Jean-Marie Baldo DJCE CES Droit Fiscal Spécialiste en droit Fiscal



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Transcription:

Jean-Marie Baldo DJCE CES Droit Fiscal Spécialiste en droit Fiscal TVA / Enregistrement : Les immeubles bâtis I. Les biens immeubles bâtis soumis aux droits d enregistrements A. Champ d application 1) Les conventions imposables Le droit de vente s'applique aux mutations à titre onéreux telles que les ventes proprement dites, adjudications, transactions, rétrocessions, annulations et résolutions amiables, soultes d'échanges, soultes de partages (autres que de successions, de communautés ou d'indivisions conjugales). Il ne s'applique pas en revanche aux déclarations de command ou d'adjudicataire, aux retraits en réméré ni aux apports en société et aux échanges. Il ne s'applique pas non plus aux annulations judiciaires (CGI art. 1961, al. 3). Les apports en société Pour les apports faits en société, on distinguera selon qu ils sont pur et simple, à titre onéreux ou mixte : Les apports purs et simple d immeubles faits à une sociétés assujettie à l impôt sur les sociétés sont en principe assujettis à un droit de 5%. Toutefois, ces apports, dès lors qu'ils sont réalisés lors de la constitution de la société, sont exonérés si l'apporteur s'engage à conserver pendant trois ans les titres remis en contrepartie de l'apport et, pour les immeubles et droits immobiliers, s il est compris dans l'apport de l'ensemble des éléments d'actif immobilisé affectés à l'exercice d'une activité professionnelle (apport d une entreprise à une société par exemple). Exonération de droits en cas d apport à une société non assujettie à l IS à l occasion de l apport. Droit de 375 ou 500 en cas d augmentation de capital selon que le capital est de plus ou moins 225.000. Les apports à titre onéreux, qui constituent en réalité une véritable vente, une taxation spécifique de 5% sera due (CGI article 683 bis). Rappelons que les apports mixtes sont la combinaison apports à titre onéreux et à titre gratuit. Les échanges 31, rue Notre Dame 30000 Nîmes Tél. : 04.66.21.37.53 / 06.88.59.47.35 Fax : 04.66.67.18.25 baldojm@yahoo.fr

Pour les apports faits en société, on distinguera selon qu ils sont pur et simple, à titre onéreux ou mixte : En cas d'échange pur et simple (sans soulte ni plus-value), il est dû un droit fixé à 5 % sur la valeur de l'un des lots (à l'exclusion de la taxe communale et du prélèvement pour frais d'assiette et de recouvrement). Les immeubles sont estimés à leur valeur vénale réelle à la date de l'échange (déclaration estimative des parties). En cas d'échange avec soulte ou plus-value, le droit de 5 % est dû sur la valeur du lot le plus faible. La soulte ou plus-value est soumise au droit départemental de vente d'immeubles (au taux correspondant à la nature de l'immeuble dont la valeur est la plus élevée), ainsi qu'à la taxe additionnelle communale, au prélèvement de 2,50 % pour frais d'assiette et de recouvrement et à la taxe additionnelle au profit de l'etat. Attentions : régimes particuliers pour les immeubles ruraux et les remembrements urbains. 2) Les biens imposables Sont imposables les mutations à titre onéreux ayant pour objet des immeubles tels qu'ils sont définis par le Code civil. Sont ainsi visés les immeubles par nature (terrains, constructions...), par destination (matériel affecté à l'exploitation d'un fonds agricole ou industriel...), par l'objet auquel ils s'appliquent (usufruit d'immeubles, droit d'usage ou d'habitation, hypothèques...) ou encore par détermination de la loi (cas de certaines indemnités attachées à des immeubles). Le droit de vente d'immeubles est également susceptible de s'appliquer aux cessions de titres de sociétés immobilières dotées de la transparence fiscale (sociétés immobilières d attribution). Les actes portant mutation simultanée de meubles et d'immeubles donnent ouverture au droit de vente d'immeubles sur la totalité du prix à moins qu'il ne soit stipulé un prix particulier pour les objets mobiliers et qu'ils ne soient désignés et estimés article par article dans le contrat. Seules les ventes d'immeubles situés en France sont en principe imposables. Les ventes d'immeubles situés à l'étranger constatées par un acte passé en France sont soumises à un droit unique de 5 % lorsque l'acte est assujetti à la formalité en raison de sa forme (acte notarié essentiellement) (CGI art. 714). Ce droit n'est dû que sous réserve de l'application des conventions internationales C. Régime 1) Fait générateur Pour que le droit de vente d'immeubles soit exigible, il faut que la convention soit parfaite et produise des effets certains et actuels. Ainsi, en cas de vente sous condition suspensive (condition qui affecte l'existence même du contrat), la convention est enregistrée au droit fixe des actes innomés, le droit proportionnel de vente d'immeubles ne devenant exigible que lors de la réalisation de la condition. A l'inverse, en cas de vente sous condition résolutoire (condition qui ne s'oppose pas au transfert de la propriété), le droit de vente d'immeubles est immédiatement exigible. En cas de réalisation de la condition, le contrat de vente est anéanti, mais, sauf en cas de résolution légale ou fondée sur un cas de force majeure, l'impôt ne peut pas être restitué (CGI art. 1961, al. 1). 2

Les droits de vente acquittés initialement ne sont restituables que si l'annulation de la vente a été prononcée par une décision judiciaire passée en force de chose jugée (CGI art. 1961, al. 2). Les annulations amiables ne peuvent donner lieu à restitution des droits acquittés initialement. les promesses unilatérales de vente ne donnent ouverture lors de leur enregistrement qu'au droit fixe des actes innomés (125 ). Tontine En cas d'acquisition en commun d'un bien quelconque, les parties peuvent stipuler qu'au décès de chacune d'entre elles sa part reviendra aux survivants de sorte que le dernier survivant sera réputé propriétaire de la totalité du bien (clause dite d'accroissement, de condition de survie ou de tontine). Ce transfert de propriété est soumis aux droits de succession selon le régime de droit commun, c'est-àdire d'après le lien existant entre le défunt et le ou les bénéficiaires de l'accroissement, et sur la valeur de la part transmise à chacun d'eux. Une exception à ce régime d'imposition est prévue en faveur des immeubles affectés à l'habitation principale commune à deux acquéreurs, lorsque ces immeubles ont une valeur inférieure à 76 000 au moment du premier décès. Dans cette situation, la part transmise au survivant est passible des seuls droits de vente d'immeubles Théorie des mutations conditionnelles pour les sociétés non passibles de l IS Selon la théorie de la «mutation conditionnelle des apports» le droit de mutation non perçu lors de cet apport devient rétroactivement exigible si les biens en cause sont attribués, lors du partage de la société, à un associé autre que l'apporteur. Au contraire, aucun droit n'est perçu si les biens sont attribués à l'apporteur, puisque celui-ci est réputé n'avoir jamais cessé d'en être propriétaire. En définitive, les droits exigibles lors du partage d'une société non passible de l'impôt sur les sociétés doivent être réglés comme suit : Partage des acquêts sociaux Il est soumis au droit de 1,10 % sur l'actif net partagé. En cas de soulte, les droits de mutation sont exigibles dans la limite de cette soulte. Partage de corps certains ayant fait l'objet d'un apport pur et simple Il faut faire la distinction suivante : o Si les biens sont attribués à l'apporteur (ou à ses héritiers ou donataires), cette attribution ne donne ouverture ni au droit de mutation ni même au droit de partage. Cependant, s'il s'agit d'immeubles ou droits immobiliers, la taxe de publicité foncière de 0,60 % (plus 0,1 % et prélèvement de 2,50 % sur le montant de la TPF) est due lors de la publication de l'acte à la conservation des hypothèques. o Si les biens sont attribués à un associé autre que l'apporteur, le droit de vente correspondant à la nature des biens en cause est exigible sur la valeur des biens à la date du partage et selon le tarif en vigueur à cette date. 2) Base Le droit de vente d'immeubles est liquidé sur le prix exprimé en y ajoutant toutes les charges en capital ainsi que toutes les indemnités stipulées au profit du cédant à quelque titre et pour quelque cause que ce soit. L'administration peut toutefois substituer au prix exprimé la valeur vénale de l'immeuble si elle est supérieure. 3

Le prix est généralement constitué par une somme d'argent. Il peut également consister en biens de toute nature : dans ce cas, l'impôt est liquidé sur la valeur de ces biens. 3) Taux Le taux de droit commun applicable aux ventes d'immeubles est fixé à 5,09 % (droit départemental de 3,60 % auquel s'ajoutent la taxe communale de 1,20 %, le prélèvement de 2,50 % pour frais d'assiette et de recouvrement calculé sur le montant du droit départemental et la taxe de 0,2 % au profit de l'etat). Ce taux s'applique sans condition particulière à toutes les ventes d'immeubles (ventes d'immeubles d'habitation, ventes d'immeubles professionnels, ventes de terrains...) ne relevant pas de la TVA ou d'un régime plus favorable. Le taux du droit départemental peut être modifié tous les ans par les conseils généraux (avec effet au 1er juin) sans pouvoir être inférieur à 1 % ni supérieur à 3,60 % (CGI art. 1594 D et 1594 E). Compte tenu de la taxe communale, du prélèvement pour frais d'assiette et de la taxe de 0,2 % au profit de l'etat, le taux plafond s'élève donc à 5,09 % et le taux plancher à 2,425 %. Il existe une liste importantes de taux spéciaux et d exonérations : taux particuliers : Immeubles ruraux, opérations de rénovations urbaines, terrains classés, ventes à des organismes HLM, acquisitions dans les DOM, achats en vue de la revente par des marchands de biens (0,715% et TVA sur marge), vente d immeubles en TVA hors terrains, vente de terrains à bâtir relevant de la TVA (droit fixe), exonérations : acquisitions et cessions SAFER, acquisitions par des collectivités, expropriations pour cause d utilité publique, II. La TVA sur les immeubles bâtis L'article 257, 7 du CGI assujettit à la TVA «les opérations concourant à la production ou à la livraison d'immeubles de toute nature». Ce régime (couramment appelé «TVA immobilière») s'applique même lorsque les opérations ainsi visées revêtent un caractère civil, et quelles que soient la qualité de la personne qui les effectue et sa situation au regard des impôts directs. La TVA immobilière concerne, pour l'essentiel, quatre catégories d'opérations, à chacune desquelles nous consacrerons un commentaire particulier : - acquisition de terrains à bâtir ; - livraisons à soi-même de certains immeubles lors de leur achèvement ; - ventes des immeubles construits ; - cessions de droits sociaux représentatifs des immeubles construits. Nous limiterons nos propos aux trois derniers points. TVA immobilière et droits d'enregistrement : Les opérations juridiques (acquisitions, ventes, apports...) passibles de la TVA immobilière entrent également, par nature, dans le champ d'application des droits d'enregistrement. Cependant, des mesures spéciales ont été prévues en vue d'éviter ou de limiter cette double taxation : Lorsqu'elles entrent dans le champ de la TVA immobilière, les ventes des immeubles construits ne sont soumises, en matière d'enregistrement, qu'à la taxe de publicité foncière, liquidée au taux réduit 4

de 0,60 % sur le prix hors taxe (CGI art. 1594 F quinquies, A). En fait, la charge est de 0,715 %, avec le prélèvement pour frais d'assiette et de recouvrement et la taxe additionnelle de 0,1 %. Lorsqu'elles sont soumises à la TVA immobilière, les cessions de droits sociaux représentatifs des immeubles construits donnent lieu à la perception d'un droit fixe de 125 (CGI art. 730). Les apports en société entrant dans le champ de la TVA immobilière sont exonérés de droits proportionnels d'enregistrement et, sauf en cas de constitution de société, assujettis à un simple droit fixe. 1) Ventes d immeubles bâtis a. Champ d application L'article 257, 7-1-b du CGI soumet explicitement à la TVA les «ventes d'immeubles». L'administration a précisé cependant (D. adm. 8 A-1131 n 82) que, par «ventes d'immeubles», il convient d'entendre toutes les mutations à titre onéreux quelle qu'en soit la forme (vente, échange, etc.) ainsi que les apports en société (purs et simples ou à titre onéreux). Ces opérations sont assujetties à la TVA immobilière lorsqu'elles portent : soit sur des immeubles (ou parties d'immeubles) vendus en état futur d'achèvement ; soit sur des immeubles (ou parties d'immeubles) vendus après achèvement, mais à la double condition (Première mutation d un immeuble neuf dans le délai de cinq ans) : o que la vente intervienne dans les cinq ans de l'achèvement ; o que la vente n'ait pas été précédée d'une autre mutation à titre onéreux postérieure à l'achèvement et consentie à une personne n'ayant pas la qualité de marchand de biens. Notion d achèvement Un immeuble ou une fraction d'immeuble est considéré comme achevé lorsque les conditions d'habitabilité sont réunies ou en cas d'occupation, même partielle, des locaux ; des dates d'achèvement distinctes peuvent être retenues pour les différentes parties d'un immeuble (ex. : appartements). Pour les locaux livrés «bruts de béton», l'achèvement coïncide avec la fin de l'intervention du constructeur et la mise à disposition de ces locaux aux propriétaires ou locataires (D. adm. 8 A-1131 n 85). Est achevé à la date de la déclaration d'achèvement un immeuble restant à aménager intérieurement, dès lors que l'ensemble des travaux incombant au constructeur, y compris le raccordement aux réseaux, est achevé (CE 2-2-1987 n 50362 : RJF 3/87 n 277). En l'absence de tout autre élément probant, un immeuble peut être réputé achevé à la date de son inscription à l'actif de l'entreprise à laquelle il est affecté (CE 30-12-2002 n 233616 : RJF 3/03 n 280). Cas d exonération Sont exonérées de la TVA les ventes consenties sous certaines conditions, soit par les collectivités locales, les sociétés d'économie mixte, les organismes d'hlm, soit par les sociétés civiles placées sous l'égide des sociétés ou organismes précités, soit par les sociétés coopératives de construction qui ont recours comme prestataires de services à un organisme d'hlm. 5

Sont également exonérées les ventes à leurs occupants, dans les conditions de la loi 84-595 du 12 juillet 1984 définissant la location-accession à la propriété immobilière des logements ayant fait l'objet d'une convention et agréés par le préfet depuis le 26-3-2004. b. Régime Redevable de la TVA La TVA est due par le vendeur (ou l'auteur de l'apport). Selon l'administration (D. adm. 8 A-151 n 3), la taxe doit être acquittée par l'acquéreur (ou la société bénéficiaire de l'apport) dans le cas exceptionnel où l'immeuble n'était pas antérieurement placé dans le champ d'application de la TVA immobilière (par exemple, construction édifiée sur un terrain reçu par succession ou acquis sous le régime des droits d'enregistrement et n'ayant pas donné lieu à une livraison à soi-même taxable). En revanche, la Cour de cassation (Cass. com. 30-3-1978 n 5265 : RJF 11/78 n 469) et le Conseil d'etat (CE 29-7-1983 n 34761 : RJF 11/83 n 1300 et CE 21-12-1983 n 37573 : RJF 2/84 n 193) considèrent que les travaux de construction font entrer le bien dans le champ d'application de la TVA et, par suite, que le redevable légal de la taxe due lors de la vente de l'immeuble bâti est en toute hypothèse le vendeur). Fait générateur La TVA est exigible à la date du fait générateur, c'est-à-dire à la date de l'acte constatant l'opération ou, à défaut d'acte, au moment du transfert de propriété. Lorsque le prix est payable en plusieurs échéances (règlement par acomptes des ventes en l'état futur d'achèvement et des ventes à terme notamment), le vendeur peut acquitter la TVA au fur et à mesure des encaissements à condition de présenter des garanties de recouvrement. Peuvent toutefois être dispensés de constituer des garanties les constructeurs professionnels qui remplissent ponctuellement leurs obligations, ou les nouveaux redevables dont la solvabilité est notoire (D. adm. 8 A-1561 n 14). En contrepartie du paiement sur les encaissements, aucun remboursement de crédit de taxe ne peut être effectué avant le dernier encaissement. Par ailleurs, l'acquéreur ne peut déduire la taxe afférente à son acquisition qu'au fur et à mesure des paiements. Le vendeur ayant opté pour le paiement sur les encaissements peut y renoncer, la renonciation étant, elle, définitive (D. adm. 8 A-1561 n 30). Assiette L'assiette de la TVA est constituée par le prix de cession hors taxe, le montant de l'indemnité ou la valeur des droits sociaux rémunérant l'apport, augmenté des charges (à l'exclusion en principe des intérêts du prix lorsque celui-ci est payable à terme). Taux Le taux applicable, en principe, aux ventes d'immeubles est le taux normal de 19,60 %. Relèvent du taux réduit de 5,50 % : - les ventes de logements sociaux neufs à usage locatif visés à l'article L 351-2, 3 et 5 du CCH agréés par le préfet et dont l'acquisition est financée au moyen d'un prêt relevant de l'article R 331-1 du CCH (prêts PLA-I, PLUS ou PLS) ; - les apports à un organisme HLM de logements sociaux à usage locatif ayant fait l'objet d'une livraison à soi-même au taux réduit ; 6

- les ventes et apports de logements destinés à être occupés par des titulaires de contrats de locationaccession faisant l'objet d'une convention et agréés par le préfet depuis le 26-3-2004 ; - les ventes et les apports de logements aux structures d'hébergement temporaire ou d'urgence bénéficiant d'une aide de l'etat et destinées aux personnes défavorisées visées à l'article 301-1, II du CCH (depuis le 17 juillet 2006 ; Loi 2006-872 du 13-7-2006 art. 73) ; - les ventes et apports de logements sociaux à usage locatif à l'association Foncière Logement lorsqu'elle a conclu avec l'etat une convention en application de l'article L 351-2, 4 du CCH (depuis le 17 juillet 2006 ; Loi 2006-872 du 13-7-2006 art. 102) ; - les ventes de droits immobiliers démembrés de logements sociaux neufs à usage locatif sous réserve que l'usufruitier bénéficie d'un prêt relevant de l'article R 331-1 du CCH (prêts PLA-I, PLUS ou PLS) ; - les ventes de logements neufs à usage de résidence principale destinés à des personnes dont les ressources n'excèdent pas de plus de 30 % le plafond d'octroi des PLS et situés dans (ou à proximité) des quartiers en rénovation urbaine (depuis le 17 juillet 2006 ; Loi 2006-872 du 13-7-2006 art. 28) ; - les apports d'immeubles sociaux neufs faits par les organismes d'hlm aux SCI d'accession progressive à la propriété instituées par la loi 2006-872 du 13 juillet 2006 (Loi 2006-872 du 13-7-2006 art. 34, II-2 ). Le taux réduit de 5,5 % s'applique, à partir du 7 mars 2007, aux ventes et apports de logements aux structures d'hébergement temporaire ou d'urgence faisant l'objet d'une convention entre le propriétaire ou le gestionnaire des locaux et le représentant de l'etat dans le département (au lieu de celles bénéficiant d'une aide de l'etat) et destinées aux personnes défavorisées visées à l'article L 301-1, II du CCH. Loi 2007-290 du 5-3-2007 art. 3 : FR 12/07 inf. 5 n 7 p. 7 Régime des déductions Lorsqu'il s'agit d'immeubles construits en vue de la vente (et constituant donc un «stock immobilier»), le promoteur-constructeur peut déduire de la TVA due sur la vente (ou sur l'apport) la taxe qui a grevé la construction de l'immeuble (acquisition de terrain, travaux immobiliers, services...), dans la mesure où cette taxe n'a pas déjà été déduite. Cas des immeubles qui n'ont pas été construits ou achetés en vue de la vente, mais qui sont néanmoins revendus sous le régime de la TVA immobilière (c'est-à-dire en général dans les cinq ans de leur achèvement). Compte tenu des dispositions de l'article 211 de l'annexe II au CGI, les conditions de déduction de la TVA ayant grevé la construction ou l'acquisition de l'immeuble sont différentes suivant que ce dernier est affecté ou non à l'habitation. Immeubles d'habitation : le montant de la TVA ayant grevé la construction ou l'acquisition de l'immeuble est entièrement déductible de celle due sur la vente. Il en est ainsi que le cédant soit un particulier ou une entreprise. Immeuble à usage professionnel, commercial ou industriel : si la TVA immobilière supportée en amont a déjà été totalement déduite par le cédant dans le cadre de son activité professionnelle, aucune nouvelle déduction n'est évidemment possible. Mais il en va autrement lorsque la taxe d'amont a été entièrement exclue de la déduction ou n'a donné lieu qu'à une déduction partielle. Dans ces deux hypothèses, une déduction complémentaire est possible lors de la vente (ou de l'apport) de l'immeuble, dès lors que la TVA est perçue sur le prix total de cette opération. Cette déduction complémentaire est calculée selon «la règle des 20 e». Rappelons brièvement : on part du montant de la taxe d'amont ou de la différence entre cette taxe et la déduction 7

initiale. Ce montant fait l'objet d'un abattement d'un vingtième par année ou fraction d'année écoulée depuis l'acquisition ou la livraison. Exemple : En N +3 un médecin vend un local professionnel qu il a construit en N. à la revente, il pourra déduire 16/20 e de la TVA initialement déduite. 2) Livraisons à soi même d immeubles En principe, l'achèvement de l'immeuble ne constitue pas un chef d'imposition à la TVA, sauf dans certains cas où le constructeur est obligé de se livrer à lui-même l'immeuble construit. Il s'agit ici de l'application à la TVA immobilière de la pratique de la livraison à soi-même qui, dans certaines situations relevant de la TVA ordinaire, consiste à considérer, en l'absence de toute cession ou opération équivalente, que le redevable est néanmoins censé, par une sorte de fiction purement fiscale, «se livrer à lui-même» certains biens ou services. Cas de taxation 1. La taxation de la livraison à soi-même est exigée, en matière de TVA immobilière, lorsqu'il s'agit d'immeubles construits par les sociétés dont les parts ou actions assurent en droit ou en fait l'attribution privative en propriété ou en jouissance d'un immeuble ou d'une fraction d'immeuble, même si elles ne remplissent pas les conditions nécessaires pour être dotées de la transparence fiscale, cette notion n'étant pas applicable en matière de TVA (il en est ainsi quelle que soit l'affectation des immeubles). 2. Doivent donner lieu à taxation de la livraison à soi-même les immeubles non affectés à l'habitation pour les trois quarts au moins de leur superficie et destinés à être utilisés pour la réalisation d'opérations soumises à la TVA. a. Entrent dans ce deuxième cas d'imposition les immeubles destinés à la location, dès lors que celleci doit être soumise à la TVA soit de plein droit, soit sur option du propriétaire. Dans ce cas, la livraison à soi-même porte sur l'ensemble des locaux loués, y compris ceux dont la location n'est pas soumise à la TVA (D. adm. 8 A-1132 n 15). b. Pour déterminer si un immeuble est, ou non, affecté à l'habitation pour les trois quarts au moins de sa superficie totale, il faut prendre en considération le rapport existant entre, d'une part, la superficie développée des locaux destinés à l'habitation ou à un usage mixte d'habitation et professionnel et de leurs dépendances, et, d'autre part, la superficie développée de l'ensemble des locaux composant l'immeuble. La superficie des parties communes doit être ventilée proportionnellement à la surface des locaux d'habitation et à celle des autres locaux, sauf rattachement à la catégorie de locaux qu'elles desservent exclusivement (D. adm. 8 A-1132 n 33). 3. Donnent enfin lieu à livraison à soi-même certains logements sociaux bénéficiant du taux réduit de TVA. (Il s'agit sous conditions des logements sociaux à usage locatif visés à l'article L 351-2, 3 et 5 du CCH agréés par le préfet ; des logements sociaux à usage locatif construits par l'association Foncière Logement ; des logements destinés à être occupés par les titulaires de contrats de locationaccession à la propriété immobilière ; des structures d'hébergement temporaire ou d'urgence ). Donnent par ailleurs lieu à livraison à soi-même, lorsque le prestataire n'a pas facturé la TVA au taux réduit, les travaux de réhabilitation (amélioration, transformation ou aménagement) ou d'entretien (autres que des espaces verts et de nettoyage) réalisés dans les logements sociaux à usage locatif ou dans les structures d'hébergement temporaire ou d'urgence visés ci-dessus (CGI art. 257, 7 bis et CGI art. 257, 7 quater issu de la loi 2006-872 du 13-7-2006 art. 73). Il en va de même des travaux de démolition partielle des logements sociaux à usage locatif visés à l'article L 351-2, 3 et 5 du CCH réalisés en vue de leur réhabilitation (Inst. 8 A-2-01). Il existe des cas d exonération pour les organismes HLM. 8

Fait générateur et exigibilité La taxe est exigible à la date de réalisation du fait générateur. Or, le fait générateur de la TVA se produit à la date de livraison des immeubles, qui doit intervenir lors de leur achèvement et, au plus tard, lors de la délivrance par le directeur départemental de l'équipement du récépissé de la déclaration attestant l'achèvement des travaux. Assiette et droit à déduction Elle est constituée par le prix de revient total des immeubles déterminé hors taxe, y compris le coût des terrains ou leur valeur d'apport (ou le prix de revient total des travaux dans les logements locatifs sociaux ou dans les structures d'hébergement temporaire ou d'urgence). Le prix de revient comprend notamment les frais financiers exposés pour la construction. Il comprend également : les frais administratifs supportés par les sociétés de construction, ainsi que les taxes et redevances dues par les constructeurs. Le prix de revient doit être déterminé «hors TVA». Du montant de la taxe afférente à la livraison à soi-même le redevable peut déduire la TVA ayant grevé la construction de l'immeuble (acquisition et aménagement du terrain, travaux de construction, services utilisés pour la construction). Il en est de même pour la taxe ayant grevé les travaux dans des immeubles locatifs sociaux ou dans des structures d'hébergement temporaire ou d'urgence. Taux Le taux est en principe de 19,60% (taux réduit pour les logements sociaux de 5,5% et taux particulier pour la Corse et les DOM). 3) Cessions de droits sociaux représentatifs d immeubles construits Sont soumises, en principe, à la TVA immobilière, «les cessions, sous forme de vente ou d'apport en société, de parts d'intérêt ou d'actions dont la possession assure en droit ou en fait l'attribution en propriété ou en jouissance d'un immeuble ou d'une fraction d'immeuble» (CGI, article 257 7 e 1b et 2). En pratique, la TVA immobilière ne sera exigible que lorsque les droits sociaux cédés seront afférents : - soit à un immeuble (ou fraction d'immeuble) non encore achevé ; - soit à un immeuble (ou fraction d'immeuble) achevé, à la double condition que la cession intervienne dans les cinq ans de l'achèvement de l'immeuble et n'ait pas été précédée, depuis cet achèvement, d'une autre cession à titre onéreux faite à une personne n'ayant pas la qualité de marchand de biens. 9