Relations Hôte-Micro-organismes et Virulence Pr. B. Jaulhac Laboratoire de Bactériologie Faculté de Médecine GENERALITES L'Homme vit dans un environnement peuplé de très nombreux micro-organismes : bactéries, virus, champignons L'Homme (= 10 13 cellules) héberge : 10 14 bactéries (surtout dans le tube digestif) 1
RELATIONS FONCTIONNELLES BACTERIES - HOMME 1. Absence de croissance 2. Commensalité ou saprophytisme : -> pas d'effet bénéfique ou nocif pour l'hôte 3. Symbiose : -> effet bénéfique pour les deux parties 4. Parasitisme : -> préjudice pour l'hôte pathogénicité POURQUOI UNE BACTERIE EST-ELLE PATHOGENE? Facteurs propres à la bactérie Facteurs de virulence Facteurs propres à l hôte Moyens de défense de l hôte Des bactéries habituellement saprophytes peuvent devenir pathogènes chez des sujets immunodéprimés = Exemple Staph à coag neg Des bactéries considérées comme habituellement "pathogènes" peuvent exister chez des sujets sains = porteurs sains exemple : N. meningitidis 2
Relations entre bactéries et cellules : Bactéries «parasites» extra-cellulaires EXEMPLES Staphylococcus Streptococcus Vibrio cholerae Bordetella pertussis Bactéries «parasites» intra-cellulaires facultatifs EXEMPLES Mycobacterium tuberculosis Legionella pneumophila Listeria monocytogenes Brucella melitensis 3
Bactéries «parasites» intra-cellulaires obligatoires EXEMPLES Chlamydia trachomatis Rickettsia conorii Anaplasma phagocytophilum Coxiella burnetii Facteurs d adhésion PROTEINES DE SURFACE : Portées par des pili Exemple : pili des E. coli uropathogènes Non portées par des pili Exemples : protéines «d opacité» de N. gonorrhoeae, Osp de Borrelia 4
Facteurs d adhésion ROLES DES PROTEINES DE SURFACE : Maintien et multiplication bactérienne à la surface des cellules d un organe-cible Résister au balayage des muqueuses par les sécrétions Etape préalable à une éventuelle pénétration intracellulaire Substances agressives TOXINES : -> Protéiques (ou exotoxines) -> Lipopolysaccharidiques (LPS ou endotoxine) ENZYMES : PRODUITS DU METABOLISME BACTERIEN : ->amines, du ph, etc. 5
Actions des toxines Soit directe = agressive -> par destruction cellulaire Soit indirecte -> en stimulant de façon inadéquate le système immunitaire ou d autres cellules de l hôte (manipulation du fonctionnement cellulaire) Soit directe et indirecte 1. Toxines protéiques (exotoxines) Protéines à activité biologique délétère pour l organisme ou les cellules Sécrétion active vers l extérieur des bactéries (= exotoxines) Parfois externalisation seulement à l occasion de la lyse bactérienne (toxines de Clostridium) Modes d action très divers 6
1 er Mode d action : Destruction membranaire Effet : destruction de la membrane cellulaire et/ou (faible dose) stimulation inadéquate des cellules Exemples : leucocidine de Staphylococcus aureus, cytolysines de Clostridium spp. 2 e M.A. : ADP-ribosylation de molécules de la machinerie cellulaire NAD + -> acide nicotinique + ADP-ribose et L ADP-ribose est transféré sur une molécule-cible dépendant de la toxine impliquée Effet : inactivation ou activation permanente de la molécule-cible, i.e. de molécules de la machinerie cellulaire : protéines Ras, Rab impliquées dans le trafficking cellulaire ou de facteurs d élongation de la synthèse protéique Exemple : toxines cholérique, diphtérique, pertussique, toxines C2 et C3 de C. botulinum 7
Toxine ADP-ribosylante Cible Effet - Toxine diphtérique - Exotoxine A de P. aeruginosa - Toxine cholérique - Toxine LT (E. coli) - Toxine pertussique EF-2 Protéines G Inhibition de la synthèse protéique Découplage entre G-protéines et récepteurs membranaires associés - Toxine C2 de C. botulinum Actine Inhibition de polymérisation de l actine 3 e M.A. : Enzymes protéolytiques spécifiques de cible Effet : destruction sélective de certaines molécules Exemple : toxines tétanique, botulinique, exfoliatine de Staph aureus, métalloprotéases de Vibrio cholerae ou de Bacteroides fragilis 8
4 e M.A. : Superantigènes Effet : stimulation polyclonale simultanée d un pourcentage important de lymphocytes T avec libération exagérée de cytokines -> choc toxique : ->Toxine du syndrome de choc toxique de Staphylococcus aureus, -> entérotoxines des Staphylococcus aureus -> exotoxines pyrogènes de Streptococcus pyogenes 9
2. Endotoxine bactérienne Endotoxines : activité biologique liée structuralement à la membrane externe des bactéries à Gram négatif. L activité biologique est associée au lipopolysaccharide constitutif de cette membrane externe : toxicité due au composé lipidique (lipide A) immunogénicité (antigène O) est associée au composé polysaccharidique. -> Responsable d activité inflammatoire : active le complément par la voie alterne. -> Participe ainsi à la pathogénicité des infections à bactéries à Gram négatif. 10
Fonction de la membrane externe des bactéries à Gram négatif Barrière de perméabilité aux grosses molécules (> 700 Da) (exemple : les sels biliaires) et aux composés hydrophobes de l environnement Empêche la destruction des bactéries par des composés sériques du complément et par les cellules phagocytaires Rôle dans l adhérence aux cellules épithéliales, dans la résistance à la phagocytose (colonies smooth/rough) et dans les variations antigéniques 11
La majeure partie de l endotoxine reste associée à la paroi bactérienne jusqu à la destruction de la bactérie (autolyse, ou lyse externe due au complément, au lysozyme ou à la phagocytose) Activité biologique moins spécifique et souvent moins puissante que celle des exotoxines protéiques Virulence associée au Lipide A Lors d une infection, le LPS libéré par les bactéries à Gram négatif se lie d abord à des protéines plasmatiques : -> les «LPS-binding proteins» Ce complexe interagit avec le récepteur CD14 des monocytes et macrophages et d autres récepteurs des cellules endothéliales 12
Virulence clinique associée au lipide A In vivo, l injection d endotoxine ou de lipide A se traduit par : fièvre leucopénie coagulation intravasculaire disséminée (CIVD) hypotension, choc, voire décès La rapidité du décès du sujet infecté dépend : de la dose d endotoxine injectée de la voie d administration de l espèce animale Virulence moléculaire associée au Lipide A L interaction avec les monocytes et macrophages est responsable de : production de cytokines (IL-1, IL-6, IL-8 TNF, PAF), d où production de prostaglandines et de leucotriènes activation des macrophages avec accroissement de la phagocytose et de la cytotoxicité, libération d enzymes lysosomiales, d IL-1 (fièvre), de TNF alpha, d autres cytokines activation du complément (C3a, C5a) activation de la coagulation (facteur XII) activation de la fibrinolyse et des kinines le LPS est aussi un mitogène des lymphocytes B : -> différenciation polyclonale 13
Résumé sur l endotoxine Activité biologique portée par le LPS Constituant de la membrane externe des bactéries à Gram négatif exclusivement Rôle biologique essentiellement dû au lipide A (= partie lipidique du LPS) Leucopéniant Pyrogène Toxique (choc, diarrhée, hémorragie intestinale) Détection par gélification d un lysat d amoebocytes Rôle antigénique de la partie polysaccharidique de la molécule (antigène somatique ou antigène O) Activité très renforcée par les superantigènes 14
APTITUDE A SURVIVRE CHEZ L HÔTE Résistance aux moyens de défense de l hôte : Adhésion Action sur les phagocytes professionnels modification de : nombre (destruction) chimiotactisme (capsule, streptolysine O) de la fonction des macrophages ou granulocytes (rupture des phagosomes, blocage de la fusion phagolysosomiale, évitement des mécanismes tueurs O 2 -dépendants) Action sur les défenses humorales : destruction ou stratégies d échappement (destruction de C5a ou d IgA1, mimétisme moléculaire, variations antigéniques) Capacité à se multiplier chez l hôte : Par exemple en captant les ressources en fer de l hôte Grands types d infections Prédominance de l aspect invasif : Streptococcus pneumoniae Prédominance de l aspect agressif : Clostridium tetani Corynebacterium diphtheriae Mixité des deux aspects : Staphylococcus aureus Bacilles à Gram négatif (Entérobactéries) 15
Objectifs Virulence = adhésion + subst agress + résist moyens défense Adhésion à cellules-cibles : pour multiplication ou prélude à pénétration Substances agressives : Toxines protéiques à action directe et/ou indirecte (destr mb, ADPribosylation, protéolyse spécif, superag, autres) Endotoxine portée par LPS des BGN (lipide A). Stimule monocytes, Mφ, d où fièvre, leucopénie, CIVD, hta, choc. Potentialisé par supag Enzymes, produits de dégradation cellulaire et métab bactérien Aptitude à survivre chez l Hôte : Résistance aux moyens de défense Capacité à se multiplier chez l hôte (ex : captation du fer) Parasitisme extra cellulaire ou intracellulaire facultatif ou obligatoire : Selon les agents infectieux, prédominance d un mécanisme 16