Cahier de doléances des doctorants et des étudiants du MALD Participants : Léa Berger, Jean-Yves Coutat, Florence Duchamps, Stéphanie Dujardin, Camille Lefebvre, Clotaire Messi Me Nang, Mahmed Oualdi, Léon Saur, Estelle Sohier, Dimitri Toubkis, Thomas Vernet Les sciences humaines ne doivent pas être négligées dans le débat des Etats Généraux de la recherche. Plus globalement, au sein de la recherche française, les sciences humaines doivent tenir une place fondamentale, car elles sont indispensables à la compréhension du monde actuel. Relation directeurs de recherche/étudiants Nécessité de réglementer la relation entre le directeur de recherche et son étudiant, qu il soit en maîtrise, en DEA ou en doctorat. Plusieurs niveaux de problèmes ont été évoqués : Certains directeurs de recherche ont trop d étudiants sous leur responsabilité, ce qui les empêche d assurer correctement le suivi de leurs élèves. Nous proposons une limitation du nombre d étudiants par directeur de recherche. Les étudiants déplorent aussi souvent le manque de disponibilité de leur directeur de recherche. Pour remédier à cela il serait souhaitable que des permanences soient obligatoirement assurées et respectées par les directeurs, en fonction du nombre de leurs élèves. Ces permanences ne devraient être consacrées qu à la rencontre des étudiants et des doctorants. De manière plus générale, accepter de diriger un mémoire ou une thèse devrait représenter, pour le professeur comme pour l étudiant, un engagement qui pourrait prendre la forme d un contrat. En cas d abus, l étudiant devrait pouvoir disposer d un recours auprès d une autorité indépendante chargée de veiller à différents types de problèmes existants à 1
l université : Suivi insuffisant des étudiants mais aussi discriminations féminine et raciale, harcèlement sexuel, népotisme et abus de pouvoir (détournement des travaux des étudiants, travaux non rémunérés au profit de membres de l institution, etc.). Statut des doctorants Les doctorants sont sous le régime étudiant alors qu ils ne connaissent plus les mêmes difficultés que leurs cadets. Nous souhaitons la constitution d un statut spécifique lié aux situations particulières que connaissent les doctorants. Ce statut organiserait les droits et les devoirs de l étudiant en thèse : La réalisation d une thèse de doctorat représente une somme de travail incompatible avec une vie professionnelle, pourtant la grande majorité des doctorants est obligée d assurer un emploi à plein temps pour vivre, ce qui nuit à leur capacité de travail. Beaucoup d étudiants sont d ailleurs dans une grande détresse financière. L Etat devrait financer bien plus d allocations de recherche, en particulier en sciences humaines, et rendre ce système plus souple (possibilité d accroissement de la durée de l allocation dans la mesure où il est impossible de conclure une thèse en 3 ans dans certaines disciplines comme l histoire). Pour améliorer la situation des doctorants et la qualité des travaux produits, nous suggérons l élévation du niveau d exigence pour l entrée en thèse ainsi que la limitation du nombre de places en doctorat dans les universités. La thèse devrait être une véritable filière professionnalisante. En contrepartie, cette sélection permettrait de valoriser ce diplôme et d augmenter la proportion d étudiants subventionnés par l Etat. L université devrait s engager vis-à-vis de toute personne acceptée en thèse et lui fournir un statut, un meilleur encadrement, et des débouchés professionnels. Une meilleure adéquation entre le nombre de postes disponibles à l université et dans les instituts de recherche, et le nombre de doctorants clarifierait les perspectives d avenir des étudiants, actuellement dramatiques. Le statut de doctorants donnerait droit à un certain nombre d avantages : possibilité d accès à des facilités pratiques dans le cadre du doctorat : bureau (au moins un grand bureau pour les doctorants par laboratoire, avec matériel informatique), photocopies, fax, téléphone, accès à des réductions en librairie ou à des commandes de livres par l intermédiaire du laboratoire, carte de visite professionnelle, adresse internet. Nous souhaiterions également une réduction du prix de l inscription à l université et à la sécurité sociale étudiante pour les doctorants, et la création de crèches universitaires ou l accès prioritaire à des crèches 2
municipales pour les étudiants chargés de famille. Le parc de logements universitaires devrait être élargi, notamment en région parisienne, et les logements existants réhabilités. L accueil des étudiants étrangers venant effectuer un troisième cycle en France devrait être facilité. Les doctorants étrangers devraient jouir des mêmes droits que les étudiants français (accès à des facilités pratiques et aux bourses et allocations). L acceptation de l inscription en doctorat devrait donner droit à une carte de séjour valable pour la durée du doctorat. La façon dont les étudiants étrangers sont actuellement accueillis en France n est pas digne d un pays qui prétend à un rayonnement scientifique international. En contrepartie, les doctorants auraient aussi un certain nombre de devoirs. Les allocataires de recherches devraient être obligés de rendre leurs thèses, sous peine de sanction (remboursement ou pénalité financière). Au cours du doctorat, plusieurs étapes devraient être déterminées, au cours desquelles l étudiant serait tenu de produire un compte-rendu annuel de l état d avancement de ses travaux, qui serait évalué par une commission scientifique. Situation des post-doctorants Le statut de docteur en sciences humaines devrait être reconnu socialement, juridiquement et professionnellement. Actuellement beaucoup de jeunes docteurs se retrouvent dans une situation extrêmement critique : ils n ont plus de carte d étudiant, plus de statut social, plus d accès à l assurance maladie, pas de travail, pas de droit au chômage, et plus d accès aux bibliothèques universitaires, et cela après au minimum huit ans d études. Nous demandons une systématisation des postes d ATER et de post-doctorat pour l année suivant l acquisition du diplôme. Enfin l obtention d une thèse de doctorat devrait être reconnue par le monde du travail, et le savoir-faire des docteurs en sciences humaines considéré comme une expérience professionnelle. Les débouchés professionnels des doctorants devraient être élargis, en accord avec les besoins de la société. Il est nécessaire d augmenter significativement le nombre de postes au CNRS ( CR2 et CR1) et à l université, d autant plus que les cours et les TD sont souvent surchargés. La filière de recrutement à l issu du doctorat devrait être clarifiée et l hypocrisie existant autour des recrutements cesser. Le recrutement à l université devrait être moins sujet au népotisme et reposer d avantage sur le mérite, notamment les capacités pédagogiques du candidat. L agrégation ne devrait plus représenter un critère officieux. On demande aux candidats à la fois d avoir obtenu l agrégation, d avoir soutenu une thèse rapidement, d avoir publié, d avoir assuré des cours et animé des séminaires, et tout cela en quelques années. De 3
plus, il est difficile après l obtention de l agrégation de rédiger une thèse puisqu il faut enseigner et qu il n est pas toujours facile d obtenir des disponibilités. A l inverse un docteur non-agrégé, devrait être considéré comme suffisamment formé pour enseigner à l université, d autant plus qu il est difficile de passer l agrégation après la thèse (il devrait exister des financements spécifiques, du type bourse pour les docteurs souhaitant passer l agrégation, ou des possibilités de passer le concours interne). On pourrait envisager un examen à caractère pédagogique lors du recrutement des maîtres de conférence. Le recrutement devrait aussi être plus ouvert, il devrait exister des passerelles entre les laboratoires à un niveau national mais aussi à l échelle européenne. Enfin il devrait exister des aides financières à l issu du doctorat. Les différentes candidatures coûtent cher et les jeunes chercheurs n ont alors souvent plus de revenu. Le statut de doctorant et de docteur devrait donner accès au service de reproduction de l université dans le cadre de la fin de leurs études, afin de reproduire les volumes de thèses et les publications demandées pour les dossiers de candidatures. Nous demandons la suppression du système des vacations à l université, qui précarise la vie des jeunes chercheurs dans des situations souvent contraire à la législation du travail. Les vacataires de l université ne disposent bien souvent même pas de contrat de travail au moment où ils effectuent leurs cours, et sont payés plusieurs mois après la fin de leurs vacations. Ce mauvais traitement, illégal et irrespectueux à l égard du travail des jeunes chercheurs, doit être dénoncé. Ce système devrait être systématiquement remplacé par des CDD en bonne et due forme avec contrat, donnant accès aux droits des salariés : sécurité sociale, cotisation chômage, etc. Il faut lutter contre la précarisation du travail dans le monde universitaire et contre la très faible reconnaissance des travaux des doctorants et des post-doctorants, alors même que ceux-ci produisent énormément sur le plan scientifique et contribuent au progrès de la recherche. Revendications diverses Nous souhaitons aussi l accélération des remboursements des frais de mission (pour lesquels il faut actuellement attendre jusqu à une année!) et la possibilité de demander des financements à l avance, beaucoup d étudiants n ayant pas les moyens d avancer la somme. Il est scandaleux que les accords de l université et du CNRS avec certaines agences de voyage fassent payer les déplacements jusqu à dix fois leurs prix. 4
Il serait nécessaire de créer un fichier central des maîtrises et des DEA comme il existe aujourd hui pour les thèses, qui serait accessible sur internet. L inscription y serait obligatoire ou systématique à l issu de la soutenance. Il serait précisé la mention obtenue et si le candidat a poursuivi en DEA ou en thèse. Cette mesure permettrait de faire connaître ces travaux et d éviter que soient soutenus deux travaux portant sur le même sujet. Conscients que la situation de la recherche est préoccupante non seulement en France, mais plus généralement dans la plupart des Etats membres de l Union Européenne et que c est bel et bien au niveau de celle-ci que se trouvent les réponses nécessaires à des questions parfois apparemment nationales, les doctorants du MALD expriment le souhait que les promoteurs du mouvement «Sauvons la recherche» s attachent - d ores et déjà dans le cadre des états généraux de la recherche à nouer et à structurer des contacts réguliers avec leurs collègues des autres Etats membres de l UE. Nous pourrions ainsi examiner ensemble les possibilités de formuler un cahier commun de revendications à défendre et à promouvoir auprès des instances de l UE (commission, conseil européen, conseil des ministres et parlement), comme au sein de chaque Etat. 5