Introduction. Reconnaissance récente du rôle des hautes terres. comme contribution à l équilibre écologique général



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Transcription:

Colloque International : L eau en montagne «Gestion intégrée des hauts bassins versants» Megève 5-6 septembre 2002 ----------------------------- Aspect sociologique des comportements humains en montagne ------------------------ Jean Bonnal, Chargé du développement rural Service des Institutions rurales et de la participation, FAO, Rome. Résumé : Cette présentation a pour objectif de montrer en quoi la prise en compte des approches favorisant le rôle des facteurs humains dans l analyse des situations des zones de montagnes et dans la recherche des solutions aux problèmes rencontrés, est important. En passant en revue l'histoire récente des interventions en milieu rural, qui sont progressivement passées d'une forme descendante à des tentatives d'implication plus grandes des populations, elle indique comment une approche globale des problèmes vécus par les ruraux permet de mieux répondre à leurs besoins mais aussi comment une approche participative va permettre de les associer au diagnostic, à la recherche et la mise en oeuvre de solutions adaptées et durables. Cette dynamique est souvent difficile à mettre en oeuvre chez les intervenants comme auprès des populations mais des efforts sont possibles pour donner plus d emphase à ces approches et conduire une décentralisation de l'appui au développement afin de répondre aux demandes locales tout en diversifiant les solutions envisageables. Introduction 1. Les zones de montagne apparaissent souvent comme des forteresses et des refuges en dehors des grands courants qui s épanouissent dans les espaces ouverts des plaines et des mers. Pourtant ces régions sont à la source d importants faits culturels, économiques et sociaux qui ont marqués l ensemble des civilisations et sont en fait plus intégrées qu on ne le pense, dans les dynamiques globales, naturelles ou artificiellement crées par l homme ( 1 ). Cette reconnaissance de la place et du rôle déterminants des hautes terres est malheureusement récente, malgré l importance que revêtent les zones montagneuses pour leurs populations propres, mais aussi comme source d'énergie et de services aux habitants des basses terres et comme contribution à un équilibre écologique général de plus en plus précaire. Dans un récent rapport, l Université des Nations Unies (UNU) souligne que divers écosystèmes de montagne sont en bon état, mais que beaucoup d'autres eux sont menacés par Reconnaissance récente du rôle des hautes terres comme contribution à l équilibre écologique général comme source d énergie pour les basses terres comme source de vie pour les populations montagnardes 2 1 «D'où que nous venions, et quelles que soient les dimensions des collines ou des montagnes dans notre pays natal, nous sommes tous des gens de la montagne. Nous dépendons tous des montagnes, nous sommes tous reliés aux montagnes et en subissons tous l'influence, comme nous ne l'avons probablement jamais imaginé.» Jacques Diouf, Directeur Général de la FAO, Discours de lancement de l Année Internationale de la montagne, New York 11 décembre 2001 1

toute une série de causes naturelles ou dues à l'homme. Le changement climatique, la pollution, les activités minières, l'agriculture et le tourisme ébranlent sérieusement les environnements de montagne, d'où une dégradation diffuse et un risque accru de calamités comme les inondations, les glissements de terrain, les avalanches et la famine. Les montagnes nous procurent l'eau douce, renferment une biodiversité égale, voire supérieure, à celle de toute autre zone, et abritent au moins un dixième de la population de la planète. Chaque jour, une personne sur deux étanche sa soif avec l eau venant des montagnes. Un milliard de Chinois, d Indiens et de Bangladais, quelque 250 millions d Africains, et la population entière de l État de Californie comptent parmi les trois milliards d êtres humains qui dépendent de l écoulement continu d eau douce de la montagne. Pourtant l avenir de cette ressource vitale n a jamais été aussi incertain et les enjeux, conflits et guerres qui se déroulent autour de l eau et la montagne sont malheureusement là pour le prouver. La déforestation des terres boisées des montagnes, l exploitation minière, l agriculture, l urbanisation incontrôlée et le réchauffement de la planète ébranlent sérieusement les bassins versants des montagnes. Par ailleurs, la demande mondiale d eau douce continue de croître de manière démesurée et déjà, 2,3 milliards d êtres humains souffrent de pénuries chroniques d eau ( 2 ). Un nombre important vit dans les pays en développement où les pénuries d eau sont si graves que la capacité de cultiver de la nourriture et de construire une économie stable a été gravement entravée ( 3 ). Les perceptions tendent donc à changer par le biais des analyses environnementales, écologiques et l exemple certainement le plus concret de cette meilleure intégration des montagnes dans les problématiques plus larges est celui du cycle de l eau qui rassemble les participants de ce Colloque. 2. Face à tous ces problèmes, les institutions publiques sont intervenues et des initiatives privées ont été prises. L observation de ces différentes interventions en milieu rural permet d apprécier quelles ont été les réponses apportées et d en tirer les enseignements pour nos actions futures. On est passé progressivement, ces 30 dernières années, d'une méthode interventionniste vers une plus grande implication des populations rurales dans leur développement. D abord productivistes et technicistes, basés sur la transmission de message, les programmes et projets de développement ont progressivement évolué vers des formes intégrant des dimensions multiples des problèmes à traiter. Ils ont en fait cherché à mieux prendre en compte la complexité des situations rencontrées, la multiplicité des causes de ces problèmes ainsi que la diversité des solutions envisagées. Mais le plus grand changement de ces MÉTHODE INTERVENTIONNISTE approche techniciste élaboration de directives transmission de messages octroi de subventions comportement d assistannat MÉTHODE PARTICIPATIVE dimensions multiples tous les acteurs écoute paysanne solutions adaptées responsabilisation dix dernières années, tient au fait que ces programmes et projets ont adopté des formes participatives et décentralisées de manière à être plus à l écoute des attentes des population, à mieux appréhender les problèmes vécus et à assurer une appropriation par les groupes 3 2 Si le nombre d habitants de la planète a doublé par rapport au siècle dernier, la demande d eau douce a été multipliée par six et si les tendances actuelles se confirment, d ici 2050, 4,2 milliards d êtres humains vivront dans des pays qui ne peuvent satisfaire leurs besoins minimaux journaliers de 50 litres d eau par personne, selon un rapport récent du Fonds des Nations Unies pour la population. 3 "...quand il s'agit de nous donner notre part du gâteau, on nous oublie... Notre isolement dans une région montagneuse peut être une excuse pour nous refuser le développement, mais cela ne convainc personne." Moses, enseignant, 36 ans, Kenya, exemple tiré de : http://www.mountainvoices.org/ 2

humains concernés des actions d amélioration de leur situation. On doit néanmoins noter que les actions de développement se sont en priorité portées sur les régions à fort potentiel (plaines irriguées) et que de fait, les montagnes considérées comme des zones marginalisées, souvent de départ et d exode, ont moins bénéficié d appui sauf peut-être pour être le théâtre d aménagement anti-érosifs visant la protection des barrages dont les ressources en eau sont justement destinées aux agricultures riches des plaines. L approche globale et la place de l homme 3. Un des enrichissements introduits ces dernières années est celui de l approche globale. Les diagnostics faits sur les contraintes et potentialités des zones rurales en faisant apparaître la complexité des situations, ont aussi fait ressortir la nécessité de savoir prendre en compte les dimensions multiples des problèmes à traiter. L analyse systémique met en évidence le fait que toute activité humaine peut s analyser comme le produit d un système complexe c est à dire où divers éléments sont mis en relation, sont capables d échange (de matière et d information) entre eux comme avec l extérieur, selon des mécanismes régulateurs et fournissent ainsi un résultat tout en assurant la propre reproduction du système. Dans ces dispositifs holistiques, le facteur humain joue un rôle déterminant comme acteur et pilote de ces systèmes ruraux. Si l on prend le cas des familles montagnardes, on peut noter qu elles développent des stratégies de survie à partir des facteurs de production (terre, eau, intrants travail et savoir faire) à leur disposition et sont capables d obtenir des résultats dont l utilisation permettra non seulement de reproduire leur système mais aussi dans le meilleur des cas d assurer une reproduction élargie de ce dernier. Bien entendu des injections sous forme d aide, subventions mais aussi provenant de revenus non agricoles des des facteurs de production un processus de production une production agricole Capital Travail Terre des apports externes un centre de décision des utilisations multiples 5 membres de la famille paysanne. La connaissance des stratégies paysannes, fonctionnement ou du disfonctionnement des systèmes paysans, peut nous éclairer sur les contraintes rencontrées et sur les actions pouvant être prises. Elles peuvent se situer au niveau des facteurs de production (amélioration de la fertilité, meilleure gestion de l eau, aménagement foncier, équipement et motorisation, etc.) comme au niveau de la mise sur le marché des surplus agricole (labellisation, organisation de la commercialisation, etc.). Mais dans tous les cas elles impliquent des prises de décisions de la part du pilote principal (le chef d exploitation), de sa famille comme des autres parties prenantes concernées de près ou de loin par les améliorations en question. 4. Tous ces partenaires se retrouvent aussi dans une série de systèmes ruraux qui répondent aux mêmes règles de fonctionnement mais avec des modalités qui leurs sont spécifiques. On parlera ainsi du système de commercialisation, du système bancaire, du système politique, etc. Si chaque système constitue une entité à lui seul, tous sont en fait en relation entre eux et peuvent même être emboîtés les uns par rapport aux autres. Ils s insèrent ainsi les uns dans les autres et sont donc interdépendants les uns des autres. Le système hydrologique appartient au bassin versant, véritable système complexe qui lui-même est intégré dans un massif montagneux plus large encore. Il en est de même des systèmes sociaux dont les appartenances remonte ainsi du local au régional et au niveau national voire international. Tous ces dispositifs répondent à un faisceau de flux et de relations entre les différentes composantes et 3

leur prise en compte est complexe mais déterminante pour assurer un diagnostic le plus proche de la réalité du milieu et préconiser des solutions les plus adaptées à cette dernière. 5. Dans un même ordre d idée, les changements intervenus ces dernières années dans la conception et la mise en œuvre de programmes de développement ont amené à revoir les principes et modalités de relations entre les acteurs en présence dans la dynamique rurale et plus particulièrement, le partenariat entre la population et les intervenants. En effet, les évaluations des actions entreprises, souvent sur l initiative des pouvoirs publics et des intervenants ont fait ressortir les problèmes de maintenance et de durabilité des actions entreprises après le départ des projets. A cela s ajoutent les pressions exercées par instances internationales pour un désengagement de l Etat. Le nouveau partage des responsabilités s'inscrit donc dans la tendance générale de décentralisation que connaissent la plupart des pays et s'appuie aussi sur un mouvement très fort en faveur d'une implication accrue des collectivités de base dans la gestion de leurs ressources dans une perspective de durabilité. La participation et le développement local 6. La participation des populations est reconnue comme une nécessité. Elle a été introduite dans de nombreux programmes et projets et se trouve inscrite dans la plupart des Plans nationaux ou internationaux, mais son application n'est pas toujours évidente. Parmi les difficultés rencontrées dans l implication des populations, certaines sont imputables aux intervenants euxmêmes parce qu ils ont du mal à modifier la nature de leur intervention qui reste de type administratif et descendant ou parce qu ils ont une vision partielle de la réalité que vivent les populations. Celles-ci, de leur côté, rencontrent des difficultés à s insérer dans de nouveaux rapports car subsistent Caractère administratif et descendant des procédures Implication limitée des populations dans les aménagements Mode d intervention peu favorable à la participation Décalage entre la vision des techniciens et des producteurs Difficultés des populations à s impliquer Insuffisante reconnaissance du partenariat Maintien de comportements d assistés 9 souvent des habitudes d assistanat et de voir les intervenants comme pourvoyeur d aide matérielle. Mais le plus souvent, c est la non reconnaissance des populations et de leurs associations comme partenaires qui freinent les choses. 7. Les différentes considérations sur la participation ont amené à s interroger sur la manière d aborder les situations nouvelles créées par son application et ceci même dans le cas d une application correcte de cette dernière. On est en effet passé d une démarche top down basée entre autre sur une offre de service à une approche qui donne la primauté à la demande individuelle. On assiste aussi partout au désengagement de l Etat pouvant créer des vides dont peuvent pâtir les populations les moins bien préparées. En privilégiant, et c est tant mieux, le niveau local, on a multiplié les centres de décisions sans que ces niveaux puissent intégrer les dimensions plus larges de leur vécu. Pour éviter ainsi certains risques de la participation comme par exemple l éparpillement, il est préconisé de renforcer la décentralisation c est à dire de donner aux niveaux intermédiaires que sont les régions ou les provinces, les moyens de jouer un rôle d interface entre les exigences nationales et les attentes locales. 4

Les relations sociales et le partenariat 8. Une politique basée sur cette implication des acteurs locaux, nécessite d agréger les demandes au niveau des communautés, des petites régions. Inversement, il convient de diversifier les politiques nationales en les régionalisant c est à dire en tenant compte des spécificités agro écologiques, sociales et culturelles des régions. Mais ces 2 dimensions ne peuvent s appliquer qu avec de fortes mesures d accompagnement pour un meilleur partage de l information, un renforcement des capacités des personnes à tous les niveaux et de l organisation du monde rural. Ainsi le grand défi consiste en la gestion de la contradiction entre la reconnaissance des initiatives collectives mais locales et l'exigence d'intégrer ces initiatives dans une vision d'ensemble. 9. Par la décentralisation, l'etat devient un mobilisateur et facilitateur des initiatives locales de développement proposées par les communautés. L'idée de base des réformes économiques et de la décentralisation est la même : libérer les initiatives afin de leur permettre de satisfaire leurs intérêts particuliers sans signifier un retour des élites locales, qui prennent la représentation des populations pour organiser, diriger et dans une certaine mesure s'approprier des démarches décentralisées et participatives. L'approche contractuelle et partenariale vise à introduire des nouvelles relations entre les acteurs du développement ETAT Institutions publiques Services d appui Subventions et aides SOCIETE CIVILE Gouvernements locaux Organisations de producteurs Autonomie financière L équilibre dans le développement rural rural, à la place des relations verticales fondées sur des stratégies définies en dehors de la dynamique locale et de leur globalisation régionale. 10. Il faut que les institutions des états centralisés laissent leur place à des nouvelles institutions capables de créer les conditions du dialogue entre les organisations des producteurs et les autres acteurs du développement rural tout en assurant la création, la reconversion ou le renforcement des associations intermédiaires DIVERSIFIER LES POLITIQUES NATIONALES dont le rôle devient central et cela pour trois raisons principales : i) elles peuvent orienter les actions FAVORISER LES NIVEAUX INTERMEDIAIRES de l'etat dans la différenciation des politiques que doit accompagner la décentralisation ; ii) elles apportent la capacité de synthèse et de régionalisation des demandes et des AGREGER LES DEMANDES LOCALES souhaits des populations rurales ; et iii) elles peuvent devenir enfin des 11 interlocuteurs suffisamment mûrs pour construire des relations de partenariat avec les autres acteurs du développement rural. 11. Cet effort d'organisation de la part des associations intermédiaires permettrait la réalisation globale du processus de décentralisation et des actions de développement rural sur la base d'un dialogue permanent entre tous les acteurs du développement rural. De cette manière, l'interface régionale deviendrait progressivement l'espace de médiation et d'arbitrage par la 10 5

Conclusions mise en place de dispositifs de concertation et de participation des populations rurales à tous les niveaux. 12. Pour aider à une meilleure prise en compte de la place et du rôle des hauts bassins versants, pour amplifier une approche sociologique de leur problèmes comme de la mise en œuvre d actions, il est possible de développer les axes de travail suivant : Sensibilisation sur le rôle de l homme dans les hauts bassins versants Afin de reconnaître pleinement les avantages que présente la prise en compte des dimensions humaines dans la gestion des ressources en eau en hautes montagnes, il est important que les partenaires concernés, dans les structures d intervention comme dans les communautés de montagne elles-mêmes, soient informés, et convaincus, des avantages découlant de cette prise en compte, à savoir la mobilisation des communautés rurales et une meilleure participation de tous aux programmes et projets de développement. Les propositions d'action sont de : i) Lancer des campagnes d information pour faire en sorte que toutes les parties prenantes soient initiés aux principes, méthodes et avantages de la participation et puissent s intégrer dans les processus participatifs. ii) Préparer du matériel spécifique, que les intervenants gouvernementaux et les organisations populaires pourront utiliser, pour une meilleure connaissance des problèmes socio-humains et pour la promotion de la participation. Renforcement des capacités des organisations locales vivant dans ces zones ou limitrophes de celles-ci Lorsqu elles existent, les organisations populaires rurales de nombreux pays en développement ne sont pas pleinement participatives. Souvent, les gouvernements les considèrent plus comme des instruments de leur politique. Elles manquent de gestionnaires qualifiés et de dirigeants locaux, et peuvent donc plus difficilement s impliquer dans leur propre développement. Il convient de concentrer les efforts sur la promotion et le renforcement des organisations de la société civile et de leur autonomie. Les propositions d actions sont de : i) Recourir à des formes d'organisations, telles que petits groupes informels, associations communautaires traditionnelles, coopératives, syndicats, etc., pour aborder et traiter les problèmes de l eau en montagne et atteindre tous les secteurs de la population rurale concernée, en adaptant les lois et règlements, en assurant la formation des personnes relais et des membres de ces organisations. ii) Prévoir une attention et des mesures particulières en faveur des groupes les plus défavorisés et des femmes, compte tenu de leur rôle essentiel dans la vie socioéconomique et dans les activités agricoles et non agricoles, en leur assurant d un accès équitable aux ressources naturelles et aux services et des droits égaux et des chances égales pour le développement et l'utilisation de leurs compétences. iii) Encourager les gouvernements à adopter, pour le financement des organisations locales ainsi promues, des méthodes qui visent principalement à les aider à devenir autosuffisantes, et à recourir le moins possible à des dons et subventions. 6

Décentralisation de la prise de décision par tous les acteurs concernés y compris hors des zones On a constaté que les systèmes décentralisés encouragent les initiatives et la participation au niveau local. Les ruraux sont probablement plus portés à appuyer les initiatives de développement lorsque celles-ci tiennent compte des vues et des besoins exprimés par eux. Pour que la délégation de pouvoir de décision au niveau local se fasse selon les règles, il faut qu'il y ait des mécanismes appropriés facilitant le dialogue et la coopération entre toutes les parties prenantes. Les propositions d'action sont de : i) Modifier les procédures administratives et budgétaires de façon à faciliter la délégation, au niveau local, des pouvoirs et des tâches concernant la prise de décisions, les perceptions fiscales et les dépenses. ii) Créer des organismes consultatifs locaux de planification, où siégeraient des représentants des organisations populaires, des ONG et des pouvoirs publics, pour aider à décentraliser la prise de décisions autour du devenir des zones de hautes montagnes. Promotion du dialogue, du partenariat et des alliances entre les acteurs Dans de nombreux pays en développement, les gouvernements, les organismes de développement et les ONG contribuent à la promotion et à l'appui des groupes communautaires de village et des organisations populaires. Encourager l'échange d'informations et le dialogue entre toutes les parties peut favoriser la collaboration, au niveau local, pour un développement participatif. Les propositions d'action sont de : i) Créer, aux niveaux national et local, des réseaux qui auraient pour fonctions de faciliter le dialogue et la collaboration entre les acteurs de ces zones de montagne. ii) Faciliter, sur le plan juridique, administratif et technique, la création d'organismes fédérant les organisations de la société civile et assurant un meilleur partenariat entre tous les acteurs concernés. 7