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représenté par la SELARL DAUPHIN & MIHAJLOVIC, avoués à la Cour assisté de Me Murielle CHABOUD, avocat au barreau de GRENOBLE INTIMEE : Madame Rosalia L. née le 21 Août 1950 à FORBACH (57600)...... représentée par la SCP GRIMAUD, avoués à la Cour assistée de Me Gilles MOURONVALLE, avocat au barreau de GRENOBLE (bénéficie d'une aide juridictionnelle Partielle numéro 2008/8070 du 13/01/2009 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de GRENOBLE) COMPOSITION DE LA COUR : LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE : Monsieur André ROGIER, Président, Madame Arlette GAILLARD MAUNIER, Conseiller, Madame Brigitte DEMARCHE, Conseiller, Assistés lors des débats de Madame M. C. OLLIEROU, Greffier. DEBATS : A l'audience publique du 26 Mai 2009, les avoués et les avocats ont été entendus en leurs conclusions et plaidoiries. Puis l'affaire a été mise en délibéré pour l'arrêt être rendu à l'audience de ce jour, après prorogation du délibéré. Exposé du litige. Par jugement du 30 juin 1993, le Tribunal de Grande Instance de Grenoble a prononcé le divorce entre les époux Gérard C. et Rosalia L. et homologué leur convention définitive réglant les effets du divorce. Au titre de la liquidation de la communauté, et aux termes de l'acte authentique rédigé le 28 janvier 1993 par Me BOUDROT, notaire à RIVES : - l'appartement de Grenoble était laissé dans l'indivision jusqu'à la fin de l'année 1993 au plus tard,

date à laquelle il devait être vendu, et le prix de vente devait être partagé par moitié, - tous les autres biens de communauté ( les parts sociales de la SCI FLORIE, l'entreprise de maçonnerie de CHARNECLES, la maison de CHARNECLES ) étaient attribués à M. C., à charge pour lui de régler à son épouse une soulte d'un montant de 640.000 fr et d'assumer seul le remboursement du passif ; il était prévu que le paiement de la soulte interviendrait dans un délai de sept ans à compter du prononcé du divorce, sans intérêt jusque là, le montant de la soulte étant, à titre de condition essentielle et déterminante, indexé sur l indice INSEE du coût de la construction ; passé ce délai de sept ans, ladite somme devait être productive d'intérêts au taux de 11 % l'an, payables en même temps que le principal, après calcul de l'indexation. La soulte réactualisée, d'un montant de 692.281,95 fr, a été payée par M. C. le 23 mai 2000. Par acte du 17 juillet 2006, Mme L., qui se prévalait d'une variation des lots reçus par son ex époux entre 1993 et 2000, a fait assigner en référé M. C. aux fins de voir instituer une mesure d'expertise technique en application des dispositions de l'article 833-1 du code civil. Par ordonnance du 13 septembre 2006, le juge des référés du Tribunal de Grande Instance de Grenoble a commis M. Philippe R. en qualité d'expert avec pour mission de déterminer la variation de la valeur des lots reçus par M. C. entre 1993 et 2000. Au vu du rapport de l'expert, Mme L. a saisi le Tribunal de Grande Instance de Grenoble statuant au fond pour voir condamner M. C. à lui payer un complément de soulte de 248.719, outre intérêts au taux légal depuis la date de l'échéance. Par jugement du 5 juin 2008, le Tribunal de Grande Instance de Grenoble a : - déclaré les dispositions de l'article 833-1 du code civil applicables au partage C./L., - ordonné une nouvelle expertise, - commis pour y procéder M. Jean A., avec pour mission de : * dire si la valeur des biens immobiliers attribués à M. C. par l'acte de partage du 28 janvier 1993 homologué par le jugement du 30 juin 1993 a, entre cette dernière date et le 23 mai 2000, augmenté de plus du quart par le seul effet des circonstances économiques conformément aux prévisions de l'article 833-1 du code civil, de sorte que la soulte revenant à Mme L. devrait être revalorisée dans la même proportion ; * dans l'affirmative, calculer le montant de la soulte qui aurait dû être versée à Mme L., et donner toute indication utile à la solution du litige ; - réservé les dépens. Par déclaration du 8 août 2008, M. Gérard C. a interjeté appel de cette décision. Par ordonnance du vice président du Tribunal de Grande Instance de Grenoble chargé des expertises civiles en date du 6 juin 2008, les opérations d'expertise ont été suspendues dans l'attente de l'arrêt qui sera rendu par la Cour d'appel de Grenoble. Dans ses dernières conclusions en date du 30 avril 2009, auxquelles il convient de se référer pour l'exposé de ses prétentions et moyens en application des dispositions de l'article 455 du code de

procédure civile, M. C. demande à la Cour : - d'infirmer le jugement du 5 juin 2008, - de déclarer l'action de Mme L. irrecevable, - subsidiairement, de constater que le paiement est intervenu en 2000, que la dette est éteinte et le partage réalisé, - en conséquence, de débouter Mme L. de ses demandes, - à titre infiniment subsidiaire, d'ordonner une nouvelle expertise aux fins d'établir l'existence ou non d'une lésion de plus du quart au vu des circonstances économiques intervenues entre 1993 et 2000, et de désigner l'expert qu'il plaira à la Cour pour exécuter cette mission, - de condamner Mme L. à lui payer 4.000 en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais engagés devant les premiers juges par M. C., - de condamner Mme L. à lui payer 4.000 au titre de l'article 700 du code de procédure civile et à supporter les entiers dépens d'appel et de première instance. Dans ses dernières conclusions en date du 25 mai 2009, auxquelles il convient de se référer pour l'exposé de ses prétentions et moyens en application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, Mme L. demande à la Cour : - de confirmer le jugement en ce qu'il a déclaré applicable l'article 833-1 du code civil, - de le réformer pour le surplus, - de condamner M. C. au paiement d'une somme de 248.719,16, outre intérêts au taux légal depuis le 23 mai 2000, et capitalisation des intérêts dus pour une année entière, - de condamner M. C. à lui payer 6.000 au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais engagés en première instance et en appel, et à supporter les entiers dépens de première instance et d'appel. Motifs. I) Sur la recevabilité de l'action. * Sur le principe de l'intangibilité du divorce et de l'homologation de la convention définitive. Le prononcé du divorce par consentement mutuel et l'homologation de la convention définitive réglant les effets du divorce ont un caractère indissociable. Le jugement de divorce, en entérinant la convention définitive, donne à cette convention et aux questions patrimoniales qu'elle règle le caractère d'une décision judiciaire, et lui confère la même force exécutoire. Il en résulte que la convention définitive et l'état liquidatif de partage qui lui est annexé ne peuvent plus être remis en cause, hors les cas limitativement énumérés par la loi.

Le jugement du 30 juin 1993 ayant prononcé le divorce entre les époux C./L. et homologué leur convention définitive, c'est à bon droit que M. C. affirme que cette convention est intangible. Toutefois, il ne saurait se fonder sur cette intangibilité, qui rend irrecevables les actions en nullité pour vice de consentement ou les actions en rescision du partage, pour voir écarter l'application de l'article 833-1 ancien du code civil et la réévaluation de la soulte au profit de son ex épouse. L'action visée par ce texte, aux termes duquel «lorsque le débiteur d'une soulte a obtenu des délais de paiement, et que, par suite des circonstances économiques, la valeur des biens mis dans son lot a augmenté ou diminué de plus du quart depuis le partage, les sommes restant dues augmentent ou diminuent dans la même proportion», n'a en effet pas pour objet, comme l'action en rescision, de remettre en cause le partage au motif que les attributions n'auraient pas été correctement effectuées ou que les biens n'auraient pas été estimés à leur juste valeur à l'époque du partage. L'on se trouve dans le cas particulier d'une soulte payable à terme qui procure au créancier, au moment du partage, un avantage immédiat sous la forme d'une créance certaine, et dont seule l'exigibilité est reportée. Cette règle légale a pour but d'éviter qu'en cas de changement important de cette valeur résultant des circonstances économiques entre le jour du partage et le jour où le paiement, devenu exigible, intervient, le débiteur en cas d'augmentation ou le créancier en cas de diminution ne soit injustement avantagé. Lorsque, comme dans le cas invoqué en l'espèce par Mme L., l'on se trouve face à une augmentation de la valeur du fait de la survenance d'éléments postérieurs au divorce et à l'acte de partage liés uniquement à l'évolution des circonstances économiques, il s'agit de protéger le créancier contre le risque économique résultant du paiement différé en procédant à une nouvelle évaluation à la hausse de la soulte. Il résulte par ailleurs d'une jurisprudence constante que les dispositions de l'article 833-1 du code civil ont une portée générale et prévoient la révision des soultes stipulées payables à terme pour tout partage. Aucune disposition légale ne permet d'exclure du champ d'application de ce texte les partages ayant le caractère d'une décision judiciaire ; c'est ainsi que l'article reçoit application dans le cas d'un partage judiciaire prévoyant une soulte payable à terme. Dès lors, ainsi que l'a jugé le tribunal, il n'y a pas de raison de ne pas faire application de cette disposition à la convention par laquelle deux époux ont, dans une procédure de divorce sur requête conjointe soumise à l'homologation du tribunal, procédé au partage de leurs biens. * Sur la possibilité de déroger aux dispositions de l'article 833-1 du code civil. L'alinéa 2 de l'article 833-1 du code civil prévoit la possibilité pour les parties de «convenir que le montant de la soulte ne variera pas». L'acte liquidatif de la communauté du 28 janvier 1993 prévoyait à titre de condition essentielle et déterminante, que la soulte était indexée sur l indice INSEE du coût de la construction. En outre, en page 13 de l'acte, les parties se reconnaissaient mutuellement entièrement remplies de

leurs droits et renonçaient expressément à élever dans l'avenir une contestation quelconque relative au règlement de la communauté. M. C. considère qu'il résulte de ces dispositions que la commune volonté des époux a été d'exclure expressément toute possibilité de remise en cause des accords, aux termes desquels seule l'indexation était prévue, et qu'ils ont ainsi entendu déroger aux dispositions de l'article 833-1 du code civil. En réalité, l'indexation a pour unique but de pallier l'augmentation du coût de la vie, alors que l'article 833-1, qui vise les «circonstances économiques», ne tient pas compte de ce seul paramètre. La renonciation à une contestation quelconque relative au règlement de la communauté ne saurait par ailleurs s'analyser en une renonciation à se prévaloir de la variation du montant de la soulte dans les conditions de l'article susvisé. En l'absence de stipulation expresse dans l'acte liquidatif quant au caractère invariable de la soulte, l'on ne saurait considérer que les parties ont entendu déroger aux dispositions de l'article 833-1 relatif à la révision des soultes. II) Sur l'extinction de la dette. L'article 833-1 du code civil ne prévoit pas de délai d'action, et l'arrêt rendu le 30 janvier 2001 par la première chambre civile de la Cour de Cassation cité par M. C. n'a pas statué sur un tel délai, mais a simplement rappelé qu'il ne pouvait pas être tiré argument d'une variation de valeur entre le jour du paiement et une période postérieure à ce paiement. Les «sommes restant dues» visées par cet article, concernées par les fluctuations de valeur, sont celles encore dues le jour où la dette vient à échéance. Lorsque l'intégralité de la soulte a fait l'objet d'un paiement différé, il s'agit par conséquent de la somme correspondant à cette soulte, qui n'a pas été acquittée même pour partie avant l'expiration du délai de paiement, et le créancier est fondé à se prévaloir d'une augmentation de sa valeur entre la date du partage et la date du paiement. Enfin, en acceptant le paiement de la soulte dans son montant initialement fixé dans l'acte liquidatif de partage, Mme L. n'a pas pour autant renoncé à se prévaloir de l'action en réévaluation des biens prévue par l'article 833-1 susvisé. C'est par conséquent à tort que M. C. se prévaut de l'extinction de la dette pour conclure au débouté de sa demande. III) Sur les évaluations effectuées par l'expert M. R.. Conformément aux dispositions de l'article 833-1 ancien du code civil, l'augmentation de valeur s'entend de celle exclusivement due aux circonstances économiques, et intervenue entre le jour du partage et le jour du paiement (en l'espèce entre le 30 juin 1993, date du divorce, et le 23 mai 2000, date du paiement de la somme de 692281,95 ). L'augmentation de valeur résultant d'une modification de l'état de l'immeuble ou de l'industrie de M. C. doit par conséquent être exclue.

* Sur la valeur des parts de la SCI. L'expert a évalué les parts de la SCI en se basant sur deux méthodes : - la valeur de transaction : il a retenu la valeur au 27 janvier 2004, et non au 23 mai 2000 ; toutefois, il n'a pas privilégié cette méthode, eu égard au fait que la valeur de transaction faisait référence à une transaction entre membres d'un même groupe familial, - la valeur par la méthode du revenu : il a additionné la valeur nette comptable et la plus value sur immobilisations qu'il a calculée en capitalisant les loyers annuels au taux de 10 %, en prenant comme loyer annuel de référence celui de l'année 2000. Le rapport d'expertise ne précise pas si le bâtiment édifié sur le terrain cadastré n 68 lot 10 a ou non fait l'objet d'améliorations ou d'agrandissement entre 1993 et 2000. Il se fonde par ailleurs sur le seul loyer de 2000, sans comparer ce loyer à celui perçu depuis 1993. * Sur la valeur du fonds de commerce de la SARL C.. L'expert a pris en compte une modification juridique, puisque l'on est passé d'une entreprise à titre personnel à une entreprise exploitée sous la forme d'une société, la SARL C.. L'on ne sait par ailleurs pas, à la lecture du rapport d'expertise, quelle est la part de l'augmentation de valeur du fonds de maçonnerie procédant de circonstances purement économiques et celle procédant de l'industrie de M. C., alors que le travail de l'artisan est primordial lorsqu'il s'agit comme en l'espèce d'un fonds artisanal d'entreprise de maçonnerie. * Sur la valeur de la propriété de Charnecles. L'expert s'est fondé sur la division de la propriété en trois lots et sur les ventes à des tiers intervenues, le 19 mai 2000 pour deux lots, et le 27 juin 2005 pour le troisième. Puis il a appliqué pour le lot vendu en 2005 le coefficient tiré de l'indice INSEE du coût de la construction, ce qui a ramené le prix initial, d'un montant de 224.000, à la somme de 191.017,32. Il a estimé inutile de conforter ses calculs par d'autres valorisations, alors que la simple utilisation d'un coefficient tiré de l'indice INSEE du coût de la construction ne permet pas forcément de connaître la valeur réelle de la propriété en 2000, d'autres paramètres ayant pu intervenir pendant ces cinq années. Eu égard aux insuffisances du rapport de M. R. et à l'impossibilité de savoir à sa lecture si les conditions prévues à l'article 833-1 du code civil sont ou non remplies, une nouvelle mesure d'expertise s'impose. C'est par conséquent à bon droit que le tribunal a désigné M. A. et donné mission à ce dernier de dire s'il existe une augmentation de plus du quart de la valeur des biens immobiliers par le seul effet des circonstances économiques conformément aux prévisions de l article 833-1 du code civil, et dans l'affirmative de calculer le montant de la soulte qui aurait dû être versée à Mme L.. Le jugement du 5 juin 2008 sera confirmé en toutes ses dispositions, y compris en sa disposition

relative aux dépens, sauf à préciser que l'applicabilité au partage C./L. des dispositions de l'article 833-1 du code civil rend recevable l'action intentée par Mme L.. Les parties, qui succombent l'une et l'autre en appel sur une partie de leurs demandes, garderont chacune à leur charge les dépens qu'elles ont engagés. Par ces Motifs, La Cour, Statuant publiquement et par arrêt contradictoire, après en avoir délibéré conformément à la loi, Confirme le jugement du Tribunal de Grande Instance de Grenoble en date du 5 juin 2008 en ce qu'il a déclaré les dispositions de l'article 833-1 du code civil applicables au partage C./L., en y ajoutant que Mme L. est en conséquence recevable en son action ; Confirme le jugement du 5 juin 2008 en ses dispositions relatives à l'instauration d'une nouvelle mesure d'expertise, en ce qu'il a renvoyé l'affaire à la mise en état, et en ce qu'il a réservé les dépens ; Vu l'article 700 du code de procédure civile, Rejette les demandes d'indemnités formées par les parties, que ce soit pour les frais engagés en première instance ou pour les frais engagés en appel ; Laisse à la charge de chacune des parties les dépens qu'elle a engagés en appel. Prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile. Signé par Monsieur André ROGIER, Président, et par Madame M. C. OLLIEROU, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire. Composition de la juridiction : Monsieur André ROGIER, Murielle CHABOUD, Gilles MOURONVALLE Décision attaquée : TGI Grenoble, Grenoble 5 juin 2008