Les routes en Afrique subsaharienne



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Transcription:

RESUME DU DOCUMENT DE REFERENCE 14 DIAGNOSTICS DES INFRASTRUCTURES NATIONALES EN AFRIQUE Les routes en Afrique subsaharienne Ken Gwilliam, Vivien Foster, Rodrigo Archondo-Callao, Cecilia Briceño-Garmendia, Alberto Nogales, et Kavita Sethi Juin 2008 Ce rapport a été produit par la Banque mondiale et le SSATP, avec le soutien financier et autre des institutions suivantes (par ordre alphabétique) : l Agence française de développement, le Département britannique pour le développement international (DFID), le Nouveau partenariat pour le développement de l Afrique (NEPAD), la Public-Private Infrastructure Advisory Facility (PPIAF), l Union africaine et l Union européenne.

Qu est-ce que l AICD? L étude qui suit s inscrit dans le programme Diagnostics des infrastructures nationales en Afrique (AICD _ Africa Infrastructure Country Diagnostic), dont l objectif est d étendre les connaissances mondiales en matière d infrastructure physique en Afrique. L AICD fournira une base de référence par rapport à laquelle les futures améliorations des services d infrastructure pourront être mesurées pour permettre de suivre les résultats atteints grâce à l appui des bailleurs de fonds. Le projet établira également des bases empiriques plus solides pour la détermination des priorités d investissement et pour la formulation des réformes stratégiques dans les secteurs infrastructurels en Afrique. L AICD produira une série de rapports (semblables à celui-ci) donnant un aperçu de l état des dépenses publiques, des besoins d investissement et de la performance individuelle de chacun des principaux secteurs d infrastructure : l énergie, les technologies de l information et de la communication, l irrigation, le transport, ainsi que l eau et l assainissement. La Banque mondiale publiera un résumé des constats réalisés par l AICD au printemps 2008. Les données utilisées seront mises à la disposition du public sur un site web interactif permettant à ses visiteurs de télécharger des rapports d informations taillés sur mesure et d effectuer des exercices de simulation simples. La première phase de l AICD est consacrée à 24 pays, qui ensemble représentent 85 % du produit national brut, de la population et des flux d aide à l infrastructure de l Afrique subsaharienne. Ces pays sont les suivants : Afrique du Sud, Bénin, Burkina Faso, Cap Vert, Cameroun, Congo (République démocratique du Congo), Côte d Ivoire, Éthiopie, Ghana, Kenya, Madagascar, Malawi, Mali, Mozambique, Namibie, Niger, Nigeria, Ouganda, Rwanda, Sénégal, Soudan, Tanzanie, Tchad, et Zambie. Dans une seconde phase, la couverture du projet sera étendue à d autres pays. L AICD est mis en œuvre par la Banque mondiale pour le compte d un comité de pilotage représentant l Union africaine, le Nouveau partenariat pour le développement de l Afrique (NEPAD), les communautés économiques régionales africaines, la Banque africaine de développement, et les principaux bailleurs de fonds des secteurs infrastructurels. Le financement de l AICD provient d un fonds fiduciaire multibailleurs dont les principaux contributeurs sont le Department for International Development (DfID) du Royaume Uni, le Mécanisme de conseil à l appui de la formation de partenariats public-privé dans le secteur des infrastructures, l Agence française de développement et la Commission européenne. Un groupe de personnalités éminentes issues de cercles de décideurs politiques et du monde académique, aussi bien de l Afrique que des autres continents, a évalué la qualité technique de tous les principaux résultats produits par l étude. Le présent article et d autres documents analysant des sujets clés liés à l infrastructure, ainsi que les sources de données utilisées mentionnées ci-dessus, pourront être téléchargés à partir du site www.infrastructureafrica.org. Des résumés sont disponibles en anglais et en français. Toutes les demandes concernant la disponibilité des ensembles de données peuvent être adressées à VFoster@worldbank.org.

Résumé Par rapport à l immensité du sous-continent, le réseau routier de l Afrique subsaharienne est peu développé. Il est certainement beaucoup moins dense que ceux d autres régions en développement. Cependant, étant donné le revenu et la population de la région et donc sa capacité à supporter les coûts d entretien la densité du réseau routier commence à apparaître plutôt élevée. Dans plusieurs pays (Madagascar, Malawi, Mozambique, Niger), la valeur de l actif du réseau routier dépasse 30 % du produit intérieur brut (PIB), ce qui donne une idée de l ampleur du problème de l entretien. Dans l ensemble, même si le réseau des routes principales interurbaines est maintenu dans un état raisonnablement bon, l état des routes de la région accuse déjà un retard par rapport à celui d autres régions en développement. 1 Le réseau routier de la région comprend une série de corridors commerciaux stratégiques qui relient les ports maritimes à l arrière-pays africain. Ces corridors, qui acheminent par an quelque 200 milliards de dollars EU de flux commerciaux, n ont pas plus de 10 000 km de long. Les routes sont généralement en bon état, suffisamment bon en tous cas pour soutenir la vitesse du trafic sillonnant ces routes, qui a été lamentablement réduite (généralement à moins de 10 km par heure) par l engorgement administratif au niveau des frontières et des ports. Le concept de réseau routier intra-régional la Route transafricaine existe depuis quelque temps. Cependant, le manque de liaisons et le mauvais entretien des segments clés l empêchent de réaliser son potentiel de connexion au sein du continent. Pour atteindre un niveau de connectivité continentale significatif, il faudrait entre 60 000 à 100 000 kilomètres de routes régionales supplémentaires. La densité des réseaux routiers nationaux primaires et secondaires varie considérablement d un pays à l autre, mais dans de nombreux cas, elle excède déjà la longueur requise pour fournir la connectivité de base entre les villes principales et secondaires, les ports clés et les passages frontaliers. Au-delà du réseau classé primaire et secondaire, il existe un vaste réseau routier non classé qui offre divers degrés de service dans les zones rurales. Moins de 40 % des populations rurales africaines vivent à moins de deux kilomètres d une route praticable en toutes saisons de loin le niveau d accessibilité rurale le plus faible du monde en développement. Il est également évident que l'isolement physique empêche les grandes zones du continent de réaliser leur véritable potentiel agricole. Cependant, en raison de la faible densité de la population, une accessibilité rurale de 100 % exigerait de doubler ou même tripler la longueur du réseau classé actuel dans la plupart des pays une tâche herculéenne. Avec l accélération de l urbanisation, l'afrique met également en place un important réseau routier intra-urbain. Toutefois, la densité du réseau routier urbain est en retard par rapport à celle des autres villes en développement, en particulier ce qui concerne les routes revêtues. 1 Cette note résume les recherches récentes et en cours réalisées sur l investissement dans le transport dans 24 pays africains, par la Banque mondiale dans le cadre des Diagnostics des infrastructures nationales en Afrique. Le rapport complet, avec des annexes détaillées par pays et des notes techniques est disponible sur http://www.infrastructureafrica.org.

Nouvelles institutions : fonds des routes, agences routières, et concessions des routes à péage Le secteur routier africain a subi un ensemble vaste et cohérent de réformes stratégiques, grâce à l appui soutenu des bailleurs de fonds. Etant donné que la majorité des pays ont suivi des voies très semblables, il y existe un consensus relativement élevé sur l orientation de la réforme. Le premier mouvement de cette réforme a été de créer une source de financement indépendante pour l entretien des routes sur la base de péages routiers. Les fonds sont séparés du budget général de l État et administrés par un conseil indépendant. La grande majorité des pays étudiés ont déjà mis en place des fonds de deuxième génération pour les routes et la plupart des autres leur emboîtent actuellement le pas. Le Nigeria et l Afrique du Sud sont les seuls pays à n avoir ni fonds des routes ni plan pour en créer un. Un examen minutieux de la nouvelle génération de fonds routiers révèle que tous ne correspondent pas entièrement à leur plan directeur conceptuel. Seuls 20 % des fonds des routes étudiés dans l'échantillon (notamment ceux du Kenya, de la Namibie et la de Tanzanie) répondent à l ensemble des sept critères de bonne conception définis par les 35 pays membres du Programme de politiques de transport en Afrique subsaharienne (Figure A1). Ces critères sont : un fondement juridique clair, la séparation des fonctions, l'imposition de frais de péage, le transfert direct des fonds, la représentation des usagers au conseil d administration, des règles claires d allocation des recettes, et un audit indépendant des comptes. Par ailleurs, malgré l imposition généralisée de taxes sur les carburants pour le financement de l'entretien des routes, le niveau de ces taxes et, partant, leur utilité varie considérablement selon les pays. Cette variation va d un niveau symbolique situé autour de 0,03 dollar EU par litre, suffisant pour apporter une contribution matérielle à l'entretien des routes, jusqu à environ 0,16 dollar EU par litre, qui permet de couvrir la plupart des besoins relatifs à l entretien. Par ailleurs, certains pays ont des difficultés à collecter les taxes sur les carburants à cause de la fraude fiscale (Tanzanie) ou des retards dans le transfert des recettes (Rwanda). Ils peuvent n arriver à percevoir qu à peine 50 % des ressources prévues. En raison du niveau des taxes sur les carburants plus faible que prévu, les ressources des fonds des routes du Bénin, de la Côte d'ivoire, du Gabon, de l Ethiopie et de la Zambie dépendent à plus de 75 % des allocations publiques. Quelques 60 % des recettes des fonds routiers sont généralement affectés au réseau routier interurbain principal, mais certains pays ont néanmoins essayé, à des degrés divers, de canaliser une partie de ces recettes vers l entretien des réseaux routiers ruraux, et dans une moindre mesure, vers les réseaux routiers urbains. La deuxième étape du processus de réforme a porté sur la création des agences routières, indépendantes des ministères techniques, et ayant la responsabilité de la passation des contrats de travaux publics. Environ deux tiers des pays de l échantillon ont déjà mis en place une agence routière, et d'autres sont en voie de le faire. Les niveaux d autonomie vont de la responsabilité complète de la gestion du réseau routier à une responsabilité limitée de mise en oeuvre des programmes d'entretien routier assignés par le Département des routes ou par le ministère des Transports. Seul un tiers de ces agences a des représentants du secteur privé dans leurs conseils. Le Nigeria, le Sénégal et l Afrique du Sud n'ont pas de fonds routier mais bien une agence routière. 2

La passation des contrats prise en charge par les agences routières a évolué vers des contrats d entretien basés sur les performances une tendance importante. L avantage potentiel de ce type de contrats est qu'il encourage les prestataires des services d entretien à fournir un travail de qualité, tout en minimisant les risques de dépenses pour le fonds routier. Dans près de la moitié des pays étudiés, plus de 80 % des travaux d'entretien ont ainsi été externalisés. Le recours à cette approche est fortement, quoique non exclusivement, associé à l existence d'une agence routière. L amélioration de la passation de ce type de contrats et des mécanismes de décaissement a réduit le coût unitaire de l entretien routier de 20 à 10 % en Ethiopie, au Ghana et en Zambie Figure A Evaluation des réformes des fonds pour les routes 1. Prévalence des caractéristiques des fonds pour les routes de nouvelle génération 2. Notation de l index général de performance Audit indépendant Tanzanie Namibie Kenya Rwanda* Droits de péage Malawi Madagascar Règles d'allocation des recettes Séparation des fonctions Ghana Ethiopie Tchad Zambie Niger* Mozambique Base juridique claire Cameroun Lesotho Côte d Ivoire Transfert direct Représentation des usagers au conseil 0% 20% 40% 60% 80% 100% Pourcentage des pays Bénin Afrique dusud Sénégal Cap-Vert Burkina Faso 0% 20% 40% 60% 80% 100% Notation en pourcentage Source : Matrice de l Initiative d'entretien des routes du Programme de politiques de transport en Afrique subsaharienne, 2007. Les concessions de routes à péage sont rares, affectant à peine 0,1 % du réseau routier classé de la région, et se retrouvent presque toutes en Afrique du Sud. Elles n ont pas mobilisé plus de 1,6 milliard de dollar EU d engagements d investissement, un résultat bien pâle au regard de l'ensemble des besoins de la région. La prévalence limitée des concessions de routes à péage reflète le fait que moins de 10 % du réseau routier de la région attirent un volume de trafic supérieur à 10 000 véhicules par jour, le minimum requis pour que les concessions soient économiquement viables. Il existe encore des possibilités de 3

concessions de routes à péage en Afrique du Sud et, dans une moindre mesure, au Nigeria mais ce potentiel est très limité dans les autres parties de la région. Dépenses : entretien, réhabilitation et nouvelles constructions Les dépenses routières en Afrique subsaharienne s'établissent en moyenne juste en dessous de 2 % du PIB, avec des différences importantes entre les pays (Figure B). Il faut les comparer au taux de 1 % du PIB habituel dans les pays industrialisés et aux 2 à 3 % du PIB des économies émergentes en croissance rapide. Bien que les efforts déployés soient élevés par rapport à la taille des économies africaines, ils demeurent faibles, en valeur absolue, avec une dépense effectuée par les pays à faible revenu d environ 7 dollar EU en moyenne par habitant et par an. Figure B Dépenses moyennes annuelles en faveur du transport routier par pays, 2001-2005 En moyenne, les pays dépensent 9 000 dollars EU par kilomètre de réseau routier principal. Cependant, les pays à faible revenu dépensent 50 % de plus par kilomètre que les pays à revenu intermédiaire. Curieusement, les pays dotés d une agence routière et des taxes élevées sur les Source : AICD, 2008 carburants semblent dépenser un peu moins que ceux qui ne le sont pas. Bien que les réformes du secteur routier aient porté essentiellement sur l'entretien, il y a des signes d un parti pris persistant en faveur de l investissement dans les dépenses. Celui-ci représente deux tiers de la dépense totale, ne laissant ainsi qu'un tiers pour l'entretien. Sur la base de l expérience dans d'autres régions du monde, le rapport entre l'investissement et l'entretien devrait être plus proche de la moitié à chacun. Le parti pris d investissement est plus prononcé dans les pays à faible revenu, notamment ceux dotés d environnements géographiques difficiles et ceux n'ayant pas de fonds des routes ou des taxes sur les carburants, qui pourraient expliquer en partie les niveaux de dépenses plus élevés observés dans ces pays. Ce parti pris serait encore plus prononcé si les budgets d investissement étaient pleinement exécutés. En moyenne cependant, les pays ont budgété en faveur de l investissement routier, 50 % de plus que ce 4

qu ils parviennent réellement à dépenser au cours d un exercice budgétaire donné. Cela représente un ratio d exécution d'environ 70 % en moyenne. À cet égard, les pays à revenu intermédiaire et ceux disposant de fonds des routes et de taxes sur les carburants se portent nettement mieux que les autres. Les insuffisances au niveau de la planification et les retards dans la passation des marchés sont les principales causes de ce problème majeur. Des dépenses d investissement élevées pourraient, dans certains cas, être justifiées par les retards importants dans les projets de réhabilitation de beaucoup des pays de l échantillon. En effet, sauf au Tchad et en Ethiopie, les niveaux actuels des dépenses d investissement se situent soit bien en dessous, soit très près de ce qui est requis pour liquider les travaux de réhabilitation en retard dans un délai raisonnable de 5 ans (Figure C). La source des fonds dépensés pour les routes peut également entretenir le parti pris d investissement que nous avons constaté. Les faits limités dont nous disposons montrent que l investissement routier est fortement tributaire de l aide publique au développement, qui peut aller d un peu plus de 50 % au Sénégal à presque 90 % au Rwanda. Les bailleurs de fonds ont eu tendance à favoriser de nouvelles constructions spectaculaires au détriment d un plus banal entretien. De plus, l aide au développement s est avérée passablement volatile, contribuant ainsi au schéma erratique de l investissement public dans le secteur. Figure C Dépenses de réhabilitation et d entretien par rapport aux normes Source : Étude AICD des coûts budgétaires, 2008 ; Analyse AICD RONET, 2008. La moitié des pays étudiés n alloue pas des ressources adéquates à l entretien du réseau routier principal, et près de la moitié d entre eux ne dépense même pas assez pour satisfaire les besoins 5

d entretien de routine. Au Tchad, au Niger, au Nigéria, au Sénégal et en Ouganda, les dépenses d'entretien sont inférieures à la moitié des besoins exprimés selon les normes. Les dépenses d'entretien varient considérablement selon les pays. Si l insuffisance des dépenses est flagrante dans les pays à faible revenu (en particulier ceux disposant d importantes ressources), les quelques pays à revenu intermédiaire ont, eux, plutôt tendance à consacrer à l entretien des dépenses nettement supérieures à la norme. En ce qui concerne le réseau routier principal, l entretien va d environ 200 dollars EU par kilomètre au Tchad, à plus de 6 000 dollars EU par kilomètre en Zambie. Les dépenses d'entretien par kilomètre du réseau principal tendent à atteindre environ le double de celles des réseaux ruraux, qui sont systématiquement sous-financés, même lorsque l entretien des routes principales est adéquat. Dans l ensemble, il existe une relation inverse entre le niveau des dépenses d entretien et celui des dépenses d investissement d un pays. Les pays ayant un fonds des routes et des niveaux de taxes sur les carburants plus élevés consacrent une partie plus importante de leurs dépenses à l entretien et se rapprochent des normes en la matière. Parmi les pays appliquant des taxes sur les carburants, les pays où ces taxes sont élevées se débrouillent nettement mieux que ceux dont les taxes sont faibles. En dépit de l insuffisance des ressources des fonds des routes réseau routier relevées ci-dessus, il est évident que les fonds des routes ont réduit la volatilité des dépenses du secteur liées aux allocations budgétaires habituelles. Les résultats présentés dans ce rapport sont fondés sur les coûts unitaires récemment observés dans le secteur et qui sont raisonnablement cohérents entre l Afrique subsaharienne et d autres régions en développement. Ces coûts unitaires ont cependant connu récemment une hausse significative, qui risque d amoindrir encore l adéquation des allocations budgétaires. Cette hausse peut être imputée à l'absence de concurrence et à l augmentation des prix du matériel de construction des routes, principalement causée par la récente flambée des prix du pétrole. Avec cette augmentation des coûts, il est plus important que jamais que le rapport coût-qualité des normes d ingénierie soit efficace. L analyse des réseaux routiers révèle que l ingénierie de près de 30 % des réseaux routiers principaux est supérieure aux normes requises pour les volumes de trafic observés, et inférieure dans 10 % des projets de routes principales (et 15 % des projets de routes rurales). Le manque de respect des normes techniques appropriées indique que les ressources ont été gaspillées, mais suggère aussi la voie à suivre pour réduire les coûts à l'avenir. Des efforts plus soutenus seront également nécessaires pour adapter les normes de conception des routes aux conditions et au matériel locaux, de façon à éviter des dépenses excessives. La mise en place d une norme appropriée pour les routes asphaltées à faible trafic est particulièrement urgente. Qualité des routes : revêtement et état La proportion des routes principales en bon état varie largement entre les pays étudiés, mais moins en ce qui concerne les routes dans un état bon à passable (Figure D). En moyenne, près de la moitié du réseau est en bon état et un tiers dans un état passable. On ne peut pas en dire autant du réseau rural. En zone rurale, seul un quart du réseau routier est en bon état et un autre quart dans un état passable. La 6

situation est cependant susceptible d être améliorée. Les données historiques limitées dont nous disposons indiquent que la plupart des pays ont amélioré la qualité de leurs routes au cours des dernières années. Malgré une différence substantielle dans le pourcentage des routes en bon état, il y en a étonnamment peu dans la valeur de l'actif des réseaux routiers exprimée en pourcentage de leur potentiel maximum. Tous les pays réalisent au moins 70 % de cette valeur potentielle d actif, laissant supposer qu ils ont concentré leurs efforts sur la préservation de leur réseau routier revêtu. Figure D Bon, passable, mauvais : longueur du réseau routier par pays, catégorie et état (a) Réseau principal Afrique du Sud Burkina Faso Kenya Namibie Ethiopie Malawi Ghana Zambie Mozambique Niger Cameroun Nigéria Madagascar Tanzanie Tchad Sénégal Lesotho Bénin Rwanda Ouganda Côte d'ivoire 0% 25% 50% 75% 100% Pourcentage de la longeur du réseau routier Bon Passable Mauvais (b) Réseau rural Burkina Faso Ghana Kenya Malawi Tchad Namibia Cameroun Ethiopie Lesotho Niger Tanzanie Afrique du Sud Côte d'ivoire Bénin Sénégal Mozambique Zambie Nigéria Madagascar Ouganda Rwanda 0% 25% 50% 75% 100% Pourcentage de la longueur du réseau routier Bon Passable Mauvais Source : Matrice de l Initiative d'entretien des routes du Programme de politiques de transport en Afrique subsaharienne, 2007 ; Base de données AICD RONET, 2008 Certaines variables liées aux politiques ont également eu un effet tangible sur les performances du réseau routier. Dans les pays disposant à la fois d un fonds des routes et d une agence routière, la qualité des routes est nettement plus élevée que dans ceux qui ne sont dotés d aucune de ces institutions. De plus, la conception du fonds des routes (c est-à-dire s il répond aux critères du Programme de politiques de 7

transport en Afrique subsaharienne) et le volume des taxes sur les carburants prédisent, de façon fiable, la qualité du réseau routier principal, mais pas celle du réseau rural. Les pays qui consacrent une plus grande partie de leurs ressources routières à l entretien (et qui ont également une agence routière) présentent des indicateurs de qualité nettement meilleurs pour leur réseau routier principal, bien qu une fois de plus, cette relation n est pas clairement établie pour les routes rurales. Combiner institutions, dépenses et qualité Selon leurs performances par rapport aux trois variables institutions, dépenses et qualité du réseau les pays peuvent être classés en quatre groupes. L'Afrique du Sud et la Namibie affichent les meilleures performances. L'Ethiopie, le Ghana, le Kenya, la Mozambique, le Nigéria et la Tanzanie s'inscrivent en deuxième position. À la troisième place, on trouve le Bénin, le Cameroun, le Tchad, Madagascar et la Zambie. Le Lesotho, le Rwanda et le Sénégal font partie du dernier groupe. Dans chaque catégorie, il est possible d'observer les pays plus avancés sur le plan institutionnel ou des dépenses d'entretien. Les différences existant entre les pays dans l état des routes reflètent les conditions à la fois économiques et géographiques, ainsi que l influence du modèle institutionnel et des flux des financements. Le PIB par habitant est le facteur le plus fortement corrélé avec le pourcentage du réseau routier principal en bon état, et il reflète les efforts consacrés aux routes revêtues du réseau. Le climat et le terrain sont, en revanche, des facteurs qui prédisent le mieux le pourcentage des routes principales et rurales en mauvais état, étant donné que des conditions climatiques et de terrain peu favorables accélèrent la détérioration. Cependant, les idiosyncrasies économiques et géographiques ne justifient pas l entièreté des différences constatées dans l état des routes entre les pays. Même en mettant de côté le revenu et le climat, on continue à observer des différences substantielles dans la qualité des routes entre les pays. Des leçons importantes peuvent être tirées de cette analyse. Malgré leurs limitations, les réformes institutionnelles ont produit un impact perceptible sur les résultats. Les pays disposant d un fonds des routes bien financé réalisent des performances nettement meilleures en matière de mobilisation des ressources en faveur de l'entretien routier. Les pays ayant un fonds des routes et une agence routière réussissent nettement mieux à consacrer de manière efficace des ressources à la qualité des routes. Toutefois, le progrès des réformes institutionnelles, bien qu impressionnant, reste incomplet dans beaucoup de cas. Pour être efficace, la mise en place d'un fonds des routes doit être accompagnée de taxes sur les carburants, fixées à un niveau réaliste et collectées de façon appropriée. Enfin, le choix du type de surface doit être plus soigneusement éclairé par une analyse du volume du trafic. Les ressources financières gaspillées à construire des routes supérieures aux normes pourraient être mieux utilisées à d autres fins, notamment pour l'entretien, l extension et l amélioration des réseaux routiers ruraux. 8