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Criminologie Introduction La délinquance est à la fois un fait normatif et à la fois une réalité humaine et sociale. D où la nécessité de l appréhender à l aide d une double démarche. - démarche juridique - démarche empirique Cette observation n a percé qu à la fin du 19 e siècle. Jusque là la délinquance n est vue que comme simple fait juridique. C est à ce moment-là qu est apparu la criminologie. Cette discipline n a cessé de se développer. Chapitre 1 Définition de la criminologie Présentation de la criminologie par son champ d études. La définition se fait classiquement par 2 perspectives : Perspective externe : distinguer la criminologie des autres sciences Perspective interne : dire ce qu est la criminologie Section 1 Domaine de la criminologie 1 Criminologie et les sciences criminelles juridiques A l origine il n existait pas de distinction entre la criminologie et les sciences criminelles juridiques. Ex : H. Ferri consacrait un chapitre à la sociologie criminelle dans ses développements du droit pénal. Aujourd hui les 2 disciplines sont distinctes et sont impossibles à confondre. Elles ont le même objet d études : la délinquance. Or elles se distinguent sur plusieurs points. Les perspectives adoptées par les 2 sciences ne sont pas les mêmes : Le droit pénal cherche à énoncer la norme pénale. La criminologie cherche à énoncer le fait. - 1 -

Les concepts utilisés ne sont pas les mêmes : Le droit pénal parle de normes, de procédure, d institutions, etc La criminologie parle de facteurs, de processus, etc Les méthodes sont aussi différentes : Le juriste utilise l analyse interprétative et synthétise les données. Le criminologue utilise les données empiriques mises à disposition par les sciences sociales. Les résultats obtenus ne sont pas le mêmes : Le droit pénal et la criminologie sont reliés entre elles d une certaine manière. Elles s influencent réciproquement. Le droit pénal influence la criminologie, car le droit pénal définit le comportement délinquant. La criminologie s affranchit du droit pénal en étudiant les concepts déviants. Elles influence insuffisamment le droit pénal, même si la politique criminelle ne peut pas uniquement se fonder sur les données scientifiques. Ex : les choix éthiques ne sont pas pris en compte dans un démarche scientifique. 2 Criminologie et les sciences criminelles empiriques La criminologie n est qu une science criminelle parmi d autres. a) Criminologie et criminalistique Criminalistique : elle regroupe l ensemble des procédés résultant de l application des connaissances scientifiques, à l établissement de la preuve des infractions et de l identité de l auteur. Ainsi d après la définition de criminalistique apparaît comme un outil indispensable pour l enquêteur dans l établissement de la preuve alors que la procédure pénale va s intéresser aux règles qui régissent l admission de la preuve. La criminalistique s intéresse à la mise en œuvre de ces procédés. Entendue comme discipline elle a été crée par le criminaliste Hans Gross au 19 e siècle. Ce dernier a été juge d instruction et magistrat. En 1889 H. Gross a créé les archives d anthropologie criminelle et de criminalistique. - 2 -

b) Criminologie et pénologie De nos jours encore la pénologie fait encore partie de la criminologie aux USA. Si l on veut éviter la récidive il faut connaître les facteurs et les processus de l action délinquante. C est l objet de la criminologie. La pénologie a pour objet l étude des méthodes de traitement utilisés pour prévenir la récidive. c) Criminologie et sociologie pénale Cette distinction existe depuis peu et repose sur un objet d études différent. La sociologie pénale étudie le fait de la justice pénale au sens large. Elle étudie les divers aspects empiriques de l action face à la délinquance. Ex : Est-ce qu il y a des parquets sur-poursuivants ou souspoursuivants? Comment fonctionne la police? Section 2 Contenu de la criminologie Déf : criminologie : c est la science du cri Cette définition est élémentaire, mais également fausse. Il faut exposer d abord 2 séries de données avant d arriver à une définition adéquate. Il faut savoir quels ont-été les apports constitutifs de la criminologie? Cette criminologie ne se divise-t-elle pas en branches / chapitres? 1 Les apports de la criminologie Il faut distinguer 3 versants : 1. l étude de la criminologie C est le versant psychiatrique. Il remonte à Pinel et Esquiriol qui étaient tous les 2 des contemporains de Napoléon I. (18-19 s) C est à la suite des premiers travaux d ordre psychiatrique qu elle a rapporté un certain nombre de connaissances sur les malades mentaux, mais les criminels ne sont pas tous des malades mentaux. Il a fallu attendre Freud pour y ajouter une approche psychologique. On peut y voir ce qu est la psychologie criminelle, l interaction pyschologique, l intervention psychanalitique, psychologie de l enfant, psychologie sociale.

La psychologie criminelle s intéresse au sens large à l intention, consciente, inconsciente, subconsciente du criminel, aux motifs d interaction, etc. 2. Sociologie Le 2 e versant est sociologique puisque c est au milieu du 19 e siècle (1850) que sont apparu les premiers travaux sociologiques de Quetelet et Géri. Après ces travaux toutes sortes de travaux sociologiques ont été réalisés. Ex : sociologie nord-américaine, sociologie marxiste et biensûr les travaux d E. Ferri. La sociologie distingue 2 milieux - les milieux médiats (éloignés) - les milieux immédiats (proches) 3. Aspect biologique Les travaux de Lombroso (ital.) sur le criminel-né (1876) apparaissent dans un ouvrage appelé : «l homme criminel» dans lequel il dit que l homme criminel présente toute une série de stigmates psychologiques. Curieusement on date la fondation de la criminologie avec la parution de cet ouvrage, alors que les travaux de sociologie criminelle sont bien antérieurs. Lombroso a essayé de traiter les problèmes fondamentaux de la criminologie : pourquoi devient-on criminel? En 1960 paraissent des études sur les abérrations du criminel, sur le chromosome criminel. Ces divers apports ont contribué à former le corpus criminel, qui est diversifié si bien qu on est conduit à distinguer plusieures branches au sein de la criminologie. 2 Les branches de la criminologie Par sa nature même la criminologie est une science théorique et appliquée. 1) La criminologie théorique a) la criminologie théorique générale b) la criminologie théorique spéciale - 4 -

a) La criminologie théorique générale Elle s intéresse aux aspects généraux de l étude du phénomène et du comportement délinquant entrepris dans une perspective théorique. Elle appréhende les aspects généraux de la délinquance en tant que faits de la société c est-à-dire les facteurs, caractéristiques et évolution de la criminalité générale et en second lieu les aspects généraux de la délinquance en tant que phénomène individuel, les processus de passage à l acte et les prédictions de la délinquance avenir. b) La criminologie théorique spéciale Elle s intéresse aux aspects spéciaux de l étude du phénomène et du comportement délinquant entrepris par la criminologie théorique. Dans cette perspective elle étudie d un point de vue empirique une infraction particulière ou un groupe d infractions spéciales correspondant aux divisions/aux notions du Droit pénal spécialisé. Ex : étudier la délinquance des meurtriers, des voleurs à mains armées, de la délinquance sur un terrain de football, de la délinquance dans le métro. Cette approche de la criminologie spéciale reste indépendante du Droit pénal spécial. Le criminologue n est pas alignée sur les distinctions du juriste. Pour le pénaliste le meurtre est une infraction utilitaire Pour le criminologue dans le meurtre c est le meurtrier qui l intéresse et le motifs qui l ont conduit au meurtre Le criminologue s intéresse non seulement aux délinquants, mais aussi aux déviants, qui ne sont pas pris en compte par le Droit pénal. c) La criminologie appliquée/concrète C est la branche de la criminologie qui a pour objet d appliquer les connaissances rassemblées et synthétisées par la criminologie théorique à la lutte contre la délinquance.

Cette criminologie comporte 3 branches : a) criminologie clinique Elle consiste dans l étude individuelle du délinquant à partir d une branche multidisciplinaire, dans le but de déterminer les mesures susceptibles de prévenir une récidive éventuelle. Il s agit donc de diagnostiquer son état dangereux de prognostiquer l évolution de ce dernier et d établir un programme de traitement permettant de rétablir l intégration sociale du délinquant. La notion fondamentale de la criminologie clinique est la notion d état dangereux ( stéréotype de dangerosité) Le premier a avoir synthétisé la criminologie clinique est Jean Prudel. b) criminologie de prévention Elle consiste à prévenir du crime à l échelon de la société ou d une collectivité. L intimidation générale par la menace d une peine ayant montré ses limites on cherche d autres moyens pour contenir les comportements délictuels. La criminologie préventive étudie les actions ponctuelles/coordonnées de la prévention collective des délinquants. Ex : les actions des conseils locaux de sécurité et de la prévention de la délinquance Raymond Gassel en a fait la synthèse c) criminologie critique Elle consiste dans la critique des institutions du droit positif à la lumière des enseignements de la criminologie théorique et propose de nouvelles constructions juridiques découlant des ces (r)enseigenements. A l origine les criminologues se sont livrés à des confrontations abstraites ayant débouchées sur des propositions de réforme. Aujourd hui ils essayent de procéder à des efforts de réforme concrets. - 6 -

Définition satisfaisante de criminologie : C est la science criminologue qui s efforce d expliquer, de décrire et de prévoir le phénomène du comportement délinquant dans leurs aspects généraux et spéciaux et qui grâce à une triple démarche, clinique, préventive et critique tente d appliquer les connaissances ainsi collectées à la lutte contre le crime afin de le contenir ou de le réduire. Cette définition prend soin de distinguer les dimensions théoriques et appliquées, les approches dites explicatives ou prédictives, les aspects collectifs et individuels de la délinquance et enfin les aspects généraux et spéciaux de la délinquance. Chapitre 2 Histoire de la criminologie Section 1 Le temps des précurseurs 1 Dans l Antiquité A la fin du 19 e siècle le mot criminologie fait son apparition. Or le problème du fait délinquant est antérieur à la création de ce mot. De grands penseurs de l antiquité ont déjà émis leurs visions sur la problématique. On allons en citer 2 : Platon et Aristote Dans l antiquité Platon considérait le crime comme le symptôme d une maladie de l âme ayant une triple source : la passion, la recherche du plaisir et l ignorance. Au plan de la réaction la peine est pour lui de la médecine morale et c est un bonheur pour le coupable de subir le châtiment car celui-ci le délivre de la méchanceté de son âme. Or il y a des criminels qui sont incurables. Alors la société doit les éliminer. Il faut une crainte salutaire pour ceux qui voudraient les imiter. Aristote voit les délinquants comme des être malfaisants qu il faut éliminer. Il prône des châtiments sévères. La peine est légitime par la nécessité de rétablir l équilibre détruit par l infraction. Quant aux causes du crime, il croit les trouver dans les caractères morphologiques du criminel, dans l origine, dans les habitudes et dans la misère. 2 Au Moyen-Âge Le Moyen-Âge est imprégné de la signature de St Thomas d Aquin. Celui-ci voit l origine de la plupart des crimes dans les passions humaines. Or il réserve une place

au rôle criminogène de la misère. Convaincu de devoir sauvegarder la partie saine du corps, il préconisait donc de supprimer la partie maladie du corps, d où son adhésion à la peine capitale. Il faut aussi souligner l importance de Beccaria et de Bentham qui envisagent la criminalité comme un phénomène social et psychologique. Pour Beccaria la délinquance est un phénomène sociale de la pauvreté. Voltaire est un précurseur de la sociologie pénale. Tous ces développements débouchent dans le Code Pénal de 1810 qui énonce une conception abstraite de la délinquance et du délit. C est la conception anthropologique d alors et déjà débordé par la réalité psycho-sociale. C est par réaction à cette conception qu est né la criminologie. Section 2 Le temps des fondateurs La criminologie est née conjointement des observations de Lombroso au niveau du fait individuel et de Quetelet et de Ferri au plan du fait collectif. Leurs théories donnent lieu à l exposé des développements criminologiques. Dans une conception anthropologique C. Lombroso tentait essentiellement de dégager un type morphologique de l homme criminel et de l expliquer par le déterminisme individuel. Il a eu des précurseurs phrénologistes (ex : Déporta) qui avaient étudiés les aspects du visage, la morphologie du corps d une côté et les caractères moraux et sociaux de l autre. La conception anthropologiste de Lombroso reposait sur l hypothèse qu il existait un type d homme criminel individualisé par un type d homme particulier, stigmatisé, étant une survivance dans la société évoluée du sauvage primitif. Elle devait donner lieu à la théorie du criminel né. Dans une perspective sociologique se situèrent les promoteurs de l école cartographique / géographique. Les travaux de Quetelet (belge) et de Géri (français) au milieu du 19 e siècle ont été rendus possibles par les publications des 1 ères statistiques criminelles françaises en 1824 ou 1825. Cette école a dressé des cartes indiquant les densités criminelles suivant les régions. Cit. Quetelet : «La société renferme en elle tous les germes criminels qu elle va commettre. L individu n est qu un instrument.» Par la suite d autres théories se développèrent dans cet axe criminologique : - les marxistes : la criminalité est un «sousproduit» du capitalisme comme les autres anomalies. Elle apparaît donc comme une réaction contre les injustices sociales ce qui explique qu on la trouve surtout dans le prolétariat. - Lacassagne a mis l accent sur l influence prépondérante sinon exclusive du milieu sociologique dans l étiologie criminel - 8 -

- Ecole de l imitation ou Ecole de l interpsychologie de Tarde : les rapports sociaux ne sont que des rapports interindividuels et ceux-ci sont régis par ce fait social fondamental qu est l imitation. Chez l individu, l imitation explique des fonction psychologiques telles que l habitude et la mémoire. Sur le plan des rapports sociaux, c est encore par le jeu de l imitation que s organise et se développe la vie sociale. - Ecole sociologique de Durkheim : le crime est un phénomène de sociologie normale puisqu il se manifeste dans toute société humaine, et il est même un facteur de santé publique. Cette conception le conduit à affirmer que la criminalité provient, non pas de causes exceptionnelles, mais de la structure même de la culture à laquelle elle appartient : d autre part, la criminalité doit être comprise et analysée non pas en elle-même, mais toujours relativement à une culture déterminée dans le temps et dans l espace. Dès les 1 er développements de la criminologie 2 explications différentes se montrent : anthropologiques de l un et sociologiques de l autre. H. Ferri a été le 1 er à tenter une synthèse entre ces 2 explications unilatérales. Son œuvre marque une étape importante dans la criminologie. Section 3 Le temps de Ferri Ferri était un juriste et un sociologue. C est probablement un des raisons pour lesquelles il a entrepris dans le domaine de la criminologie à une synthèse des données précédemment collectées. Une question fondamentale se situe dans son travail. C est de savoir pourquoi parmi un nombre d individus soumis aux mêmes conditions exogènes, sociales, ces individus et non tels autres deviennent délinquants ou criminels? En d autres termes Ferri admettait que si les conditions sociales au sens large constituent bien le bouillon de la criminalité, ces conditions ne peuvent pas à elles seules tout expliquer. C est dire que Ferri est le premier a soutenir que le délit est un fait complexe et qu il a des origines multiples tant biologiques, géographiques et sociologiques. Cela l amène à l observation que l infraction n a pas une cause unique. Il n y a pas un facteur du crime, mais plusieurs. Ferri les classe en plusieurs parties : - facteurs anthropologiques - facteurs physiques - facteurs sociaux La 2 e idée fondamentale de Ferri est que ces facteurs, si on les retrouve chez chaque délinquant, se combinent de manière différente selon les cas. Tantôt vont prédominer

les facteurs sociaux, tantôt vont prédominer les facteurs biologiques. Cette constatation débouche sur une classification des délinquants. Dans une 1 re catégorie prédominent les facteurs anthropologiques. Il y range les criminels nés et les criminels aliénés. Les criminels nés sont ceux qui présentent les caractéristiques du type criminel de Lombroso. Pour Ferri les criminels nés ne sont pas fatalement voués au crime, car des facteurs sociaux particulièrement favorables peuvent les prévenir. Les délinquants aliénés sont délinquants en raison d une anomalie mentale très grave ; mais ici encore, Ferri expose que le contexte social dans le évolue l individu n est pas indifférent à sa délinquance, ce qui expliquerait que parmi tous les individus atteints de la même affection mentale, tous ne deviennent pas délinquants. Dans une 2 catégorie prédominent les facteurs sociaux. Ferri y classe les délinquants d habitude, les délinquants d occasion, les criminels passionnels, ceux qui on connu des conditions sociales défavorables, ceux où la situation précriminelle joue un rôle. Dans chacune de ces 5 catégories tous les facteurs biologiques ou sociaux jouent un rôle. C est l importance de ces différents rôles qui varie selon les catégories. L œuvre de Ferri marque une étape importante dans l histoire de la criminologie, car c est la 1 re fois qu est accrédité l idée que la délinquance a des causes multiples (=cause multifonctionnelle de la criminalité) L œuvre de Ferri est le point d aboutissement des 1 res explications du fait délinquant et le point de départ de nouvelles observations situées dans la perspective étiologique. Section 4 Le temps de l étiologie criminelle Entre les 2 Guerres commence la période de l étiologie criminelle qui se traduit par un foisonnement de théories criminologiques. Or il y est difficile de déceler si la théorie essaye d expliquer le niveau macrocriminologique (niveau collectif) ou le niveau microcriminologique (niveau individuel) du fait délinquant. Ces explications se situent dans la perspective étiologique traditionnelle qui entend découvrir les causes de la délinquance. 1) Elles ont en commun de considérer que la criminologie est un fait multifactoriel. 2) Les criminologues modernes ont généralement compris que les actes délictueux, comme les autres conduites humaines, sont des comportements psychologiques et que par conséquent les divers stimuli de quelque nature qu ils oient que l on peut repérer à l origine de la délinquance, s impriment en quelque sorte dans le psychisme de l individu avant de s exprimer sous la forme du passage à l acte criminel. - 10 -

1. Point de vue analytique L explication criminologique a pris 3 directions essentielles : a. Théories bio-psychologiques L idée essentielle de ces interprétations consiste à assigner une base organique ou fonctionnelle à la délinquance, même si l on ne néglige pas pour autant l influence d autres facteurs, notamment des facteurs du milieu social, mais qui font seulement figure de facteurs secondaires. De nombreuses théories ont été développées à ce sujet. Les plus importantes sont notamment Théorie de l inadaptation biologique de Kinberg Théorie de la constitution délinquantielle de Di Tullio Théorie de l agressivité de Laborit b. Théories psycho-sociales Les théories psycho-sociales prétendent trouver l explication de la criminogénèse dans l environnement social, càd dans le milieu de vie ou les conditions de vie des délinquants. Elles ont l inconvénient de ne pas élucider la question si elles se trouvent au niveau individuel ou au niveau collectif. Les théories les plus importantes à ce sujet sont notamment Théorie marxiste-leniniste : la délinquance est un phénomène social qui trouve ses racines dans l inégalité des hommes, la concentration des richesses dans les mains de quelques-uns et la misère et la servitude des autres. Le crime est donc une expression particulière des la lutte des classes. Théorie écologique de Shaw : pour cette théorie ce sont les circonstances sociales et économiques d une zone géographique déterminée plutôt que la nature du groupe intéressé qui exercent une influence décisive sur le taux de la délinquance. Théorie de l association différentielle de Sutherland : il s efforce de préciser comment les individus sont devenu criminels et pourquoi les taux de criminalité varient suivant les nations. Théorie de l anomie de Merton : examen par rapport à l élucidation de la criminalité en tant que phénomène de masse. (anomie = état social caractérisé par l absence de norme ou tout au moins par leur affaiblissement caractérisé ; c est donc le contraire de la cohésion sociale) Théorie des conflits de culture et des sous-cultures délinquantes de Sellin : le crime résulte du choc qui se produit dans une même société entre des normes de conduite différentes. c. Théories psycho-orales D autres criminologues se sont attachés à étudier la structure de la mentalité criminelle, de la formation de celle-ci et des traits qui la caractérisent. Ils

considèrent que si le biologique et le social exerce une influence, c est qu ils structurent la mentalité criminelle. Dans cette approche théorique entrent aussi les théories psychanalitiques, la théorie de la personnalité criminelle de Pinatel, la théorie de la dissociativité de Mucchielli et la théorie phénoménologique. 2. Point de vue synthétique Quelques rares auteurs ont essayé de promouvoir une explication mulitfactorialiste refusant de privilégier tel ou tel facteur. Logiquement si c est la thèse mulifactorialistes quoi doit l emporter c est dans cette direction qu il faut se situer. C est le recours à l informatique qui rend possible ce type de recherche. Théorie des causalités multiples des Glueck : la causalité de la délinquance n est ni exclusiement biologique, ni exclusivement socio-culturelle, mais elle dérive de l interaction de certaines forces somatiques, intellectuelles, socio-culturelles ou tenant au caractère des sujets. Théorie de l aliénation sociale de Jeffery Théorie de la sous-culture de violence de Wolfgang et Ferracuti Bref les théories criminologiques ne manquant pas. De plus que dans la 2 e moitié du 20 e siècle d autres théories sont émises avec un changement de perspective. Section 5 Le temps de la criminologie contemporaine A ce stade des développements de la criminologie, les explications proposées n étaient pas tout à fait convaincantes. S est imposée l idée que l on n arriverait jamais à découvrir les causes de la criminalité. Les chercheurs on pris de nouvelles orientations. Il y en a 3. Dans les années 50 est apparu la théorie de la dynamie criminelle (= th. du passage à l acte). Jusqu alors les chercheurs voulaient savoir le pourquoi. A partir d une certaine date l appréciation criminologique se déplace. On passe du pourquoi au comment et plus précisément sur l épisode du passage à l acte. Les concepts de processus ou de mécanismes deviennent essentiels. Ex : Par quelles étapes psycho-criminologiques le criminel passe avant de passe à l acte? On met l accent sur la personnalité au moment de l acte et sur la situation précriminelle (=pers. du criminel juste avant la commission de l infraction). On met l accent sur le rôle de la victime. On passe donc de la criminologie statique à la criminologie dynamique. Dans ces développements-ci il faut particulièrement souligner les travaux de De Greeff et de Matza. - 12 -

A partir des années 60 une autre orientation s est affirmée. C est la criminologie de l action sociale centrée sur l administration de la justice pénale. A la suite de Pinatel on peut distinguer 3 tendances. 1) tendance organisationnelle : elle étudie la justice pénale dans son sens large (organisation et fonctionnement ; coûts et rapports entre les coûts et les résultats). 2) tendance interactionniste (Labyrinth Théorie) : la délinquance est une étiquette imprimée sur les individus. Elle s intéresse aux mécanismes de la réaction sociale qui crée la condition sociale du délinquant, celle qui inflige les stigmates sociaux au délinquant. La justice sociale est étudié comme une agence de la stigmatisation sociale. Ex : Becker, Le Mert, Shackmann, Erikson 3) tendance gauchiste : elle met l accent sur le fait que les mécanismes policiers et judiciaires jouent au détriment des classes socialement défavorisées. C est un sorte d anti-criminologie. Ex : Taylor, Walton, Yung Au-delà de ces différences criminologiques, la criminologie de la réaction sociale pose un problème de fond en ce sens qu on peut se demander s il s agit véritablement d une criminologie. Les questions que ces criminologues se posent sont différentes de la question fondamentale de la criminologie. Ce n est plus de la criminologie, mais de la sociologie pénale. Certains aspects peuvent quand même être retenus : Ex : si l étiquetage des mesures de police peut jouer sur la récidive, c est un aspect qui peut être pris en compte en criminologie Si la justice est plus favorable aux riches qu aux pauvres cela n a pas d impact en criminologie. 3. Criminologie Victimologie Dans les années 70 l axe de la victime est devenu un objet d études majeur. Cela a débouché sur des réformes législatives incorporant la victime de plus en plus dans le processus de la poursuite judiciaire du délinquant. Certes des efforts doivent encore être faits en la matière, mais la victime ne peut jamais s attendre à une réparation absolue. En gros la situation de la victime s est amélioré depuis les réformes. Ex : victime est devenu une partie intégrante du drame criminel. Au terme de ce chapitre on est étonné de voir le grand nombre d explication proposées. Si il y a tant d explications c est que le fait criminel est une réalité complexe et donc très difficile à appréhender. Sans doute ne faut-il pas percevoir ces explications comme de véritables théories, mais plutôt comme des repères qui ont permis de défricher le terrain. Si la complexité du phénomène fait délinquant explique la diversité des théories, elle explique aussi la diversité des méthodes.

Chapitre 3 La méthode de la criminologie Le but des criminologues est certes de parvenir à appréhender le phénomène délinquant, mais pour y parvenir il faut utiliser certaines méthodes. Les criminologues suivent certaines approches, concepts, règles. Section 1 Techniques utilisées Que la criminologie soit théorique ou appliquée les chercheurs utilisent dans la conduite de leurs travaux divers instruments ou techniques. Il est possible de les distinguer selon qu ils prétendent saisir le phénomène délinquant au niveau collectif ou au niveau individuel. 1 Les procédés d appréhension du phénomène délinquant Puisqu il s agit de l aspect collectif de la délinquance, on a à faire ici à des techniques quantitatives. Il existe cependant une distinction entre les procédés classiques et les procédés contemporains. 1. Procédés classiques Si l on néglige les sociétés archaïques et préhistoriques, la connaissance de la criminalité s est fait à partir de documents historiques et de documents statistiques. a. Documents historiques L exploitation des documents historiques est impérative pour les périodes de l Histoire antérieures aux documents statistiques (à partir de 1825). Ils restent intéressants à étudier pour les périodes plus récentes afin de compléter les données fournies par les statistiques. Les données historiques sont essentiellement les archives policières, judiciaires, et pénitentiaires. Elles sont essentielles pour l historien, mais le problème est que ces documents historiques se dégradent, de perdent ou soient détruits. b. Documents statistiques D une manière générale depuis le 19 e siècle les documents statistiques ont constitué la technique de reconnaissance de la criminalité. Elles demeurent un outil incontournable pour l étude du phénomène délinquant. b.1. Diverses statistiques criminelles b.1.1 Au plan national Les documents statistiques peuvent être d une grande variété. En effet c est chaque étape de la réaction sociale qui peut faire l objet de mesures quantitatives et on peut aboutir à des statistiques judiciaires, - 14 -

policières, et pénitentiaires. En réalité tous les pays n offrent pas tout cet éventail statistique. Ex : USA : au niveau fédéral les statistiques criminelles sont insuffisantes. C est en France que les statistiques ont l air d être les plus complètes. C est à cause de l œuvre centralisatrice du pays. Dans les meilleures des hypothèses elle est de trois ordres. 1) statistiques policières : rendent compte de la criminalité apparente càd du nombre d infractions portées à la connaissance de la police à savoir les infractions constatées et les infraction dénoncées. En France le document policier ne remonte qu à 1972. Auparavant il y avait quelques documents établis, mais ceux-ci étaient d accès difficile. Ils offrent des indications sur des affaires traitées et réussies. Les statistiques policières ne sont pas traitées par tous les pays, mais bon nombre communiquent leurs données à Interpol. 2) statistiques judiciaires : elles rendent compte de la criminalité légale. Elle ne concerne que le niveau judiciaire. Il s agit du nombre des affaires dont les instances judiciaires ont eu à connaître et sur lesquelles diverses décisions ont été prises. Ex : classements sans suite (Parquet) Non lieu Acquittement ou relaxe (jgmt) En France le Ministère de la Justice a publié le compte général de la justice à partir de 1827. Il a disparu en 1878 parce qu il mettait trop de temps à paraître. Il a été remplacé par l annuaire statistique de la justice (œuvre moins complète que la précédente) 3) statistiques pénitentiaires : elles informent sur les aspects quantitatifs, qualitatifs et évolutifs des effectifs des populations confiées aux établissements pénitentiaires. b.1.2. Au plan international Il n y a que les quelques statistiques publiées par Interpol depuis les années 1950. Elles indiquent pour un nombre de pays variant selon les époques le nombre d affaires portées à la connaissance de la police et le nombre d actes délinquants relevées par celle-ci.

b.2. La valeur des statistiques b.2.1. Au niveau national Les différents documents publiés présentent de nombreuses imperfections surtout les statistiques policières et judiciaires. Ex : dans les statistiques policières ne figurent pas les contraventions, ni les infractions au code de la route, ni les infractions d imprévoyance. D autres sont sous-évaluées comme la délinquance des affaires. En 2 e lieu, il reste à apporter des amélioration sensibles. Or la technique statistique ne peut pas prétendre mesurer correctement la criminalité parce que les statistiques criminelles ne mesurent pas la criminalité réelle, càd la somme des infractions effectivement commises. Cela est évident pour les statistiques judiciaires ou pénitentiaires. Les statistiques pénitentiaires sont utilisées en pénologie. Les statistiques judiciaires sont utilisées en sociologie de la justice pénale. L observation est vrai aussi pour les statistiques policières. Bien qu elles se rapprochent de la réalité criminelle, elles en restent encore fort éloignées. Elles restent séparées par le chiffre noir de la criminalité qui est la différence entre la criminalité réelle et la criminalité apparente. Or les décalages introduits par l existence de ce chiffre noir sont importants et variables selon la nature de l infraction. Malgré les inconvénients et faute de mieux ce sont les statistiques policières qui sont utilisées en criminologie lorsqu il s agit d appréhender les aspects collectifs de la délinquance. Grâce à elles on peut avoir une idée sur les différents aspects de la criminalité. La France dispose d un arsenal statistique conséquent. Or on peut se demander si, plutôt que de fournir des indications sur la délinquance, les statistiques ne sont pas la mesure de la réactivité de la réaction sociale. Ce sont en effet d excellent indicateurs du processus pénal. b.2.2 Au niveau international On y rencontre des obstacles considérables quasiment impossibles à surmonter. Il y a des pays qui refusent de communiquer leurs statistiques. Les qualifications varient d un pays à l autre. De même que la qualité des statistiques varie considérablement d un pays à l autre. Malgré ces réserves, il reste que les statistiques sont l instrument privilégié de la connaissance de la criminalité du moins apparente et judiciaire. En raison même de leur limites les criminologues ont ressenti la nécessité d élaborer d autres procédés pour compléter leur utilisation, d où l élaboration de nouvelles techniques. - 16 -

2. Les Procédés contemporains (Techniques de substitution) Les techniques inaugurées par les chercheurs sont de 2 sortes. On rencontre d une part les techniques socio-criminologiques et de l autre les procédés économicocriminologiques. A. Procédés socio-criminologiques On peut les présenter en 2 catégories. Ils ont porté sur les 2 protagonistes du droit criminel : le délinquant et la victime. Il s agit d enquêter auprès d une échantillon de la population des délinquants et auprès de la population des victimes. a.1. Enquêtes d autoconfession Cette technique est utilisée depuis les années 60. Elle consiste à interroger un groupe de personnes sur leur délinquance cachée, càd leur demander si elles ont commis des infractions. Elles reposent donc sur des aveux des délinquants et l on constate que leur objectif est d approcher le chiffre noir de la délinquance. A l encontre de cette technique on a mis en doute la volonté des personnes interrogées de dévoiler l ensemble de leurs activités antisociales. De la possibilité d utiliser cette technique à l égard de délinquants criminels ou de délinquants en col blanc paraît très relative. En fait l expérience a montré que lorsqu elles sont convenablement mises en œuvre ces techniques mesurent correctement la délinquance cachée et permet un meilleur connaissance du phénomène criminel. Elle complète donc les statistiques. Elles est particulièrement utilisée en matière de délinquance juvénile. Elle parvient difficilement à être généralisée. a.2. Enquêtes de victimation Depuis les années 70 les criminologues ont suivi une 2 e orientation et se sont intéressés à la victime. Les enquêtes de victimation ont vu le jour à cette époque et si elles se sont limitées à étudier le fait de la victime, elles ont ajouté à leur préoccupation la peur d être victime a.2.1 Le fait de la victime Ce 1 er objet d études est l essentiel de l enquête de la victimation. On interroge un échantillon représentatif de la population et on leur demande quelles sont les infractions dont elles ont été victimes.

Cette technique repose sur des témoignages. Le but est d aller au-delà des statistiques criminelles afin de pouvoir percer le chiffre noir. L apport de cette technique est qu elles apporte de nombreuses contributions à la connaissance du fait délinquant. Elle permet de connaître avec une certaine précision le nombre d infractions commises chaque année dans un pays déterminé et d appréhender le chiffre noir des comportements antisociaux. Elle permet de se faire une idée sur les raisons qui expliquent la dénonciation ou la non-dénonciation par la victime. Elle permet de déterminer pour telle infraction le risque de victimation pour telle catégorie de la population. Elle permet de comparer ces risques avec d autres risques de la vie sociale. Elle permet de déboucher sur des propositions de politique criminelle pour faire en sorte que la victime soit mieux indemnisée. Il n est pas étonnant que dans les pays industrialisés ce type de recherche se soit développé et même ces recherches peuvent être répétées de sorte qu on a des données sérielles, qu on voit l évolution de la victimation. Les enquêtes de victimation sont plus faciles à mener que des enquêtes d autoconfession. Ce type d enquête a besoin d une période de référence courte, d un échantillon représentatif de la population. Ces enquêtes sont riches d enseignements et ont un certain avenir. Elles ont aussi élargi leur champ d études. a.2.2. Sentiment d insécurité / Peur de victimation Déf : C est une peur diffuse qu en tant que membre de la population on soit victime d un agression. 1. L intérêt des recherches du sentiment d insécurité ne fait aucun doute, car elle permet une meilleure connaissance des aspects de la délinquance. Il peut y avoir un fossé entre le sentiment et la réalité de l insécurité. Cette connaissance permet de définir un seuil de tolérance susceptible de mesurer le degré de dénonciations. 2. La mise en œuvre des travaux de ce type suppose aussi le respect des méthodes. Ex : sondages par questionnaires, enquêtes des systèmes de sécurité, emploi des travaux d assurances, place des média. - 18 -

B. Procédés économico-criminologiques Il y a un domaine de la délinquance qui pose problème : c est celui de la délinquance au col blanc. Pour essayer d appréhender l importance de cette délinquance on a forgé de nouveaux outils. C est l enquête économico-criminologique : on cherche à évaluer financièrement les différents aspects du processus pénal, càd à déterminer les coûts des différents crimes. L intérêt de ces recherches est indéniable puisque les statistiques criminelles et les techniques de substitution sont inefficaces pour appréhender cette délinquance. 2 Procédés d appréhension du comportement délinquant A. Procédés quantitatifs Au niveau quantitatif certaines démarches visent soit à expliquer soit à prévenir les comportements délinquants. 1. Dans les procédés de recherches explicatives il s agit de l élaboration par le criminologue des statistiques portant sur les criminels, permettant de dégager des données mises en évidence par l étude individuelle et d en extraire des pourcentages et de corrélations. C est dire qu il s agit ici d étudier le comportement délinquant individuel. Comment faire? On choisit un échantillon de délinquants. On étudie les aspects de leur personnalité et de leurs milieu social. On généralise les résultats obtenus à propos de cette catégorie représentative à l ensemble des criminels du même type. C est par l utilisation de cette méthode que l on prétend découvrir les facteurs de la délinquance individuelle. La question de la fiabilité des résultats se trouve posée, car il faut que des précautions méthodiques soient prises. Il ne suffit pas qu il y ait représentativité. Il faut qu à partir des groupes étudiés il faut des groupes contrôles formés de personnes non-délinquantes ou de délinquants appartenant à d autres catégories. Les délinquants observés n doivent pas uniquement être des détenus, mais aussi des délinquants non incarcérés. C est lorsque ces précautions élémentaires sont respectées que l on peut faire confiance au résultat obtenu. En France, pendant ¾ de siècle les enquêtes menées n ont pas respectées ces 2 dernières précautions si bien que les résultats de ces enquêtes peuvent être contestés.

2. Procédés de recherche prédictive 1. Chaînes de pronostiques de l école allemande 2. Tables de prédictions de l école américaine Ces enquêtes sont élaborées à partir d études individuelles et sont dans les prolongements des travaux précédents. C est l optique qui diffère, car ici on entend prédire le comportement social futur et le risque de récidive. L utilité de ces techniques ne fait pas de doute, car leur mise en œuvre équivaut à une expérimentation criminologique. B. Techniques qualitatives 1. Etudes individuelles de cas Soit on s intéresse au passé criminel du délinquant (biographie) soit on s intéresse au son avenir (étude de suivi de cas) Quant aux biographies, il s agit d examiner d un manière exhaustive toutes les manières d une situation déterminée, en retraçant l histoire du sujet et de son acte. On analyse systématiquement la carrière de certains délinquants afin de découvrir le rôle des divers facteurs individuels ou sociaux. Dans ce but le biographe s entretient personnellement avec le délinquant, se réfère à ses écrits éventuels, questionne son entourage et consulte le dossier pénal du sujet. On observera que ces biographies reposent sur les témoignages des sujets. Quant aux études suivis de cas il s agit de vérifier ce que sont devenus les sujets examinés. L idée sous-jacente est de savoir quelle est l efficacité de la réaction sociale. Le fait de contrôler la carrière ultérieure des délinquants est bien, mais reste la question : à qui attribuer leur comportement futur? à l effet bon ou nocif de l appareil répressif? ou bien à d autres facteurs? 2. Observation systématique des délinquants C est une méthode qui intéresse la criminologie clinique, car il s agit de recourir à l examen clinique des délinquants. Celui-ci consiste en l étude individuelle d un cas particulier à partir de toutes les ressources proposées par les disciplines modernes. - examen médical - examen anatomique - examen pathologique - examen physiologique - examen psychologique - examen psychiatrique, etc - 20 -

Le problème c est que cette observation ne peut qu être pratiquée sur les détenus. Elle permet de mieux connaître la personnalité des personnes concernées. A ce titre ces examens participent utilement à la construction d une donnée ciminologique. En conclusion on s aperçoit que les criminologues ont à leur disposition un arsenal de procédés très diversifié pour appréhender le phénomène de la délinquance. Tout en utilisant ces techniques, le chercheur adopte un certain type d approche, d où la question suivante : Quelles sont les approche qu on rencontre en criminologie? Section 2 Les approches suivies en criminologie La recherche criminologique n a jamais privilégié un mode particulier de recherche scientifique. Des approches divers et différentes ont été adoptées pas les chercheurs et ce aussi bien en criminologie théorique qu en criminologie appliquée. 1 Approche suivies en criminologie théorique On peut opposer ces approches qui ont une grande variété de critères. Il faut distinguer entre une approche pluridisciplinaire et une approche interactive 1. Approche pluridisciplinaire A l origine les criminologues ont appréhendé le phénomène et le comportement délinquant par divers versants scientifiques. Il se sont penchés sur le problème de la délinquance chacun selon ses compétences. Cela a débouché sur des théories biologiques, psychologiques, sociologiques unilatérales ce qui fit apparaître que c était insuffisant lorsque la thèse multifactorielle s impose. Alors les chercheurs essayaient d adopter une thèse interdisciplinaire ou interactive. Les recherches contemporaines s efforcent de faire une recherche intégrée avec la subordination des aspects biologiques et sociologiques à l aspect psychologique. 2. Approche explicative et prédictive Le 1 er effort a consisté à expliquer le phénomène et le comportement délinquant. C est de cette époque que date l essentiel de leurs travaux pour découvrir les facteurs de la criminalité générale et les facteurs de la délinquance individuelle. Ultérieurement certains d entre eux ont tenté de faire des prévisions aussi bien pour la criminalité générale future que pour la délinquance individuelle avenir. Ce qui est fort intéressant pour le statut scientifique de la

criminologie qu elle puisse prévoir les variations ultérieures de la criminologie et les comportements futurs des criminels. 3. Approche transversale et Approche longitudinale L approche transversale consiste à étudier soit des groupes différents (délinquants et non-délinquants) à la même époque soit les caractéristiques des personnalités des criminels (infracteurs) à un moment donné de leur évolution. Cette démarche transversale est essentiellement évaluative en ce sens qu elle a été élaborée pour dégager les différences entre les groupes et les individus. Elle a l inconvénient de ne pas prendre en compte l idée de durée que symbolise le concept de processus. Pour cette raison certaines recherches se sont situées dans une approche longitudinale. Elle consiste à étudier les mêmes groupes de délinquants ou de non-délinquants à des époques différentes et à suivre les individus observés dans leur évolution pour les étudier à des dates différentes. Ainsi on introduit l étude de la dimension temporelle du phénomène dans la recherche. 4. Approche analytique et Approche systémique A l origine on s est contenté d analyser l effet de chaque facteur sans se soucier de ses rapports avec les autres. C est biensûr cette approche qui domine dans des travaux sur les facteurs de la criminalité générale comme dans ceux relatifs à la délinquance individuelle. Or si l on veut avoir une vision satisfaisante de la causalité en criminologie il conviendrait de s intéresser aussi aux relations qui se nouent entre facteurs. Il faudrait étudier les interactions entre facteurs. Cette 2 e approche est dite systémique, car les interactions étudiées aboutissant à un système intégré. 2 Approches suivies en criminologie appliquée Plusieurs distinctions doivent être faites. 1. Approche évaluative et Approche modificative Avec l approche évolutive il s agit de s interroger sur la valeur scientifique des mesures de lutte contre la délinquance. Elle peut porter soit sur l évaluation des traitements appliqués aux délinquants sur l évaluation des programmes de prévention de la criminalité soit encore sur l évaluation de l action des institutions pénales. L approche modificative a pour finalité de déboucher sur des propositions de modifications des mesures de luette contre la délinquance. Autrement dit l évaluation débouche alors sur les propositions concrètes de modification. - 22 -

2. Approche passive et Approche active Pendant très longtemps les chercheurs eurent pour unique ambition de toujours mieux connaître le phénomène et le comportement délinquant. Par la suite ils prétendent influencer l action des praticiens, des intervenants à la réaction sociale. Autrement dit la recherche devient engagée sur l action, dans l action, et par l action. Il s agit de produire de l information nouvelle, mais aussi de changement social.. 3. Approche transversale et Approche longitudinale (traité au paragraphe précédent) Section 3 Concepts élaborés Divers concepts opérationnels aident le criminologue dans son travail. On peut les distinguer selon qu ils sont d ordre descriptif ou d ordre interprétatif 1 Concepts opératoires d ordre descriptif De façon très schématique on peut dire que l infraction est la réponse d une personnalité donnée à une situation donnée. Il se trouve que cette simple phrase met en jeu un certain nombre de concepts. D un côté il y a la situation précriminelle plongée dans un milieu. a. Le concept de milieu est très souvent utilisé en criminologie. Quelles significations lui donner? Au sens banal du terme c est le monde environnant. En criminologie ce monde environnant c est le monde physique, géographique et ensuite c est le milieu social. Ce milieu social se subdivise lui-même en milieu général ou médiat englobant toutes les circonstances générales produisant des influences communes à tous les citoyens d un pays (ex : urbanisme) et un milieu personnel ou immédiat qui comprend l entourage de l individu lequel produit des influences spécifiques sur ce dernier (ex : milieu familial) Pour les criminologues d une part le milieu n est pas un élément statique, mais dynamique en interaction constante avec l individu et qui se modifie avec lui autant qu il le modifie. D autre part le milieu et constitué non seulement par les conditions objectives qu il présente, mais encore par la signification subjective que l individu lui a attribué, càd la façon dont il a vécu ce milieu objectif. C est dans ce milieu que baigne la situation préciminelle.

b. La situation précriminelle est la situation à laquelle est confronté le délinquant au moment de la commission de l infraction ( = sit. paracriminelle). C est en quelque sorte la situation à l instant T. Le concept présente un aspect objectif et un aspect subjectif. Il y a tout d abord une réalité objective (ex : présence d une arme et attitude de la victime). Cette réalité objective est vécu subjectivement par l intéressé. Le fait qu il y ait une arme n entraîne pas le meurtre, il faut que la situation soit vécue d une certaine façon par le criminel. D un autre côté il y a la personnalité. La personnalité est un terrain physiologique a. Le concept de terrain peut être précisé par paliers. a.1. a.2. a.3. a.4. a.5. A la base il y a l héréditaire. Autrement dit la contribution parentale prévisible. Si l on ajoute à l héréditaire la mutation et al ségrégation on obtient l inné. Le caryotype est déterminé au moment de la conception, au moment de la division chromosomique. Les abérations chromosomiques sont innées. Si l on ajoute à l inné les acquis utéraux on obtient le congénital. Une malformation due à un développement fâcheux de l embryon est un malformation congénitale. Si l on ajoute à tout cela ce qui est acquis in utero on obtient le constitutionnel. Une malformation du bébé qui est en relation avec l état physiologique de la mère et d ordre constitutionnel. Si l on ajoute au constitutionnel l apport des divers et fort nombreuses influences physiques ou psychiques subies tout au long de l existence on obtient le terrain. Ex : perte d un membre au cours d un accident de la route. Le schéma corporel change. Le terrain est ambivalent. D une part il présent une certaine permanence vu les données congénitales et constitutionnelles. Ce terrain change et évolue de l autre. Ex : vieillissement, Ce terrain est d ordre biologique. b. Le concept de personnalité a fait l objet de définitions fort différentes, car chaque discipline l a considérée selon sa propre optique. Pour les anthropologues la personnalité est synonyme d individualité physique et psychologique. C est la somme des caractéristiques de la personne. - 24 -