Chap. 3 L AFRIQUE A LA VEILLE DE LA POUSSEE IMPERIALISTE OU L AFRIQUE AU XIXe SIECLE



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Transcription:

Chap. 3 L AFRIQUE A LA VEILLE DE LA POUSSEE IMPERIALISTE OU L AFRIQUE AU XIXe SIECLE - Présenter l environnement climatique et humain au XIXe siècle ; - Ressortir l impact de la traite négrière ; - Dresser le panorama politique et économique de l Afrique au XIXe siècle. IN TRODUCTION Le XIXe siècle a toujours été associé à la révolution industrielle, au capitalisme triomphant et à l impérialisme. Cet impérialisme s est notamment exercé sur l Afrique, continent sur lequel les européens portaient un regard condescendant (dédaigneux), proche de la négation. Pourtant le XIXe siècle a été aussi marqué par une histoire africaine dont il convient de brosser un tableau général. Tout en le faisant nous nous attèlerons à déceler les éléments qui ont préparé la domination du continent par l Europe. I- L ENVIRONNEMENT CLIMATIQUE ET HUMAIN Il s agit ici d examiner les variations climatiques et démographiques qui ont marqué l Afrique au XIXe siècle et de savoir en quoi ces données ont soutenu une certaine croissance ou préparé la domination du continent. A- Les variations pluviométriques et leurs conséquences Le XIXe siècle fut marqué par de nombreux accidents climatiques. En Afrique australe par exemple la sécheresse fut sévère entre 1800 et 1803, dans les années 20 et vers la fin du siècle. C est donc entre les années 1830 et 1870 que les accidents climatiques furent assez espacés pour permettre aux populations de s en relever. Aux calamités climatiques à répétition étaient associés les faits suivants : - Les mouvements et regroupements de populations, - La recrudescence épidémique (variole, rougeole, fièvre, dysenterie, etc.) - Les épizooties (peste bovine en Ethiopie ) - L anthropophagie - Les invasions de sauterelles Ces mauvaises années furent tout aussi nombreuses en Afrique du Nord au climat méditerranéen, malgré une abondance de pluies vers la fin du siècle. (Etait-il possible dans ce contexte d asseoir le développement?). Toutes ces calamités eurent des conséquences fâcheuses sur les populations. B- L environnement humain - Croissance et régression de la population Les estimations de la population étaient de l ordre de 90 à 100 millions de personnes vers la fin du XVIIe siècle. C est ce niveau qui fut également atteint vers la fin du XIXe siècle. En effet, cette stagnation des effectifs de population est d abord attribuée à la traite négrière

(entre les 17 e et 19 e siècles) qui fut synonyme de régression de la population. Cependant en Afrique australe, l essor démographique fut plus vigoureux au début du XIXe siècle parce que la traite aurait été moins développée. Au Nigéria actuel (pays Ibo), on observait une reprise nette de la démographie en 1840, bien que ce fût une région de forte traite. Ce phénomène semble se justifier par la culture du manioc 1 (symbole d abondante pluviométrie). Néanmoins on assista à une relative augmentation de la population africaine qui atteignit 120 ou 150 millions de personnes vers les années 1860-1880. A l opposé, la population européenne était en pleine croissance à la suite des progrès de la médecine et de la révolution agricole. - Situation sanitaire et épidémiologique Au XIXe siècle, l Afrique orientale, du centre et de l Ouest ont souffert, plus que toutes les autres régions des épidémies. Aux maladies très anciennes comme la maladie du sommeil et la peste (Afrique du Nord), s ajoutent le choléra à partir de 1836, la variole importée de l Inde, des maladies vénériennes apportées par les arabes. Toutes ces maladies connaitront leur expansion maximale avec le début de la pénétration coloniale. La maladie du sommeil, quant à elle, gagne du terrain et se répand dans toute l Afrique orientale du fait des raids négriers et de l avancée du déboisement. La variole, qui sévit sur l ensemble du continent, commet ses plus grands ravages dans la seconde moitié du XIXe siècle. Les épizooties, non moins nombreuses, ont un lien direct avec les épisodes de famine, surtout dans les zones d élevage. La pneumonie bovine par exemple, introduite en Afrique du Sud en 1853, gagne rapidement le reste du continent. Plus sérieuse fut la peste bovine, importée de Russie en 1860 et qui décima à plusieurs reprises le cheptel d Afrique durant le dernier quart de siècle. - Afflux des étrangers C est dans les colonies de peuplement ou les régions économiquement prospères que l on observât les arrivées massives d étrangers au XIXe siècle. En Algérie par exemple, les Français passent de moins de 8000 en 1833 à plus de 50 000 en 1901. La population blanche de la colonie du Cap en Afrique du Sud s est également accrue tout au long du siècle passant de 2000 en 1798 à 74000 en 1840. Avec la découverte du diamant en 1867 et de l or en 1886, le flux va s accélérer pour atteindre 24000 individus par an, si bien qu en 1890, l Afrique du sud compte environ 750 000 européens de souche néerlandaise, française, anglaise, allemande. Dans les autres colonies (d exploitation), la représentation européenne fut assez faible (Congo avec le bois, le Ghana avec l or). Mais au total, l Afrique dans son ensemble accueillit environ 1 500 000 européens au XIXe siècle. A ces immigrants de souche européenne, il faut ajouter les indiens et las arabes importés à partir de 1860 pour des travaux 1 Autre explication : au début du XIXe siècle, malgré l abolition de la traite, la production d esclaves continua un moment. A partir de 1820, une bonne partie du stock d esclaves ainsi produits resta sur place, et se destina à des tâches productives locales telles que la cueillette des noix de cola notamment sur les côtes dahoméennes et nigérianes, la chasse à l éléphant, la guerre, la production artisanale. Leur nombre et leur rentabilité contribuèrent à l essor urbain en zones côtières et, plus particulièrement à l expansion Ibo.

divers et qui n excédaient pas 20 000 individus. Cette présence des européens en Afrique allait être un prétexte invoqué pour occuper l Afrique. II- L IMPACT DE LA TRAITE NEGRIERE La traite négrière a perturbé en Afrique les ensembles commerciaux et politiques existants ou en cours de formation (disparition du grand commerce transsaharien et des grands empires), et a modifié les systèmes économiques et religieux (économie de traite, introduction du christianisme). En Afrique occidentale et centrale plus précisément, lorsque l importance économique des États de la savane décline, les États de la côte prospèrent et augmentent leur puissance. Des conflits surgissent bientôt entre les peuples côtiers pour le contrôle des routes commerciales. Au cours des quatre siècles du commerce des esclaves, des millions d Africains sont victimes de ce trafic de vies humaines. La plupart sont capturés par d autres Africains et échangés contre différents biens de consommation. Qu elle fût Atlantique, méditerranéenne ou orientale, la traite négrière a nourri des ressentiments 2 chez certains peuples d Afrique. Ceci a joué en faveur de la colonisation, puisqu au lieu d unir leurs efforts pour combattre l ennemi européen, certains peuples africains se sont parfois unis aux colons pour venir à bout de la résistance d autres peuples africains. III- PANORAMA POLITIQUE DE L AFRIQUE AU XIXe SIECLE : L IMMOBILISME Le monde africain, immense et divers, semble fort peu changer au cours des siècles ; il suit une tradition très forte. Il diffère ainsi complètement de l Europe occidentale et de l Amérique, qui, liées par les mêmes langues, la même religion, la même culture, le même désir de progrès technique, opèrent une véritable mutation. A- L islam politique et tentatives d intégration Au VIIe siècle, dix ans après la mort de Mahomet (lequel meurt en 632), les armées musulmanes envahissent l Afrique et viennent à bout de la résistance byzantine Les Arabes soumettent ensuite les États berbères de l ouest, atteignent l Atlantique, puis s établissent sur la péninsule Ibérique (VIII e siècle). De nombreux groupes berbères, retranchés dans le massif de l Atlas et au-delà du Sahara, résistent à la mainmise des conquérants musulmans. Pour leur part, les populations urbaines de la côte nord-africaine (christianisées superficiellement par les Byzantins) embrassent l islam. Les minorités arabes, s appuyant sur ces convertis, établissent des principautés en Algérie et au Maroc, créant de l Indus à l Atlantique un grand ensemble commercial dans lequel les marchands peuvent circuler et échanger leurs produits en toute liberté grâce à une monnaie d or, le dinar. La logique pousse ces derniers à développer le commerce transsaharien pour accéder au royaume du Ghana, qui a établi sa notoriété sur l exploitation des mines d or du Haut-Sénégal-Niger. Au Soudan oriental, les États chrétiens sont conquis ; seul le royaume chrétien de Nobatia est assez fort pour imposer un traité lui garantissant l indépendance (qu il conserve pendant six 2 Rancune tenace associée à un désir de vengeance Synonyme: rancune Synonyme: rancœur Exemple : il éprouve un terrible ressentiment

siècles). Le long de la côte orientale, les commerçants arabes de Mascate et d Oman, prenant la suite des commerçants indiens du Gujarat, fondent des comptoirs (VIII e siècle), qui connaissent la prospérité et la paix jusqu à l arrivée de Vasco de Gama, au début du XVI e siècle. Le commerce transsaharien s établit à partir du VIII e siècle. Les caravaniers musulmans propagent les valeurs politiques, religieuses et sociales de l islam, mais ont peu de prise sur les populations noires animistes jusqu à l arrivée des Almoravides, qui entreprennent de mettre la main sur le commerce de l or et d islamiser la région par la force en lançant une guerre sainte contre les païens (XI e siècle). Plusieurs dynasties musulmanes se développent en Afrique du Nord (Almoravides, Almohades, Idrissides, Fatimides en Tunisie puis en Égypte). Au XIV e siècle, le Soudan chrétien est débordé par les armées des Mamelouks d Égypte. B- L immobilisme des «Régences d Afrique du Nord» Les Turcs ottomans conquièrent l Égypte en 1517 et, en l espace de cinquante ans, établissent un contrôle nominal sur la côte nord-africaine. Ainsi, tous les pays d Afrique méditerranéenne- excepté le Maroc- sont sous la domination turque sous le nom de «Régences turques». Mais les fonctionnaires de la Sublime Porte-pachas, deys, beys- se comportent en petits princes indépendants et avides, plus soucieux de maintenir leur dynastie au pouvoir que du prestige du sultan et surtout du bonheur des peuples, qu ils gouvernent et considèrent comme des vaincus. Les liens effectifs de subordination se distendent de plus en plus entre les régences (Egypte, Lybie, Tunis, Alger) et le gouvernement turc devient trop faible pour imposer son autorité à ses vassaux. Ainsi se présentent les gouvernants des régences turques aux 18 e et 19 e siècles. Cela entraîne fréquemment des guerres intestines dont le petit peuple fait les frais. Les princes, aveuglés par leur ambition et leur passion pour ces jeux, ne s aperçoivent pas qu ils laissent végéter 3 leurs fiefs dans l immobilisme, tandis que l Europe, au contraire, acquiert une énorme puissance par son évolution politique, technique et économique. C- Guerres de religion en Afrique occidentale et centrale L époque des grands empires sahéliens (X e -XVI e siècles), la vie des agriculteurs et des pêcheurs s améliore dans la mesure où l islam, associé aux nouveaux centres urbains, a favorisé l expansion économique et l émergence d une classe dirigeante et d une bourgeoisie vivant du commerce de moyenne et longue distances. La conversion à l islam est l aboutissement de cette évolution sociale et économique. Les populations rurales, quant à elles, restent pour la plupart attachées à la religion traditionnelle, ou continuent à en perpétuer certaines pratiques. C est à travers les Kountas, des nomades arabo-berbères, que les confréries musulmanes commencent à s implanter en Afrique occidentale. Ainsi, la spiritualité prêchée à partir du milieu du XVIe siècle par la Qadiriyya (la plus ancienne des confréries musulmanes) trouve un terrain favorable chez les populations de la boucle du Niger. À cette période, la pratique 3 vivre médiocrement, sans s'épanouir [Remarque d'usage: souvent péjoratif] Exemple :ce travail ne lui convient pas, elle végète

religieuse décline au sein de la classe dirigeante et l islam devient une religion individuelle, plutôt qu une religion d État. Entre 1804 et 1812, le musulman Ousman dan Fodio soulève les Peul de la région pour lutter contre le retour de l animisme chez les Haoussa du Gobir. Il renverse les dirigeants haoussa, et fonde l empire de Sokoto (1809), dans le nord du Nigeria. Il renverse les dirigeants haoussa, et fonde l empire de Sokoto 4 (1809), dans le nord du Nigeria. Sa tentative d investir le Bornou se heurte à la résistance des chefs religieux locaux. À sa mort en 1817, son empire est repris en main par son fils, Mohammed Bello. Un autre État théocratique est créé dans le Macina par Cheikhou Ahmadou, un marabout peul qui lance une guerre sainte contre les Bambara animistes et se taille un royaume dans le Macina (la plaine inondable entre Tombouctou et Djenné 5 ). Il instaure une théocratie fondée sur un islam rigoriste, qui lui survit de peu, emporté en 1862 lorsqu El-Hadj Omar s empare de la région. Avec Mohammed Bello à Sokoto, Cheikhou Ahmadou à Tombouctou et Djenné et Abdoullahi à Gando, l empire peul réalise l unité politique et administrative d une grande partie du Soudan occidental, ce qui favorise le commerce. De plus les Peul bénéficient du prestige que leur confèrent leurs savants éminents dans les sciences coraniques. Le succès politique des Peul se double d un succès intellectuel et moral pour la confrérie Qadiriyya, puisque les Peul ont été convertis à l islam par les Maures Kounta, qui en sont les prosélytes 6. Mais l expansion de la confrérie Qadiriyya se heurte à l hostilité de la confrérie Tidjaniya, dont les champions politiques sont El-Hadj Omar et son fils Amadou, chefs des Toucouleurs. Au début du XIX e siècle, emmenés par El-Hadj Omar qui crée la confrérie Tidjaniyya, les Toucouleur relancent le mouvement d islamisation à partir du Fouta-Toro, dans la haute vallée du Sénégal. El-Hadj Omar se retourne contre le royaume Bambara de Ségou, puis attaque l empire peul du Macina et prend Hamdallahi en 1862. Ce dernier ne profite toutefois guère de sa victoire car les populations se soulèvent, et El-Hadj Omar meurt en 1864. Le conflit aboutit à des guerres de religion qui priveront les africains d une alliance contre l envahisseur européen. D- Les royaumes du Soudan tchadien fragilisés par l abolition de la traite des esclaves Les royaumes de Bornou, de Kanem et d Ouadaï vainqueur des Peul, ont retrouvé au milieu du 19 e siècle une prospérité basée sur la traite des esclaves. Seulement au XIXe siècle, ce commerce est proscrit par les Européens qui s évertuent en plus à le combattre, ce qui diminue la puissance de ces royaumes et les rend incapables de résister à la pénétration étrangère. En plus, en s entêtant à poursuivre la traite négrière, ces royaumes se sont attiré les foudres des puissances européennes. 4 Voir carte 12 de la page 110 dans Histoire 3 e : Le monde contemporain, de 1815 à nos jours, Edicef 5 Idem 6 1. nouvel adepte qui devient à son tour porte-parole de la propagande (d'une doctrine ou d'un mouvement) Exemple : une cause faisant de nombreux prosélytes 2. religion personne récemment convertie ou initiée et qui devient à son tour porte-parole (d'une religion) Exemple :le recueillement des prosélytes

E- Le profond bouleversement de l Afrique Australe par Tchaka La tradition orale et l archéologie ne permettent pas de se faire une idée précise du peuplement de l Afrique australe au I er millénaire. Les Karangas immigrants bantous et ancêtres des Shonas de l actuel Zimbabwe semblent être les édificateurs des étonnantes structures de pierres qui couvrent la région. Au Moyen Âge, ce royaume zimbabwéen exporte son minerai de fer et de cuivre jusqu aux Indes par le port de Sofala, près de l embouchure du Zambèze. La prospérité du royaume de Monomotapa, qui lui succède au XV e siècle, repose également sur l exploitation des mines d or. À son apogée, la sphère d influence du royaume de Monomotapa (dont la capitale est alors Zimbabwe) s étend du fleuve Zambèze au Kalahari, à l océan Indien et au fleuve Limpopo. À la fin du XVIII e siècle, les peuples de langue bantoue ont repoussé vers le désert ou assimilé leurs prédécesseurs bochimans dans le sud de l Afrique. Au début du siècle suivant, les pressions démographiques et la famine entraînent une succession de guerres et des mouvements migratoires importants, appelés Mfecane. Vers 1816, Chaka, le chef d un clan des Ngounis, entreprend d éliminer le système de clan et de le fondre en un seul peuple, ama zoulou («ceux du ciel»), en forçant les clans annexés et les prisonniers ennemis à changer de nom et à adopter une langue unique. Fuyant devant les Zoulous, les tribus vaincues écrasent ou repoussent les peuples plus éloignés. Les Ndwandwes, dirigés par Sobhuza, fondent le royaume de Swazi (1820). Les Ngounis forment cinq royaumes et effectuent de nombreuses incursions militaires entre le lac Victoria et le Zambèze (1848). Soshangane émigre vers le sud du Mozambique et fonde l État de Gaza vers 1830. Dans le Nord, les Kololos se heurtent aux Lozis pour la domination de la région. Les Ndebele émigrent vers l est (1824-1834) puis vers le nord (1837) jusque dans l actuel Zimbabwe, où ils fondent le Matabélé. Ainsi, l Afrique australe a été profondément affectée par l épopée sanglante de Tchaka qui a provoqué la disparition d un million d individus et des migrations des peuples. Toutes choses qui ne prédisposaient pas les peuples de cette région d Afrique à empêcher l occupation de leurs territoires par les Européens. IV- UNE ECONOMIE ARRIEREE 7 L économie de l Afrique noire demeure traditionnellement une économie de subsistance : les communications sont difficiles, les distances énormes ; aussi chaque village s efforce de produire ce qui lui est nécessaire : céréales (mil, sorgho dans les régions de savane), tubercules (patate, igname, taro dans les régions forestières), plantes à huile (karité ou palmiers selon les régions), volailles ; en région soudanaise, l élevage est pratiqué par les Peul, car l agriculture africaine dissocie culture et élevage. Les tissus, les objets usuels de bois ou de fer sont fabriqués sur place par des artisans. Le sel, les perles, les cuirs, les noix de kola font l objet d un commerce lointain, ainsi que la poudre d or et, malheureusement les esclaves, dont la traite est interdite par les Européens dès 1830. 7 1. en retard dans son développement [Remarque d'usage: le plus souvent péjoratif] Exemple : une région arriérée 2. appartenant à une époque révolue (péjoratif) Exemple : des idées arriérées

En Afrique blanche, la grosse majorité de la population est paysanne, cultivant céréales (blé orge) et arbres fruitiers (oliviers, amandiers, figuiers), élevant un peu de bétail (bœufs, moutons, ânes, chevaux) ; les régions insuffisamment arrosées sont laissées à l élevage nomade. Il y a donc un gros fossé entre l économie africaine et celle de l Europe qui subit une grande mutation et lui confère prestige et puissance. Comment donc échapper à une volonté hégémonique de l Europe? CONCLUSION L Afrique se présente donc comme une entité désorganisée et immobile, ceci à cause des guerres et de la traite négrière. Elle apparaît d emblée 8 comme une proie facile pour l impérialisme européen. Encore que les différentes nations européennes avaient commencé à se positionner un peu partout en Afique. 8 D emblée locution adverbiale 1. dès le début Exemple : d'emblée, je l'ai trouvé sympathique 2. du premier coup Exemple : il a réussi d'emblée