SOMMAIRE Le projet One person crying, par Marissa Roth...p 2 L'exposition, présentation...p 3 Parti-pris de l'artiste...p 4 Quelques définitions

Documents pareils
LIVRET DE VISITE. Autoportraits du musée d. musée des beaux-arts. place Stanislas

L'EPS à l'école primaire aucune modification des programmes

Galerie de photos échantillons SB-910

Ancienne gare de déportation de Bobigny. Rencontre avec les enseignants de Bobigny Connaître les ressources locales

La rue. > La feuille de l élève disponible à la fin de ce document

Un contrat de respect mutuel au collège

Là où vont nos pères1

huile sur bois 67 x 49 cm Origine : Renaissance

I/ CONSEILS PRATIQUES

compl mentaire des dossiers réalisés dans le cadre du Concours national de la Résistance notamment de ceux réalis

été 1914 dans la guerre 15/02-21/09/2014 exposition au Musée Lorrain livret jeune public 8/12 ans

Eléments de présentation du projet de socle commun de connaissances, de compétences et de culture par le Conseil supérieur des programmes

Un écrivain dans la classe : pour quoi faire?

UN COURS DE PHOTO. le cadeau idéal pour progresser en photo. en 4 heures pour une personne. Des cours collectifs à choisir parmi 8 thèmes :

Attirez-vous les Manipulateurs? 5 Indices

«Longtemps, j ai pris ma plume pour une épée : à présent, je connais notre impuissance.»

Horizons Solidaires. Un portrait photographique et sonore de l Économie Sociale et Solidaire aujourd hui

Certains de ces changements peuvent être positifs. Les intervenants humanitaires témoignent souvent de la

REGISTRE DE LA MÉMOIRE DU MONDE. Journal d Anne Frank

Exposition Camps d internement du Limousin ( )

A vertissement de l auteur

NON MAIS T AS VU MA TÊTE!

Communiqué de presse. Les Voies de la Liberté. Exposition temporaire 2015 Mémorial National de la Prison de Montluc

Livret-jeu à partir de 11 ans

Charte de la laïcité à l École Charte commentée

J ai droit, tu as droit, il/elle a droit

Où et quand cette photo a-t-elle été prise? Comment le devinez-vous?

Organisme indépendant dont la mission consiste à mieux sensibiliser la population à l'histoire et à la citoyenneté canadiennes. Chaque année, plus de

Si j étais né ailleurs, seraisje différent?

Journée sans maquillage : une entrevue entre ÉquiLibre et ELLE Québec

Conseil Municipal des Enfants à Thionville. Livret de l électeur et du candidat

FICHES DE REVISIONS LITTERATURE

Prix de la bourse commémorative communautaire Kim Halliday. (Une division de la bourse commémorative Ron Smyth)

Présentation du programme de danse Questions-réponses

Les 7 Principes fondamentaux

UNE SÉRIE D'AUTO- REPORTAGES SUR

La Joconde. ( , 0,77x 0,53 m) de Léonard de Vinci TEMPS MODERNES

PROJET D ETABLISSEMENT

GRAVER LA PAIX Projet de création artistique collective dans le cadre des Rencontres de Genève Histoire et Cité Construire la Paix (

«la mouche» : 1958 / 1987, l'adaptation au travers des affiches.

27 Janvier : Journée internationale de commémoration en mémoire des victimes de l'holocauste

Gildas Malassinet-Tannou PEINTURE DE LUMIÈRE INSTALLATION INTERACTIVE

Le service éducatif des Archives départementales du Val-d'Oise : un partenaire ressource

FICHE S PEDAGOGIQUE S. Bilan personnel et professionnel Recherche active d emploi

Stages de recherche dans les formations d'ingénieur. Víctor Gómez Frías. École des Ponts ParisTech, Champs-sur-Marne, France

Les Principes fondamentaux

PARTICIPER À UNE VENTE AUX ENCHÈRES D ŒUVRES D ART

ORGANISER UNE EXPOSITION DE PRODUCTION D ELEVES OU DES REPRESENTATIONS EXPOSER QUOI?

AVANT-PROPOS CREATIVITE, FEMMES ET DEVELOPPEMENT L'EXEMPLE QUI VIENT DES AUTRES...

UTILISATION DES FONDS ET DES BIENS DES COOPERATIVES ET DES FOYERS COOPERATIFS

Livret du jeune spectateur

La Constitution européenne

1. Composition des groupes en formation qui ont été interrogés sur le thème de l inter- culturalité:

C était la guerre des tranchées

Thématique : Arts, ruptures et continuités

Musées et paysages culturels

27 janvier 2015 Journée de la mémoire des génocides et de la prévention des crimes contre l Humanité

CENTRE DES ARCHIVES DU MONDE DU TRAVAIL. FONDS ROBERT SERRURIER, Militant du Mouvement de libération ouvrière, puis Culture et Liberté

[HDA HDA] La Statue de la Liberté au Musée des arts et métiers NOM : PRENOM : Source photo : wikipedia.org. Parcours élève CORRIGE

GROUPE DE SPECIALISTES SUR UNE JUSTICE ADAPTEE AUX ENFANTS (CJ-S-CH) QUESTIONNAIRE POUR LES ENFANTS ET LES JEUNES SUR UNE JUSTICE ADAPTEE AUX ENFANTS

La caméra Embarquée et subjective

Usages pédagogiques des tablettes

CHARLES DAN Candidat du Bénin pour le poste de Directeur général du Bureau international du Travail (BIT)

eduscol Ressources pour la voie professionnelle Français Ressources pour les classes préparatoires au baccalauréat professionnel

LibQual+ à l'ubo : une enquête de satisfaction des usagers en bibliothèque du 16 mars au 4 avril 2009

AZ A^kgZi Yj 8^idnZc

En direct de la salle de presse du Journal virtuel

QUELQUES MOTS SUR L AUTEURE DANIELLE MALENFANT

Quand doit-on utiliser un grand-angle?

QU EST-CE QUI VOUS MÈNE: LA TÊTE OU LE COEUR?

Le graphisme et l écriture, en lien avec les apprentissages en maternelle

LIVRET DE SUIVI SCOLAIRE ET DE PROGRÈS

Pour connaître mes collègues journalistes. Références

Grande Loge Féminine de France

Extrait de l'ouvrage Le Statut de Rome de la Cour pénale internationale. éditions A.Pedone EAN AVANT-PROPOS

Un nouveau regard de l assurance au féminin : la «Hub Decider Woman» Paris, le 8 juin 2011

CONCEPT Notre Temps - Vivre bien, Vivre mieux Notre Temps - Vivre bien, Vivre mieux Notre Temps - Vivre bien, Vivre mieux

LA SOUFFRANCE DU MALADE EN FIN DE VIE. LES COMPORTEMENTS FACE A LA PERTE : vécu de la mort

ANALYSE QUALITATIVE RESTREINTE

N.V. Bourov, I.Yu. Khitarova. ART-INFORMATION Problèmes de stockage et de communication. Matériel didactique

Définition. Recherche sur Internet. Quelques chiffres. Stress et enseignement. Symptômes 3 catégories de causes Le burn out Gestion du stress

L AFMD et l ISTR brisent le tabou de la religion en entreprises

A - Nomenclature des préjudices de la victime directe

7, rue Jules Ferry Bagnolet contact@riofluo.com

Programme. Modératrice de la matinée Sylvie Braibant, rédactrice en chef à TV5 Monde

Il n'y a rien de plus beau qu'une clef

S organiser autrement

Savoir construire une photographie. Connaitre la base en technique photographique. Savoir traduire le message du mouvement en image.

Bali : 14 années de découvertes compilées dans un guide culture et voyage

Médiation traduction. De la matière aux langages. 1/ Au fait, les Arts plastiques, qu est-ce que c est? 2/ Pourquoi traduire une œuvre?

TIM S.A., une aventure d Homme

LES RÉFÉRENTIELS RELATIFS AUX ÉDUCATEURS SPÉCIALISÉS

Cours de Leadership G.Zara «LEADERSHIP»

Exemples de questions d entrevue pour l établissement d un récit de vie

Questionnaire. sur l évaluation interne Qualité dans les centres d accueil pour enfants, adolescents et jeunes adultes

Maison du droit et de la médiation

Ensemble, soutenons le Bleuet de France!

ÉCOLE DES BEAUX ARTS DEMANDE D ADMISSIBILITÉ POUR L ANNÉE 2015/2016

Transcription:

SOMMAIRE Le projet One person crying, par Marissa Roth...p 2 L'exposition, présentation...p 3 Parti-pris de l'artiste...p 4 Quelques définitions générales...p 5 Support réflexif sur l'exposition...p 8 Informations pratiques...p 11 1

LE PROJET «ONE PERSON CRYING», par Marissa Roth Femmes et guerres : One person crying, Women and War est un travail photographique mondial et personnel qui aborde les effets immédiats et durables de la guerre sur les femmes. «Dans une tentative d apporter un point de vue sur la guerre que je considère comme étant une perspective méconnue, le projet m a amenée face à des centaines de femmes qui ont subi et survécu à la guerre et aux expériences subsidiaires de perte, de souffrance et d une inimaginable détresse. J ai voyagé dans le monde entier pour photographier, interviewer et écrire leurs histoires, en notant leurs gestes quotidiens comme les horribles détails, afin de documenter la manière dont la guerre a changé leurs vies de façon irrévocable. Les femmes sont des piliers pour leurs familles et leurs communautés et sont souvent sollicitées comme appui pour maintenir une certaine cohésion durant une guerre ou un conflit. Souvent, elles n ont pas le temps de faire face à leurs propres traumatismes [ ]. J ai été fascinée par le fait de mettre des visages et de donner une voix à l autre facette de la guerre, sans aucun jugement pour savoir quelle guerre est la pire pour ses victimes. Il n y a pas de sang ni d armes dans ces images, juste le souvenir de ces vies passées dans un après-guerre sans fin comme toile de fond. Les conséquences de la guerre sur les femmes dans les pays, cultures et communautés ont souvent été ignorées. Mon principal espoir quant à ce projet est de montrer que la guerre ne discrimine pas la manière dont est infligée la souffrance physique ou morale, que les femmes sont en fait les mêmes partout dans leur façon d endurer la guerre et de vivre avec ses conséquences après-guerre. J espère aussi que ce projet apporte le dialogue et inspire le militantisme, afin d apporter un soutien psychologique et social à ces femmes frappées par la guerre. La mise en œuvre de ce projet a débuté comme une réponse à des événements politiques et sociaux que j ai couverts en tant que photojournaliste dès la fin des années 80. 10 ans plus tard, j ai formalisé ce travail en projet documentaire et l ai poursuivi dans cette perspective. C est en 2009 au cours d un voyage en BosnieHerzégovine et en Serbie que j ai pleinement pris conscience de la motivation profonde de ce travail. Mes parents étaient des survivants de l Holocauste et mes grands-parents paternels ainsi que mon arrière grand-mère ont été tués au cours d un massacre en 1942 à Novi Sad en Yougoslavie. Le dernier jour de ce voyage, j ai trouvé l ancienne maison de mes grands-parents ainsi que leurs noms sur une plaque mémorielle apposée près du Danube, dédiée aux nombreuses victimes de ce massacre. J ai eu le sentiment de les trouver pour la première fois. En 2012, je suis allée au Vietnam pour la première fois dans le but d achever la construction de ce projet. La guerre du Vietnam a été la guerre qui a accompagné mon passage à l âge adulte et a vraiment influencé mes années d études, en tant que personne et en Eva Brown, survivante de l'holocauste Marissa Roth tant que militante, mais aussi en tant que photographe.» 2

L EXPOSITION Le périple de la photographe débute à Novi Sad en Yougoslavie en 1984 et se conclut à Oradour en février 2013. Plus de 90 photographies, en noir et blanc, couvrent 12 conflits mondiaux au long d une période de 28 années de travail qui commence avec l histoire personnelle de Marissa Roth en tant que fille de réfugiés de l Holocauste. L exposition inclut des panneaux qui fournissent des références historiques et reviennent sur le déroulement des conflits abordés par la photographe. L exposition est complétée par la mise en vitrine d'archives inédites sur les femmes d'oradour, dont des extraits originaux des Cahiers de Denise Bardet, institutrice à Oradour, une des 246 femmes victimes du massacre d' Oradour, qui a tenu entre 1940 et 1944 un journal intime et réflexif, mettant en lumière la vie et les pensées d une femme française pendant la Deuxième guerre mondiale. Un ensemble de projections, (témoignages et documentaires) revenant sur les conditions de vie et les violences faites aux femmes pendant les guerres, vient également appuyer les propos de Marissa Roth. Howard Spector, commissaire de cette exposition, a rassemblé et séquencé les images de la façon la plus profonde qui soit la somme de 28 années de photographies et de retranscriptions d entretiens. Il est co-directeur du South Pasadena Arts Council de Los Angeles, consultant pour des ONG et membre du National Endowment for the Arts (Fondation Nationale pour les Arts) et du US Dept. Of Education (Département américain de l Éducation). L exposition est distribuée par l agence Photokunst spécialisée dans la promotion et la diffusion de la photographie d art et du photojournalisme militant. Barbara Cox en est la directrice. L exposition «One person crying, women and war» a ouvert au Musée de la Tolérance de Los Angeles le 16 août 2012 jusqu au 11 janvier 2013. Elle a ensuite été présentée à la Willy Brandt Haus de Berlin du 7 mars au 3 avril 2013, et poursuit son itinérance en France, à Oradour. Sara Duvall, tenant une photographie de son fils tué en Iraq Marissa Roth 3

PARTI-PRIS DE L ARTISTE «Quand l humanité sombre dans la folie, la guerre fait souvent son apparition. Ce projet parle de la réconciliation entre le besoin des hommes de faire la guerre et le bouleversement involontaire qui s impose aux femmes qui en sont directement affectées. La vérité d après-guerre qui se consume lentement et que j ai découverte, est qu à la fin la guerre laisse apparaître la faiblesse des hommes et la force des femmes. Pour les hommes, la bravade ne conduit pas facilement à admettre leur incapacité à protéger les leurs. Naturellement protectrices, les femmes ramassent les morceaux et transforment des vies brisées en jardins replantés. Le pont de l angoisse est traversé de nombreuses fois depuis chacun de ses côtés, la perspective est toujours différente à cause du rôle des genres, de la culture et du contexte historique. Je croyais naïvement que la guerre et la paix étaient des options sociologiques en noir et blanc. Progressivement, au cours de ce projet mené durant 28 années, qui reflétait l apogée de mon propre processus de maturation, la palette de ma vision du monde s est brisée en une centaine de nuances de gris. En refusant le cynisme, j ai appris que la guerre et la paix sont juste des mots, et que c est en fait cette fine ligne invisible entre civilisation et anarchie, tolérance et intolérance entre 2 personnes, puis 10 personnes, puis une centaine de personnes, puis un million de personnes qui fonde une coexistence constructive. J ai lu l histoire de la guerre sur le visage de chacune des femmes que j ai rencontrées pour ce projet. Leurs yeux sont devenus des mots enchevêtrés de phrases de souffrance, gravés sur l enveloppe de leurs larmes liées par une expérience commune, où ni le temps ni le lieu n ont d importance. Ce qui importe réellement à la plupart d entre elles, c est la connaissance universelle que chaque femme, qui a aussi survécu à la guerre, partage le même tragique secret de ce que l on ressent d avoir vécu au-delà. La mort ne choisit pas de côté, mais choisir la vie après la guerre est une autre affaire. Un grand nombre de femmes que j ai rencontrées autour du monde ont tiré une incroyable force de leur chagrin et de leurs pertes, et ont tourné leur regard vers l activisme en militant pour la justice sociale, la paix, et l enseignement de la tolérance. Ce processus n a pas toujours était immédiat ou facile mais il s est lentement imposé à elles alors qu elles faisaient face aux difficultés d après-guerre et cicatrisaient leurs blessures physiques et psychologiques. J ai essayé de ne pas prendre position en éclairant un conflit, et j ai plutôt choisi de mettre en lumière des femmes de tous bords afin de raconter l histoire d une guerre en particulier. Les mots sont les mêmes qu ils soient dits à Belfast ou en Bosnie, en anglais, en hongrois ou en cambodgien. Les femmes que j ai choisies de présenter ici sont des activistes comme des inconnues et reflètent le spectre des femmes qui incarnent des esprits féroces et une force Nuk Nimmy, survivante du génocide des Khmers Rouges tranquille. Chacune à sa manière a choisi la vie et m a Marissa Roth laissé une marque indélébile.» 4

BIOGRAPHIE DE MARISSA ROTH Marissa Roth est née et a grandi à Los Angeles, Californie. Elle est une photojournaliste et photographe documentaire freelance internationalement publiée. Elle a travaillé pour un grand nombre de publications dont le New York Times, le Los Angeles Times, Time and Newsweek et a couvert une large variété de sujets comme une tentative de coup d'état aux Philippines, la première élection de la Hongrie post-communiste, les sans-abris au Japon ou encore les survivants de l'explosion de l'usine d'union Carbide à Bhopal en Inde. Marissa Roth fait partie de l'équipe du Los Angeles Times qui a gagné le Prix Pulitzer pour les meilleures actualités de la couverture des émeutes à Los Angeles en 1992. Le premier livre de Marissa Roth, "Burning Heart" (Un cœur qui brûle), un portrait des Philippines, a été publié en 1999. En 2000, elle a terminé un projet de documentaire photo : "Inside/Out : Downtown Los Angeles, (Le centre-ville de Los Angeles vu de l'intérieur) qui a mis en lumière la diversité culturelle et ethnique du centre-ville de Los Angeles. Ce projet a trouvé son apogée dans un livre : "Real City: Downtown Los Angeles Inside/Out", (La ville réelle : Le centre-ville de Los Angeles vu de l'intérieur) en 2001. "Come the Morning" (le Matin arrive), un livre pour enfants illustré avec les photographies de Marissa Roth sur les sans-abris de Los Angeles, a été publié en 2005. Elle enseigne au sein de différentes institutions académiques, dont son Alma Mater, l'ucla (L'université de Californie à Los Angeles). Son travail a été exposé dans des expositions individuelles et de groupe et certains de ses clichés ont intégré des musées américains et internationaux ainsi que des collections institutionnelles et privées. The Museum of Tolerance/ Simon Wiesenthal Center lui a passé commande d une série de portraits de survivants de l Holocauste, Witness to Truth, qui fait maintenant partie de l exposition permanente du musée. Marissa Roth travaille actuellement sur un autre livre, à savoir "Infinite Light : A Photographic Meditation on Tibet" (Lumière Infinie: Une méditation photographique sur le Tibet). 5

QUELQUES DEFINITIONS GENERALES Il est difficile de définir sans ambiguïté les termes de reportage, photojournalisme, documentaire ou photographie humaniste car ils sont souvent utilisés de manière interchangeables et avec des connotations positives ou négatives selon les époques.. Le reportage Au sens large, le reportage qualifie toute démarche ayant pour but majeur d enregistrer le réel, autant les êtres que les lieux ou les événements. En cela, le reportage se distingue en premier lieu de la photographie de studio où prime la mise en scène. Le plus souvent, un reportage implique une série de photographies sur un thème particulier, dans le but de présenter les différents aspects de ce dernier (enquête et témoignage). L approche est prioritairement documentaire mais peut avoir une dimension esthétique : bien que l objectivité ait généralement été le but des photographes dès le 19 e siècle, la part personnelle de l auteur a toujours eu un rôle déterminant. L évolution du reportage a essentiellement été liée à une volonté de relater les événements historiques et sociaux. En cela, le développement de la presse et de l illustration dans les années 1920 1930 a fait du reportage photographique l un des moyens importants de communication visuelle de l information. De nombreux reporters sont donc photojournalistes, souvent par nécessité et, en parallèle de leur travail pour la presse, la plupart développent des reportages personnels. Les livres et les expositions sont alors les moyens privilégiés de diffusion de la part intime de leur oeuvre. Le reportage moderne se décline sous de multiples formes : photographie de rue (Henri Cartier-Bresson, Robert Doisneau), reportage engagé (Robert Capa), reportage social (Dorothea Lange), reportage politique, etc. Le photojournalisme Le photojournalisme recouvre les activités de productions photographiques dans le domaine de l information destinées à l illustration des médias, en particulier ceux de la presse. En 1880, la première photographie publiée en couverture d un journal annonce le développement des magazines illustrés dans les années 1920. Le photojournalisme moderne doit beaucoup à l apparition des appareils de petit format permettant la mobilité (du photographe autant que du sujet) et donc une rapidité d action indispensable pour couvrir l actualité. C est la période de gloire du photojournalisme, de Weegee, de Robert Capa et d'henri Cartier-Bresson. L excès d images ainsi que la concurrence de la télévision ont entraîné un surenchère de l image choc, du scoop. Ceci au détriment de l essai photographique qui propose un véritable récit en images, accompagné de textes et légendes permettant une interprétation plus profonde du sujet. Le documentaire Dès son origine, la photographie est reconnue pour sa valeur d attestation : elle permet d obtenir un document, c est-à-dire un témoignage, une preuve objective du réel photographié qui vient d abord informer. De cette conception découlent ainsi divers usages de la photographie : scientifique, judiciaire, médical, ethnographique ou journalistique. Le reportage 6

est donc l un des aspects que peut prendre un travail à visée documentaire. Cependant, les techniques de manipulation de l image ont existé dès le milieu du 19 e siècle et le mythe de l objectivité est progressivement remis en question (le détournement de l information à but idéologique, de propagande, est l un des exemples les plus marquants de l entre-deux guerres). Dès 1930, Walker Evans (USA, 1903 1975), défenseur du «style documentaire», met en évidence la dualité de la photographie, à la fois document et oeuvre esthétique. Dès lors, le terme documentaire s associe à un projet photographique personnel proche du réel mais n ayant pas nécessairement un but informatif (contrairement au photojournalisme ou au reportage engagé). Dans les années 1960, la subjectivité du photographe est entièrement assumée, en particulier dans le domaine du documentaire social (à la suite de Robert Frank, Lee Friedlander et Diane Arbus par exemple). La photographie humaniste Mouvement majeur de la photographie des années 1930 à 1960 qui se concentre sur l image de l homme et témoigne de sa dignité. Les grands thèmes de la photographie humaniste visent une portée universelle et montrent une attention particulière pour le quotidien des peuples, des classes défavorisées, des opprimés. La photographie humaniste a pour caractéristique de ne pas se limiter aux événements «chocs» de l actualité, mais d étudier ce qui se passe derrière la grande scène de l Histoire. Alors que le photojournaliste doit fournir «la» photographie parfaite, le scoop, le photographe humaniste peut s exprimer sur plus d une centaine de photographies et sur le long terme. Etant moins dépendants de la presse, ils présentent leur travail soit dans des expositions soit dans de beaux livres. Ceci leur permet de mieux marquer le sens donné à leur démarche. En France, la photographie humaniste illustrée par Henri Cartier-Bresson, Robert Doisneau, Willy Ronis ou Izis, est le reflet d un certain «réalisme poétique» qui caractérise l époque. Aux Etats-Unis, dans le domaine du documentaire social, les photographes mandatés par la Farm Security Administration (FSA) présentent les ravages de la crise de 1929 sur la communauté rurale. Les plus célèbres sont Walker Evans et Dorothea Lange, dont l image Migrant Mother, 1936, est devenue une icône moderne. La Deuxième Guerre mondiale ralentit l effervescence de la photographie humaniste qui gagne un regain de popularité à la Libération : Robert Doisneau immortalise le peuple de Paris en liesse, devenant le symbole de la photographie humaniste de l Après-Guerre. Le mouvement connaît une reconnaissance internationale triomphale en 1955 grâce à l exposition «The Family of Man», organisée par Edward Steichen au MOMA, le Musée d art moderne de New York, et présentée dans de nombreux pays européens (véritable événement qui connut 7 millions de visiteurs). L exposition, monumentale, proposait une vision optimiste de la nature humaine à travers plus de 500 images, prises par des amateurs comme des professionnels, et célébrant les étapes majeures de la vie selon l idée que «la mission photographique est d expliquer l homme à l homme». Le succès de l exposition «The Family of Man» peut cependant être interprété comme le chant du cygne de l humanisme. Dès les années 1960, les grands idéaux sociaux et humanistes sont en crise. Avec la concurrence de la télévision et suite aux horreurs de la guerre au Viet-nam, le rôle informatif de la photographie d actualité, le mythe de l objectivité ainsi que les règles esthétiques et déontologiques du reportage sont remis en question. 7

SUPPORT REFLEXIF SUR L 'EXPOSITION L'exposition de Marissa Roth pose différents problèmes à la compréhension initiale, et cette double difficulté en décuple l'intérêt. D'une part, il s'agit d'un ensemble de photographies faites par une femme qui est en même temps photographe de guerre, mais ces images ne sont pas celles de la guerre elle-même et ne relèvent pas du documentaire. Pourtant, et c'est le second problème qui interdit une lecture simple, les femmes dont Marissa Roth fait le portrait sont, d'une certaine manière, des femmes de guerre. Non pas des femmes guerrières (sauf quelques exceptions), mais des mères, des femmes ou des victimes civiles des différents conflits couverts par la photographe. La guerre est donc ici présente mais par une double absence : celle des faits mêmes d'une part, et celle des acteurs «convenus» de la guerre, qui sont censés être les hommes. On est donc reconduit dans la distinction classique et encore réelle, qui veut que les hommes se battent et aient part à la plus grande violence, tandis que les femmes victimes directes ou indirectes, restent dans l'ombre du conflit (ce qui mérite d'être discuté en soi, indépendamment de cette exposition, qui a sa propre logique). Marissa Roth, selon l'ordre des raisons qui la motivent, ne peut pas briser ce schéma, car elle parle en tant que femme désireuse de redonner une voix, par l'image, aux femmes que les guerres font taire ou disparaître dans la réalité comme dans les mémoires. Celles de sa famille d'abord, suivant une descendance où, dernier maillon d'une chaîne d'oubli, elle fait le vœu d'exhumer l'histoire des aïeules qui forment l'origine du parcours qu'elle propose autant que sa propre existence. La première image est celle d'une maison qui fait office de premier portrait de femme (l'image de la maison reste souvent symbolique de la femme et de la matrice), suivi par des visages qui donnent une personnalité et des traits à une absence primordiale. C'est donc par l'intermédiaire de toutes ces autres femmes qu'elle atteint à une forme d'universalité en renouant avec sa propre histoire, mêlant sa quête personnelle à l'enquête historique. Le choix du noir et blanc, et de prendre tous les portraits avec le même appareil pendant plus de vingt-cinq ans, participe d'une démarche qui met en positif ces femmes restées dans le négatif des conflits et des objectifs eux-mêmes généralement masculins, lorsqu'il s'agit de couvrir une guerre. Mais aussi, le noir et blanc rend les femmes les photos les plus récentes contemporaines de l'histoire plus ancienne qui s'y rejoue, et crée cet effet d'identité que le spectateur ressent immanquablement. Cet aspect permet de résoudre un autre problème apparent qui touche à l'agencement des photos et à l'ordre de l'exposition, qui ne semble pas chronologique ; du point de vue de Marissa Roth, l'esthétique a guidé les choix de disposition dans l'espace, mais cela produit cette identité de surface mais qui suggère une parenté plus profonde - entres des femmes qui dans leurs différences se ressemblent étrangement, et cette ressemblance est d'autant plus flagrante sur des portraits qui révèlent des regards, des postures, des attitudes. Ces regards nous scrutent le plus souvent avec l aplomb douloureux de celles qui ont survécu à la guerre et à leurs morts, de celles qui, comme le veut encore une fois la tradition et souvent l'histoire, ont gardé, maintenu ou reconstruit le foyer déserté ou détruit. Au milieu de ce défilé de visages campent, comme des respirations anonymes, de grands cadres de paysages cernés de noir, qui offrent comme un repérage, non pas de pays en particulier, mais de nature et d'espace, venant rappeler que la terre même porte les marques et les scarifications de la guerre. Ceux-là ne nous regardent pas mais nous interrogent à leur façon. Le dernier 8

d'entre eux pourra même nous surprendre, dans la mesure où il ne s'agit pas d'un paysage, mais d'un groupe de femmes afghanes ; Marissa Roth avoue avoir choisi cette dernière image pour des raisons esthétiques, mais on pourrait interpréter ce dernier choix comme une évocation de l'objectivation dont ces femmes sont les victimes, derrière le voile qui leur dénie l'identité et les réduit à l'état, précisément, de paysage plus que de personnes. Enfin le dernier groupe de photos est révélateur de l'ensemble de l'exposition : il s'agit d'enfants, symboles de l'avenir et d'une certaine innocence certes, mais avec une ambiguïté : ne sont-ils pas les protagonistes ou les victimes des guerres à venir? Aussi ces images peuventelles indiquer qu'il ne s'agit pas pour Marissa Roth de montrer des victimes ; son intention est bien politique et elle revendique son engagement, mais moins dans l'apitoiement que dans la représentation d'une dynamique, d'une force et d'une volonté de vivre qui résiste à toutes les guerres et à toutes les destructions. Derisa Hodzic et son fils Osman,né pendant le siège de Srebrenica Ainsi, douze guerres auront été couvertes, de celle qui lui est la plus proche à d'autres, plus éloignées, mais qui révèlent toutes, dans l'objectif, la même histoire oubliée, qu'il s'agissait pour Marissa Roth de nous donner à voir, sans moralisme et sans jugement. On notera pour finir les quelques images d'oradour, dont l'histoire s'inscrit dans la continuité de l'exposition, en renouant avec ses origines dans la seconde guerre mondiale. 9

Il pourra être pertinent pour le professeur, de faire réfléchir ses élèves, à partir du questionnaire proposé, sur certains thèmes : - La puissance expressive de l'art et notamment de la photographie, qui n'est jamais qu'une pure copie de ce que l'on voit. Ainsi, voir comment chaque image fait l'objet d'un travail sur la lumière, le cadrage, la pose, les contrastes. A ce sujet, noter aussi que le noir et blanc ne se réduit jamais à l'opposition de ces deux tons, mais offre une gamme de gris aussi riche qu'une palette de couleurs, et que cette gamme constitue elle-même des moyens d'expression dont le photographe sait faire usage. - A partir de cette approche de l'art dans sa dimension expressive, s'interroger sur les limites du langage et la nécessité parfois d'avoir recours à d'autres formes d'expression : que dit une photo que les mots ne peuvent pas dire? Comment le dit-elle? Pourquoi ce recours ne remplace pas le langage et qu'est-ce qui est transmis par là? - Marissa Roth ne se revendique pas comme artiste, pourtant on peut se demander en quoi ses photos relèvent de l'art plus que du documentaire. Par ailleurs, son intention est à la fois personnelle et politique : en quoi cela se retrouve-t-il souvent chez les artistes? Ces images sont comme des représentations d'une histoire oubliée, mais aussi d'un inconscient, et d'un inconscient qui est personnel, familial et historique. Elles ont alors pour fonction de véhiculer une mémoire, mais aussi d'être des vecteurs d'histoire(s) et peuvent être replacée dans l'histoire de l'art elle-même, telle qu'elle croise et dessine aussi à sa manière les pages de l'histoire. Montrez et interrogez la différence qu'il y a entre une approche pédagogique des événements et la manière dont l'art les prend en charge : y -a-t-il contradiction? - Cette dernière question peut permettre d'approfondir la fonction plus particulière de la photographie, qui est souvent perçue comme le vecteur le plus fidèle de la réalité, tout en étant au cœur des plus grandes manipulations. Que signifie cette ambivalence de l'image qui plus est photographique - qui se situe toujours à la frontière du réel et de la fiction? Les images de cette exposition renvoient à quel type de réalité? 10

INFORMATIONS PRATIQUES Photographies, textes cartels et panneaux : Marissa Roth Fiche pratique : Exposition du 21 juin 2013 au 30 avril 2014 Centre de la mémoire d Oradour BP12 87520 Oradour sur Glane 05 55 430 430 www.oradour.org Tarifs Entrée groupes scolaires : 1,00 / élève 0,50 / élève si visite couplée à l'exposition permanente Horaires : Du 1er février au 28 février : 9h à 17h Du 1er mars au 15 mai : 9h à 18h Du 16 mai au 15 septembre : 9h à 19h Du 16 septembre au 31 octobre : 9h à 18h Du 1er novembre au 15 décembre : 9h à 17h Rappel : dernier accès une heure avant la fermeture Dossier réalisé par le service éducatif du centre de la mémoire contact : stephanie.boutaud@oradour.org ou 05.55.430.438 Réservations groupes : reservations@oradour.org ou 05 55 430 439 11