LA FIÈVRE CHEZ LE CHIEN : ÉTUDE RÉTROSPECTIVE REVUE D ARTICLE : JSAP Juillet 006, vol 47 (7) En guise d introduction, l auteur redéfinit la notion de fièvre et rappelle qu une distinction doit être faite entre la pyrexie et ce que les anglosaxons ont nommé FUO (Fever of unknown origin). La pyrexie est l augmentation de la température corporelle au-delà de l intervalle de référence normal de l espèce considéré pour un âge déterminé. On parle de fièvre lorsque l augmentation de la température corporelle est due à l intervention de mécanismes pyrogènes exogènes (p.ex. agents infectieux, médicaments) ou endogènes (p.ex. cytokines). La FUO a été définie en médecine humaine comme étant une fièvre qui ne disparaît pas spontanément dans un délai normal (infection autolimitante), et dont le diagnostic est inconnu après une semaine d hospitalisation et d investigation de routine. En médecine vétérinaire (chiens-chats), on utilise le terme FUO lorsque la fièvre ne répond pas au traitement antibactérien et qu une investigation clinique minimale ne permet pas d établir un diagnostic. L étude a été réalisée sur 66 chiens à l Université de Bristol, entre novembre 00 et mars 004. Les buts de cette étude étaient non seulement de préciser l existence d une distribution démographique des cas de fièvre, mais également l évaluation des différentes procédures diagnostiques utilisées, l effet d un traitement préalable sur cette investigation clinique et la capacité d atteindre un diagnostic final. Dans cette étude, 9 races sont représentées, les races les plus fréquentes étant : - Le Border Collie ou type collie (8%), - Le Springer Spaniel (3.%), - Le Berger Allemand (6%), - Le Golden Retriever (6%) et - Le Labrador ou apparenté (6%). L âge moyen est de 4 ans. Il est à noter que l âge moyen ne diffère pas de façon significative entre les groupes pathologiques. 30 mâles ( castrés) et 36 femelles (6 stérilisées). Les chiens sélectionnés pour cette étude présentaient une température corporelle supérieure à 39.7 C. Laboratoire d Analyses Vétérinaires J.Collard Revue de littérature /
Les analyses réalisées, c'est-à-dire, - L hémoculture pour rechercher une bactériémie, - Les sérologie (IFA) néosporose et toxoplasmose, - La recherche de parvovirus sur les matières fécales, - Les sérologies des pathologies transmises par les tiques et - L immunodiagnostic : Ac.antinucléaire (ANA), facteur rhumatoïde (FR Waaler Rose), test de Coombs (IgG, IgM et C3), Ont permis la classification des pathologies en groupes, en fonction des résultats d analyses : - Pathologies infectieuses - Pathologies à médiation immune - Néoplasie - Divers - Absence de diagnostic Durant cette étude, différentes procédures diagnostiques sont utilisées, notamment: La radiographie : elle permet de poser un diagnostic dans 6/63 cas : - ostéomyélite - ostéopathie métaphyse - ostéopathie pulmonaire hypertrophique - pneumonie par erreur de lieu secondaire à un mégaoesophage généralisé - néoplasie vertébrale L échographie : absence de diagnostic sur les 43 cas réalisés L échocardiographie : un diagnostic d endocardite est posé dans / cas La cytologie : est utile dans /47 cas : elle permet de poser les diagnostics suivants : - pathologie inflammatoire du SNC, dont 0 cas de méningite steroid-responsive (SRM), un cas de méningoencéphalite granulomateuse et cas d inflammation nerveuse centrale non spécifique - polyarthrite à médiation immune (IMPA) - leucémie lymphoïde chronique - leucémie aleucémique - Aplasie érythroïde - Bronchite Laboratoire d Analyses Vétérinaires J.Collard Revue de littérature /
Les pathologies à médiation immune représentent le groupe de pathologies le plus important de chiens fébriles (3/66 cas = 34.8%). Dans ce groupe, les pathologies inflammatoires du SNC sont prévalentes (0/3 cas) suivies par les IMPA (polyarthrite à médiation immune) (/3 cas). 7 chiens sur «non diagnostiqués» montrent une résolution de la fièvre sans qu aucun traitement ne soit appliqué. Les 8 autres reçoivent un essai de traitement consistant en une antibiothérapie accompagnée d anti-inflammatoires non stéroïdiens (NSAID) si aucune réponse n est observée, + finalement des glucocorticoïdes. Un cas ne répond à aucune thérapie. Discussion : Les informations concernant l évaluation diagnostique des chiens fébriles restent très vagues et diffuses dans la littérature. Très peu de publications traitant de FUO (fever of unknown origin) existent. En médecine humaine, les infections sont responsables de la majorité des cas de FUO (0 à 60%). Dans l étude présentée ici, les pathologies à médiation immune comptent pour la plus grande proportion de cas référés pour fièvre (34.8%). Avec une majorité de méningite puis de polyarthrite. Les Collies et les Springer Spaniels sont les races les plus fréquentes. Les Collies sont surreprésentés dans le groupe des pathologies à médiation immune (aucune étude statistique n existe cependant permettant d affirmer une prévalence dans cette race). L âge moyen de la population est de 4-6 ans, avec les chiens les plus âgés dans le groupe «divers» et les plus jeunes dans le groupe «infection». Cette différence n est cependant pas significative d un point de vue statistique. L instauration d un traitement avant l évaluation clinique du cas, particulièrement 4h avant, augmente significativement la durée d investigation et diminue également la chance de repérer la fièvre lors de la consultation. Il est donc impératif de cesser tout traitement, lorsque c est possible, avant d essayer d investiguer la fièvre. L examen radiographique permet dans cette étude un diagnostic dans seulement 9% des cas, alors qu un examen cytologique (particulièrement LCR et liquide synovial) permet le diagnostic chez 4% des chiens chez qui il est réalisé. L hémoculture représente une difficulté diagnostique : toutes les chances d avoir une culture positive doivent être mises en œuvre. Le volume de sang prélevé influe fortement sur cette possibilité. Les résultats négatifs sont fréquents et peuvent être dus à une antibiothérapie, à la présence d un agent infectieux encapsulé ou à l impossibilité de cultiver le microorganisme. Laboratoire d Analyses Vétérinaires J.Collard Revue de littérature 3/
Les cultures réalisées sur LCR et sur liquide synovial peuvent être négatives lors de pathologie inflammatoire stérile, mais aussi dans certains cas d infection! Ces résultats doivent donc toujours être confrontés aux examens cliniques et cytologiques avant d éliminer un processus infectieux! La valeur diagnostique des tests sérologiques ou PCR utilisés dépend de la prévalence des pathologies dans un pays donné (régions endémiques ou non pour la toxoplasmose, néosporose). Ils sont souvent de faible valeur diagnostique lorsqu ils sont utilisés comme test de screening pour rechercher une pathologie infectieuse sous-jacente à une pathologie immune déjà diagnostiquée ou lorsque aucun diagnostic ne parvient à être posé. Ils doivent cependant être réalisés lorsque l anamnèse, les signes cliniques et l examen clinicopathologique indiquent la possibilité d une de ces pathologies. Laboratoire d Analyses Vétérinaires J.Collard Revue de littérature 4/
Tableau reprenant la classification en groupe pathologique : Groupe pathologique Diagnostic Nbre de chiens fébriles (n=66) Pathologie infectieuse Endocardite Abcès ss mandibulaire Pyothorax Sepsis Pyélonéphrite Bronchopneumonie 3 Toxoplasmose Anaplasma Parvovirus Lymphadénite Ostéomyélite 8 (7.) Nbre de chiens avec FUO (n=6) (9) Pathologie immune Inflammation SNC Panniculite Aplasie GR Inflammation pyogranulomateuse multisystémique Thrombocytopénie IMPA Myosite masticateurs IMPA, myocardite et glomérulonéphrite Pathologie systémique (uvéite, spondylite, fièvre) 0 4 (33.3) 4 9 (34.6) Néoplasie Leucémie Ostéopathie hypertrophique Néoplasie vertébrale 3 (7.) (4) Divers Myélodysplasie Alvéolite fibrosante Ostéopathie métaphysaire Perforation duodénale Post mortem : pathol myéloprol., glomérulonéphrite et IMPA 6 (9) 0 Absence de diagnostic (.) (4) Laboratoire d Analyses Vétérinaires J.Collard Revue de littérature /