Matériel La photographie dentaire est un outil incontournable en pratique clinique. Son adoption par le plus grand nombre passe d abord par le choix d un matériel simple d utilisation, performant et économique. Son paramétrage doit ensuite être connu, de même que certaines méthodes de prises de vues. Cet article propose de répondre à ces différentes problématiques. 1 Boîtier reflex Objectif macro Flash macro Mettez-vous à la photographie dentaire! Emmanuel d Incau MCU-PH, UFR des Sciences Odontologiques de Bordeaux, Sous-section de Prothèses Choix d un matériel simple, performant et économique 1. Principaux éléments d un ensemble photographique simple, performant et économique. Plusieurs types de matériels peuvent être utilisés en photographie dentaire, à condition qu ils permettent d effectuer des prises de vues rapprochées (macrophotographie) et qu ils dispensent une source lumineuse suffisamment puissante et homogène. Les systèmes reflex semblent selon nous le mieux répondre à ces différents impératifs. Ils sont composés d un boîtier auquel il faut adjoindre un objectif et un flash macro spécifiques (fig. 1)). Le volume et le poids importants de ces matériels, la complexité apparente de leurs réglages et leurs prix présumés élevés apparaissent comme des contraintes mineures au regard des avantages qu ils procurent. L INFORMATION DENTAIRE n 35-15 octobre 2014 1
Spécial l Tendances 2. Différentes combinaisons d achat. La compatibilité des divers éléments doit être vérifiée avant tout achat, en particulier lorsque le flash Metz 15 MS-1 est retenu (*boîtiers reflex discontinués). Le boîtier reflex Il est possible et même souhaitable d utiliser un boîtier reflex d entrée de gamme, dont le prix est compris entre 300 et 600. Les systèmes plus sophistiqués et plus onéreux proposent en effet des options inutiles vu l usage des photographies dentaires. Il est même possible d acheter d occasion un boîtier discontinué. C est l un des rares avantages lié à l obsolescence programmée du matériel photographique. L objectif macro Une fois le boîtier acquis, il est nécessaire de lui adjoindre un objectif spécifique. Ce dernier doit permettre de faire des photographies de près (fonction macro avec la possibilité d atteindre le rapport de grossissement 1/1), sans déformation (distance focale proche de 100 mm). Ces deux propriétés sont contraignantes d un point de vue optique. Elles ne sont donc proposées que par une minorité d objectifs performants, donc onéreux. Les prix des marques «leaders» (Canon, Nikon, Pentax, Sony ) avoisinent 1 000. Certaines marques «génériques» (Tamron, Tokina, Sigma ) proposent de leur côté des objectifs similaires, mais dont le prix est plus attractif (entre 450 et 600 ). La principale différence provient de leur contenant, un peu moins robuste. Ces objectifs restent malgré tout très performants et ils doivent être privilégiés, selon nous, par les praticiens souhaitant intégrer l outil photographique à leur exercice. Le flash macro Le troisième achat concerne le flash. Là encore, les prises de vues rapprochées imposent un matériel spécifique : un flash macro. Celui-ci dispense de la lumière de part et d autre du centre optique de l objectif afin d éviter les zones d ombre. Les marques «leaders» proposent des systèmes performants mais onéreux (entre 500 et 1 000 ). Une nouvelle fois, il est possible et souhaitable d acquérir un flash macro d une marque «générique», telle que Metz, Nissin ou Sigma (prix entre 300 et 350 ). Au final, différentes combinaisons sont actuellement possibles pour acquérir un matériel simple, performant et économique (fig.2). Avant tout achat, trois règles doivent cependant être respectées : - vérifier que l objectif «générique» est compatible avec la marque du boîtier ; - vérifier que l objectif «générique» dispose d une véritable fonction macro ; - vérifier que le flash macro est compatible avec le boîtier reflex. Dans tous les cas, il est indispensable de demander des conseils aux revendeurs et/ou de vérifier les compatibilités entre les matériels (type de monture associée à l objectif, mesure TTL du flash, possibilité d obtenir un rapport de grossissement de 1/1 pour l objectif, etc.). 2 L INFORMATION DENTAIRE n 35-15 octobre 2014
Matériel Paramétrage simple et rapide du matériel L adoption immédiate de l outil photographique au cabinet dentaire suppose qu il soit simple d utilisation, rapide à mettre en œuvre et que ses résultats soient qualitatifs et reproductibles. Aucune connaissance particulière n est indispensable si le matériel est correctement choisi. Son paramétrage passe par certaines étapes qu il est possible de préprogrammer, sans réelles connaissances photographiques. 4. Sélection du mode de prise de vue. Le mode A (Aperture) ou Av (Aperture value) donnant la priorité à l ouverture doit être privilégié. 3. Sélection de la mesure de l exposition. La mesure matricielle doit être privilégiée. Étape 1 mesure de l exposition La mesure matricielle (ou multizone) doit être privilégiée car, dans cette situation, la cellule d exposition du boîtier contrôle l intensité lumineuse sur la totalité de l image et fait une moyenne entre les zones claires et les zones sombres. L exposition (quantité de lumière qui impressionne le capteur numérique) est donc correctement mesurée. Sur la plupart des boîtiers reflex, cette mesure peut être accessible grâce à un pictogramme spécifique. La sélection s effectue soit directement à l aide d une molette (fig. 3), soit dans un menu spécifique de l appareil. Étape 2 mode de prise de vue Quatre modes de prises de vue sont disponibles sur les boîtiers reflex. Sur la plupart d entre eux, le mode A ou Av (Aperture ou Aperture value) doit être sélectionné. Ce mode semi-automatique permet de sélectionner la valeur de l ouverture du diaphragme, variable fondamentale que nous définirons plus après. La sélection s effectue soit directement à l aide d une molette (fig. 4), soit dans un menu spécifique de l appareil. Pour les possesseurs d un boîtier de marque Canon, le mode M (Manuel) doit être sélectionné à la place du mode Av. 5. Réglage de la balance des blancs (White Balance en anglais ou WB). Le mode Flash (pictogramme en forme d éclair) doit être sélectionné. Étape 3 balance des blancs Le paramétrage de la balance des blancs (White Balance en anglais ou plus simplement WB) permet à l appareil de restituer correctement les couleurs. Lorsqu un flash est utilisé, la qualité de la lumière (sa température exprimée en degrés Kelvin) doit être spécifiée en sélectionnant un pictogramme spécifique (en forme d éclair), dans un menu dédié. Une touche «raccourcie» marquée «WB» permet souvent d y accéder directement (fig. 5). L INFORMATION DENTAIRE n 35-15 octobre 2014 3
Spécial l Tendances 6. Paramétrage de la sensibilité. Une valeur proche de 400 ISO doit être sélectionnée. 7. Réglage du flash intégré. Le mode contrôleur (C) doit être paramétré afin de bénéficier de la mesure TTL. 8. Paramétrage de l ouverture. Les valeurs F les plus importantes doivent être retenues (ouvertures les plus faibles) pour bénéficier d un maximum de profondeur de champ (netteté de l image sur les différents plans). Étape 4 sensibilité Elle correspond à la capacité du capteur numérique à percevoir la lumière qui lui est envoyée. Elle est symbolisée par une valeur d ISO. Plus cette dernière est élevée, plus le signal est amplifié. L utilisation d un flash permet de travailler avec de faibles valeurs, de l ordre de 200 à 400 ISO. Cela constitue un avantage, car des valeurs trop élevées produisent du bruit dans l image (détérioration qualitative). La sélection de la sensibilité s effectue dans un menu spécifique souvent accessible via une touche «raccourcie» nommée «ISO» (fig. 6). Étape 5 mode du flash intégré Afin que le flash macro externe et l appareil photographique «communiquent» correctement (synchronisation de la vitesse, mesure TTL), il est parfois nécessaire de paramétrer le flash intégré de ce dernier. Cela est notamment le cas lorsque le pilotage du flash macro se fait sans fil (e.g. Metz 15 MS-1). Il est alors nécessaire d activer la fonction «Contrôleur» du flash intégré dans un menu spécifique (fig. 7). Cette opération peut se révéler complexe pour les néophytes. Il est souvent indispensable d avoir recours aux notices explicatives de l appareil et du flash. 9. Lien entre la valeur de l ouverture du diaphragme de l objectif et la profondeur de champ. Plus l ouverture est importante (faible valeur F), moins la profondeur de champ est importante. Nous voulons le contraire en photographie dentaire (importante valeur F, donc faible ouverture). Étape 6 paramétrage de l ouverture Cette étape est fondamentale pour obtenir une importante profondeur de champ. Celle-ci correspond à la zone de netteté au niveau des différents plans d une image (e.g. au niveau des incisives centrales situées au premier plan, des canines situées au plan intermédiaire et au niveau des molaires situées à l arrière-plan). D un point de vue optique, plus la valeur de l ouverture du diaphragme (équivalent de la pupille sur un appareil photographique) est faible, plus la profondeur de champ est étendue. C est précisément ce que nous recherchons. Il faut donc sélectionner à l aide d une molette ou d un «pad» dédié les valeurs d ouverture les plus faibles pour que l image soit la plus nette possible. Cette valeur est donnée par un chiffre précédé de la lettre «F» (fig. 8). Attention! Il faut en réalité sélectionner les valeurs «F» les plus élevées pour avoir une ouverture la plus faible possible, car le chiffre affiché correspond en réalité à 1/F (fig. 9). 4 L INFORMATION DENTAIRE n 35-15 octobre 2014
Matériel Méthodes pour les photographies intrabuccales Une fois le matériel acquis et correctement paramétré, certaines méthodes doivent être mises en application afin d effectuer des photographies intrabuccales. Certains ustensiles (écarteurs et miroirs photographiques) sont alors nécessaires. Trois types de vues sont généralement effectués. Vues frontales Elles répondent à un cahier des charges simple : - des écarteurs simples ou doubles sont tractés vers l avant et les côtés pour dégager les tissus mous. Le patient peut effectuer cette tâche aisée (fig. 10a) ; - le photographe se situe en face du patient. Son appareil est perpendiculaire à la surface des dents antérieures ; - le cadrage est assuré par la surface interincisive maxillaire (verticale) et le plan d occlusion (horizontale)(fig. 10b) ; - la gestion de la distance permet de faire varier les rapports de grossissement (arcades entières, dents antérieures, incisives seules). La mise au point doit idéalement se faire manuellement, au travers de l oculaire. Les néophytes pourront activer les systèmes autofocus, désormais performants avec les objectifs macro ; - les dents sont séchées et la salive est aspirée avant le déclenchement. Vues latérales Elles peuvent être directes, ou indirectes dans un miroir. Nous privilégions les premières plus simples à réaliser : - le patient doit incliner la tête du côté opposé à celui devant être photographié ; - des écarteurs simples ou doubles sont tractés latéralement, en particulier du côté à photographier (fig. 11a) ; - le cadrage est assuré par le plan d occlusion (horizontal), la canine maxillaire devant approximativement être située au centre de la photographie (fig. 11b). 10a. Technique pour les vues frontales. b. Vue frontale. 11a. Technique pour les vues latérales directes (sans miroir). b. Vue latérale directe. L INFORMATION DENTAIRE n 35-15 octobre 2014 5
Spécial l Tendances Vues occlusales Ce sont les plus difficiles à réaliser. Un miroir occlusal préchauffé (eau chaude) est requis. Des écarteurs unilatéraux modifiés (sectionnés à moitié) assurent le dégagement des tissus mous tout en permettant au patient d ouvrir correctement la bouche. Pour les vues maxillaires : - le patient est placé en situation horizontale, la tête inclinée en arrière ; - le photographe doit se placer derrière le patient ; - l objectif doit être perpendiculaire au miroir, lequel est plaqué contre les dents mandibulaires (fig. 12a) ; - le cadrage vertical est assuré par le raphé médian (fig. 12b). Pour les vues mandibulaires : - le patient est placé en situation horizontale ; - le photographe doit se placer devant le patient ; - l objectif doit être perpendiculaire au miroir, lequel est plaqué contre les dents maxillaires (fig. 13a) ; - la langue est réclinée par le miroir ; - le cadrage vertical est assuré par le frein lingual (fig. 13b). 12a. Technique pour les vues occlusales maxillaires. b. Vue occlusale maxillaire. 13a. Technique pour les vues occlusales mandibulaires. b. Vue occlusale mandibulaire. Un matériel simple performant et économique est accessible depuis quelques années. Des méthodes de prises de vues élémentaires et rapides existent également. Cela devrait inciter de nombreux praticiens à se mettre à la photographie dentaire afin d améliorer significativement leur exercice quotidien. 6 L INFORMATION DENTAIRE n 35-15 octobre 2014