La lutte biologique contre le cynips du châtaignier Dryocosmus kuriphilus (Yasumatsu) Situation en Aquitaine Rappel sur le ravageur Le cynips du châtaignier est l un des ravageurs les plus importants du châtaignier. Dryocosmus kuriphilus est un hyménoptère de la famille des Cynipidae, de petite taille (2,3 à 3 mm), de corps noir et inféodé au Castanea sativa, C. crenata, C.dentata, C. seguinii et leurs hybrides. Castanea pumila et C. alnifolia (châtaigniers sauvages américains) ne semblent pas être attaqués. Symptômes et dégâts : les larves provoquent la formation de galles au niveau des jeunes pousses ou de la nervure principale de la feuille, ou sur le pétiole. Ces galles mesurent de 5 à 20 mm, sont faciles à repérer, de couleur verte teintée de rose. Après l émergence des adultes, les galles sèchent, prennent l apparence du bois et peuvent rester attachées jusqu à deux ans sur l arbre. En cas de fortes attaques, l arbre peut dépérir. Galles de cynips du châtaignier : (g) galle de l'année et (d) galle sèche de l'année n-1 à n-2 (Christel Rapaport, Fredon Aquitaine) Originaire de Chine, l insecte a été introduit au Japon en 1941 puis en Corée en 1963. Il s est ensuite répandu en Amérique par les Etats-Unis en 1974 (Géorgie) puis en Europe par l Italie en 2002, la Slovénie en 2005, la France en 2007 et la Suisse en 2010. Source : SDQPV
Le cynips du châtaignier perturbe la floraison et la fructification des arbres infestés. L impact économique est très important pour la filière castanéicole : dans les secteurs nouvellement attaqués, une chute de 50 à 70 % de la production de châtaignes est observée en quelques années. En forêt, l impact économique directement lié à l insecte semble moins important, néanmoins, les galles sèches pourraient constituer des portes d entrée au chancre du châtaignier (phénomène observé en Suisse). La réglementation en vigueur relative au cynips du châtaignier Décision de la Commission 2006/464/CE du 27 juin 2006 relative à des mesures provisoires d urgence destinées à éviter l introduction et la propagation dans l Union Européenne de l'organisme Dryocosmus kuriphilus Arrêté national du 22 novembre 2010 relatif à la lutte contre le cynips du châtaignier (Dryocosmus kuriphilus) L arrêté interdit l introduction et la propagation du cynips du châtaignier, et n autorise la circulation sur le territoire national du matériel végétal de Castenea que s il est accompagné d un passeport phytosanitaire européen. Il s applique à tout végétal de Castanea destiné à la plantation ou à la multiplication, à des fins agricoles, forestières ou ornementales, à toutes personnes physiques ou morales, publiques ou privées, et prévoit : - une déclaration obligatoire auprès de la DRAAF/SRAl de toutes nouvelles plantations par l exploitant ou le gestionnaire en mentionnant la commune et la référence cadastrale de la parcelle, - une surveillance des plantations, des pépinières, des jardineries, des vergers, des espaces verts, des massifs forestiers, des taillis par le propriétaire ou le gestionnaire qui, en cas de suspicion ou de découverte de l insecte, doit faire l objet d une déclaration auprès du maire ou de la DRAAF/SRAl, - la délimitation des différentes zones en cas de découverte du cynips : délimitation de la zone contaminée, de la zone focale (5 km de rayon autour de la zone contaminée), de la zone tampon (10 km de rayon autour de la zone focale). L arrêté définit les mesures suivantes de lutte à appliquer à chaque zone : une inspection appropriée menée notamment durant la période de possible présence des galles habitées par le cynips (généralement de la fin mars à la fin juillet), avec une surveillance particulièrement intensive dans la zone contaminée et la zone focale ; une interdiction de tout mouvement du matériel végétal de Castanea, à l intérieur ou vers l extérieur des zones délimitées, sauf autorisation donnée à des fins de destruction par la DRAAF/SRAl ; dans un lieu de production du matériel végétal de Castanea, la destruction sous le contrôle de la DRAAF/SRAl de tous végétaux contaminés ou avec symptômes du cynips et, le cas échéant, de tous végétaux du même lot au moment de la plantation ; pour toute plantation (y compris vergers de production, espaces verts et jardins particuliers) de moins d un an ne présentant que des galles fermées indiquant que le cynips n a pas émergé, la destruction sous le contrôle de la DRAAF/SRAl de tous végétaux contaminés ou avec symptômes du cynips et, le cas échéant, de tous végétaux appartenant au même lot au moment de la plantation ; pour toute plantation de plus d un an et peuplement forestier ne présentant qu un nombre restreint de galles fermées indiquant que le cynips n a pas émergé, le cas échéant, la destruction sous le contrôle de la DRAAF/SRAl de tous végétaux ou parties de végétaux contaminés ou présentant des symptômes de cynips. L'infestation des châtaigniers par le cynips concerne tous les départements aquitains. Les arrêtés préfectoraux de chaque département sont disponibles sur le site Internet de la DRAAF Aquittaine : http://draaf.aquitaine.agriculture.gouv.fr/cynips-du-chataignier,857 Ci-après la cartographie des communes d'aquitaine, réalisée par la Direction Régionale de l Alimentation, de l Agriculture et de la Forêt Aquitaine, Service Régional de l Alimentation Contact : 05 56 00 42 03 fax 05 56 00 42 31 courriel : sral.draaf-aquitaine@agriculture.gouv.fr
Cycle biologique du cynips du châtaignier Le cynips du châtaignier est une espèce à reproduction par parthénogenèse thélytoque (reproduction monoparentale qui ne donne que des femelles) produisant un grand nombre d individus, environ 100 à 150 œufs par femelle. Les œufs (0,1 à 0,2 mm) sont déposés par groupe de 3 à 5 dans les bourgeons entre fin juin et mi-juillet. Les œufs et les larves sont impossibles à déceler extérieurement. L éclosion a lieu 30 à 40 jours après. La larve (2,5 mm au dernier stade larvaire) passe l hiver, se développe et se nymphose (nymphe 2,5 mm) dans la galle sans qu aucun symptôme extérieur ne soit visible. En avril, lors du débourrement, des galles de 5 à 20 mm se forment au fur et à mesure que la larve se nourrit. Les larves entrent en nymphose entre mai et juillet puis les adultes émergent et s envolent entre juin et août. Lutte contre le cynips du châtaignier Du fait de son coût environnemental et de son inefficacité, la lutte chimique n est pas envisageable. La lutte mécanique consiste à supprimer les rameaux atteints avant l émergence de l insecte mais ne peut concerner que de très petits foyers. La lutte biologique avec l auxiliaire Torymus sinensis qui pond dans les larves de cynips a été testée au Japon. Elle a permis de retrouver 80-90 % de la production initiale en 10 ans. En Europe, elle a été mise en place en Italie tout d abord, puis en France. Les premières introductions ont été réalisées en 2010 dans les Alpes-maritimes et en 2011 en Ardèche, dans le Var et en Haute-Corse. Des recherches sont également en cours pour sélectionner des variétés résistantes de châtaignier (Bouche de Bétizac est pour l instant indemne d attaque dans les secteurs contaminés). Lutte biologique Depuis 2010 la lutte biologique contre le cynips de châtaignier est mise en œuvre au moyen d'un micro hyménoptère spécifique de Dryocosmus kuriphilus, Torymus sinensis (Hymenoptera, Torymidae). Cette lutte biologique menée au Japon depuis 1980 montre une bonne régulation du cynips au bout de 10 années (rendement revenu au niveau de production avant l'arrivée du cynips). La reproduction de cet auxiliaire est de type sexuée. Au printemps, les adultes émergent. Les femelles pondent dans les galles au début de la reprise d'activité des larves de cynips et du développement des galles. Les femelles Torymus munies d'un ovipositeur pondent leurs œufs directement dans les larves de cynips à l'intérieur des jeunes galles encore tendres. Les galles ainsi hyperparasitées vont continuer de grossir tant que la larve de Torymus n'aura pas tué celle du cynips. La larve de l'auxiliaire va achever son développement et demeurer dans la galle jusqu'au printemps suivant. Grâce à des programmes de coopération internationaux, l'insecte est introduit en France, élevé, multiplié puis lâché sur les sites les plus favorables, lui offrant les meilleures chances de survie et d acclimatation. Ces programmes impliquent une collaboration entre des partenaires institutionnels italiens et français, universitaires, instituts techniques et organismes de recherche.
Cartographie des foyers de Cynips du châtaignier et des lâchers de Torymus sinensis en France, 2012. Source : Focus sur l'aquitaine Les premiers lâchers de T. sinensis en Aquitaine ont été réalisés en avril 2012 sur 2 sites de Dordogne (Prigonrieux et Saint Pierre d Eyraud ; A ce dispositif a été rajouté un site témoin à Le Fleix (24). le tableau ci-après rend compte de l'historique des lâchers de T. sinensis depuis 2010. Source :
Protocole pour l obtention, le conditionnement et les lâchers des Torymus sinensis issus des galles du cynips du châtaignier (source INRA, UELB) - Récolte de galles en février (débarrassées de tous débris végétaux, qui génèrent de l'humidité, et d'araignées, potentiellement prédatrices d'insectes), - Stockage en conditions extérieures et sous abri (non soumis à la pluie et au soleil direct), dans des boîtes éclosoirs hermétiques permettant de collecter les adultes au fur et à mesure de leur émergence des galles dans des tubes contenant de micro quantités de miel. - Collecte et tri des insectes émergents : (2 fois par jour), les adultes sont collectés et triés sous loupe binoculaire (isoler T. sinensis des autres parasitoïdes présents), les sexer (séparer mâles et femelles) et les dénombrer. - Reproduction dans des tubes où mâles et femelles sont enfermés (les femelles doivent toutes être fécondées). Ces tubes sont ensuite placés à l'étuve en conditions contrôlées de température (14-16 C) et de photopériode (10h de jour, 14h de nuit). Le miel doit y être renouvelé une fois par semaine. Le suivi des émergences et le conditionnement des Torymus sinensis doit être fait jusqu à ce que plus aucun individu n émerge (mi avril) - Lâcher in situ sur les châtaigniers infestés, au stade phénologique D (le bourgeon a éclaté, les nervures des feuilles sont apparentes, la pousse est en phase d'élongation) les galles sont vertes, les tissus tendres. Les femelles peuvent facilement perforer les galles au moyen de leur ovipositeur pour atteindre les larve de cynips. Les T. sinensis utilisés devront être âgés de 2-3 semaines (d où l importance de respecter au maximum la synchronisation entre les émergences des adultes à relâcher et les stades phénologiques favorables des châtaigniers sur le terrain). Femelle de T. sinensis prête à pondre sur une galle de cynips du châtaignier, lâcher du 25 avril 2013 sur le site de Villenave d'ornon (Christel Rapaport, Fredon Aquitaine) Compte tenu de l épisode de gel tardif survenu sur les sites de lâcher en Aquitaine en avril 2012 (et qui a provoqué une importante chute de galles), les résultats de la première évaluation post lâcher s avèrent particulièrement importants pour juger de l impact de ce phénomène climatique sur l établissement de Torymus sinensis. Pour avoir la confirmation de l établissement de T. sinensis sur les sites d'introduction, il conviendra donc d attendre la prochaine compagne d échantillonnage (hiver 2013 2014) qui consiste à prélever un très grand nombre de galles afin d'identifier le T. sinensis. D'autre parasitoïdes indigènes étant potentiellement présents (nombreux autres micro-hyménoptères).