Forum d EL MOUDJAHID Intervention du Ministère de l Energie et des Mines présentée par Mr Ali Hached Conseiller du Ministre 26 août 2012
Monsieur le Directeur Général, Je vous remercie pour l invitation que vous avez bien voulu adresser au Ministère de l Energie et des Mines, pour participer au Forum d El Moudjahid et de l opportunité qui lui est ainsi offerte d exposer les grandes lignes des activités récentes du secteur en donnant quelques perspectives de leur développement à moyen et long termes. Tout d abord, il est nécessaire de rappeler brièvement le contexte économique mondial de ces derniers mois, car comme vous le savez, il influence sur de nombreux plans l évolution du marché des hydrocarbures, et par voie de conséquence les résultats de notre secteur. En 2009, le monde fut frappé par une profonde récession économique, aggravée par la crise financière. En 2010,les mesures de relance prises par les pays industrialisés, premiers touchés par la crise, ont permis une reprise de l activité économique atteignant une croissance globale de 5%. Cette reprise s est finalement avérée fragile, d une part par la disparité de la reprise économique entre les différentes régions du monde, et d autre part en raison des difficultés financières que connaissent plusieurs pays européens, avec la crise des dettes souveraines et ses répercussions sur les autres régions. On observe ainsi, depuis 2011, un ralentissement de la croissance de l économie mondiale, avec un taux de croissance global moyen en 2011-2012 de 3,5%, principalement soutenue par les pays émergents et en développement. Les prévisions pour 2013 donnent une croissance globale de l ordre de 3,9%. Ces taux, relativement modestes, ne permettent qu une croissance molle de la demande pétrolière. Sur le plan des prix, les cours du brut ont marqué une tendance haussière quasi ininterrompue durant les trois premiers mois de l année atteignant un pic de plus de 128$/bbl durant le mois de mars, essentiellement en raison de facteurs géopolitiques qui ont accentué les craintes d une perturbation des approvisionnements pétroliers, de la vague de froid qui a touché l Europe, et du reflux du dollar face à l euro. Néanmoins, les cours ont nettement fléchi à partir du mois d avril, chutant sous la barre des 90$/bbl pour le Brent vers la fin juin, déprimés par l actualité économique mondiale et l abondance de l offre pétrolière qui dépassait largement les besoins du marché. Les cours du brut semblent s orienter de nouveau à la hausse depuis le mois de juillet dépassant la barre des 115$/bbl vers la mi-août, essentiellement sous l influence du regain des tensions géopolitiques au Moyen-Orient, et du recul de la production pétrolière de la Mer du Nord. Pour les mois qui viennent, dans la mesure où le surplus sur le marché 1
a de fortes chances de perdurer et bien que les prix à terme restent aujourd hui au niveau des prix actuels, il faut rester prudent. Le marché du gaz naturel, affiche de son côté une évolution contrastée entre les différentes régions du monde. Le dynamisme de la demande dans la zone hors OCDE, conjugué à l accident de Fukushima au Japon, a aidé à réduire la bulle gazière en 2011. Cependant, la disparité en termes de niveau de prix du gaz, persiste sur les marchés mondiaux. En effet, la demande soutenue du Japon, maintient la pression sur les prix du gaz en Asie avoisinant des niveaux de 17$/MMbtu, alors que sur le marché européen ils oscillent entre 8 et 13 $/MMbtu, le marché américain, quant à lui enregistrant une moyenne d environ 4 $/MMbtu en 2011. Pour ce qui concerne les performances de l année 2011, le bon niveau de prix enregistré en moyenne sur l année a permis à notre pays d améliorer les revenus de ses exportations d hydrocarbures qui ont atteint une valeur globale de prés de 72 milliards de dollars contre 56 en 2010 soit une hausse de prés de 29%. Le prix moyen réalisé au 1 er semestre 2012 du Sahara Blend est quasiment identique à celui de la même période en 2011, soit environ 114 $/ Bbl. En ce qui concerne le marché national la production d électricité a atteint près de 46Twh, soit une progression de près de 9% par rapport à 2010. La consommation de gaz naturel a atteint quant à elle, 29 milliards de m3 en évolution d un peu plus de 6% par rapport à 2010. Enfin, la consommation de produits pétroliers (tous produits confondus), s est établit à 17 millions de tonnes en 2011 contre un peu plus de 16 en 2010, en progression de plus de 6%. Pour le moyen terme, le secteur de l énergie et des mines a engagé un ambitieux programme de développement, qui, de manière globale, vise à optimiser l exploitation de nos ressources énergétiques et ce afin de : 1. Développer les ressources disponibles, avec pour objectif de garantir la couverture des besoins à long terme du pays ; 2. Maximiser les revenus tirés des exportations et ainsi assurer à l économie nationale les moyens de son développement. 3. Satisfaire les besoins énergétiques du pays, notamment au niveau de l électrification rurale et en intensifiant la pénétration du gaz naturel Examinons d abord le programme de développement à moyen terme des hydrocarbures : il s appuie essentiellement sur un effort soutenu de l activité exploration et d optimisation de l exploitation de nos gisements de pétrole et de gaz, et sur le lancement d un vaste programme de réalisation de capacités 2
additionnelles de raffinage et de projets nouveaux dans la pétrochimie. Il est ainsi prévu un programme d investissements de prés de 80 milliards de dollars sur la période 2012-2016. Il vise deux objectifs prioritaires à savoir, i) accroitre les réserves afin d assurer la sécurité d approvisionnement du marché national à très long terme et ii) fournir les moyens pour continuer à être un acteur important sur les marchés énergétiques internationaux. Pour ce faire, les moyens humains et matériels de Sonatrach seront renforcés avec l objectif d augmenter les capacités nationales en services pétroliers et parapétroliers. Cet effort s accompagnera de la promotion plus active du domaine minier de l ensemble du pays, notamment certaines régions du Nord et l offshore en faisant appel aux nouvelles technologies, ainsi que de l appréciation du potentiel des ressources en hydrocarbures non conventionnelles. En matière de transport par canalisation, les capacités nouvelles prévues durant les cinq prochaines années serviront à renforcer nos moyens d évacuation des productions des gisements du Sud, à sécuriser et fiabiliser le réseau de transport à l effet de satisfaire la demande nationale et à respecter les termes de nos engagements commerciaux sur le plan international. Par ailleurs l activité de transformation de nos hydrocarbures primaires et dérivés est redynamisée. Cette relance a pour objectif de contribuer à l effort d industrialisation et de diversification de l économie nationale, en jetant les bases du déploiement d un tissu de PME/PMI dans la pétrochimie permettant de créer plus d emplois directs et d être un acteur actif sur le marché extérieur, et ce à travers la valorisation des produits de seconde et troisième génération. Après la réhabilitation en cours de l outil de raffinage, en vue de sa modernisation d une part, et pour augmenter de manière significative ses capacités d autre part, un important programme d investissements dans des capacités nouvelles est lancé pour répondre à la demande à long terme en produits pétroliers. Ce programme prévoit le doublement de nos capacités de raffinage. Nous envisageons à cette fin de construire trois raffineries sur les hauts plateaux, une au Sud, et ultérieurement une autre sur la façade maritime. A l horizon 2020 nous visons une capacité de raffinage d environ 50 millions de tonnes par an. En résumé, nous devrions disposer en 2014 d une capacité supplémentaire de traitement de brut de près de 4 millions de tonnes par an et être en mesure de généraliser l usage des carburants sans plomb et diesels plus propres et moins polluants. Les unités de conversion envisagées dans notre schéma de raffinage permettront une valorisation optimale de toutes les fractions pétrolières et la mise à disposition de carburants en volumes et en qualité et de charges pétrochimiques en mesure de contribuer au développement de notre 3
programme de pétrochimie, et au-delà, de celui de nombreux secteurs industriels pourvoyeurs de richesse et d emplois. Ce plan sera accompagné d un vaste programme de développement des capacités de stockage des produits pétroliers sur l ensemble du territoire afin de sécuriser la distribution des carburants. Enfin, la construction de nouvelles unités de liquéfaction de gaz naturel pour l exportation sera achevée dès le début de l année prochaine. Mesdames et messieurs, Je voudrais maintenant aborder le secteur de l électricité qui a fait l actualité de ces dernières semaines. Pour ce qui concerne ce secteur la puissance électrique totale installée en 2011 sur le réseau interconnecté national est de l ordre de 11000 MW, pour une puissance maximale appelée de l ordre de 10000 MW. L accroissement important de la demande en électricité observé ces trois dernières années, notamment en période estivale, a été à l origine de contraintes importantes en matière de couverture de la demande dans certaines régions du pays, principalement en raison de contraintes de transport, suite au retard enregistré dans la réalisation de certaines lignes pour cause d opposition pour le passage des ouvrages. En effet, durant les dix dernières années, la puissance maximum appelée du réseau national interconnecté est passé de 4965MW en 2002 à 8606 MW en 2011 avec un basculement de la pointe de l hiver vers l été depuis 2009. Ceci est essentiellement dû à l utilisation massive des équipements de climatisation avec des taux de croissance de l ordre de 14% pour les deux dernières années. Pour réduire les contraintes sur le système électrique durant la période de l été 2012 et afin de renforcer la sécurité du système électrique et disposer d une marge de réserve conséquente, il a été lancé, en plus des centrales déjà décidées, un plan d urgence pour la période 2012-2017, pour garantir la couverture de la demande de l année 2012 et s assurer de la satisfaction de la demande sur la période 2013-2017. Ce plan d urgence concerne : Pour le réseau interconnecté : Une capacité à réaliser sur la période 2012 2017 de l ordre de 12 000 MW, dont 3300 MW durant la période 2013-2015 et 9000 MW durant la période 2016-2017. Sur les 12000 MW, 60% seront réalisés en cycles combinés et 40% en turbines à gaz Pour les réseaux isolés du Sud: les capacités de production d électricité prévues se répartissent en 136 MW en turbines à gaz pour les régions de Tindouf, Tamanrasset, Beni Abbes et Timimoun, et 140 MW en groupes diesels pour les localités du grand sud. 4
Au programme de développement des capacités de production classiques sur la période 2012-2017, il a lieu de mentionner la réalisation de l ordre de 800 MW d origine solaire. Pour l été 2012, le système électrique a connu des contraintes d alimentation au niveau des régions Est et Sud Est, notamment en terme de couverture de la demande durant les périodes caniculaires. Les causes principales sont les contraintes de transits sur les lignes de transport et des problèmes de tenue du plan de tension, compte tenu des appels de puissances importants (taux d évolution de plus de 15% par rapport à 2011). En termes de réseau de transport de l électricité, le programme de développement sur la période 2012-2017, prévoit donc la réalisation d une longueur de réseau de l ordre de 15 000 km et de 350 nouveaux postes de transformation, notamment au niveau des grandes agglomérations. Ainsi à l horizon 2017, la longueur globale du réseau de transport de l électricité sera de l ordre de 35 000 km avec un nombre global de postes de transformation de l ordre de 600 postes, soit presque le doublement du réseau actuel en termes de lignes de transport et le doublement en termes de postes de transformation. Ainsi pour assurer la couverture de la demande prévisionnelle, la capacité additionnelle de production prévue sur la période 2012-2017 (de l ordre de 12 000MW et dont 1200 MW seront mises en service à fin 2012) équivaut à réaliser en 5 années, une capacité de production égale à la capacité de production actuelle. Ce programme nécessitera aussi, pour le raccordement au réseau gaz des nouvelles centrales la réalisation d un réseau de transport gaz de l ordre de 460 km et pour le transport de l électricité, y compris l évacuation de l énergie électrique des futures centrales électriques, le développement d un réseau de transport de l électricité de l ordre de 15000 km et 350 postes de transformation, que j ai mentionné auparavant. Il est clair qu il s agit d un programme ambitieux, la capacité de production électrique étant portée à près de 24000 MW en 2017, soit un quasi doublement en cinq ans, qui nécessitera la mobilisation de toutes les parties concernées. Parallèlement, le programme de développement des énergies nouvelles et renouvelables ainsi que d efficacité énergétique, adopté par le gouvernement en février 2011, a été lancé. Comme vous le savez ce programme vise l installation à l horizon 2030, d une capacité de production d énergies renouvelables de 12 000 MW, dont 800 MW d origine solaire seront installés sur la période 2012-5
2017. En plus de ces 12 000 MW prévus pour le marché domestique, le programme prévoit l installation d une capacité de 10 000 MW pour les besoins de l exportation, sous réserve d un accès garanti de l électricité produite au marché européen et de conditions permettant une rentabilité suffisante des investissements qui seront engagés. Le programme EnR en question, doit permettre un maximum d intégration industrielle, et sa prise en charge se fera en plusieurs phases : Après avoir mis en service la centrale hybride solaire/gaz de Hassi-R mel début 2011, la première phase du programme a été lancée et concerne : L électrification rurale en Kit individuels (PV) pour une capacité globale de 5 MW (13 wilayas du Sud et des Hauts plateaux). Le lancement de la construction de l usine de fabrication de modules PV de plus de 140MWc à partir de fin 2014. A partir de fin 2012, il sera mis en service de façon progressive une unité d encapsulation de 25 MW. La construction d une ferme éolienne de 10 MW dans la région d Adrar dont la mise en service est prévue pour 2013. La construction d une centrale pilote à Ghardaïa pour tester 04 filières technologiques du Photovoltaïque de 1,1 MWc. La construction de centrales pilote CSP dans les régions de Beni Abbes, Naama et El Oued. Un appel à partenariat pour la mise en place d une usine de fabrication de silicium (grade solaire et métallurgique). A noter également la création récente d une filiale de Sonelgaz pour les réseaux isolés du sud et des énergies renouvelables. Cette filiale sera chargée de la réalisation du programme de développement des énergies renouvelables au niveau des réseaux isolés du Sud. Nous allons à terme étendre ce programme pour atteindre d ici 2015 une capacité de 655 MW, dont 280 MW en photovoltaïque, des centrales solaires thermiques de 325 MW et 2 fermes éoliennes de 25 MW chacune. En 2020, l ensemble des projets identifiés devrait nous permettre d atteindre une capacité globale de 2600 MW d électricité EnR. Au niveau des économies d énergie, ce sont quantités de projets qui ont été identifiées et qui seront mis en chantier. L exécution de ces programmes repose sur l utilisation de moyens nationaux de réalisation et cible la maîtrise de la chaine complète de développement des projets, de l engineering et de l exploitation ainsi que la fabrication des équipements, dans un objectif de maximalisation de l intégration industrielle. Il repose aussi sur la participation active de nos moyens nationaux de recherche 6
scientifique. Enfin ce programme permettra, non seulement d optimiser l exploitation des ressources en hydrocarbures du pays, mais aussi la création d une nouvelle dynamique socio-économique autour des EnR, avec la création de milliers d emplois, dans le secteur de l énergie et dans d autres secteurs. Il sera accompagné d actions de promotion de maîtrise de l énergie, visant à une utilisation plus efficace des ressources, permettant ainsi de réaliser des économies d énergie significatives. Ces actions concernent notamment l introduction de l éclairage performant, l utilisation à grande échelle des chauffe-eau solaire, la construction de logements à haute performance énergétique. Elles comprennent aussi la promotion du GPL/C, ainsi que du GNC comme carburants. Ce programme inclut également des actions visant à réduire la consommation énergétique dans les différentes industries fortement consommatrices d énergie. Je voudrais terminer en présentant brièvement quelques éléments sur le secteur minier national. Notre secteur s attelle à créer toutes les conditions pour concrétiser le potentiel que recèle notre domaine minier et permettre à ce secteur d activités de contribuer significativement au PIB national. D abord, il nous faut pleinement satisfaire les besoins de l économie nationale en produits miniers pouvant être extraits localement. Cela se fera par l accroissement de la production des ressources minérales aujourd hui insuffisamment exploitées. Il s agira aussi de les valoriser dans une perspective de développement durable en créant de nouvelles richesses et en exportant les excédents dégagés. Tout cela devra reposer à plus long terme sur un élargissement de la base minérale grâce à une intensification de la prospection du pays, et enfin s appuyer sur le développement d une industrie minière performante. Cette stratégie s articule autour d instruments et d actions précises notamment la mise en place d un groupe industriel minier et la création de l institut algérien des mines. Ce centre d excellence assurera des formations spécialisées et opérationnelles d ingénieurs et de techniciens supérieurs du secteur minier en adéquation avec les besoins des institutions, des opérateurs publics et privés. Il s agira aussi de renforcer l acquisition de connaissances géoscientifiques pour stimuler l exploration minière et aider à la découverte de nouvelles ressources minérales. Nous avons dans ce cadre relancé, par les moyens de l Etat, des opérations prioritaires de prospection de structures géologiques, de districts miniers à fort potentiel et d exploration d indices et évaluation de gîtes miniers ; De même, tout en poursuivant la réhabilitation du potentiel de production existant, le secteur des mines va lancer de grandes opérations de développement 7
des gisements de phosphates, or, plomb-zinc manganèse, à travers des actions de coopération et d association avec des organismes et des sociétés internationales, disposant d une expérience dans les différents domaines des géosciences et des mines. Enfin il sera aussi fait appel aux opérateurs privés nationaux qui maitrisent l activité de production minière en les encourageant à diversifier leurs activités. Cet exposé sur la situation du secteur et ses perspectives à moyen et long termes n a évidemment pas abordé tous les sujets, et je vous invite donc maintenant à le poursuivre à travers vos questions. Je vous remercie pour votre attention. 8