par Juliette LANÇON, Juge au Tribunal de Grande Instance de Paris, agissant par délégation du Président du Tribunal,

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Transcription:

T R I B U N A L D E GRANDE I N S T A N C E D E P A R I S N RG : 11/56931 N : 1/FF Assignation du : 07 Juillet 2011 1 ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ rendue le 27 septembre 2011 par Juliette LANÇON, Juge au Tribunal de Grande Instance de Paris, agissant par délégation du Président du Tribunal, Assistée de Férial MOHAMED BEN ALI, Greffier. DEMANDEURS Comité d entreprise de GMF-Assurances 140-148 rue Anatole France 92597 LEVALLOIS PERRET CEDEX Syndicat des Assurances CFDT transrégional et Ile de France (ACTIF) 7 rue Euryale Dehaynin 75019 PARIS représenté par Me Jean-Marc WASILEWSKI, avocat au barreau Fédération de l Assurance CFE CGC 43 rue de Provence 75009 PARIS Fédération des Employés et Cadres Force Ouvrière (FEC FO) 28 rue des Petits Hôtels 75010 PARIS Copies exécutoires délivrées le: Page 1

Syndicat CGT du personnel de la GMF 148 rue Anatole France 92597 LEVALLOIS PERRET CEDEX Syndicat National de l Assurance et de l Assistance CFTC (SN2A CFTC) 21 rue Roque de Fillol 92800 PUTEAUX DÉFENDERESSE Société GMF Assurances 76 rue de Prony 75017 PARIS représentée par Me Virginie MONTEIL, avocat au barreau de PARIS - #P0071 DÉBATS A l audience du 06 Septembre 2011, tenue publiquement, présidée par Juliette LANÇON, Juge, assistée de Férial MOHAMED BEN ALI, Greffier, Nous, Président, Après avoir entendu les parties comparantes ou leur conseil, Par assignation en référé d heure à heure délivrée le 7 juillet 2011, le comité d entreprise de GMF Assurances, le syndicat des Assurances CFDT transrégional et Ile de France (ACTIF), la fédération de l'assurance CFE CGC, la fédération des employés et cadres Force Ouvrière (FEC FO), le syndicat CGT du personnel de la GMF et le syndicat national de l'assurance et de l'assistance (CFTC lsn2a CFTC) demandent au juge des référés de : Page 2

débouter GMF Assurances de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions ; constater : - que l'introduction d'un nouveau dispositif d'entretien Trajectoires doit donner lieu à l'information et à la consultation préalable du Comité d'entreprise de GMF Assurances en vertu des dispositions des articles L. 2323-32 et L. 2323-6 du Code du Travail ; - que l'introduction d'un nouveau dispositif d'entretien Trajectoires doit donner lieu à l'information et à la consultation préalable du Comité d'entreprise de GMF Assurances en vertu des dispositions de l'article 77 de la convention collective des sociétés d'assurance ; - qu'en refusant d'informer et de consulter les membres du Comité d'entreprise de GMF Assurances sur le projet d'introduction d'un nouveau dispositif d'entretien Trajectoires, comportant des critères d'appréciation liés au comportement des salariés, la direction de GMF Assurances commet un trouble manifestement illicite ; - que l'introduction d'un nouveau dispositif d'entretien Trajectoires doit donner lieu à l'information et à la consultation préalable des quatre CHSCT de GMF Assurances en vertu des dispositions des articles L. 4612-1 et L. 4612-8 du Code du Travail ; - qu'en refusant d'informer et de consulter les membres des CHSCT de GMF Assurances sur le projet d'introduction d'un nouveau dispositif d'entretien Trajectoires, comportant des critères d'appréciation liés au comportement des salariés, la direction de GMF Assurances commet un trouble manifestement illicite ; en conséquence, compte tenu de l'urgence, pour prévenir tout dommage imminent, et/ou pour faire cesser tout trouble manifestement illicite : faire défense : - à GMF Assurances d'annoncer et de mettre en œuvre le nouveau dispositif d'entretien Trajectoires tant que le Comité d'entreprise de GMF Assurances n'aura pas été valablement et complètement informé et consulté sur ce nouveau dispositif d'entretien Trajectoires ; - à GMF Assurances d'annoncer et de mettre en œuvre le nouveau dispositif d'entretien Trajectoires tant que les quatre CHSCT de GMF Assurances n'auront pas été valablement et complètement informés et consultés sur ce nouveau dispositif d entretien Trajectoires ; Page 3

ordonner à : - GMF Assurances la suspension de la mise en œuvre du nouveau dispositif d'entretien Trajectoires tant que le Comité d'entreprise GMF Assurances n'aura pas été valablement et complètement informé et consulté, sous astreinte de 500 Euros par jour de retard à compter du prononcé de l'ordonnance à intervenir ; - GMF Assurances la suspension de la mise en œuvre du nouveau dispositif d'entretien Trajectoires tant que les quatre CHSCT GMF Assurances n'auront pas été valablement et complètement informés et consultés, sous astreinte de 500 Euros par jour de retard à compter du prononcé de l'ordonnance à intervenir ; dire qu en cas de difficulté dans l exécution de l ordonnance à intervenir, ou en cas de refus d exécuter cette dernière, il en sera référé au Président du Tribunal qui sera compétent pour liquider l'astreinte ; condamner GMF Assurances à verser au comité d'entreprise et à chacune des organisations syndicales la somme de 1.000 Euros sur le fondement de l article 700 du code de procédure civile ; condamner GMF Assurances aux dépens, y compris ceux liés à l'exécution de l'ordonnance à intervenir. Les demandeurs soutiennent que : - le nouveau formulaire d entretien dit «Trajectoires» qui sert de base à l entretien annuel des salariés a considérablement modifié les critères d évaluation des salariés en introduisant des critères liés au comportement ; - l introduction de ces nouveaux critères doit donner lieu à la procédure d information et de consultation du comité d entreprise, comme le prévoit l article L. 2323-32 du code du travail, en ce que ce dernier doit être informé et consulté sur les mesures de nature à affecter les conditions d emploi, de travail et de formation professionnelle des salariés ; et ce d autant plus que la direction de la GMF Assurances organise de nombreuses formations sur l utilisation des nouveaux formulaires ; - selon l article 77 de la convention collective des sociétés d assurances, le comité d entreprise doit être consulté sur la méthode d appréciation de la contribution du salarié ; - le CHSCT doit être également informé et consulté en vertu des articles L. 4612-1 et L. 4612-8 du code du travail, qui précise que le CHSCT est consulté avant toute décision d aménagement important modifiant les conditions de santé et de sécurité ou les conditions de travail des salariés ; - que l absence d information et de consultation de ces deux organismes cause un trouble manifestement illicite ; Page 4

Aux termes de ses conclusions soutenues oralement, la société GMF Assurances demande au juge des référés de constater qu'elle n'a commis aucun trouble manifestement illicite en diffusant le support d'entretien annuel (appelé «Trajectoires») sans avoir préalablement informé et consulté le comité d'entreprise et les quatre CHSCT, de débouter les demandeurs de l'ensemble de leurs demandes, fins et prétentions, de condamner chaque demandeur à lui verser à la société GMF ASSURANCES la somme de 1.500 sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens. Elle indique : - que depuis 1984, le support qui permet de mener à bien les entretiens annuels a été modifié à de nombreuses reprises; que depuis 2002, la société GMF Assurances a travaillé sur une méthode de définition des profils d emplois et le développement de la formation incluant la prise en compte d un profil de compétences reposant sur une analyse poussée de la dimension comportementale des salariés; que la notion de comportement et de «savoir être» est prise en compte dans tous les process RH, que ces termes sont cités dans de nombreux documents et que la trame de l ancien formulaire est la même, s agissant juste d être plus précis ; - que de ce fait, il n y a pas d aménagement important de l entretien d évaluation nécessitant l information et la consultation du comité d entreprise (qui a d ailleurs été informé lors d une réunion du 29 mars 2011 puisque la question avait été mise à l ordre du jour), ni celle du CHSCT ; - qu il n y a pas non plus de violation des articles de la convention collective puisque cette dernière évoque la notion de «dimension relationnelle» dont doivent faire preuve les salariés dans chaque catégorie de fonctions. MOTIFS DE LA DÉCISION Les formulaires devant servir de guide pour les entretiens annuels d évaluation des salariés de la société GMF Assurances ont changé à de nombreuses reprises depuis 1984. Celui en vigueur en 2010 était un formulaire intitulé Trajectoires entretien annuelqui comprenait quatre rubriques : bilan de la période annuelle (réalisations et contribution du collaborateur : activités, missions, tutorat ), pour la période annuelle à venir (objectifs : précis-atteignables, indicateurs de suivi, moyens à mettre en œuvre), souhaits d évolution, perspectives professionnelles (mobilité fonctionnelle ou géographique) commentaires, observations. Page 5

Le nouveau formulaire proposé sous le même intitulé précise que l entretien «Trajectoires» est un moment important de la vie professionnelle et reprend les mêmes rubriques, tout en détaillant le contenu de chacune d elles. Dans la rubrique bilan individuel de l année écoulée, il est précisé, sous la question globalement, quel est le bilan de l année pour le collaborateur? : sur le plan technique (savoirs/savoir faire) : point forts/points faibles et sur le plan comportemental (savoir être) la rubrique objectifs pour l année à venir, il est mentionné que les objectifs de développement de compétences (techniques et/ou comportementales) sont déterminés en fonction des points à renforcer identifiés dans le bilan individuel de l année écoulée et des objectifs opérationnels de l année à venir. Le comité d entreprise a souhaité inscrire la question de l'introduction du terme "compétences" à l ordre du jour de la réunion du 29 mars 2011, puisque le nouveau formulaire avait été diffusé au sein de la société. Il ressort du procès-verbal de cette réunion que de nombreux salariés ont manifesté leurs inquiétudes quant à l introduction de cette nouvelle notion d'analyse comportementale dans leur évaluation annuelle. La direction a expliqué que les compétences comportementales concernaient l ajustement du comportement en fonction des situations et s est engagée à diffuser une définition commune de cette expression aux managers, ce qu'elle n'a pas fait. La direction a ajouté que depuis le début de l année 2011 deux sessions de formation ont été organisées pour 73 personnes concernant ce nouvel outil. La consultation préalable du comité d entreprise sur la décision de mise en œuvre dans l entreprise de moyens ou techniques permettant le contrôle de l activité des salariés, doit lui permettre de donner son avis sur la pertinence et la proportionnalité entre les moyens utilisés et le but recherché. Il est introduit dans ce nouveau formulaire par rapport au précédent la notion de «comportement du salarié» comme critère d évaluation. Il ne s agit pas d une simple modification formelle. Cette notion n était pas inexistante au sein de la société GMF Assurances, puisqu elle est existe sous le terme «savoir être» ou «comportement» dans des fiches de fonction ou d évolution et dans des dispositions relatives à l apprentissage ou à la formation professionnelle. Ainsi à chaque fois, elle est explicitée au travers d'exemples, notamment sur des attitudes à avoir par rapport à l accueil du public ou la façon de répondre au téléphone. Il ne s agit en aucun cas d une notion imprécise comme indiquée dans le nouveau formulaire, qui laisse part à une grande part de subjectivité. Page 6

Ce nouveau formulaire va modifier les techniques permettant de contrôler de l activité du salarié, en mettant davantage l accent sur les aptitudes techniques et comportementales, c est à dire les comportements appropriés à la situation du travail du collaborateur, comme l indique l article Changer de trajectoires, dans la rubrique Innover du magazine des salariés de la GMF d avril 2011. En conséquence, le comité d entreprise de la GMF assurances devait être informé et consulté sur ces nouveaux éléments de contrôle de l activité des salariés, ce qui n a pas été le cas, causant de ce fait un trouble manifestement illicite. L article 77 de la convention collective des sociétés d assurance du 27 mai 1992 prévoit qu un entretien individuel permettant de faire le point sur le degré de satisfaction réciproque du salarié et de l'entreprise ainsi que sur leurs attentes mutuelles a lieu une fois par an. Cet article précise notamment que la méthode d appréciation de la contribution du salarié doit être exposée devant le comité d entreprise, qui doit être consulté à ce sujet. Néanmoins, les modalités pratiques des entretiens individuels sont définies dans chaque entreprise, compte tenu de ses caractéristiques propres et que lors de leur mise en place, elles sont communiquées par écrit, après information du comité d entreprise ou d établissement, à l ensemble du personnel. Cette convention précise dans son annexe que chaque société doit classer les fonctions présentes au sein de son entreprise. Chaque fonction doit être divisée en sept classes, elles-mêmes divisées en degrés. Dans les critères pour définir les degrés est prise en compte une dimension relationnelle, qui est définie comme les différents types de situations relationnelles, notamment hiérarchique et commerciale, impliquées par la fonction est donnée une série d exemples par degré. Quand bien même ces éléments seraient repris dans les fiches «fonction» de la société GMF Assurances, le comité d entreprise devait être informé et consulté avant l application de toute nouvelle méthode d appréciation de la contribution du salarié, comme indiqué à l article 77 de la convention collective, comme c est le cas en l espèce. Par conséquence, la société GMF Assurances a violé les dispositions de l article 77 de la convention précitée, créant un trouble manifestement illicite ; En revanche, le comité d'entreprise n'ayant pas qualité pour représenter les intérêts du CHSCT, les demandes formées pour le compte de ces derniers qui ne sont pas dans la cause et tendant à voir ordonner leur consultation sont irrecevables. Page 7

Le défendeur qui succombe sera condamné à payer au comité d'entreprise et à chacune des organisations syndicales la somme de 1.000 sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ; Il n'y a pas lieu à astreinte dans la mesure où rien ne laisse supposer que la société GMF Assurances se soustraira aux demandes du tribunal. PAR CES MOTIFS, statuant publiquement, en premier ressort, par ordonnance contradictoire, par mise à disposition au greffe, Ordonnons à la société GMF Assurances de suspendre la mise en œuvre du nouveau dispositif d'entretien Trajectoires tant que le comité d'entreprise GMF Assurances n'aura pas été valablement et complètement informé et consulté, Condamnons la société GMF Assurances à verser au comité d'entreprise et à chacune des organisations syndicales la somme de 1.000 sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, Condamnons la société GMF Assurances aux dépens. Fait à Paris le 27 septembre 2011 Le Greffier, Le Président, Férial MOHAMED BEN ALI Juliette LANÇON Page 8