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Transcription:

Exempt - appel en matière de droit du travail. Audience publique du dix-huit décembre deux mille douze. Numéro 37774 du rôle Présents: Carlo HEYARD, président de chambre, Ria LUTZ, premier conseiller, Théa HARLES-WALCH, conseiller, Isabelle HIPPERT, greffier. A, demeurant à F-( ), E n t r e : appelante aux termes d un exploit de l huissier de justice suppléant Véronique REYTER, en remplacement de l huissier de justice Jean-Claude STEFFEN d Esch-sur-Alzette du 29 juillet 2011, comparant par Maître Patrice MBONYUMUTWA, avocat à la Cour à Luxembourg, e t : 1) la société à responsabilité limitée B s.à r.l., établie et ayant son siège social à L-( ), représentée par son gérant actuellement en fonctions, intimée aux fins du susdit exploit REYTER, comparant par Maître Joëlle ELVINGER, avocat à la Cour à Luxembourg, 2) la société à responsabilité limitée C s.à r.l., établie et ayant son siège social à L-( ), représentée par son gérant actuellement en fonctions, intimée aux fins du susdit exploit REYTER, défaillante.

LA COUR D'APPEL: Vu l ordonnance de clôture de l instruction du 26 juin 2012. Ouï le magistrat de la mise en état en son rapport oral à l audience. Par requête du 21 mars 2011, A réclama à 1) B sàrl et à 2) C s.à r.l., suite à sa démission à requalifier en licenciement abusif, réparation de ses préjudices tant matériel que moral. Engagée par la société C le 1 er juillet 2009 pour le poste de gérante technique / responsable coiffeuse, société dans laquelle elle exerçait encore un mandat social de gérante puisque l autorisation de faire le commerce était à son nom, A fut informée par courrier du 9 novembre 2010 que son employeur allait cesser son commerce et qu un nouvel acquéreur reprendrait le salon, la société B ; elle fit exposer que la société repreneuse lui adressa à deux reprises un contrat de travail qu elle refusa de signer car il contenait une modification substantielle de son ancien contrat de travail en ce qui concerne ses fonctions; finalement par courrier du 20 décembre 2010 elle démissionna avec effet immédiat pour faute grave en conformité avec l article L.121-7 du code du travail. La société C contesta la demande de son ancienne salariée précisant que cette dernière aurait été engagée par la société B en qualité de coiffeuse pour le même salaire; que le mandat social exercé par elle ne relèverait pas du droit du travail. La société B se rallia aux contestations du premier employeur et précisa que la modification intervenue porterait uniquement sur la fonction de gérante et ne serait dès lors pas à considérer comme une modification essentielle en sa défaveur mais plutôt en sa faveur étant donné qu elle a eu droit au même salaire en ayant moins de responsabilités. Par un jugement du 24 juin 2011, le tribunal du travail a dit que la démission du 20 décembre 2010 pour refus d accepter ladite modification ne s analyse pas en un licenciement abusif du contrat de travail de A et a débouté cette dernière de toutes ses demandes et donné acte à l ETAT, pris en sa qualité de gestionnaire du Fonds pour l emploi, qu il n a pas de revendications à formuler dans la présente affaire. Pour statuer comme il l a fait, le tribunal a considéré, après avoir analysé les conditions d application de l article L.121-7 du code du travail «qu il se dégage des pièces versées au dossier que la modification telle que proposée par le contrat de travail soumis pour signature en décembre 2010 ne portait que sur la fonction de gérante, tous les autres avantages -l ancienneté et, surtout, le salaire - ayant été maintenus.» Il a encore considéré «que même s il y avait une modification à la baisse des responsabilités à assumer par la salariée par rapport à son premier contrat de travail, cela ne constituerait pas une modification substantielle de son contrat de travail.» A a régulièrement relevé appel dudit jugement par acte de l huissier de justice Véronique REYTER du 29 juillet 2011. L appelante demande de déclarer son appel fondé et de réformer le jugement entrepris dans tous les chefs de son dispositif ; partant par réformation les deux intimées s entendre dire que la

démission du 20 décembre 2010 pour faute grave de l employeur s analyse en un licenciement abusif et en conséquence s entendre solidairement condamner à lui payer la somme de 19.141 euros pour le préjudice matériel subi et la somme de 10.087,32 euros pour le préjudice moral. L appelante rappelle qu auprès de son premier employeur elle exerçait concomitamment à ses fonctions de responsable coiffeuse, un mandat social de gérante technique étant titulaire de l autorisation d établissement, que ces deux fonctions étaient totalement distinctes et autonomes l une de l autre ; que les contrats de travail lui soumis par le deuxième employeur contenaient une modification substantielle de l ancien contrat puisqu il ne reprenait pas ses anciennes fonctions, l engageant comme simple coiffeuse, partant la rétrogradant de gérante responsable coiffeuse à simple coiffeuse, même si son ancien salaire et son ancienneté de service ont été maintenus ; que partant seules ses fonctions salariales ont fait l objet d une modification illégale, de sorte qu il y aurait lieu de réformer le premier jugement qui a opéré une confusion entre les deux fonctions totalement différentes. Elle précise encore que si elle a accepté le premier contrat de travail, c était justement parce que son employeur lui offrait des responsabilités plus importantes, des possibilités de prendre des décisions et de diriger le salon de coiffure, ce qui diffère considérablement et incontestablement des fonctions de simple coiffeuse. Ensuite, elle soutient que pour modifier de façon substantielle son contrat de travail le nouvel employeur aurait dû suivre la procédure prévue par l article L.121-7 du contrat de travail, ne l ayant pas fait il a commis une faute grave l autorisant à démissionner avec effet immédiat. Elle en conclut que son refus de la modification s analyse en un licenciement abusif de sorte qu elle pourrait prétendre à des dommages et intérêts pour les préjudices subis ; elle calcule son préjudice matériel sur base d une période de référence de neuf mois. Elle précise encore avoir assigné les deux sociétés employeuses sur base de l article L.127-3 d après lequel le cédant C s.à r.l. et le cessionnaire B s.à r.l. sont solidairement tenus à l égard de A des droits et obligations qui résultent de la résiliation du contrat de travail. L intimée B sàrl demande à la Cour de déclarer l appel non fondé et de confirmer le jugement dans toute sa forme et teneur Elle maintient les mêmes arguments qu en première instance plus précisément, elle conteste qu il y ait eu une modification d une clause essentielle du contrat de travail de la salariée. Elle estime au contraire qu il y a eu une modification en faveur de la salariée étant donné qu elle avait droit au même salaire en ayant moins de responsabilités. Elle conteste les montants réclamés par la salariée tant en principe que dans leur montant et demande à titre subsidiaire de réduire la période de référence à trois mois alors que la salariée a ouvert un salon de coiffure quelques semaines seulement après sa démission ; elle précise finalement que la salariée n a jamais travaillé pour son nouvel employeur puisqu elle était en arrêt de maladie jusqu à sa démission. L intimée C s.à r.l. n a pas pris de conclusions.

La Cour renvoie quant aux faits de la cause et quant aux moyens et prétentions des parties à la relation correcte faite par le tribunal du travail pour la faire sienne dans son intégralité. Quant à la requalification de la démission de la salariée en licenciement abusif Si c est à bon droit que le tribunal du travail a, dans un premier temps examiné si la résiliation du contrat de travail découlant du refus de la salariée d accepter la modification lui notifiée par courrier recommandé du 10 décembre 2010 constitue une modification substantielle de son contrat de travail, qu il a encore fait une analyse correcte des dispositions de l article L.121-7 du code du travail y relative et de ses conditions d application et s il a finalement à bon escient relevé les principes jurisprudentiels constants à cet égard, force est cependant de constater que le tribunal du travail en a tiré les fausses conséquences pour le cas d espèce. La Cour constate tout d abord que le tribunal du travail a effectivement opéré une confusion entre les deux activités exercées par la salariée au sein de la société sub 1). Les juges de première instance ont en effet indiqué dans leur motivation : «Dès lors et même à supposer que le contrat proposé en décembre 2010 par la défenderesse sub 2) entraîne une modification à la baisse des responsabilités à assumer par la requérante par rapport à son contrat signé le 1 er juillet 2009, le tribunal ne peut que constater que le refus de la défenderesse sub 2) de la désigner en qualité de gérante technique/responsable, concomittant à sa reprise en qualité de responsable coiffeuse ou coiffeuse, ne constitue pas une modification substantielle de son contrat de travail à défaut d entraîner également une réduction de son salaire. En outre, le mandat de gérante technique d une société à responsabilité limitée étant à la disposition du nouvel acquéreur, les associés de la défenderesse sub 2), les circonstances qui entourent cette désignation ne sauraient constituer une modification du contrat de travail de la requérante auquel ledit mandat, distinct de son contrat de travail, a été refusé.» La salariée était cependant engagée depuis le 1 er juillet 2009 par l assigné sub 1) comme gérante technique/ responsable coiffeuse du salon de coiffure ; elle cumulait partant son mandat social statutaire de gérante technique de la sàrl C, avec sa fonction de travailleuse salariée, découlant de son contrat de travail, soit de responsable coiffeuse, partant deux activités différentes régies chacune par des règles qui lui sont propres. La salariée reproche partant à bon droit au tribunal du travail d avoir confondu ces deux activités dans son raisonnement, respectivement sa motivation. Elle reproche en fait à la société sub 2) d avoir modifié sa fonction de responsable coiffeuse et non de l avoir révoquée en tant que gérante technique. Concernant la modification intervenue, il y a lieu tout d abord de rappeler que pour être substantielle la modification doit porter sur un élément du contrat qui avait été considéré par les parties comme essentiel lors de la conclusion, c'est-à-dire sur un élément qui avait pu les déterminer à contracter. Il résulte des renseignements fournis que la salariée a accepté de travailler pour l assignée sub 1) justement parce qu il lui était proposé de gérer le salon de coiffure et donc d en être, à côté de sa fonction de coiffeuse, la responsable par rapport à l organisation du salon de coiffure et de son personnel.

Il y a lieu de relever ensuite, qu il y a abus de droit dans l exercice du droit de modifier les conditions de travail lorsque malgré le maintien de la qualification (coiffeuse) et de la rémunération comme en l espèce, la modification change profondément l importance de la fonction confiée au salarié (Cour 21 janvier 1976, Pasicrisie 23.372). Partant en prévoyant d affecter la salariée au poste de simple coiffeuse, poste prévu dans les deux contrats de travail lui soumis, l assignée sub 2), qui a repris le salon de coiffure de l assignée sub 1) ainsi que l ensemble de son personnel, a modifié une clause essentielle de son contrat de travail alors qu elle l a dégradée d une fonction dirigeante à une fonction subalterne, même si sa rémunération est restée la même. Il résulte des considérations qui précèdent que c est à tort que les juges de première instance ont considéré qu il n y avait pas modification d une clause essentielle du contrat de travail de la salarié et l a débouté de ses demandes Dès lors, il y a lieu par réformation de constater que la modification intervenue est non seulement substantielle mais elle est encore intervenue en violation des articles L.124-2 et 124-3 du contrat de travail, de sorte que la démission de A est à considérer, d après la loi, comme un licenciement abusif lui ouvrant les recours prévus à l article L.124-11, c'est-à-dire lui donnant les mêmes droits et moyens qu au salarié licencié et plus précisément lui accordant le droit de demander réparation des préjudices tant matériel que moral subis suite à ce licenciement abusif. Si la salariée a partant en principe droit au paiement de dommages-intérêts pour le préjudice matériel subi suite à ce licenciement abusif, encore faut-il que ce préjudice soit réel et justifié par des pièces et qu il soit en relation causale directe avec le congédiement abusif. Or, il résulte des renseignements fournis et des pièces soumises à l appréciation de la Cour, que A a ouvert son propre salon de coiffure le 15 mars 2001, soit trois mois après sa démission donnée le 15 mars 2011, sans cependant préciser quelle était sa situation financière pendant ces trois mois, partant sans justifier la réalité de son préjudice matériel, et la relation causale directe entre ce préjudice et son licenciement abusif, de sorte que sa demande est à déclarer non fondée. La Cour considère cependant, eu égard aux circonstances du licenciement abusif de la salariée, à son ancienneté de service remontant au 27 novembre 2007, à son âge (née le 12 octobre 1972) ainsi qu au fait qu elle a ouvert son commerce trois mois déjà après avoir donné sa démission, que son préjudice moral est réparé de façon adéquate par le paiement de dommages et intérêts à hauteur de 1.500 euros. La salariée conclut à la condamnation solidaire des intimées sub1) et sub2) par application de l article L.127-3(1) du code du travail C est cependant à tort que l appelante soutient que selon le prédit article le cédant C sàrl et le cessionnaire B sàrl seraient solidairement tenus à son égard des droits et obligations qui résultent de la résiliation du contrat de travail. En effet l article L.127-3(1) dispose «les droits et obligations qui résultent pour le cédant d un contrat de travail ou d une relation de travail existant à la date du transfert sont, du fait de ce transfert, transférés au cessionnaire.» Or, au moment du transfert il n y avait ni droits ni obligations résultant pour le cédant du contrat de travail existant à cette date.

Le paragraphe 3 du prédit article précise encore : «Le cédant et le cessionnaire sont, après la date du transfert, responsables solidairement des obligations venues à échéance avant la date du transfert à la suite d un contrat de travail ou d une relation de travail existant à la date du transfert». Or, il n y a pas en l espèce «d obligations venues à échéance avant la date du transfert», de sorte que la solidarité quant à la condamnation à prononcer par la Cour sollicitée par A ne joue pas en l occurrence et seul le cessionnaire, c'est-à-dire son nouvel employeur est tenu de payer à A les dommages et intérêts lui alloués en réparation du préjudice moral. Chacune des parties réclame une indemnité de procédure sur base de l article 240 du NCPC. La partie qui succombe et qui est condamnée aux frais et dépens de l instance ne peut bénéficier des dispositions de l article 240 du NCPC, de sorte que la demande de la société B sàrl est à rejeter. Au vue de l issue positive de l instance d appel pour A, il ne paraît pas inéquitable de lui allouer une indemnité de procédure de 1.000 euros pour l instance d appel ainsi que la même indemnité de procédure de 1.000 euros pour la première instance et ce par réformation du jugement entrepris. PAR CES MOTIFS : la Cour d appel, troisième chambre, siégeant en matière de droit du travail, statuant contradictoirement, sur le rapport oral du magistrat de la mise en état, déclare l appel recevable, le dit fondé, Réformant : dit que la démission avec effet immédiat de A du 20 décembre 2010 est à considérer comme licenciement abusif, dit la demande de A en paiement de dommages-intérêts pour le préjudice matériel non fondée et en déboute, dit la demande de A en paiement de dommages-intérêts pour le préjudice moral subi fondée pour un montant de 1.500 euros, dit que la solidarité prévu par l article L.127-3.(1) ne s applique pas,

dit non fondée la demande de A en tant que dirigée contre la société C s.à r.l., partant condamne la société B s.à r.l. à payer à A la somme de 1.500 euros avec les intérêts légaux à partir du jour de la demande en justice jusqu à solde, condamne la société B à payer à A une indemnité de procédure de 1.000 euros pour l instance d appel ainsi qu une indemnité de procédure de 1.000 euros pour la première instance, rejette la demande de la sàrl B basée sur l article 240 du NCPC, condamne la société à responsabilité limitée B aux frais et dépens des deux instances.