Chercheure principale Annie Aimé, U. du Québec en Outaouais. Co-chercheur(s) Catherine Bégin, U. Laval Pierre Valois, U. Laval

Documents pareils
ESTIME DE SOI ET IMAGE CORPORELLE : COMPRENDRE POUR MIEUX INTERVENIR

Repenser notre façon d aborder les problèmes de poids : s inspirer d un nouveau paradigme. Fannie Dagenais, Dt.P., M.Sc.

Monitoring des données relatives au poids effectué par les services médicaux scolaires des villes de Bâle, Berne et Zurich

Une vision d avenir. Il était deux petits navires. Mise en contexte. Rapport Perrault. Forum des générations (2004) En bref...

Guide d intervention sur. l intimidation. destiné aux intervenants - 1 -

Apprenez à votre enfant la Règle «On ne touche pas ici».

Chaque Jour, les enfants sont victimes d intimidation.

POLITIQUE D ÉGALITÉ ENTRE LES FEMMES ET LES HOMMES

Une école adaptée à tous ses élèves

Orientations. gouvernementales. en matière. d agression. sexuelle. Plan d action

Un besoin identifié : les jeunes et leur santé (état des lieux et constat)

AVIS DE LA FÉDÉRATION QUÉBÉCOISE DE L AUTISME DANS LE CADRE DE LA CONSULTATION PUBLIQUE SUR LA LUTTE CONTRE L INTIMIDATION

Conseils sur la conduite à tenir en cas de suicide d un salarié sur le lieu de travail

(septembre 2009) 30 %

Analyse des mesures anthropométriques et de la composition corporelle des cégépiens et des cégépiennes

Évaluation et recommandations

Les défauts et «fautes impardonnables» des candidats à l élection présidentielle

LE MARKETING SOCIAL ET

1/ LES CARACTÉRISTIQUES DU CYBER-HARCÈLEMENT

J ai droit, tu as droit, il/elle a droit

La notion de besoin peut décrire : La notion de besoin peut décrire :

Analyse des questionnaires d évaluation parents et enfants Juin 2015

STATUTS DE L ASSOCIATION DE L ESPACE DE VIE ENFANTINE LES MOUSSAILLONS

CATÉGORIE B TEST D ORIENTATION TECHNIQUES D'EXPRESSION ÉCRITE

La contribution des pères au développement de leur enfant

Étude comparative sur les salaires et les échelles salariales des professeurs d université. Version finale. Présentée au

Sondage sur le phénomène de la cyberintimidation en milieu scolaire. Rapport présenté à la

Table des matières. Introduction 2

Bien dans sa tête, bien dans sa peau: pour une école en santé! Fannie Dagenais, Dt.p., Directrice ÉquiLibre, Groupe d action sur le poids

Bienvenue à la conférence en ligne Violence au travail : présentation des résultats du sondage mené auprès de trois secteurs professionnels

Les approches de réduction des méfaits trouvent un certain appui dans la population québécoise*

Les pratiques de simulation de crise: enquête auprès de quarante-trois grands établissements financiers

Service de l adaptation scolaire et des services complémentaires

L approche populationnelle : une nouvelle façon de voir et d agir en santé

Dangers potentiels d Internet et des jeux en ligne

L heure est venue de passer à l action pour aider les enfants de l Ontario

COMMENT REAGIR FACE A L INTIMIDATION A L ECOLE

ENSEIGNEMENT DES SCIENCES ET DE LA TECHNOLOGIE A L ECOLE PRIMAIRE : QUELLE DEMARCHE?

Quels sont les indicateurs socio-sanitaires utiles pour la promotion de la santé en milieu scolaire? Ce que nous apprend la littérature

ÉVALUATION DE LA PERSONNE ATTEINTE D HYPERTENSION ARTÉRIELLE

ET SI LA PARTICIPATION FAISAIT LA DIFFÉRENCE

Cahier des charges pour le tutorat d un professeur du second degré

Comment un. accident. peut-il engager la. responsabilité pénale. des élus locaux et des fonctionnaires territoriaux?

Joël Tremblay, Ph.D Nadine Blanchette-Martin, M. Serv. Soc. Pascal Garceau, étudiant en sociologie

Mémoire de la Corporation de développement communautaire de Côte-des-Neiges portant sur le projet de Schéma d aménagement et de développement de l

Le conseil d enfants La démocratie représentative à l école

Chronique Assurances et gestion des risques. sous la responsabilité de Gilles Bernier 1

Charte de la laïcité à l École Charte commentée

Politique Institutionnelle. Politique de protection de l enfance. Direction Générale Fédérale 2007 PI 01

La migraine. Foramen ovale perméable. Infarctus cérébral (surtout chez la femme)

7. Exemples de tests pour détecter les différents troubles de la vision.

PRIMAIRE. 1er cycle, 2e année. Les tâches familiales. Planification des activités

OBESITE ET EPS. Cf national, nutrition santé, courbe de corpulence)

LIGNES DIRECTRICES CLINIQUES TOUT AU LONG DU CONTINUUM DE SOINS : Objectif de ce chapitre. 6.1 Introduction 86

Cohorte Observatoire Musculosquelettique (COMETT) Pénibilité et Vieillissement

Réformedes. rythmes, quel. temps pour. Rythmes scolaires : plus de 80% de participation au questionnaire diffusé par la Ville

Plan d Action de Ouagadougou contre la traite des êtres humains, en particulier des femmes et des enfants, tel qu adopté par la Conférence

LA CIBLE Ce que nous savons des 9-13 ans

S ONDAGE SUR LA SCOLARIS ATION E N MILIE U ORDINAIRE DES ENFANTS E N S ITUATION DE HANDICAP EN ELEMENTAIRE ET AU COLLEGE

Soutien en informatique clinique Un projet pilote

Les aspects psychologiques de la paralysie cérébrale : répercussions et enjeux dans le parcours de vie.

Agir. ensemble. pour prévenir les. problèmes liés au poids

Philippe BANCE Président du Conseil scientifique international du CIRIEC CREAM Normandie Université (Univ. Rouen)

Étude auprès de la génération X. Le paiement virtuel et la gestion des finances personnelles

Étude sur les dépenses des étudiants universitaires

COMMENT RENFORCER LES ENFANTS A SE PROTEGER EUX-MEMES. Production: Groupe d enfants participants à l atelier Présentation: Essenam & Paa Kwessi

Photographie statistique des accidents de travail, des accidents de trajet et des maladies professionnelles en France selon le sexe entre 2001 et 2012

Le réseau social des filles en lien avec les gangs : mieux connaître pour mieux intervenir

Dossier de presse «Fais-nous rêver-fondation GDF SUEZ»,

PROCESSUS D AIDE MUTUELLE DANS LE TRAVAIL SOCIAL AVEC LES GROUPES De l intérêt à distinguer entraide et aide mutuelle

Directives canadiennes en matière de comportement sédentaire

CODE DE CONDUITE FOURNISSEUR SODEXO

IFRS 11 : Coentreprises Passage de la méthode de la consolidation proportionnelle à la méthode de la mise en équivalence

TABAC : PREMIER BILAN SUR L APPLICATION DE LA LOI EVIN EN MILIEU SCOLAIRE. Dossier de Presse

Charte départementale Accueil et scolarisation des enfants de moins de trois ans

PASS sports vacances. Sommaire

La fraude par complaisance et la justice alternative chez les mineurs

Écoutez ce qui se dit sur l épargne-retraite au Canada

squelettique Importance pressentie des troubles de santé psychologique Sollicitation par les centres d urgence d

ENQUÊTE SUR LA PRATIQUE DE L ACTIVITÉ PHYSIQUE CHEZ LES JEUNES EN MILIEU SCOLAIRE RAPPORT DE RECHERCHE PAR

Clubs Garçons et Filles : Pour le développement de jeunes en santé et pleins de confiance. Avril 2007

Complément pédagogique

Plan et résumé de l intervention de Jean-Philippe Dunand

REGARDS SUR L ÉDUCATION 2013 : POINTS SAILLANTS POUR LE CANADA

AVIS SUR L ACCÈS DES ENFANTS AYANT DES LIMITATIONS FONCTIONNELLES AUX SERVICES DE GARDE À L ENFANCE

L'art pour les tout-petits : expérience pilote au sein de différentes maisons d accueil et crèches

RÉSULTAT DISCIPLINAIRE RÈGLE DE RÉUSSITE DISCIPLINAIRE Programme de formation de l école québécoise Secondaire - 1 er cycle

PRÉSENTATION DU PROGRAMME. Le cœur à l école. PROGRAMME DE PRÉVENTION DE L ÉCHEC SCOLAIRE ET SOCIAL Volets préscolaire et 1 er cycle du primaire

Une école adaptée à tous ses élèves

Faculté de Psychologie et des Sciences de l Education

La loi du 1% au Québec et son impact sur la formation 1

La transformation du travail au quotidien suite à l implantation d un nouveau logiciel de gestion

PROJET PEDAGOGIQUE DE L'ACCUEIL JEUNES 11/17 ANS

Logiciels d éducation à la Nutrition et à l activité physique

présentés à l Ordre des ingénieurs du Québec

Les 7 Facteurs clés de Succès pour s'épanouir sur le plan personnel, familial et professionnel au Canada

L écart salarial entre les femmes et les hommes en Belgique

Préparer la formation

Introduction par effraction

Transcription:

Environnement et discrimination à l'école primaire: quel est l'impact de ces facteurs sur les habitudes de vie, les préoccupations corporelles et les trajectoires de poids d'enfants et de préadolescents? Chercheure principale Annie Aimé, U. du Québec en Outaouais Co-chercheur(s) Catherine Bégin, U. Laval Pierre Valois, U. Laval Autre(s) membre(s) de l'équipe Wendy Craig, Queen's University Marie-Christine Brault, Université du Québec en Outaouais Marilou Côté, Université Laval Partenaires impliqués Commission scolaire au Cœur-des-Vallée Commission scolaire des Draveurs Commission scolaire des Portages-de l Outaouais Commission scolaire des Appalaches Commission scolaire de la Capitale Commission scolaire des Découvreurs Commission scolaire des Premières Seigneuries Établissement gestionnaire de la subvention U. du Québec en Outaouais Numéro du projet de recherche 2010-PD-137192 Titre de l'action concertée Problèmes de poids et facteurs sociaux Partenaire(s) de l'action concertée Le Ministère de la Santé et des Services sociaux, Le Centre de recherche en prévention de l obésité, Le Fonds de la recherche en santé du Québec et le Fonds de recherche du Québec - Société et culture (FRQSC) Le Fonds s'engage à rendre public les Rapports de recherche produits dans le cadre des Actions concertées. Le contenu n'engage que ses auteurs.

Résumé Titre promotionnel : Quand le poids défini l enfant et son bien-être Principale question ou hypothèse de recherche Le projet actuel s intéresse à l évolution du poids chez des jeunes âgés entre 8 et 14 ans. Il est attendu que différentes trajectoires d évolution du poids soient obtenues et que des différences sexuelles s observent. Principaux résultats et principales pistes de solution Les résultats obtenus font état d un indice de masse corporelle (IMC) plutôt stable à travers le temps. En fait, les jeunes qui sont minces, en surpoids ou obèses à 8 ans tendent à conserver un IMC semblable et dans la même catégorie de poids jusqu à l âge de 14 ans. À la lumière des efforts de sensibilisation par rapport à l obésité réalisés au cours des dernières années, cette stabilité du poids chez les jeunes en surpoids ou obèses est inquiétante. Ces jeunes semblent même adoptés des comportements allant à l encontre des recommandations qui leur sont adressées en pratiquant moins d activité physique que les jeunes de leur âge qui sont minces ou de poids normal. Les jeunes en surpoids et obèses présentent par ailleurs de plus fortes insatisfactions corporelles et sont plus à risque de subir de l intimidation par rapport à leur poids. Lorsque des changements de poids sont observés entre 8 et 14 ans, une inégalité sexuelle se remarque : 24% des filles dont le poids à 8 ans est considéré normal gagnent du poids et 38% des garçons dont le poids est normal en perdent.

Ainsi, alors que la puberté fait en sorte que les filles s éloignent de l idéal de minceur auquel elles aspirent, il semble qu elle amène les garçons à mincir. Cette inégalité accentue possiblement l écart observé entre les filles et les garçons sur le plan de la satisfaction corporelle. À cet effet, nos résultats témoignent, d une plus forte insatisfaction corporelle et d un désir de perdre du poids plus fréquent chez les filles que chez les garçons. Les résultats de notre étude montrent que l insatisfaction corporelle s observe chez les filles et les garçons, et ce, même s ils ne sont pas en surpoids. En effet, 19% et 20% des filles et des garçons qui demeurent minces entre 8 et 14 ans et plus de 40% des jeunes qui maintiennent un poids normal aspirent à être plus minces. Ces résultats confirment que l insatisfaction corporelle devient une norme pour les jeunes peu importe leur poids et leur sexe. Elle s installe tôt dans l enfance, augmente avec l âge, est pratiquement aussi prévalente chez les garçons que chez les filles et affecte même les enfants plus minces. Ce phénomène d insatisfaction corporelle normative intrigue. Il doit être mieux compris de manière à éviter de compromettre le développement de l estime de soi et l adaptation psychosociale des jeunes. Des initiatives et stratégies liées à l acceptation et la valorisation du corps sont souhaitables, voire même nécessaires, dès le primaire. Cependant, ces stratégies devront être évaluées rigoureusement afin d en cibler les composantes les plus efficaces et de s assurer de ne pas causer de tort aux enfants. La discrimination à l égard du poids est quant à elle vécue et rapportée par certains jeunes de 8 à 14 ans. La probabilité d en être victime augmente en fonction de l indice de masse corporelle, ce qui signifie que les jeunes dont le poids est plus élevé sont plus à risque d être confrontés à des biais négatifs par rapport à

leur poids. Or, ces biais peuvent : (1) limiter leur désir de s engager dans des activités physiques; (2) faire en sorte qu ils se sentent exclus ou différents et qu ils s isolent; (3) les empêcher de développer une estime de soi positive; et (4) les amener à avoir recours à la nourriture pour apaiser des émotions négatives comme l anxiété ou la tristesse. Bref, les conséquences de la discrimination par rapport au poids sur le bien-être psychologique peuvent être considérables. En ce sens, il importe de veiller à ce que les interventions centrées sur les saines habitudes de vie réalisées auprès des enfants prêtent attention à de possibles effets indésirables. Ces interventions ne doivent pas accentuer les biais négatifs à l égard du poids ou encore faire en sorte que les jeunes se sentent coupables face à leur poids. Elles doivent plutôt contribuer à les protéger de conséquences psychosociales néfastes. Bref, les résultats obtenus indiquent le besoin de privilégier une approche plus holistique afin de prévenir l obésité chez les jeunes. En ce sens, il importe de favoriser l adaptation psychosociale ainsi que le bien-être psychosocial chez les jeunes en surpoids et obèses. Non seulement doit-on informer les enfants et leurs parents par rapport aux habitudes de vie à préconiser, mais il convient aussi de leur fournir un contexte de vie où ils se sentiront plus à l aise d adopter de telles habitudes de vie. À cet effet, les résultats de notre étude mettent en relief la nécessité de protéger les jeunes des pressions médiatiques ressenties, de les encourager à se pourvoir d une capacité de nuancer les informations auxquelles ils sont exposés, de les aider à se définir autrement que par leur poids et d enrayer l intimidation par rapport au poids dont ils peuvent être victimes.

Contexte et historique du projet en lien avec l appel de propositions Le présent projet de recherche s inscrit dans la visée de mieux comprendre les déterminants environnementaux et sociaux liés à l apparition de problèmes de poids chez les enfants, tel que suggéré dans l appel de propositions de l action concertée. Les déterminants environnementaux ont été évalués à partir du nombre d heures passées devant un écran, de la fréquence à laquelle des magazines de mode sont lus, de la conscience des standards de minceur, de l internalisation de ces standards et de la pression ressentie pour s y conformer. Les déterminants sociaux portent principalement sur le phénomène de la discrimination par rapport au poids. À ces déterminants, des facteurs individuels (image corporelle, préoccupations par rapport au poids, niveau de pratique de l activité physique) et familiaux (IMC des parents, préoccupations des parents face au poids et à l alimentation) se sont ajoutés afin de rendre compte du mieux possible de différentes influences sur l évolution du poids des jeunes de 8 à 14 ans. Notre étude cherchait également à étudier l apparition de problèmes de poids, tel que suggéré dans l appel de propositions. Nous avons donc choisi d utiliser la méthode des trajectoires de poids et un devis longitudinal accéléré pour tracer l évolution du poids des jeunes entre les âges de 8 à 14 ans. Nous constatons que les insatisfactions corporelles et la discrimination par rapport au poids constituent d importants prédicteurs du surpoids et de l obésité. Conséquemment, les efforts de sensibilisation et d intervention liés à la variété des schémas corporels et à l élimination des comportements d intimidation en lien avec le poids en milieu scolaire doivent être poursuivis.