Décision du Défenseur des droits n MLD

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T : F : info@cms-bfl.com Neuilly-sur-Seine, le 14 décembre 2011

Recommandation n /PG en application de l article 43-1 de la loi n et du décret n

Transcription:

Paris, le 16 décembre 2016 Décision du Défenseur des droits n MLD-2016-317 Le Défenseur des droits, Vu l article 71-1 de la Constitution du 4 octobre 1958 ; Vu la loi organique n 2011-333 du 29 mars 2011 relative au Défenseur des droits ; Vu le décret n 2011-904 du 29 juillet 2011 relatif à la procédure applicable devant le Défenseur des droits ; Vu la loi n 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ; Vu loi n 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations ; Saisi par Madame X, agent contractuel au sein de la commune de Z jusqu au 31 décembre 2013, qui dénonce le non-renouvellement de son contrat de travail ainsi que la privation de toute fonction pendant les quatre derniers mois de son contrat, pour des raisons liées à son âge ; Décide, en vue de régler la situation exposée dans la note récapitulative ci-jointe, de recommander au maire de la commune de Z : de se rapprocher de Madame X afin de définir avec elle le montant de l indemnisation des préjudices subis du fait du non-renouvellement de son contrat de travail ; d adresser une note de service aux agents de la commune rappelant le principe de non-discrimination dans l emploi tel qu il est posé à l article 6 de la loi du 13 juillet 1983. Demande à être tenu informé des suites réservées à ses recommandations dans un délai de deux mois à compter de la date de notification de la présente décision. Jacques TOUBON 2

Recommandations dans le cadre de l article 25 de la loi organique n 2011-333 du 29 mars 2011 relative au Défenseur des droits RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCEDURE Madame X est recrutée par une succession de contrats à durée déterminée depuis le 8 mai 2010, en qualité de professeur d enseignement artistique de classe normale auxiliaire, au sein de l école municipale de danse de Z. Son dernier contrat de travail s étend du 1 er janvier au 31 décembre 2013. Le 11 juillet 2013, Madame X est informée qu elle n assurera plus les fonctions de professeur de danse à compter de la rentrée de septembre 2013. D ailleurs, la procédure de recrutement d un nouveau professeur de danse débute le 8 juillet 2013 avec la publication de l offre d emploi sur le site internet du centre national de la danse, puis sur le site internet de la commune. Madame X est ainsi privée de toute fonction jusqu au terme de son contrat de travail. Au 31 décembre 2013, son contrat n est pas renouvelé. Madame X soutient que la nouvelle responsable du service culturel de la commune, Madame Y, arrivée en septembre 2012, a souhaité renouveler les effectifs par des enseignants plus jeunes, la réclamante étant alors âgée de 56 ans. C est dans ce contexte que Madame X a saisi le Défenseur des droits. Par courrier du 28 janvier 2015, le Défenseur des droits sollicite des explications de la part de la collectivité qui y répond par un courrier du 1 er juin 2015. La commune justifie ses décisions à l égard de Madame X par le fait qu elle aurait rencontré des difficultés relationnelles avec ses collègues, sa hiérarchie et des parents d élèves. La commune maintient sa position dans un courrier adressé au Défenseur des droits le 10 mars 2016. Ce dernier invite la commune à produire les éventuels éléments de preuve de nondiscrimination qu elle aurait en sa possession dans un dernier courrier daté du 6 juin 2016. En guise de réponse, la commune revoie, le 26 septembre 2016, son précédent courrier daté du 10 mars 2016. ANALYSE JURIDIQUE Aux termes de l article 6 de la loi du 13 juillet 1983, «aucune distinction, directe ou indirecte, ne peut être faite entre les fonctionnaires en raison [ ] de leur âge». L article 1 er de la loi du 27 mai 2008 prohibe également toute forme de discrimination fondée sur l âge. S agissant des modalités d administration de la preuve applicable lorsque le moyen tiré de la violation du principe de non-discrimination est soulevé, le Conseil d Etat juge «que, s'il appartient au requérant qui s'estime lésé par une telle mesure de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles de faire présumer une atteinte à ce dernier principe, il incombe au défendeur de produire tous ceux permettant d'établir que la décision attaquée repose sur des éléments objectifs étrangers à toute discrimination» (arrêt du 30 octobre 2009, n 298348). 3

Le principe d aménagement de la charge de la preuve est également posé à l article 4 de la loi du 27 mai 2008 précitée. En l espèce, il apparaît que la personne recrutée en septembre 2013 pour assurer les fonctions précédemment occupées par Madame X était alors âgée de 33 ans. Le Défenseur des droits relève également que, depuis le mois de septembre 2012, pour pourvoir sept postes déclarés vacants, six professeurs de danse de moins de 33 ans ont été recrutés. Ce constat soulève une présomption de discrimination fondée sur l âge qui tend à montrer une volonté de la collectivité de recruter un personnel plus jeune. Par courriers des 1 er juin 2015, 10 mars et 26 septembre 2016, la collectivité entend faire valoir que les mesures prises à l encontre de Madame X seraient motivées, non par son âge, mais par l intérêt du service puisqu elle aurait eu un comportement professionnel inadapté. A ce titre, la commune produit un rapport, non daté, mettant en cause le comportement de la réclamante, établi par sa supérieure hiérarchique, Madame Y. Il convient de noter que les reproches formulés à l encontre de Madame X ne sont étayés par aucune pièce justificative de nature à confirmer les faits reprochés. Au contraire, les éléments produits par Madame X permettent de remettre en cause les allégations de la commune. Alors que la commune soutient que Madame X a désapprouvé l ouverture de nouveaux cours de danse en septembre 2012 et a critiqué ses nouvelles collègues, les échanges de mails avec Madame Y, produits par la réclamante, contredisent ces dires. Dans un mail du 13 décembre 2012 à l attention de Madame Y, Madame X propose : «je désire une réunion avec les professeurs concernés par le projet du spectacle afin que nous puissions échanger et trouver des solutions cohérentes et en concertation». Le 14 mars 2013, Madame Y écrit à Madame X : «j ai hâte de découvrir le spectacle! Merci pour ton professionnalisme! Nous sommes à trois mois et demi des galas et je n ai toujours aucune nouvelle des autres profs!». Le 26 avril 2013, Madame Y écrit à Madame X : «pour le gala 2014, on en reparlera mais je ne pense pas que ce soit bien de tout regrouper! Il faut une cohésion entre les disciplines et un projet commun et pour ça il faudrait que Madame W soit un peu plus disponible!!!!!!!!!!!!!». L ensemble de ces échanges de mails montre que, si des critiques ont été émises contre les autres professeurs de danse, elles n émanaient pas de Madame X mais de Madame Y. Ces échanges mettent également en évidence le fait que ce sont les autres professeurs de danse qui n ont pas cherché à s intégrer dans le projet culturel de la commune. Aussi, il ne paraît pas justifié d imputer à Madame X le climat de tension qui a pu apparaitre au sein de l école de danse. Surtout, aucune pièce ne démontre que Madame X aurait désapprouvé la politique de l école de danse. 4

Par ailleurs, la commune reproche à Madame X d avoir «imposé aux parents d élèves d acheter des tenues spécifiques et codifiés à chaque cycle» dont le coût financier a embarrassé certains des parents d élèves. Dans le courrier du 8 juin 2015, la commune allègue que «des familles se sont vues désinscrire leur enfant pour cause qu elles n avaient pas les moyens de répondre aux attentes et aux exigences de Madame X [ ] le service culturel a rappelé les familles concernées en les assurant que le service trouverait une solution afin de remédier au problème. Un bon nombre d éléments ont été retrouvés dans les armoires de l école et le service culturel s est chargé de les mettre rapidement à disposition. Le service a également fait le lien entre des parents d élèves souhaitant faire un troc». Or, dans un mail du 12 octobre 2012 produit par Madame X, Madame Y indique : «je viens d apprendre que nous ne sommes pas en mesure de mettre en place un troc officiel au sein de la municipalité. Le maire ne valide pas. Le troc doit se faire entre les parents. La ville n a pas à l organiser». Cet élément vient contredire les allégations de la commune selon lesquelles elle a organisé un troc entre les parents pour pallier les exigences de la réclamante. S agissant du comportement de Madame X envers sa hiérarchie, la commune entend démontrer que Madame X a commis des «manquements à l obligation de réserve, de discrétion professionnelle, de respect de la hiérarchie et de respect des collègues de travail». Or, la commune ne produit pas les mails susceptibles de mettre en évidence les «nombreux échanges tumultueux» évoqués par Madame Y dans son rapport. La commune ne produit pas davantage d attestation de la part de l adjointe du maire en charge de la culture envers laquelle Madame X aurait tenu, selon elle, «des propos dégradants, insultants et inadmissibles». Alors même qu un tel comportement, s il était avéré, aurait pu justifier une sanction disciplinaire, la commune indique que «par principe, le commune de Z répugne à engager des procédures disciplinaires à l encontre de ses agents». Certes, il n appartient pas au Défenseur des droits d apprécier l opportunité d engager une procédure disciplinaire. Pour autant, en l espèce, on ne peut que regretter une telle décision car l ouverture d une procédure disciplinaire aurait permis à Madame X de prendre connaissance des faits qui lui sont aujourd hui reprochés et d y répondre. La commune fait également valoir que Madame X a humilié des élèves, entrainant des désinscriptions. Sur ce point, le Défenseur des droits a invité la commune à fournir un comparatif entre le nombre d élèves inscrits à l école de danse avant l arrivée de Madame X et le nombre d élèves inscrits au mois de juin 2013, ce qui aurait permis de constater une éventuelle baisse de la fréquentation de l école comme le soutient la commune. La commune n a pas répondu à cette demande. En revanche, Madame X a communiqué au Défenseur des droits une pétition signée par les parents de 32 élèves de l école de danse (parmi environ 70 élèves) qui souhaitaient lui manifester leur soutien. Par cette pétition, signée en septembre 2013 et adressée au maire de la commune, les parents demandent la poursuite de l enseignement par Madame X des cours de danse classique, ce qui tend à démontrer que son travail était apprécié d élèves et de parents. 5

La commune semble reprocher à Madame X d avoir eu une altercation avec un autre utilisateur de la salle de danse au cours de l année scolaire. Madame X ne conteste pas ce fait, mais s étonne que cela lui soit reproché. En effet, elle avait immédiatement fait part de l incident à Madame Y, laquelle lui avait alors apporté son soutien. Madame Y avait adressé un mail, le 16 avril 2013, à cet usager pour lui rappeler les règles d utilisation de la salle de danse. Enfin, il est reproché à Madame X, en charge de la régie des dépenses théâtre-danse, d avoir eu une altercation avec le professeur de théâtre de l école municipale. En effet, Madame X a constaté que celui-ci ne respectait pas les règles pour l achat du matériel, ce dont elle a fait état auprès du centre des impôts. De toute évidence, cette réaction de Madame X a embarrassé la commune. Dans son rapport, Madame Y déclare que Madame X «s est rendue au trésor public afin de se plaindre ce qui a provoqué de la part des agents du trésor public le souhait de contrôler les pratiques du professeur de théâtre avec la régie». Au regard de l ensemble de ces éléments, les allégations de la commune ne résistent pas aux éléments de preuve apportés par Madame X. De plus, la commune ne justifie pas sa décision de priver Madame X de toute fonction à compter du mois de septembre 2013, alors même qu il lui restait quatre mois de contrat. Un mail de Madame X en date du 10 octobre 2013, adressé à la direction des ressources humaines, dans lequel elle demande des indications sur ses missions, est d ailleurs resté sans réponse. Enfin, le Défenseur des droits prend note du refus de la commune de fournir les évaluations professionnelles de Madame X de 2010 et 2011, comme il l avait sollicité dans le but de vérifier l appréciation des compétences professionnelles retenue par l ancien responsable culturel de la commune. En l état, il n est pas suffisamment démontré que les mesures prises à l égard de Madame X seraient justifiées par l intérêt du service. Dès lors, en application du principe d aménagement de la charge de la preuve énoncé précédemment, le Défenseur des droits considère que Madame X a été victime d une discrimination fondée sur son âge au sens de l article 6 de la loi du 13 juillet 1983. Conformément à une jurisprudence constante, la victime d un agissement fautif, tel une discrimination, a droit, tant en matière civile qu administrative, à une réparation intégrale des préjudices subis (par exemple, Cass. Soc, 23 novembre 2005, n 03-40.826 ; CE, 11 juillet 2011, n 321225). En l espèce, au-delà des conséquences financières de la décision de non-renouvellement de son contrat de travail, Madame X a également subi un préjudice moral important. Plusieurs éléments sont à prendre en considération pour apprécier ce préjudice moral. Le fait que le recrutement de son remplaçant ait débuté avant qu elle ne soit informée du nonrenouvellement de son contrat, le fait d avoir été privée de toute fonction pendant quatre mois et, enfin, le dénigrement de ses qualités professionnelles, ont porté atteinte à la dignité de la réclamante. Le préjudice moral, ainsi caractérisé, doit donner lieu à une juste réparation. 6

En conséquence, le Défenseur des droits recommande au maire de la commune de Z : de se rapprocher de Madame X afin de définir avec elle le montant de l indemnisation des préjudices subis du fait du non-renouvellement de son contrat de travail ; d adresser une note de service aux agents de la commune rappelant le principe de non-discrimination dans l emploi tel qu il est posé à l article 6 de la loi du 13 juillet 1983. Jacques TOUBON 7