Texte de commémoration de la Victoire du 8 mai 1945 Cérémonie du 8 mai 2009, Montchat, 11 h 30 Discours de Thierry PHILIP Mesdames, Messieurs les élus et représentants du monde des anciens combattants, Mesdames, Messieurs, Chers Amis Il y a 64 ans, la France vivait l un des plus grands moments de son histoire en célébrant la fin du cauchemar nazi. La capitulation sans condition de l Allemagne du 3 e Reich venait mettre un terme au plus horrible des conflits que l humanité n ai jamais connu. Un conflit qui emporta des hommes, des femmes et des enfants de tous les continents, 1
de toutes les régions du monde. Au total, plus de 55 millions de vies humaines furent détruites. Vous savez mon intérêt particulier pour cette période de l histoire. J y ai un attachement familial parce que mon grand-père, André Philip, à qui je pense aujourd hui, a fait partie des quatre-vingts parlementaires qui refusèrent de voter les pleins pouvoirs à Pétain en juillet 1940. Adhérent du «Comité de vigilance des intellectuels antifascistes», André Philip a rejoint de Gaulle à Londres en 1942. Il fait partie de ces résistants à qui nous rendons aujourd hui hommage. A titre personnel cette période de l histoire me passionne, car elle a permis à des êtres humains de se dépasser pour sauver la liberté et la démocratie. Ce courage me touche particulièrement, car une vie humaine doit se 2
conjuguer avec ce type de valeurs ; ce sont les fondements de l humanisme et du respect. Notre époque en a toujours besoin. Nous sommes ici pour commémorer cette victoire des alliés et de la France, pour rendre hommage aux soldats des armées de libération et à tous les combattants de la résistance, sans exception, quelle que soit l époque et quelle que soit la guerre, finalement. Je pense en particulier au conflit 1914/1918 qui a fauché aussi des millions de vies, dans toutes les communes de France. Vous le savez, le jour de notre installation à la mairie du 3 e arrondissement, nous avons souhaité nous rendre en priorité devant la stèle Jean Moulin à Montluc. Je suis admiratif de ces héros qui ont su dépasser les limites 3
communes, ces héros qui ont su désobéir pour sauver la démocratie. Nous commémorons ces grands hommes, mais aussi ceux dont le panthéon de l histoire n a pas retenu les noms, ceux qui ont œuvré dans l ombre. Ils sont nombreux. Mais, ne l oublions pas, nous sommes aussi là pour rendre hommage à la mémoire de tous les déportés, de tous les prisonniers, de toutes les victimes de guerre, de ces 55 millions d être humains qui périrent sous le joug de la folie humaine, lors de la seconde guerre mondiale. Nous sommes là encore pour nous souvenir que ce 8 mai 1945, l Europe se libérait d une idéologie barbare visant à exterminer toutes les races et tous les peuples déclarés «inférieurs». Ce 8 mai 1945, l Europe se libérait du totalitarisme et du fascisme, de la dictature, de la haine 4
raciale et de la xénophobie érigée en norme. Ce 8 mai 1945, la France se libérait du régime vichyssois qui avait voulu faire croire que le déshonneur pouvait se justifier en nous protégeant. Mais cette grande date peut également être celle d une immense espérance pour nous. Celle du jour où les valeurs que nous portons encore aujourd hui ont pu s imposer et triompher. Celle de la victoire des nations libres et démocratiques, celle où la France a su montrer qu elle pouvait se relever et se réunir autour du Général de Gaulle pour clamer qu elle ne renoncerait jamais aux idéaux de liberté, d égalité et de fraternité sur laquelle elle s est fondée. Cette victoire est celle des alliés, cette victoire est celle des résistants. C est celle du Général de Gaulle dont le nom seul rappelle la France éternelle. 5
Le 8 mai 1945 appartient à l histoire, mais la grande leçon que nous pouvons tirer de cette victoire est plus que jamais d actualité pour les combats politiques que nous avons à mener. Il faut savoir faire barrage à la construction d un système visant à monter les hommes les uns contre les autres, voilà ce que cette période nous enseigne! Il faut savoir faire preuve de résistance et de solidarité face à la crise économique et demain sociale que nous traversons. Précédemment, nous avons vu la grande crise de 1929 engendrer la frustration, la rancœur et la stigmatisation. Ces sentiments ont portés les germes du totalitarisme, du fascisme et des fanatismes qui ont emporté l Europe. Aujourd hui, la crise nous fait craindre un phénomène de rupture sociale car elle porte avec elle la 6
peur, les mouvements de rejet et de défiance envers l autre. Ces sentiments, la France occupée les a connus de manière exacerbée et a su les dépasser. Aujourd hui la crise rend palpable ce ressentiment et notre pacte républicain vacille. Nous voyons nos concitoyens de l outre-mer s insurger contre leur sort injuste, nous voyons nos minorités victimes de discriminations, nous voyons insidieusement les questions d immigration mêlées à celle de «l identité nationale». Face à ces peurs et ces injustices, souvenons-nous du rassemblement dont notre pays a été capable, en des temps obscurs. Souvenons-nous de la réunion, côte à côte, des Français d Outre-mer et de ceux qui avaient pu fuir la métropole, souvenons-nous des Tirailleurs Sénégalais, des 7
Chasseurs d Afrique, du Bataillon de Choc des Commandos d Afrique, des Spahis, des Tabors marocains, algériens et tunisiens, de tous ces hommes qui ont participé à la Libération de la France! Nous sommes dans un Etat de Droit et nous avons les moyens, par le combat politique, de faire respecter la solidarité. Solidarité entre les hommes, mais aussi solidarité entre les pays de l Union européenne, tous touchés par la crise. Cette Europe pour laquelle nous allons voter le mois prochain doit aussi être pour nous la solution. La solution majeure face aux problèmes que nous rencontrons dans cette crise, jamais un problème! 8
Pour cela, pour surmonter ces divisions, nous devons nous souvenir du rassemblement des hommes de la France occupée. Il nous faut nous souvenir de ces résistants qui refusèrent la résignation, qui refusèrent de céder au fatalisme. C est l union et l espérance de ces hommes qui peut aujourd hui nous aider et nous servir d exemple. Nous devons nous souvenir de leur vision, de leur solidarité et honorer les idéaux qui les animaient, tous les clivages étant dépassés à ce moment là. A ce prix, et à ce prix seulement, ils ne seront pas morts pour rien. Puissions-nous penser aujourd hui à chacun de ces héros que peut illustrer le Docteur Long dont la rue voisine porte le nom. Il a choisi l honneur et la mort glorieuse. Que ceux qui ont fait un autre choix ne viennent pas aujourd hui nous expliquer qu ils n avaient pas le choix. 9
Comme le dit si bien l écrivain lyonnais Eric Emmanuel Schmitt «l homme est fait de choix et de circonstances. Nul ne peut prévoir les circonstances mais chacun est responsable de ses choix». Comme le disait le philosophe allemand Arthur Schopenhauer, «l Histoire est pour un Peuple ce que la Conscience est pour un Homme. Un Peuple qui oublie son histoire est comme un Homme qui perd sa Conscience.» Sans conscience, nous ne pourrions pas appréhender notre présent, nous ne pourrions pas anticiper notre futur. Aussi, pour ne pas perdre cette conscience, nous devons nous souvenir aujourd hui, demain, toujours, de ce que signifie ce 8 mai 1945. Souvenons-nous et n oublions jamais. Je vous remercie. 10