DOMINIQUE Où, il n est jamais trop tard pour identifier et contrôler le processus lithogène! Où, quand la persévérance et la collaboration ainsi que la répétition dans le temps des examens permet de faire le diagnostic Le malade. Mr R, 60 ans, 72 kg pour 1,62m. La maladie 2008-2009. Passe 40 ans à fabriquer des calculs de weddellite (oxalate de calcium dihydraté) et de brushite (phosphate de calcium). 2008 : Recueil urinaire 2 semaines après la 25 ème LEC : - Calciurie : 12 mmol/24h, - Créatininurie : 15 mmol/24h, - Natriurèse : 150 mmol/24h. 1
Questions. 1. Qu évoque la nature des calculs comme processus lithogène?- L'existence de calcul de weddellite et de brushite, évoque un processus calcium dépendant. De surcroit, le calcul de brushite majoritaire (ou supérieur à 30%) doit aussi faire rechercher une hyperparathyroïdie primaire. Il faut s'assurer ici qu'il s'agit d'une vraie hypercalciurie (12 mmol/24h), c'est-à-dire se mettre dans de bonnes conditions pour la mesurer : au moins deux mois après les lithotrities extracorporelles en connaissant les apports calciques journaliers (enquête diététique) en s assurant de la qualité du recueil des urines (créatininurie = 0.1 mmol/kg /J) : ce qui est le cas ici puisque la créatininurie/j = 15 mmol/j >7,2 mmol/j attendue pour un poids de 72kg. en corrigeant l hypercalciurie liée à l hypernatriurèse (150 mmol/j = 150 meq/j) Elle est ici au dessus du seuil maximal (100 meq/j). Ici, les 50 meq d excès de natriurèse/j entrainent automatiquement 2 mmol de calciurie supplémentaire. La calciurie «vraie» est donc à 10 mmol/j pour une calciurie attendue de 0.1 mmol/kg/j, soit 7 mmol. 2
Maladie (suite) 2009. Nouveau bilan biologique. - Calcémie : 2,28 mmol/l, - Calcémie ionisée : 1,27 mmol/l, - PTH : 65 pg/l, - 25OHvit D = 25 ng/ml Urine - Calciurie 6 mmol/j, - Créatininurie 10 mmol/j, - Natriurèse 250 mmol/j, - urée 38 g/j. 2. Quels commentaires autres sur ce bilan 2009? Sur ce bilan il existe une hyperparathyroïdie normocalcémique, une calciurie normale mais avec l hypercalciurie est corrigée une hyper natriurèse (250 meq par jour au lieu de 100) une urée urinaire très élevée (apport en protides élevés, souvent associés à l excès alimentaire de sodium). Il est alors adressé à la consultation diététique : où il reçoit les conseils de diminution des apports sodés et de protéines. 3
La maladie (suite) 03/2010. Nouveau bilan biologique à distance de la consultation de diététique.. - Calcémie : 2,48 mmol/l - PTH : 70 pg/l, - 25 OH vitamine D : 23,8 ng/ml urine - Créatininurie : 12mmol/j, - Natriurèse 100mmol/j, - Urée 26g/j, - Calciurie 8 mmol/j. 3. Analyse de la calciurie de mars 2010? Que pouvez-vous conclure? Est-il guéri? Pourquoi la PTH reste-t--elle élevée? Le bilan montre - une hyperparathyroïdie (primaire ou secondaire?) car PTH > 60 pg/l. - une carence en vitamine D, qui est dans le bas de la fourchette (N= 20-40) - une normalisation de la natriurèse et de l'urée urinaire. - une calciurie encore un peu élevée : mais cette calciurie est difficile à apprécier si l'on ne connait pas les apports. 4
Sur les conseils de son médecin traitant il voit un endocrinologue qui lui prescrit une ostéodensitométrie qui retrouve une ostéoporose. 4. Quelle précieuse information cette ostéoporose vous donne t elle? L ostéoporose est tout à fait anormale chez l homme. Elle correspond à une dette calcique ancienne liée à des recommandations diététiques antérieures inappropriées. Il est conseillé d avoir dles apports calciques à 900 mg/j Lui conseillez-vous d augmenter ses apports calciques? Oui, afin de mieux explorer son axe phosphocalcique avec des apports normalisés. Cette augmentation d'apport en calcium va majorer l'hypercalciurie et oblige à augmenter la diurèse de manière à ce que la calciurie n atteigne pas le seuil de sursaturation (3.8 mmol/l.). Dans ces conditions il est recommandé d informer le patient du risque de récidive et de réaliser des contrôles de calciurie des 24H régulièrement. 5
La maladie (suite) 2010. Le rhumatologue consulté pour l ostéoporose lui conseille de normaliser ses apports en calcium et en vitamine D. Il revient avec une nouvelle calciurie d octobre 2010. - Ca : 2,17 mmoles/l, - P : 0,93 mmoles /l, - PTH : 89,5 pg/ml, - Vit D25 OH : 20 ng/ml urine - Volume urinaire: 3 l 400 - Calciurie : 127 mg/l, et 432 mg/24 h - Phosphore : 677 mg / 24 h - Sodium : 218 meq/24 h Quel est à votre avis le mécanisme le plus probable de cette hypercalciurie? Absorptive? Résorptive? Ou rénale primitive? Il s'agit d'une vraie hypercalciurie de débit (432 mg/j correspondent à 10,7mmol/J), pour une normale de 0,1 mmol/kg/j, soit 7,2 mmol/j pour ce malade : c'est le test de Pak qui permettra d'en connaitre l'origine. 6
La maladie (suite) Octobre 2011. Il est opéré de parathyroïdectomie en janvier 2011 suite à des explorations fonctionnelles de l axe calcique. Il revient vous voir en octobre 2011 avec le bilan suivant. Ca : 2,25 mmol/l, Ph : 0,93 mmol /L, PTH: 47pg/ml, Vit D25 OH: 43,7 ng/ml urine Volume urinaire: 3 l 500 Calciurie : 81 mg/l, 284 mg/24 h Phosphore : 444 mg / 24 h Sodium : 102 meq/24 h 5. Son risque de récidive est-il contrôlé? De quelle intervention a-t-il bénéficié? Après parathyroïdectomie, son bilan est normalisé - PTH < 60 pg/ml - Vit D25 OH = 40 à 60 ng/ml - Calciurie normalisée (6,5 mmol/j) La natriurèse reste normale depuis les modifications diététiques. Conclusion : Il y avait une vraie hyperparathyroïdie primaire, secondarisée par la carence d apport calcique. Pour démasquer les processus lithogène, le «chemin» est parfois long. La normalisation des apports et de la 25OHvitD est incontournable. 7