Activité physique et vieillissement



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1. Généralités Activité physique et vieillissement 1.1 Définition des concepts «âge» et «vieillissement» Âge Selon la source utilisée et les époques, on distingue cinq types d âge en gérontologie : - l âge chronologique : celui du calendrier. N exprime rien sinon un chiffre. Utilisable dans les statistiques. - l âge biologique : l âge individuel. Relation entre la qualité des tissus d un organisme vivant et une norme. Dépend de processus exogènes. - l âge psychologique : repose sur la capacité d adaptation individuelle, sur l image de l individu. C est l âge de la somme d expériences, de la maturité d esprit. - l âge social ou sociologique : dans la même société, on peut classer le même individu parmi les jeunes ou les vieux selon les circonstances. - l âge fonctionnel : réunion des âges biologiques, psychologiques et social sous le même terme. Il n existe aucune façon satisfaisante d appréhender le terme âge si l on rajoute les notions de «politiquement correct/incorrect», on ne sait plus comment appeler nos «vieux». Ceci pose un problème notable lors de recherches comme celle-ci. Vieillissement Plusieurs essais de définitions : - c est la modification irréversible de la substance vivante avec le temps. (Bürger, 1957). - c est un groupe de phénomènes qui conduisent à un raccourcissement de l espérance de vie quand l âge augmente (Frolkis 1957). - c est la suite des modifications qu un individu présente au cours du temps, de manière caractéristique, depuis l âge adulte jusqu à la fin de sa vie (Singer 1981). 1.2 Indices généraux du vieillissement Il existe deux types de vieillissement : - le vieillissement pathologique : insuffisance fonctionnelle marquée d un seul organe ou d un seul système (Jablonovskij 1953). - le vieillissement physiologique : modification synchrone de tous les tissus et organes. Se caractérise par : diminution de la taille corporelle (hauteur des disques vertébraux-cyphosemodification de l angle col/diaphyse du fémur). atrophie des appareils locomoteurs augmentation des tissus conjonctifs et de la masse grasse. modification de la peau/coloration et chute des cheveux (aucun rapport avec la détermination scientifique de l âge). 1

diminution des qualités fonctionnelles des organes sensoriels (vieillissement du système nerveux). 2. Le vieillissement de la société 2.1 Espérance de vie L EV est une mesure de la mortalité de la population pour une année ou une époque donnée ; elle peut être considérée comme un indicateur de l état de santé d une population.(spuhler 1993) Depuis 1876, introduction des premières statistiques, l espérance de vie a augmenté de 33.3 ans, passant pour les hommes de 40.6 à 73.9 ans et pour les femmes, de 37.5 à 80.7 ans (CF.Fig 1). Les femmes ont donc une espérance de vie en moyenne supérieure de 6.8 ans. Fig1 bis L augmentation de l EV et le recul des naissances ont eu pour effet de modifier la structure par âge de la population qui n a pas été compensée par l immigration d une population jeune. Ainsi, la population des 0-19 ans a diminué et celle des +64 augmenté. (CF. Tab 1 et fig1 bis) Par exemple, en 1980, on comptait 490000 hommes et 677000 femmes âgées de 60 ans et plus ; si l espérance de vie était restée au niveau de 1950, on aurait recensé, en 1980 environ 60000 hommes et 122000 femmes de moins dans cette tranche d âge, soit une diminution de 15.6% (Lopez 1990). 2

L espérance de vie des + de 65 ans était à la fin du siècle dernier d à peine 10 ans (CF. fig. 2), elle est aujourd hui d environ 15 ans pour les hommes et de 20 pour les femmes! Elle a tout simplement doublé. Prévisions et conclusion Pour les enfants qui naîtront dans les années 2020-2025 dans un pays industrialisé, l ONU leur prévoit une espérance de vie de l ordre de 77.7 ans pour les hommes et 83.6 ans pour les femmes. En Suisse, l OFS prévoit en 2010, 76.10 ans pour les hommes et 82 ans pour les femmes. L augmentation de la proportion de personnes âgées est inéluctable. Ceci, comme nous l avons vu précédemment, peut être considéré comme un signe général de bonne santé de la population. 2.2 Mortalité Il est capital de s intéresser à l évolution du taux de mortalité pour se faire une idée réaliste du vieillissement de la population et de la nécessité de développer des programmes sportifs adaptés aux plus de 65 ans. Si l on observe la fig. 3 on constate une diminution très spectaculaire de la mortalité en un siècle. Cette diminution touche tous les âges et les deux sexes, mais est nettement plus marquée pour les femmes. Si l espérance de vie et le taux de mortalité nous renseignent sur l état de santé global des Suisses, il est aussi important d examiner de près les différentes causes de décès liées à ces chiffres. 3

D après la figure 4, on se rend compte que les maladies cardio-vasculaires représentent les causes de décès les plus fréquentes, tant pour les hommes que pour les femmes. Les trois premières causes (cœur/circulation, tumeurs, accidents/violence) nous intéressent tout particulièrement, car on connaît aujourd hui l importance de la modification des habitudes de vie (sédentarité, fumée, tabac, etc ) sur la fréquence ou sur la précocité de ce type d accidents. 2.3 Conclusion Même si la mortalité en Suisse a connu une amélioration spectaculaire depuis 100 ans, tout particulièrement ces 40 dernières années, il ne faut pas perdre de vue que les chiffres concernant notamment les décès par maladie cardio-vasculaires peuvent être dans l avenir influencés. En tant que spécialistes du mouvement, nous avons deux rôles essentiels à jouer au vu de ces chiffres : rallongement de la durée de vie : -par la prévention : en influençant les jeunes à chaque fois que l occasion se présente. -par une action appropriée auprès des personnes âgées. Amélioration de la qualité de vie : Selon l expression de l OMS, «l objectif d une amélioration de la santé générale n est pas seulement d ajouter des années à la vie des gens, mais également d ajouter de la vie aux années.» 3. Les mécanismes du vieillissement La majorité des modifications du vieillissement repose sur les fondements de l information génétique. La recherche considère deux directions principales : -Soit la somme des lésions de l appareil génétique est responsable de celui-ci. -Soit le vieillissement est un processus génétiquement programmé. 3.1 Théories qui reposent sur l hypothèse d erreur dans la synthèse des protéines L information génétique est stockée dans l ADN qui se trouve dans le noyau cellulaire de toutes les cellules ; grâce à une «transcription», elle est transmise à un ARNm (acide 4

ribonucléique messager). Dans la phase suivante de «translation», l information génétique parvient avec l ARNm dans le cytoplasme cellulaire ; là, grâce à la participation d un ARNt (ARN de transfert, responsable de la manipulation des acides aminés dans la cellule) et d enzymes et de cofacteurs, elle est «traduite» en un structure protéique correspondante. Dans le déroulement de ce processus très compliqué, des erreurs peuvent se produire, qui ont pour conséquence une synthèse de protéines défectueuses. La théorie des mécanismes de réparation Nous possédons des enzymes spécifiques chargés de détecter et de réparer les défauts de la structure de l ADN. Avec l avancement de l âge, ce sont ces capacités de réparation qui se perdent et qui conduisent donc à des perturbations dans la synthèse des protéines et donc au vieillissement. Ceci se traduit par l apparition des premières rides et tavelures. Ce mécanisme de réparation (life maintenance) est bien connu et fonctionne idéalement pendant des années. La théorie des radicaux libres (Theimer, 1973) Les radicaux libres proviennent de l oxygène que nous respirons et dont quelques pour cent échappent aux filières de transformation en eau et en gaz carbonique et, sous la forme atomique amputée d un électron, se répandent dans l organisme avec une force de destruction très importante. De manière violente, ces radicaux libres vont s attaquer à tout ce qui les entoure : ils déchirent les membranes cellulaires, ils détruisent les protéines, ils cassent l ADN en quelques nanosecondes à peine, ce qui crée de nombreux états irréversibles tant dans la cellule que dans le milieu intercellulaire : par conséquent, une accumulation de pigments ou des modifications de propriétés membranaires conduisent au vieillissement des structures concernées. Notre organisme possède ses propres moyens de défense pour lutter conte ces radicaux libres. Ceux-ci consistent en une série de vitamines et d oligo-éléments qu on appelle les anti-oxydants. Malgré cela, la production de radicaux libres déborde parfois les filières d assimilation, notamment dans une série de situations qui sont favorables à ceux-ci : exposition aux rayons ultraviolets A du soleil, à certains produits chimiques, à la fumée de cigarette, etc Certains scientifiques voient dans l élimination des radicaux libres naissants un moyen de prolonger l espérance de vie : cette élimination, à l aide d agents anti-oxydants (par exemple la vitamine E) a abouti à une augmentation de l espérance de vie moyenne de 25-40% chez les souris (Harman, 1976). Si l on tient compte de cette théorie et qu on la replace dans un contexte purement sportif, cela laisserait entendre que, comme le sport induit une consommation d oxygène accrue, la quantité d atomes qui échappent à la réduction pour former des radicaux libres est elle augmentée. Ainsi, pour éviter que la pratique sportive n active le vieillissement, il faudrait veiller à respecter une alimentation riche en vitamines E et en oligo-éléments. 3.2 Les théories qui postulent un cours du vieillissement génétiquement déterminé L hypothèse de l horloge du vieillissement Evetitt (1973) postule que la programmation de la vie est sous contrôle d une horloge du vieillissement. Ainsi certaines cellules «rythmiques» auraient une fonction limitative de l âge et du vieillissement. L existence de plusieurs horloges, situées dans l hypothalamus, ou dans d autres centres régulateurs cérébraux est même envisageable. Ces horloges, de 5

même que leurs programmes sont soumises à des influences internes et externes qui peuvent accélérer ou ralentir leur course. L hypothèse «Programme» de Kanungo Kanungo (1982) admet une programmation de chaque étape de vie d un organisme : croissance, maturation et vieillissement. Ces étapes sont programmées par un groupe de gènes qui déterminent chaque étape de la vie d un organisme. C est l alternance d activation et d inhibition de ces gènes qui détermine la durée de vie de chaque espèce. 3.3 Conclusion Comme le montre ces 4 théories (il en existe beaucoup plus), décrire le vieillissement du point de vue physiologique n est pas chose aisée. Qu il soit programmé, ou qu il résulte d une simple «usure» de l ADN à force d avoir été trop «réparé», l essentiel est de retenir que le vieillissement se situe au cœur même du fonctionnement de la cellule et qu il n est pas uniquement le fait d hérédité ou de conséquence d agressions extérieures. 4. Conséquences physiques du vieillissement 4.1 Le déclin des performances (figures 5 et 6) Le maximum des capacités fonctionnelles de l organisme se situe entre 17 et 25 ans. L ensemble des performances commence à diminuer à partir de 30 ans (vitesse de course, force musculaire, temps de réaction, capacité de récupération). La performance qui perdure le plus longtemps est l endurance. Fig 5 4.2 La notion d adaptabilité Fig 6 Avec l âge apparaît une baisse de notre capacité physique à nous adapter. Un même effort, un même stress, une même agression entraînent des effets différents à 25 ou à 45 ans. Cette faculté d adaptabilité sert de mesure de «l âge fonctionnel», possibilité de l organisme à s adapter à de nouvelles situations. 6

Le sport pratiqué régulièrement provoque une série de réactions d adaptation qui maintiennent le corps «jeune» sans qu il en ait forcément les apparences médicales pour deux raisons essentielles : - le corps vieillit par à-coups, il prend des «coups de vieux» : la pratique sportive modérée, par les sollicitations physiques et les bouleversements qu elle génère, apprend à notre corps à réagir, à s adapter à n importe quelle situation. - tous nos tissus à l exception de la graisse diminuent de poids après 30 ans. Cette atrophie devrait induire une perte de poids et c est toujours le contraire qui se produit. La graisse augmente souvent de 50% entre 30 et 70 ans du fait de l absence d activité physique et d une alimentation trop riche ; la masse graisseuse remplace donc la masse maigre. Le sport contribue dans ce cas-là à faciliter l adaptation pour notre corps à une situation de prise de poids et de perte de masse maigre. Tous les bienfaits de cette adaptabilité par l exercice physique ne sont valables que dans une pratique modérée. Une pratique trop violente aurait l effet inverse (notamment celle de provoquer des «coups de vieux» par l incapacité de notre corps à s adapter à une telle pratique ; c est le serpent qui se mord la queue!). 4.3 Le vieillissement des organes Les vaisseaux On observe un durcissement des artères qui va jusqu à leur calcification par le dépôt de cristaux de phosphate de calcium et de cholestérol. Les veines et les capillaires sont moins touchés par ces phénomènes. Le cœur L augmentation des résistances vasculaires (sclérose) créent une hypertrophie progressive dès la 30 ème année (prise d un gramme par année). Tous les tissus devenant moins élastiques avec l âge, le cœur perd de son efficacité et notamment de son volume d éjection systolique. De plus, les valves cardiaques subissent un fort enraidissement en raison de l augmentation de la présence de collagène. Les muscles squelettiques Les différences entre les muscles sont très importantes. Les muscles de l avant bras, par exemple, subissent une chute vertigineuse de leur force. La perte de force résulte, comme nous le verrons ultérieurement, d une modification des afflux hormonaux. Les sens La vue : le cristallin perd progressivement son pouvoir d accommodation après 45 ans (difficulté à voir de près), et l on devient presbyte (du grec «presbutès», très vieux, bien que la presbytie ne s aggrave plus après 60 ans). L ouïe baisse et affecte la perception des sons aigus et des sons violents. Le toucher diminue aussi, ainsi que le goût et l odorat qui diminuent dès l âge de 10 ans. Le sportif de plus de 50 ans se comporte ainsi un peu comme un aveugle qui développerait au maximum ses facultés encore intactes. La peau Malgré les effets très visibles du vieillissement sur la peau, c est un organe qui vieillit plutôt bien : à cent ans, on cicatrise et l on transpire aussi bien qu à 20. La structure interne du derme se modifie en teneur de graisse, en capacité de reproduction, en 7

élasticité. Le tissu de maintien, appelé collagène, qui en temps normal constitue une véritable armature, se distend progressivement ; les ponts cellulaires se rompent créant une dépression : la ride. Le dépôt de graisse s atrophie sous la peau. La teneur en eau et l activité des mélanocytes (cellules de la pigmentation) diminuent et sont à l origine des tâches de vieillesse. Les os et le cartilage Le cartilage se calcifie à cause de la diminution du collagène. Pour les os, développement de l ostéoporose qui est une atrophie des tissus osseux et qui débute plus tôt chez l homme que chez la femme. Outre l aspect hormonal, les la perte des sels minéraux qui est responsable et qui provoque l élargissement de la trame spongieuse et la réduction de la partie corticale. Le cerveau et système nerveux L ensemble du système nerveux voit son nombre total de cellules diminuer avec l âge. Sur environ 100 milliards au total, on peut en avoir perdu 3 à 80 ans. La principale conséquence qui nous intéresse peut logiquement être une diminution de l intensité du signal commandant les mouvements et donc une diminution générale de la force. Les cellules du cerveau (neurones) sont incapables de se diviser et de se reproduire. Nous naissons avec un capital défini de neurones (10 milliards). Chaque jour, nous en perdons des dizaines avec une légère augmentation après 40 ans (30% entre 30 et 70 ans). La conservation d un «pool» de neurones inactifs par le maintien d une activité intellectuelle en garantit un nombre suffisant pour permettre au cerveau de fonctionner. Le vieillissement ne touche que très peu la mémoire à long terme, mais affaiblit notablement la mémoire à court terme, en raison de l altération d une structure cérébrale appelée hippocampe. Ainsi la personne âgée se souviendra plus facilement et de manière précise de son enfance que du numéro de téléphone qu on vient de lui citer. L organisation mentale pose également problème : la personne âgée a de plus en plus de peine, faute de moyens mnémotechniques, à replacer l information dans son contexte. Enfin, le transfert négatif d apprentissage survient lorsque l acquisition d une information contrarie ce qui est déjà en place. Les habitudes de raisonnement ancrées entrent en compétition avec le nouvel apprentissage. Pour maintenir sa mémoire la personne âgée a trois possibilités : Régularité : Comme pour les muscles, les à-coups ne servent à rien pour le cerveau. Il convient de favoriser les activités intellectuelles quotidiennes, comme la rédaction d un journal. Nouveauté : Dès l âge de 35-40 ans, il est impératif de se tenir au courant et de stimuler son goût pour les nouveaux apprentissages pour éviter les problèmes de transferts négatifs vus plus haut. Rapidité : Si l on observe la figure 6, on se rend compte qu en vieillissant, on devient moins rapide. C est pourquoi les longues parties d échec ou les mots croisés ne luttent pas efficacement contre le vieillissement. Il vaudrait mieux privilégier les exercices courts effectués dans un temps défini. Dans tous les cas, une activité physique régulière oxygène le cerveau, augmente la circulation sanguine et empêche le durcissement des artères. Il représente également une motivation, un rythme, et est le vecteur des relations sociales, autant de facteurs qui, selon des études américaines sont très motivants pour le cerveau. 8

4.4 Les hormones et le vieillissement L hormone de croissance Secrétée par une glande située à la base du cerveau (antérohypophyse), L HC est responsable de notre taille. Elle peut d ailleurs être administrée aux enfants trop petits. Après 18-20 ans, son action reste primordiale : elle possède une action anabolisante qui favorise la croissance des muscles et des tissus de soutien (pour la peau en particulier), tout en activant la dégradation des graisses. De nombreuses études ont montré des résultats surprenants sur les personnes âgées : perte de 1/5 de leur graisse, augmentation de la masse musculaire de 10%, durcissement des os. A partir de 40 ans, la production d HC baisse régulièrement et atteint le niveau 0 à 60 ans. Cependant, lors d un effort physique, la production de cette hormone peut être multipliée par 30. Une activité physique régulière maintient le corps jeune par le réveil hormonal qu elle procure et par la lutte contre la fonte musculaire. Les contre-indications à la prise d HC sont hélas très nombreuses et vont du diabète à l hypertension. Les hormones du stress On l a vu plus haut, le stress à petite dose et notamment le stress artificiellement créé par le sport pour lutter contre le manque d adaptabilité dû à la vieillesse, nous aide à supporter mieux les «coups durs». L exercice physique comme simulation d agressions douces et répétées développe notre résistance et notre capacité de récupération. Le stress physique, tout comme le sport, stimule l hypothalamus qui excite l hypophyse qui à son tour produit une substance qui déclenche une sécrétion de cortisol par les glandes surrénales. Le cortisol agit sur le foie et les muscles en permettant une meilleure libération des réserves glucidiques et en participant à bon nombre de métabolismes. Cette hormone procure une sensation de bien-être pendant l effort et lutte contre la fatigue. Le bon fonctionnement de ce système de production est le garant de la réactivité de l organisme devant l agression. Avec l âge, notre production de cortisol diminue ce qui explique que la personne âgée soit très facilement stressée. Encore une fois l activité physique, qui ici s apparente à un vaccin contre le stress (le sport bouscule l organisme), est extrêmement bénéfique : elle nous protège de l émotion suscitée par notre feuille d impôts! Les endorphines ont des propriétés proches de celles de la morphine, elles luttent contre la douleur, régulent le système cardio-vasculaire, procurent une sensation de bien-être. Leur production est étroitement liée à celle du cortisol, elle est donc, elle aussi, accrue par la pratique sportive. Malgré le bonheur qu elle procure lors de la pratique sportive et le fait qu elle lutte, selon des études récentes, contre la dépression, l endorphine peut masquer des symptômes graves, comme l épuisement. De plus, l augmentation d endorphine est liée à une baisse simultanée des défenses immunitaires. Après un effort violent, l organisme est en état de faiblesse. Ceci peut s avérer particulièrement dangereux chez le sujet âgé : il faut donc rapidement qu il se couvre et se douche après l exercice. 9

Les hormones sexuelles La ménopause : spécificité du genre humain due à un épuisement des cellules sexuelles avec arrêt de la production hormonale. Cette chute de la production hormonale va entraîner l apparition de l ostéoporose, favoriser les cancers du col de l utérus, empêcher la protection naturelle contre les maladies cardio-vasculaires dont la femme bénéficie dans la première partie de sa vie. De plus, les oestrogènes jouent un rôle essentiel dans l activité électrique du cerveau, ce qui explique les difficultés de mémorisation et les états dépressifs chroniques qui découlent de la ménopause. L ostéoporose qui survient après la ménopause peut, selon toutes les dernières études, être efficacement combattue par la marche à pied. L andropause : sur ce point précis, les hommes sont mieux lotis que les femmes. Le terme «andropause» n existe pas de manière scientifique. Ce qui est sûr c est que même si l on peut procréer jusqu à n importe quel âge, la production de testostérone baisse dès l âge de 18 ans ainsi que la fabrication des spermatozoïdes. La testostérone est un véritable engrais pour le muscle, une chute de sa production équivaut à une fonte de la masse musculaire et à son remplacement par de la masse adipeuse (comme les castrats ou les chapons). Faire des abdominaux pour s en débarrasser est tout simplement inefficace, car cette accumulation de graisse est avant tout un problème hormonal. Il faut donc encore une fois stimuler son système hormonal par une activité physique globale comme le vélo ou le footing, avec une fréquence cardiaque peu rapide (120/140), pendant minimum 45 minutes. La DHEA : le sulfate de déhydroepiandrostérone est un précurseur des hormones sexuelles, elle active donc la fabrication d œstrogène et de testostérone. La quantité de DHEA que nous avons dans le sang est notre marqueur du vieillissement, le témoin de notre âge physiologique. Comme toutes les hormones dont nous venons de parler, le taux de DHEA est directement influencé par la pratique sportive, selon une étude américaine récente (2001). 5. La pratique sportive adaptée Il va de soit que dans une pratique courante avec des gens de plus de 65 ans, le professionnel du mouvement rencontrera autant de problèmes physiques et d antécédents que d individus. Son enseignement devra donc être non seulement adapté à l âge de chacun (sans observer uniquement l âge chronologique), mais encore à divers problèmes liés au vieillissement. Concrètement, il serait préférable de s astreindre à une visite médicale avant la reprise d une activité physique et de la répéter tous les 3 mois. De plus, et au vu des remarques cidessous, la répartition suivante est conseillée durant une séance de sport : -60% endurance -30% mobilité et adresse (exercices type mouvements avec élan, rotations, mouvements pendulaires, jeux et lancers) -10% entraînement de la force-endurance 10

5.1 Le système cardio-vasculaire Avec l âge, le cœur doit fournir plus d efforts en raison des résistances artérielles. Liée au processus de sclérose, la paroi artérielle subit une transformation en profondeur sous forme d une diminution de son élasticité. De plus, le volume d éjection systolique est également diminué à l effort ce qui engendre une augmentation de la FC. La FC max. diminue également de manière significative avec les années. Pour résumer, nous avons d une part une diminution du volume d éjection systolique qui impliquerait une adaptation de la fréquence cardiaque pour fournir le même travail, et d autre part une diminution de la Fcmaximale : les personnes âgées dépassent donc très facilement leur capacité maximale à l effort! C est justement cette diminution du rythme cardiaque, cette fois au repos, vers laquelle il faut tendre. Le ralentissement du rythme cardiaque provoque une diminution considérable du travail quotidien du myocarde. Statistiquement, un rythme cardiaque plus bas est un gage d accidents cardiaques moins fréquents. On s attachera donc à «renforcer» le muscle cardiaque (augmentation du volume du cœur-dilatation des cavités du muscle cardiaque-augmentation du volume systolique-économie du travail du cœur) au sens préventif, mais aussi au sens réhabilitatif dans le but d améliorer la qualité de vie. Intensité : même si l intensité de l effort doit être supérieure à celle de tous les jours il faut impérativement maintenir toute pratique physique dans les limites de l effort aérobie (80% de la Fcmax). Il serait même conseillé de débuter à 50% de la capacité de performance maximale. Avec des gens âgés, il est recommandé de ne pas s éloigner de la règle des FC : 180bpm-âge et non 220bpm pour des sportifs jeunes. (Fig 7) Fig 7 Fréquence et volume : l idéal de progression se situe à 3 séances d endurances de 45min. L entraîneur veillera à travailler de manière fractionnée (par exemple 1 de course suivie 1 de marche au début, et ce afin de garantir une progression lente et accessible à tous. La mise en train : la mise en train qui a pour but immédiat et primordial d activer la régulation du système cardio-vasculaire à l effort. A mesure que les années passent, cette activation prend toujours plus de temps. Le retour au calme : en raison de l augmentation des résistances vasculaires, la pression sanguine augmente à l effort et tarde à redescendre une fois la séance terminée. C est pourquoi le retour au calme doit être tout particulièrement soigné. 11

5.2 Le système locomoteur Le système locomoteur de la personne vieillissante se transforme progressivement. Les muscles diminuent de volume, les ligaments se raidissent, les articulations s ankylosent et le système nerveux ralentit sa vitesse de conduction. Toutes les précautions doivent être prises en évitant notamment les exercices impliquant un blocage de la respiration et en ne pas dépassant 1/3 de la force maximale. De plus, il convient de faire preuve de la plus grande prudence si, comme la plupart des personnes très âgées, vos «élèves» souffrent de l une des affectations suivantes : L arthrose : les personnes atteintes de ce mal se plaignent de douleurs très vives, notamment au début de la leçon. Il faut donc dans ce cas mettre l accent sur l échauffement et plus précisément sur sa partie fonctionnelle. Ces douleurs sont souvent accompagnées d une crispation musculaire qui rend les mouvements laborieux et difficiles. L ostéoporose : cette affection n est pas accompagnée de douleurs aussi vives que l arthrose ; en revanche la personne présente un état de santé général fragilisé. Il faudra donc veiller à adapter le programme et éviter toute surcharge sur l appareil osseux ou toute situation pouvant provoquer une chute et donc une fracture avec des conséquences irréversibles. Fig 8 Chutes et âge avancé : elles sont la conséquence de diverses affections sont la simple diminution de la force musculaire est un exemple. Ces chutes et les fractures qui les occasionnent sont dues à des pertes d équilibre. L enseignant veillera donc à travailler de manière systématique cette qualité de coordination dans chaque séance. De plus il faut toujours avoir à l esprit que la peur de tomber est avec la douleur un des principaux freins qui limitent le mouvement et démotivent les pratiquants. 5.3 Travail de l équilibre Comme nous venons de le mentionner, le travail de l équilibre est fondamental lorsqu on arrive à un âge avancé (comme il l est d ailleurs chez les petits enfants). Voici quelques informations pour mieux comprendre les causes et les conséquences d une carence dans ce domaine. Toute chute peut être décomposée en deux temps : 12

- le déséquilibre (mauvaise vue, manque de force, chute de pression). - l absence de mécanismes compensatoires, de telle sorte que la personne est incapable de se protéger de la chute ou de compenser le déséquilibre soit en mettant les mains, soit en avançant rapidement une jambe. Activation de la mobilité : l inactivité physique est le pire ennemi de l équilibre. De nombreuses études ont montré que si l équilibre avant/arrière pose peu de problèmes, ça n est pas le cas pour l équilibre latéral. Il conviendra donc, dans le choix de nos exercices, de mettre en avant les sensations de «roulis», de travailler les rotations ainsi que les mouvements d ouverture latéraux. Entraînement de la force : notre expérience avec les personnes âgées nous montre qu avec de la régularité, un réel gain de force est possible (même si la littérature prétend le contraire). Ce gain de force est surtout visible au niveau de la posture, élément primordial dans l anticipation et la compensation en cas de chute. Dans un entraînement de musculation, il est conseillé de travailler sur des machines, car elles seules permettent de réduire le poids au minimum, ce qui n est pas le cas si l on travaille avec son poids de corps. Une exception à cette règle peut-être faite lors du renforcement du tronc qui lui peut se faire au sol sans machines. Les séries seront relativement longues (45-60 secondes) et les pauses fréquentes. L alternance entre plusieurs groupes musculaires ainsi que le travail sur la globalité de la musculature est de rigueur. Travail de la verticalité : le contrôle de la posture passe par un travail sur la verticalité. Il est important pour le travail de l équilibre de multiplier les situations où, de la station debout immobile, on s abaisse en gardant la colonne verticale, en maintenant son centre de gravité au dessus de son polygone de sustentation. La marche : le rythme de la marche ralentit de manière spontanée après 60 ans. Le transfert du centre de gravité d une jambe sur l autre se fait de manière plus lente à cause du manque d équilibre, mais aussi à cause d une carence en mobilité au niveau de la cheville et du pied. On veillera donc lors de nos séances à ne pas oublier de mettre en avant la souplesse articulaire de la voûte plantaire et de la cheville. 13

6. Bibliographie 1. W. Weiss, «La Santé en Suisse», Office Fédéral de la Santé Publique, Payot, Lausanne, 1993, PP 17 à 36. 2. J. Weineck, «Biologie du sport», Vigot, Paris, 1992, PP. 398 à 437. 3. C. Daulouède, «Les secrets de la forme, le sport après 40 ans», Sport et Vie, 1995, PP 11 à 48. 4. M.-J. Manidi et J.-P. Michel, «Activité Physique pour l adulte de plus de 55 ans», Masson, Paris, 1998, PP 13-219. 5. Dr. Lionel Longueville et coll., «Le Vieillissement et le sport», groupe d étude du 3 ème âge sportif, Paris, 6. G. Lenzhofer et J. Staüble, «La Prévention des accidents dans l enseignement du sport aux aînés», BPA, Berne, 1991. 7. «European Review of Aging and Physical Activity», Annual Review, 1, 2004, publié par l AGREPA (European Group for Research into Elderly and Physical Activity). 8. «European Review of Aging and Physical Activity», Annual Review, 2, 2005, publié par l AGREPA (European Group for Research into Elderly and Physical Activity). 14