L EQUILIBRE SAGITTAL DU RACHIS Dr Anne Cernier Orthopédie CH Dax
L Homme (être humain) est le seul vertébré capable de tenir une position debout érigée prolongée donc économique.
Ce n est pas un mouvement de balancier comme chez les oiseaux ni un appui tripode comme le kangourou.
Le corps humain en position debout, oscille à l intérieur d un cône dont le sommet serait situé sur la surface au sol inscrite entre les deux pieds (Dubousset). Ce système nécessite une chaîne d éléments anatomiques adaptés : Des pieds, large surface d appui au sol Des membres inférieurs verticaux avec des genoux en extension Un bassin rétroversé Les courbures rachidiennes avec le rachis lombaire en lordose Et l aplomb de la tête sur le même axe vertical que le bassin
L analyse de la statique rachidienne humaine nécessite de définir des paramètres précis et reproductibles. Il faut différencier deux parties dans le rachis : le bassin et le rachis (essentiellement de C7 à S1). Le bassin est considéré comme une vertèbre pelvienne, il est le socle sur lequel repose la colonne vertébrale et il transmet la charge aux têtes fémorales qui la transmettent aux pieds.
Le bassin : les paramètres pelviens : L incidence pelvienne La pente sacrée La version pelvienne
L incidence pelvienne(ip) : angle formé par l intersection d une ligne tracée du centre des têtes fémorales jusqu au milieu du plateau sacré et une autre ligne perpendiculaire au milieu du plateau sacré C est un paramètre morphologique, anatomique qui caractérise le bassin.
La version pelvienne = VP (pelvic tilt = PT) : angle entre la verticale passant par le centre des têtes fémorales et une ligne rejoignant le centre des têtes fémorales au centre du plateau sacré C est un paramètre de position
La pente sacrée = PS (sacral slope = SS) définit l angle du plateau sacré avec l horizontale C est un paramètre de position
L incidence pelvienne IP est constante pour un sujet donné. Un petit angle correspond à un bassin étroit et un grand angle à un bassin large dans le sens antéropostérieur. La version pelvienne VP augmente quand le bassin tourne en arrière = rétroversion et diminue quand le bassin tourne en avant = antéversion. La pente sacrée PS diminue en rétroversion et augmente en antéversion. VP et PS sont des angles positionnels variables, complémentaires.
IP = VP + PS
Pour une population asymptomatique blanche caucasienne IP = 52 en moyenne ( 35 < IP< 85 ) VP = 12 en moyenne et donc PS = 40 puisque IP = VP+PS
L incidence pelvienne IP est un paramètre de forme. Le bassin est constitué de 2 os iliaques et du sacrum. Il semble que ce soit le sacrum qui soit impacté par les variations d IP. Plus IP est faible et plus le sacrum est long et plus le plateau sacré se projette vers le haut proche de la ligne joignant les deux crêtes iliaques et plus le plateau sacré est horizontal. Plus IP est grand et plus le sacrum est court, plus la projection du plateau sacré est basse bien en dessous de la ligne des crêtes iliaques.
Dans les faibles IP le bassin est haut et étroit dans son diamètre antéro-postérieur. Ce bassin vertical offre une faible capacité de version pelvienne. Dans les grandes IP, le pelvis est plus horizontal, a une forte pente sacrée et donc une grande possibilité de version pelvienne. La relation anatomique entre le rachis et les hanches a d importantes implications dans la modulations de la posture. Le pelvis est couplé à la lordose lombaire et à l extension des hanches en position debout et certains pelvis sont meilleurs que d autres pour accomplir cette tâche.
Les paramètres rachidiens : La lordose lombaire, ses limites théoriques anatomiques sont T12/L1 en haut et L5 en bas mais cela ne correspond pas à la réalité mécanique, elle peut être plus longue ou plus courte. Ses points de repère ont été redéfini : - Plateau supérieur de S1 en limite distale - Point d inflexion en limite supérieure qui délimite le passage à la cyphose - L apex de la lordose lombaire défini comme le point le plus antérieur de la lordose sur un rachis en position verticale
Segmentation de Dimmet et Berthonaud La courbure de la lordose est divisée en deux arcs en fonction d une droite horizontale passant par l apex L arc supérieur est compris entre le point d inflexion supérieur et l apex L arc de cercle inférieur est compris entre l apex et le plateau sacré
L arc supérieur a une valeur angulaire relativement constante de 15 pour une population asymptomatique. L arc inférieur a une valeur angulaire égale à la pente sacrée. Donc, l orientation du plateau sacré est une condition majeure de la forme de la lordose lombaire. Et compte tenu de la constance de l arc supérieur, la somme des arcs peut être ramenée à PS + 15. A partir de cette construction et en segmentant les valeurs de PS, Roussouly a défini quatre types majeurs de morphotypes de lordose lombaire.
Type 1 PS < 35 L arc inférieur est de faible angulation, il est très court, voire inexistant. Seul l arc supérieur s exprime. Comme la lordose est courte, la cyphose descend bas en zone lombaire
Type 2 PS < 35 la deuxième expression d un arc inférieur de faible degré est de diminuer le rayon de courbure, la forme de l arc se rapproche d un segment de droite. La lordose est plus longue mais très aplatie. La forme générale du rachis thoraco-lombaire est globalement harmonieuse et peu galbée. LL<50
Type 3 35 < PS < 45 C est le type harmonieux moyen. La lordose s allonge, l apex est au niveau de L4. 50 < LL < 60
Type 4 PS > 45 C est le type harmonieux hyper-galbé. L angle de lordose augmente avec l inclinaison sacrée. Comme l arc inférieur s allonge, le nombre de vertèbres dans la lordose lombaire (LL) augmente pouvant dépasser la limite anatomique de T12-L1. LL > 60
Il existe donc une forte corrélation entre IP et PS et à un moindre degré entre IP et LL La forte corrélation IP-PS autorise l approximation entre IP et les formes de lordose qui sont indexées sur PS. Pour les IP les plus faibles, on trouvera des LL types 1 et 2 Pour les IP plus fortes, les types 3 et 4.
Equilibre global du rachis L équilibre global du corps humain en position debout nécessite l analyse du positionnement de l ensemble cervico-céphalique. Il n y a pas encore de consensus pour un repère anatomique crânien (EOS récent). Le consensus est le milieu du corps de C7. L aplomb de C7 (ligne verticale partant du milieu du corps vertébral de C7) doit tomber au niveau du plateau sacré. Idéalement juste en arrière du bord postérieur du plateau sacré L angle spino-sacré (ASS) = angle mesuré de l aplomb de C7 avec l horizontale (bascule de C7) + PS
L angle spino-sacré(ass) est primordial, en une seule mesure il permet une analyse globale de l équilibre du complexe spino-pelvien. La position de C7 est extrêmement stable dans une population d adultes asymptomatiques La valeur moyenne de la bascule de C7 est de 95 (+ ou 3 ) La corrélation entre ASS et PS est forte ce qui démontre la stabilité de C7 au dessus du sacrum.
Pathologie Le patient n a jamais été «normal» : spondylolisthésis avec lyse isthmique. Relation spino-pelvienne déséquilibrée dès l adolescence. Le patient a été «normal» mais une pathologie intercurrente (trauma, infection, tumeur) a changé l équilibre rachidien. Le patient était initialement «normal» et l évolution dégénérative avec perte de hauteur discale liée à l âge a conduit à un changement de l organisation spinopelvienne générant un déséquilibre. C est cette dernière situation que nous allons développer.
Pathologie Selon Battié, la dégénérescence discale est génétique à 74% des cas. Des facteurs extérieurs peuvent aggraver la situation (activités physiques contraignantes) La perte de hauteur discale génère une cyphose locale = diminution de LL
Pathologie En fonction des formes de lordose : Le type 1 : les contraintes s exerceront plus volontiers sur les disques de la cyphose thoraco-lombaire et les articulations postérieures de la zone lombaire basse. Le type 2 : peu de lordose, les disques intervertébraux seront hypersollicités. Le type 3 : harmonieux, pas de caractéristique mécanique négative. Le type 4 :lordose très galbée. Les contraintes prédominent sur les formations postérieures. Ceci prédispose à l arthrose apophysaire postérieure et au spondylolisthésis dégénératif.
Mécanismes primaires de compensation Si les mobilités intervertébrales sus- et sous-jacentes à la cyphose sont conservées, les zones rachidiennes concernées se mettent en extension.
Mécanismes primaires de compensation Quand le rachis est raide, l ASS diminue, la rétroversion du bassin est mise en jeu (VP augmente). Elle permet la diminution de PS pour compenser la baisse de l ASS afin de maintenir l aplomb de C7 ( ASS = PS + bascule de C7).
Mécanismes primaires de compensation Les possibilités de compensation en rétroversion du bassin sont dépendantes de la valeur de l IP Pour les grandes IP les possibilités de VP sont plus grandes que dans les faibles IP. Dans la réalité, le mécanisme de rétroversion est limité par l extension des hanches, quand la limites de celle-ci est atteinte, le fémur doit s incliner en fléchissant les genoux. Même si les grandes IP autorisent une meilleure compensation, le mécanisme de grande rétroversion est difficile à maintenir et souvent douloureux. Le déséquilibre antérieur est majoré lors du pas postérieur qui pousse le bassin en antéversion et le rachis en déséquilibre antérieur.
Merci de votre attention