Par une requête, enregistrée le 11 juillet 2016, l association pour la gratuité du pont de l île d Oléron (AGPIO) demande au juge des référés :

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N 1601570 TRIBUNAL ADMINISTRATIF DE POITIERS ASSOCIATION POUR LA GRATUITE DU PONT DE L'ILE D'OLERON (AGPIO) Mme Lucie Cazcarra Juge des référés REPUBLIQUE FRANÇAISE AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS Le juge des référés Audience du 27 juillet 2016 Ordonnance du 28 juillet 2016 Vu la procédure suivante : Par une requête, enregistrée le 11 juillet 2016, l association pour la gratuité du pont de l île d Oléron (AGPIO) demande au juge des référés : 1 ) d ordonner, sur le fondement des dispositions de l article L. 521-1 du code de justice administrative, la suspension de la délibération du 24 juin 2016 par laquelle le conseil départemental de la Charente-Maritime a approuvé l organisation et a fixé les modalités de la consultation des électeurs inscrits sur les listes électorales des communes de l île d Oléron, prévue le 25 septembre 2016, sur l instauration d un droit départemental de passage, dit «écotaxe», sur le pont d Oléron, jusqu à ce qu il soit statué au fond sur la légalité de cette décision ; 2 ) de mettre à la charge du département de la Charente-Maritime la somme de 150 euros au titre de l article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi que les entiers dépens. Elle soutient que : - l urgence est établie dès lors que la date de consultation, fixée au 25 septembre 2016, est trop proche pour que le tribunal puisse statuer sur la légalité au fond de la décision contestée avant cette échéance ; - en prévoyant de consulter les seuls électeurs oléronais, le département de la Charente- Maritime limite de manière trop restrictive le périmètre de la consultation, en méconnaissance des dispositions de l article L. 1112-15 du code général des collectivités territoriales, dès lors que l instauration d un droit de passage du pont d Oléron intéresse l ensemble des électeurs du Pays de Marennes/Oléron qui regroupe les communautés de communes de l île d Oléron et de Marennes ; - la question soumise est orientée pour favoriser un vote en faveur du projet, ce qui porte atteinte à la sincérité du scrutin ; - les dispositions du huitième alinéa de l article L. 321-11 du code de l environnement instaurent une rupture d égalité des citoyens devant les charges publiques dès lors que la modulation

N 1601570 2 des tarifs qu elle permet n est pas fondée sur l impact environnemental des véhicules qui franchiront le pont. Par un mémoire, enregistré le 18 juillet 2016, l association pour la gratuité du pont de l île d Oléron (AGPIO) demande au juge des référés, à l appui de sa requête, et en application de l article 23-1 de l ordonnance du 7 novembre 1958, de transmettre au Conseil d Etat la question prioritaire de constitutionnalité relative à la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution des dispositions de l article L. 321-11 du code de l environnement. Elle soutient que : - l article L. 321-11 du code de l environnement s applique au litige dont le juge des référés est saisi ; - le Conseil constitutionnel n a pas été saisi des dispositions litigieuses ; - la question prioritaire de constitutionnalité n est pas dépourvue de caractère sérieux dès lors que les dispositions litigieuses sont contraires à la liberté d aller et de venir ainsi qu au principe d égalité devant les charges publiques. Par des mémoires, enregistrés les 19 juillet et 25 juillet 2016, le conseil départemental de la Charente-Maritime, représenté par Me de Froment, conclut au rejet de la requête et demande que soit mise à la charge de l AGPIO une somme de 1 500 euros au titre de l article L. 761-1 du code de justice administrative. Il soutient que : - l urgence n est pas caractérisée par la fixation de la date du scrutin trois mois après la délibération attaquée dès lors que la règlementation en vigueur n impose aucune règle quant à la fixation de cette date ; - la condition de l urgence n est pas satisfaite dès lors que la délibération et la consultation, qui ne présentent pas de caractère décisoire, ne peuvent avoir pour effet de porter atteinte aux intérêts de l association requérante ou à ceux qu elle entend défendre ; - le juge des référés n a pas remis en cause le périmètre retenu dans le précédent recours dirigé contre la délibération du 22 avril 2016 par laquelle le département organisait les modalités de la consultation portant sur le même objet ; - le périmètre de consultation retenu se justifie eu égard aux spécificités de l insularité et est conforme aux dispositions combinées des articles L. 321-11 et R. 321-6 du code de l environnement qui réservent l initiative du processus d instauration du droit départemental de passage à la majorité des communes ou de groupements de communes situés sur une île ; - la question posée répond aux exigences de précision, de clarté et de loyauté nécessaires pour assurer la sincérité du scrutin ; - le moyen tiré de l inconstitutionnalité de l article L. 321-11 du code de l environnement est inopérant devant le juge des référés auquel il n appartient pas de se prononcer sur la constitutionnalité d une loi et est, en tout état de cause, non fondé dès lors que le principe d égalité devant les charges publiques ne fait pas obstacle à ce que des situations différentes fassent l objet de solutions différentes. Vu : - les autres pièces du dossier ; - la requête n 1601572, enregistrée le 11 juillet 2016 par laquelle l AGPIO demande l annulation de la délibération n 112 du 24 juin 2016 du conseil départemental de la Charente- Maritime.

N 1601570 3 Vu : - la Constitution, notamment son article 61-1 ; - l ordonnance n 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel, notamment ses articles 23-1 à 23-3 ; - le code général des collectivités territoriales ; - le code de l environnement ; - le code de justice administrative. La présidente du tribunal a désigné Mme Cazcarra en application de l article L. 511-2 du code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l audience. Après lecture du rapport de Mme Cazcarra, juge des référés, ont été entendues au cours de l audience publique : - les observations de M. Rivault, représentant l association pour la gratuité du pont de l île d Oléron, - et les observations de Me de Froment, représentant le département de la Charente- Maritime. La clôture de l instruction a été prononcée à l issue de l audience publique. Un mémoire présenté pour le département de la Charente-Maritime a été enregistré le 28 juillet 2016. Considérant ce qui suit : 1. La communauté de communes de l île d Oléron a, par une délibération du 17 décembre 2014, demandé au conseil départemental de la Charente-Maritime de se prononcer sur l instauration d un droit départemental de passage, dit «écotaxe», sur le pont de l île d Oléron. Par délibération du 24 mars 2016, le conseil départemental a approuvé le principe de l organisation d une consultation des électeurs de l île d Oléron afin de connaître leur avis sur l instauration d un tel droit et a donné délégation à la commission permanente pour sa mise en œuvre. La commission permanente du conseil départemental de la Charente-Maritime a, par délibération du 22 avril 2016, arrêté les termes de la question posée et a précisé que seuls les résidents permanents de l île seraient appelés à cette consultation. A la suite de la suspension de la délibération du 22 avril 2016 par une ordonnance du juge des référés du 30 mai 2016, le conseil départemental de la Charente-Maritime a pris une nouvelle délibération, le 24 juin 2016, approuvant l organisation et les modalités de la consultation des électeurs de l île d Oléron, fixée au 25 septembre 2016, à propos de l instauration d un droit départemental de passage sur le pont d Oléron. Par la présente requête, l association pour la gratuité du pont de l île d Oléron (AGPIO) sollicite la suspension de cette dernière délibération. 2. L'article L. 521-1 du code de justice administrative dispose que : «Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision. / Lorsque la suspension est prononcée, il est statué sur la requête en annulation ou en réformation de la décision dans les meilleurs délais. La suspension prend fin au plus tard lorsqu'il est statué sur la requête en annulation ou en réformation de la décision».

N 1601570 4 Sur l urgence : 3. La condition d urgence à laquelle est subordonné le prononcé d une mesure de suspension doit être regardée comme remplie lorsque la décision contestée préjudicie de manière suffisamment grave et immédiate à un intérêt public, à la situation du requérant ou aux intérêts qu il entend défendre. Il appartient au juge des référés d apprécier concrètement, compte tenu des justifications fournies par le requérant, si les effets de l acte contesté sont de nature à caractériser une urgence justifiant que, sans attendre le jugement de la requête au fond, l exécution de la décision soit suspendue. 4. D une part, la délibération litigieuse fixe la consultation des électeurs inscrits sur les listes électorales des communes de l île d Oléron au dimanche 25 septembre 2016. Or, contrairement à ce que soutient le département de la Charente-Maritime pour contester, non la recevabilité de la requête, mais l urgence, une telle délibération, alors même qu elle prévoit une consultation n ayant qu un caractère consultatif, conformément aux dispositions de l article L. 1112-17 du code général des collectivités territoriales, est un acte faisant grief susceptible de faire l objet d un recours pour excès de pouvoir. D autre part, la consultation projetée a pour objet d apporter un avis éclairé au département, qui a délibérément fait le choix de mettre en œuvre cette procédure avant d instaurer, le cas échéant, un droit départemental de passage qui aura des conséquences financières sur les usagers du pont d Oléron. Ainsi, en se prévalant de l imminence de la consultation et de ce que l absence de contrôle préalable des modalités de sa mise en œuvre priveraient cette consultation de sincérité, l AGPIO, qui a pour unique objet d «obtenir le maintien de la gratuité du pont d accès à l île d Oléron», doit être regardée comme justifiant d une situation d urgence au sens des dispositions précitées de l article L. 521-1 du code de justice administrative. Sur l existence de moyens de nature à faire naître un doute sérieux quant à la légalité de la délibération litigieuse : En ce qui concerne la question prioritaire de constitutionnalité relative à l article L. 321-11 du code de l environnement : 5. Il résulte des dispositions combinées des premiers alinéas des articles 23-1 et 23-2 ainsi que de l article 23-3 de l ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel qu une question prioritaire de constitutionnalité peut être soulevée devant le juge des référés statuant sur des conclusions à fin de suspension qui lui sont présentées sur le fondement de l article L. 521-1 du code de justice administrative. Si le juge des référés ne rejette pas les conclusions à fin de suspension pour irrecevabilité ou pour défaut d urgence et qu il est saisi d un moyen tiré de ce qu une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution présenté dans un écrit distinct et motivé, il lui appartient de statuer sans délai par une décision motivée sur la transmission de la question prioritaire de constitutionnalité au Conseil d Etat. Il procède à cette transmission à la triple condition que la disposition contestée soit applicable au litige ou à la procédure, qu elle n ait pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances, et que la question ne soit pas dépourvue de caractère sérieux. 6. L article L. 321-11 du code de l environnement prévoit que : «A la demande de la majorité des communes ou des groupements de communes compétents en matière d'aménagement, d'urbanisme ou d'environnement d'une île maritime reliée au continent par un ouvrage d'art, le conseil départemental peut instituer un droit départemental de passage dû par les passagers de chaque véhicule terrestre à moteur empruntant cet ouvrage entre le continent et l'île. / Le droit

N 1601570 5 mentionné au premier alinéa est établi et recouvré au profit du département. Il peut être perçu par l'exploitant de l'ouvrage en vue du reversement au département. / Le montant de ce droit est fixé par le conseil départemental après accord avec la majorité des communes et groupements de communes mentionnés au premier alinéa. / Le montant du droit de passage est au plus égal au produit d'un montant forfaitaire de 20 par un coefficient, compris entre 0,2 et 3, en fonction de la classe du véhicule déterminée d'après sa silhouette, appréciée en tenant compte, s'il y a lieu, de la présence d'une remorque tractée et de ses caractéristiques techniques. / Lorsqu'est perçu le droit départemental mentionné au premier alinéa, l'usage de l'ouvrage d'art entre le continent et l'île peut en outre donner lieu à la perception d'une redevance pour services rendus par le maître de l'ouvrage en vue d'assurer le coût de son entretien et de son exploitation. ( ) / La délibération du conseil départemental sur le droit de passage peut prévoir des tarifs différents ou la gratuité, sans préjudice de la modulation éventuelle de la redevance d'usage, selon les diverses catégories d'usagers pour tenir compte soit d'une nécessité d'intérêt général en rapport avec les espaces naturels protégés, soit de la situation particulière de certains usagers et, notamment, de ceux qui ont leur domicile ou leur lieu de travail dans l'île concernée, ou leur domicile dans le département concerné, soit de l'accomplissement d'une mission de service public. / Le produit du droit départemental de passage est inscrit au budget du département après déduction des coûts liés à sa perception ainsi que des coûts liés aux opérations de gestion et de protection des espaces naturels insulaires dont le département est le maître d'ouvrage ; les sommes correspondantes sont destinées au financement de mesures de protection et de gestion des espaces naturels insulaires ainsi que du développement de transports en commun fonctionnant avec des véhicules propres, dans le cadre d'une convention conclue entre le préfet, le conseil départemental et les communes et les groupements de communes. La fraction du produit revenant aux communes et groupements concernés en application de cette convention leur est reversée par le département. Les collectivités peuvent rétrocéder tout ou partie de ces sommes aux gestionnaires des espaces naturels protégés mentionnés au huitième alinéa, dans le cadre d'une convention conclue à cet effet. / Un décret en Conseil d'etat précise les conditions d'application du présent article». Ces dispositions, applicables au litige, n ont pas déjà été déclarées conformes à la Constitution par le Conseil constitutionnel. 7. Pour contester la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution des dispositions de l article L. 321-11 du code de l environnement, l AGPIO soutient que le législateur a méconnu le principe à valeur constitutionnelle de la liberté d aller et venir sur le territoire national en contraignant les usagers d un véhicule terrestre à moteur - autres que ceux pouvant bénéficier de la gratuité ou de tarifs différents en vertu du 8 ème alinéa de ce même article - à s acquitter d un droit de passage, au demeurant très élevé, dès lors qu ils n ont d autre choix que d emprunter le pont, unique voie d accès public à l île. Elle soutient également que le législateur a méconnu, par ces mêmes dispositions, le principe d égalité devant les charges publiques en ce qu il n envisage pas la gratuité ou des tarifs différenciés selon le caractère plus ou moins polluant du véhicule à moteur emprunté. 8. D une part, si la liberté d'aller et venir est un principe de valeur constitutionnelle, celui-ci ne saurait faire obstacle à ce que l'utilisation de certains ouvrages donne lieu au versement d'une taxe. D'autre part, si le principe d'égalité devant la loi implique qu'à situations semblables il soit fait application de solutions semblables, il n'en résulte pas que des situations différentes ne puissent faire l'objet de solutions différentes. Ainsi, en précisant dans le huitième alinéa de l'article L. 321-11 du code de l environnement, que pour la fixation du montant du droit départemental de passage le conseil départemental est autorisé «à prévoir des tarifs différents ou la gratuité, sans préjudice de la modulation éventuelle de la redevance d'usage, selon les diverses catégories d'usagers pour tenir compte soit d'une nécessité d'intérêt général en rapport avec les espaces naturels protégés, soit de la situation particulière de certains usagers et, notamment, de ceux qui ont leur domicile ou leur lieu de travail dans l'île concernée, ou leur domicile dans le département

N 1601570 6 concerné, soit de l'accomplissement d'une mission de service public», le législateur a déterminé des critères qui ne sont contraires ni au principe de l'égalité devant la loi ni à son corollaire, celui de l'égalité devant les charges publiques. 9. Il résulte de ce qui précède que la question prioritaire de constitutionnalité soulevée est dépourvue de caractère sérieux. Il n y a dès lors pas lieu de transmettre cette question au Conseil d Etat. 2016 : En ce qui concerne les autres moyens invoqués à l encontre de la délibération du 24 juin 10. L AGPIO soutient que le périmètre de la consultation, qui concerne exclusivement les électeurs de l île d Oléron, est trop restrictif eu égard aux dispositions de l article L. 1112-15 du code général des collectivités territoriales. 11. L article L. 1112-15 du code général des collectivités territoriales prévoit que : «Les électeurs d'une collectivité territoriale peuvent être consultés sur les décisions que les autorités de cette collectivité envisagent de prendre pour régler les affaires relevant de la compétence de celleci. La consultation peut être limitée aux électeurs d'une partie du ressort de la collectivité, pour les affaires intéressant spécialement cette partie de la collectivité». 12. Le conseil départemental de la Charente-Maritime, seule autorité compétente pour instituer un droit départemental de passage sur le pont de l île d Oléron, a choisi de limiter à une partie de son territoire la consultation relative à l instauration de ce droit. Dès lors que le pont relie, depuis la commune de Bourcefranc-le-Chapus, membre de la communauté de communes du Bassin de Marennes, le continent à l île d Oléron, la consultation relative au droit de passage du pont ne peut être considérée comme intéressant exclusivement les électeurs inscrits sur les listes électorales des communes de l île d Oléron. Si le conseil départemental de la Charente-Maritime soutient que les communes qui ne sont pas situées sur l île n ont pas à être comprises dans le périmètre de consultation sur l instauration d un droit départemental de passage dès lors qu elles ne sont pas au nombre des communes pouvant déclencher la procédure d instauration d un droit départemental de passage en application des articles L. 321-11 et R. 321-6 du code l environnement, cette argumentation est inopérante dès lors que la procédure d instauration du droit de passage et la procédure de consultation des électeurs sur des décisions locales relèvent de législations distinctes. Dans ces conditions, le moyen tiré d un périmètre de consultation trop restrictif est propre à créer, en l état de l instruction, un doute sérieux quand à la légalité de la délibération du 24 juin 2016. 13. Il résulte de ce qui précède qu il y a lieu de prononcer la suspension de l exécution de la délibération n 112 du conseil départemental de la Charente-Maritime du 24 juin 2016 jusqu à ce qu il soit statué au fond sur la légalité de cette délibération. Sur les conclusions tendant à l application des dispositions de l article L. 761-1 du code de justice administrative : 14. Les dispositions de l article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l AGPIO, qui n est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme demandée par le département de la Charente-Maritime. 15. Dans les circonstances de l espèce, il n y a pas lieu de faire droit aux conclusions de l AGPIO présentées sur le fondement de ce même article.

N 1601570 7 O R D O N N E : Article 1 er : Il n y pas lieu de transmettre au Conseil d Etat la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par l association pour la gratuité du pont de l île d Oléron. Article 2 : L exécution de la délibération du conseil départemental de la Charente-Maritime du 24 juin 2016 est suspendue jusqu à ce qu il soit statué au fond sur la légalité de cette délibération. Article 3 : Les conclusions de l association pour la gratuité du pont de l île d Oléron et du département de la Charente-Maritime tendant à l application des dispositions de l article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées. Article 4 : La présente ordonnance sera notifiée à l'association pour la gratuité du pont de l île d Oléron et au département de la Charente-Maritime. Fait à Poitiers, le 28 juillet 2016. Le juge des référés, Signé L. CAZCARRA La République mande et ordonne au préfet de la Charente-Maritime, en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision. Pour expédition conforme, Pour le greffier en chef, Le greffier, C. NOIRIEL