... Vu la décision par laquelle le directeur des services fiscaux des Hauts-de-Seine Nord a statué sur la réclamation préalable de la société SUEZ;

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Transcription:

TRIBUNAL ADMINISTRATIF DE PARIS N 0300768 Société SUEZ M. GIRO Président- rapporteur Mme WEIDENFELD Commissaire du Gouvernement REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS Le Tribunal administratif de Paris (1 ère Section - 1 ère Chambre) Séance du 5 décembre 2007 Lecture du 28 décembre 2007 Vu la requête, enregistrée le 22 janvier 2003, présentée par la société SUEZ, dont le siège social est 16, rue de la Ville l Evêque (75008) Paris, agissant par la voie de ses représentants légaux ; la société SUEZ demande au tribunal : 1 ) de prononcer en sa faveur la restitution de sommes payées à raison du précompte mobilier assis sur des distributions de dividendes en provenance de ses sociétés filiales établies dans d autres Etats membres de l Union européenne que la France, au titre des années 1999, 2000 et 2001 ; 2 ) d ordonner que lesdites sommes seront, conformément aux dispositions de l article L. 208 du livre des procédures fiscales, assorties des intérêts moratoires y afférents ; 3 ) de condamner l Etat à lui verser, par application de l article L.761-1 du code de justice administrative, la somme de 10.000 (dix mille) euros au titre des frais irrépétibles ;... Vu la décision par laquelle le directeur des services fiscaux des Hauts-de-Seine Nord a statué sur la réclamation préalable de la société SUEZ; Vu les autres pièces du dossier ; Vu le traité instituant la Communauté européenne ; Vu la directive 1990/435/CEE du Conseil du 23 juillet 1990 concernant le régime fiscal des sociétés mères et filiales d établissements différents ;

0300768 2 Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ; Vu le code de justice administrative ; Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l audience ; Après avoir entendu au cours de l audience publique du 5 décembre 2007 : - le rapport de M. Giro, président-rapporteur ; - les observations de Maître Briard, avocat aux Conseils, pour la société SUEZ ; - et les conclusions de Mme Weidenfeld, commissaire du gouvernement ; Sur les conclusions tendant à la restitution de sommes versées à raison du précompte mobilier : Sans qu il soit besoin d examiner les autres moyens de la requête : Considérant, d une part, qu aux termes des stipulations de l article 56 du traité instituant la Communauté européenne : «Dans le cadre des dispositions du présent chapitre, toutes les restrictions aux mouvements de capitaux entre les Etat membres et entre les Etats membres et les pays tiers sont interdites» ; qu aux termes de l article 58, paragraphe 1, de ce traité : «L article 56 ne porte pas atteinte au droit qu ont les Etats membres : a) d appliquer les dispositions pertinentes de leur législation fiscale qui établissent une distinction entre les contribuables qui ne se trouvent pas dans la même situation en ce qui concerne leur résidence ou le lieu où les capitaux sont investis : b) de prendre toutes les mesures indispensables pour faire échec aux infractions à leurs lois et règlements, notamment en matière fiscale» ; Considérant, d autre part, qu aux termes des dispositions de l article 158 bis du code général des impôts, dans sa rédaction alors en vigueur : «I Les personnes qui perçoivent des dividendes distribués par des sociétés françaises disposent à ce titre d un revenu constitué : a) par les sommes qu elles perçoivent de la société ; b) par un avoir fiscal représenté par un crédit ouvert sur le trésor. Le crédit d impôt est égal à la moitié des sommes effectivement versées par la société. Il ne peut être utilisé que dans la mesure où le revenu est compris dans la base de l impôt sur le revenu dû par le bénéficiaire. Il est reçu en paiement de l impôt» ; qu aux termes de l article 216 du même code, dans sa rédaction alors en vigueur : «I- Les produits nets des participations, ouvrant droit à l application du régime des sociétés mères et visés à l article 145, touchés au cours d un exercice par une société mère, peuvent être retranchés du bénéfice net total de celle-ci, défalcation faite d une quote-part de frais et charges» ; qu aux termes de l article 223 sexies du même code: «1. Sous réserve des dispositions de l article 209 quinquies et 223 H, lorsque les produits distribués par une société sont prélevés sur des sommes à raison desquelles elle na pas été soumise à l impôt sur les sociétés aux taux normal prévu au deuxième alinéa du I de l article 219, cette société est tenue d acquitter un précompte égal au crédit d impôt calculé dans les conditions prévues au I de l article 158 bis. Le précompte est dû au titre des distributions ouvrant droit au crédit d impôt prévu à l article 158 bis quels qu en soient les bénéficiaires» ; qu enfin, aux termes du 2 de l article 146 dudit code : «Lorsque les distributions auxquelles procède une société mère donnent lieu à l application du précompte prévu à l article 223 sexies, ce précompte est diminué, le cas échéant, du montant des crédits d impôt et avoirs fiscaux

0300768 3 attachés aux produits de participations, visées à l article 145, encaissés au cours des exercices clos depuis cinq ans au plus» ; Considérant, en premier lieu, que dès lors que seule la distribution des dividendes perçus par les sociétés mères de leurs filiales installées en France, est assortie d un avoir fiscal, les dispositions de droit interne précitées ont nécessairement pour effet de désavantager les sociétés qui perçoivent des dividendes de filiales installées dans un autre pays membre de l Union européenne, lesquelles sont soumises, à raison de la redistribution de ces dividendes, au précompte mobilier sans imputation possible d un crédit d impôt ; que l application dudit précompte dans ces conditions tend à dissuader les sociétés assujetties à l impôt sur les sociétés en France de placer leurs capitaux dans les sociétés ayant leur siège dans un autre Etat membre, et les actionnaires d investir dans des sociétés ayant des filiales sises dans un autre Etat membre ; que la législation relative à l avoir fiscal et au précompte produit en outre un effet restrictif à l égard des sociétés établies dans d autres Etats membres que la France, en ce qu elle constitue pour elles un frein à la collecte de capitaux dans ce pays ; qu ainsi, la mise en œuvre des dispositions précitées du code général des impôts génère une restriction à la libre circulation des capitaux prohibée, en principe, par l article 56 du traité instituant la Communauté européenne ; Considérant, en deuxième lieu, que si l administration fiscale soutient qu à supposer que la mise en œuvre du système de l avoir fiscal et du précompte créerait une discrimination de nature à porter atteinte à la libre circulation des capitaux, une telle discrimination serait justifiée au regard du principe de la territorialité de l impôt, en réalité les actionnaires que sont les sociétés mères, assujetties à l impôt à titre principal en France, se trouvent dans une situation comparable, qu elles perçoivent des dividendes d une société établie dans cet Etat ou bien d une société établie dans un autre Etat membre de l Union européenne, face à une règle fiscale ayant pour objet de prévenir une double imposition des bénéfices distribués ; qu ainsi, la législation fiscale française ne saurait être considérée comme une conséquence de la mise en œuvre du principe de territorialité, visé par les stipulations précitées du a) du paragraphe 1 de l article 58, lesquelles doivent, au demeurant, en vertu de la jurisprudence de la Cour de justice des Communautés européennes, faire l objet d une interprétation stricte, dès lors qu elles constituent une dérogation au principe fondamental de la libre circulation des capitaux ; Considérant, en troisième lieu, qu eu égard à l objectif poursuivi qui, comme il vient d être dit, est de prévenir une double imposition, la législation contenue dans les dispositions précitées, en ce qu elle exclut les dividendes perçus de filiales ayant leur siège dans un autre Etat membre que la France du bénéfice de l avoir fiscal tout en les soumettant au précompte mobilier, n apparaît pas nécessaire, contrairement à ce que soutient l administration fiscale, à la cohérence du système fiscal français, dès lors que ledit objectif peut aussi bien être atteint en octroyant également le bénéfice d un avoir fiscal aux dividendes distribués par les filiales ayant leur siège dans un autre Etat membre de l Union européenne, le cas échéant calculé en tenant compte de l impôt sur les bénéfices acquitté dans cet Etat ; Considérant qu il résulte de ce qui précède que le dispositif de l avoir fiscal et du précompte, tel qu instauré par le droit interne alors en vigueur, impliquait une restriction à la libre circulation des capitaux qui ne pouvait trouver sa justification dans le principe de territorialité de l impôt ni dans la nécessité de préserver la cohérence du système fiscal français, et qui, en conséquence, était contraire aux stipulations des articles 56 et 58 du traité instituant la Communauté européenne ; que, par suite, il y a lieu de prononcer la restitution au

0300768 4 bénéfice de la société SUEZ de la contre-valeur en euros des sommes, non contestées, de 842.764.400 F, 1.437.416.383 F et 1.774.294.267 F, correspondant à l impôt versé à raison du précompte mobilier assis sur les dividendes reçus de ses filiales installées dans d autres pays membres de l Union européenne que la France, au titre, respectivement, des années 1999, 2000 et 2001 ; Sur les conclusions tendant au versement d intérêts moratoires : Considérant que les intérêts dus au contribuable, en vertu de l article L. 208 du livre des procédures fiscales, en cas de remboursement effectué par suite de dégrèvements d impôt prononcés par un tribunal ou l administration fiscale à la suite d une réclamation, sont, en application de l article R. 208-1 du même livre, «payés d office en même temps que les sommes remboursées au contribuable par le comptable chargé du recouvrement des impôts» ; qu il n existe aucun litige né et actuel entre le comptable et la société requérante en ce qui concerne lesdits intérêts ; que dès lors les conclusions susmentionnées ne sont pas recevables ; Sur l application de l article L. 761-1 du code de justice administrative : Considérant qu il y a lieu, dans les circonstances de l espèce, de condamner l Etat à verser à la société SUEZ la somme de 3.000 euros par application de l article L. 761-1 du code de justice administrative ; D E C I D E : Article 1er : Il est accordé restitution à la société SUEZ des sommes de 128.478.605 (cent vingt-huit millions quatre cent soixante-et-dix huit mille six cent cinq) euros, 219.132.715 (deux cent dix-neuf millions cent trente deux mille sept cent quinze) euros et 270.489.417 (deux cent soixante-et-dix millions quatre cent quatre-vingt neuf mille quatre cent dix-sept) euros, correspondant à l impôt versé à raison du précompte mobilier assis sur les dividendes reçus de ses filiales installées dans des pays membres de l Union européenne autres que la France au titre, respectivement, des années 1999, 2000 et 2001. Article 2 : L Etat versera à la société SUEZ la somme de 3.000 (trois mille) euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de la société SUEZ est rejeté. Article 4 : Le présent jugement sera notifié à la société SUEZ et au directeur des services fiscaux des Hauts-de-Seine Nord.

0300768 5 Délibéré à l'issue de l'audience du 5 décembre 2007, où étaient présents : M. Giro, président ; M. Ladreit de Lacharrière, premier conseiller ; Mme Oriol, premier conseiller ; Lu en audience publique le 28 décembre 2007 ; Le Président-rapporteur, L assesseur le plus ancien, P. GIRO P. LADREIT de LACHARRIERE Le greffier, E. MOULIN La République mande et ordonne au ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.