Groupe de travail «Gestion des Actifs Logiciels» Réunion du 3 février 2015



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Transcription:

Groupe de travail «Gestion des Actifs Logiciels» Réunion du 3 février 2015 Eléonore VARET Associée Cabinet d avocats Gilles Vercken ev@gillesvercken.com 06 77 18 94 13 http://clubutilisateursoracle.org/

ASPECTS JURIDIQUES DES CONTRATS DE LICENCES: PANORAMA DES ERREURS À ÉVITER 3 février 2015 Éléonore Varet [Avertissement : cette présentation est le support complémentaire d une intervention orale. Elle a donc été conçue en complémentarité, et non en vue d une lecture autonome] Groupe de travail «Gestion des actifs logiciels» Réunion du 3 février 2015

Introduction 3

Qu est-ce qu un logiciel? Une œuvre de l esprit éligible à la protection par le droit d auteur (loi n 85-660 du 3 juillet 1985) avec un régime de protection spécifique pour prendre en compte sa dimension technique et industrielle qui explique la prééminence du contrat. Pour les éditeurs : Un impératif économique les conduits à mener une politique rigoureuse en matière de licences pour compenser les pertes de revenus liées à la concurrence et valoriser l investissement en R&D. Pour les entreprises : Un enjeu stratégique : un levier concurrentiel et de productivité. L un des principaux postes de dépense informatique. 4

Contexte de la négociation des contrats de licence Dans ce contexte, les entreprises utilisatrices doivent négocier les accords de licence avec pour principaux objectifs : Souplesse Sécurité Prévisibilité Maîtrise des coûts Les pratiques des grands éditeurs s accordent imparfaitement avec ces objectifs : Réticence à négocier les contrats Contrats complexes Des produits et des règles de comptage qui évoluent sans cesse Une pratique systématique des audits 5

Bonnes pratiques et propositions de clauses 6

Le périmètre contractuel: référentiel contractuel et hiérarchie des documents contractuels Objectif: s engager sur des documents contractuels acceptés. Le consentement est donné sur la totalité des documents formant le contrat pour être opposable. Fondement juridique: le vice du consentement, l absence de fourniture des documents ne permet pas de connaître l étendue de son engagement. Mauvaises pratiques - contrat renvoyant à des documents non communiqués, - contrat contenant des liens hypertextes non annexés au contrat, - contrat de licence signé mais jamais retourné. Exemple de clause (Licence Oracle) «Dès l acceptation de votre commande par Oracle, il vous est concédé un droit limité d utilisation des logiciels et des services commandés, exclusivement pour les opérations internes liées à votre activité, aux conditions stipulées au dit contrat, y compris les définitions et règles tarifaires figurant dans la commande et la documentation du logiciel. 7 La documentation est soit livrée avec le logiciel, soit accessible en ligne à l adresse : http://oracle.com/contracts.»

Le périmètre contractuel: référentiel contractuel et hiérarchie des documents contractuels Recommandation Tous les documents contractuels sont communiqués avant l acceptation du contrat et imprimés et signés par les deux parties. Le contrat établit la liste des documents entrant dans le champ contractuel. Le contrat stipule l ordre de prévalence des documents contractuels en cas de contradiction. Le contrat stipule que ces documents contractuels annulent et remplacent tous les documents, emails, propositions commerciales échangés précédemment entre les parties. Exemple de clause «Le contrat (ci-après le «Contrat») est composé des documents contractuels suivants qui prévalent en cas de contradiction dans l ordre de priorité suivant : [XXX] Le Contrat exprime l intégralité des droits et obligations des Parties. Il annule et remplace tout document échangé préalablement entre les Parties ayant le même objet.» 8

Petit rappel: les conditions de validité de la formation des contrats Aux termes de l article 1108 du Code civil, quatre conditions sont essentielles pour la validité d une convention: La capacité à contracter Le consentement de la partie qui s oblige Un objet certain Une cause licite 9

Le consentement doit être donné sur une offre ferme et précise. L acceptation doit être concordante, pure et simple, complète et doit avoir lieu sur les points essentiels de l offre. La forme de l acceptation est libre du moment qu elle exprime la volonté d accepter. TGI Paris, 3 e ch, 7 mai 2014, Actuate Corporation / AXA REIM Le Tribunal de grande instance de Paris a jugé que même si le clic d acceptation du contrat «clic» avait matériellement été effectué par un administrateur réseau d AXA REIM, la signature d un bon de commande succinct au lendemain même de la proposition de services et de ce fait, des nouvelles conditions, par un simple clic étaient insuffisant à garantir la recentre des volontés et qu ainsi la rencontre des volontés n avaient pas eu lieu, à défaut d un consentement éclairé de la part d AXA REIM, par une personne habilitée à conclure de tels contrats. Trois vices peuvent altérer la qualité du consentement et entraîner la nullité relative du contrat: l erreur, le dol et la violence. 10

L exemple du dol Est caractérisé lorsque les manœuvres pratiquées par l une des parties sont telles qu il est évident que, sans ces manœuvres, l autre partie n aurait pas contracté. Il comporte un élément intentionnel: l intention de tromper son partenaire. Il entraîne la nullité de la convention qu à la condition d avoir été déterminant du consentement. La notion de manœuvre est entendue largement. Cour d appel de Lyon, 1 e ch, 26 janvier 2012, Cegid / SAS Norsud Pour la Cour, la référence omniprésente dans les documents commerciaux de Cegid à SAP, dont la notoriété a été un élément déterminant du consentement de Norsud, a vicié son consentement puisque la solution proposée n était en réalité pas certifiée SAP. 11

Assurer la pérennité du périmètre contractuel Objectif: le contrat est la loi des parties, aucune modifications du contrat ne peut intervenir sans l information et l accord préalable de l utilisateur. Fondement juridique: le contrat oblige les parties à respecter les obligations acceptées. Elles doivent les exécuter de bonne foi. 12

Assurer la pérennité du périmètre contractuel Mauvaises pratiques - Le contrat de l éditeur de logiciel stipule qu il peut modifier à tout moment le contrat sans l accord du client. - Un éditeur absorbe un autre éditeur et impose la substitution de son contrat à celui de cet autre éditeur. - L accès à une nouvelle version s effectue par l intermédiaire d une plateforme qui impose l acceptation de nouvelles conditions générales en ligne, alors que l accès à cette version s effectue dans le cadre du contrat antérieur. - L éditeur modifie d une version à l autre son produit, et répartit par exemple sur plusieurs produits des fonctionnalités d un unique produit antérieur, ces nouveaux produits distincts comportant de nouvelles fonctionnalités qui ne sont pas nécessairement souhaités par le client. L éditeur souhaite que le client prenne des nouvelles licences sur les nouveaux produits, compte tenu du fait que ceux-ci comportent de nouvelles fonctionnalités (par ex. IBM). 13

Assurer la pérennité du périmètre contractuel Exemple de clauses - Licence Oracle «Ces conditions peuvent être modifiées à tout moment et les conditions qui vous sont applicables ainsi que la façon d y accéder figurent dans la commande.» «Les prestations de support technique annuel éventuellement commandées sont fournies la première année et toutes les années suivantes aux conditions générales en vigueur lorsqu elles sont exécutées. Elles font partie intégrante du présent contrat et peuvent être modifiées à tout moment par Oracle. Toutefois, Oracle ne réduira pas de manière sensible le niveau de support des logiciels supportés pendant la période pour laquelle les redevances correspondantes ont été payées.» Vous devez en prendre connaissance avant chaque commande. Elles sont disponibles et mises à jour à l adresse suivante http://oracle.com/contracts». «Tous les Services d Implémentation, les Packages Méthodes les Services d Architecture, les Services Accélérateur, les Services Assessment et Workshops sont fournis aux conditions spécifiques à chaque offre et aux conditions générales de prestations de services de conseil, disponibles sur : http://www.oracle.com/consulting/policies/index.html?content.html et sont susceptibles d être modifiées.» 14

Assurer la pérennité du périmètre contractuel Recommandation Exemples de clauses «Toute modification du présent Contrat doit faire l objet d un avenant signé des Parties.» «Dans l hypothèse où l Editeur éclaterait les fonctions du Progiciel objet des présentes en plusieurs logiciels reprenant les fonctionnalités initialement incluses (et/ou les fonctionnalités essentielles) ou les fonctionnalités du Progiciel seraient commercialisées sous un nouveau produit ou seraient intégrées pour l essentiel dans un autre produit (même si le nouveau produit offre de nouvelles fonctionnalités), l ensemble de ces nouveaux logiciels devra être compatible avec la Mise à Jour immédiatement précédente du Progiciel concerné par ces opérations. Le Client sera dispensé des redevances initiales ou des droits d acquisition des licences d utilisation de ces nouveaux logiciels : aucune redevance de licence supplémentaire, aucun frais supplémentaire ne pourra être réclamé au Client qui continuera à bénéficier des mêmes droits accordés au titre des présentes, reportés sur ces nouveaux progiciels. Toute modification dans le modèle de commercialisation du Progiciel ne saurait remettre en cause les droits et obligations du Client sur tout Progiciel acquis ou à acquérir au titre du présent Contrat.» 15

Petit rappel: les effets du contrat Les parties au contrat valablement conclu sont liées et doivent exécuter leurs obligations respectives 16

La force obligatoire des conventions Le contrat est la loi des parties: Irrévocabilité du contrat et impossibilité de rompre unilatéralement le contrat (sauf exception d inexécution compte tenu de la gravité du manquement dans les contrats à durée indéterminée). Intangibilité du contrat et absence de révision pour imprévision. Interdiction de la dénaturation des clauses claires et précises du contrat par les juges dont le pouvoir d interprétation se limite aux clauses ambigües. 17

La force obligatoire des conventions La révocation, la résiliation ou la novation du contrat ne peuvent se produire qu avec l accord des parties: Cour de cassation, ch. Commerciale, 4 juin 2013 IBM /MAIF Dans cet arrêt, la Cour de cassation approuve les juges du fond d avoir écarté le dol mais reproche à la Cour d appel de ne pas avoir caractérisé en quoi la MAIF avait manifesté sa volonté de substituer aux engagements initiaux stipulés au contrat d intégration les nouveaux engagements prévus dans les protocoles ultérieurs. La Cour de cassation rappelle ainsi que la novation ne se présume pas et qu ainsi lorsqu un nouvel accord intervient en cours de projet, il est impératif qu il traite de l effet des conventions successives en définissant clairement la hiérarchie contractuelle. A défaut c est laisser le sort des accords successifs à l appréciation souveraine des juges du fond. 18

Adapter le périmètre contractuel aux besoins de l entreprise Objectif: ce sur quoi porte la licence (version du logiciel) et la durée des engagements doivent être expressément stipulés au contrat. il doit être possible de conclure un contrat de licence sans maintenance et sans être obligé de prendre les nouvelles version du logiciel. Le client doit pouvoir modifier la structure de sa société et de son organisation tout en continuant à bénéficier des licences à parc d utilisateurs / puissance serveur constante. Fondement juridique: article 1129 du Code civil, l objet doit être certain et déterminé. Mauvaises pratiques - Les licences existantes sont des licences illimitées : l éditeur décide de transformer en mode location pour les nouvelles évolutions sans l accord du client. - Le contrat lie obligatoirement la maintenance corrective et la maintenance évolutive. Le contrat de licence indique que la licence n est valable que si le client dispose d un contrat de maintenance en vigueur. 19

Adapter le périmètre contractuel aux besoins de l entreprise Exemples de clauses - Licence Oracle «Les Mises à jour Logiciel et le support Produit commandés peuvent être renouvelés par période d un an et à condition que vous renouveliez les Mises à jour Logiciel ou le support Produit pour le même nombre de licences et les mêmes logiciels, pour les premier et second renouvellements, l augmentation de la redevance correspondante sera plafonnée à 4% par an par rapport à l année précédente.». «Pour la deuxième année, l augmentation sera plafonnée à 4 % par rapport à l année précédente pour les Mises à jour Logiciels ou le support Produit.». «Si vous choisissez d acquérir le support pour une licence appartenant à un groupe de licences, vous devez acquérir le même niveau de support pour toutes les licences appartenant à ce même groupe.». «Vous avez la faculté de résilier le support technique pour un sous-groupe de licences, à condition de résilier les licences de ce sous-groupe». 20

Adapter le périmètre contractuel aux besoins de l entreprise Recommandation Exemples de clauses «La durée des Licences concédées par le Prestataire est fixée à la durée de protection des droits de propriété intellectuelle afférents au Progiciel. La licence est applicable à toutes les versions du logiciel. La Licence est acquise au client indépendamment de la conclusion d un contrat distinct de maintenance». «Dans le cadre du Contrat, le Prestataire propose au Client des services optionnels de Maintenance. Le Client n est pas obligé de souscrire à ces services et peut y renoncer sans incidence sur la Licence.» «Aucune Mise à Jour ou amélioration technique ne saurait entraîner une quelconque augmentation du prix payé au titre de la redevance de Licence». «Le Client peut résilier à tout moment et de plein droit la Maintenance prévue au Contrat par anticipation sans qu il ait à motiver ou justifier le bien-fondé de sa décision et sans que cette résiliation n ait un impact sur la concession des droits sur le Progiciel». «Le Client peut céder, apporter ou transférer, sous quelque forme que ce soit, après notification écrite au Prestataire, ses droits et obligations résultant du Contrat à une Société du Groupe». «Les Licences sont librement cessibles entre les Sociétés du Groupe». 21

Adapter le périmètre contractuel aux besoins de l entreprise: l imprécision des clauses du contrat de licence De nombreux contrats stipulent que l utilisation des logiciels est concédée «pour les besoins du licencié». Cour d appel de Paris, 23 mai 2007 Une société cessionnaire d un fonds de commerce a été condamnée au paiement de 60.000 euros pour contrefaçon de logiciel, le licencié cessionnaire soutenait que le périmètre de la licence lui permettait d utiliser directement ou indirectement le logiciel pour l ensemble de ses besoin sur tous sites et configurations informatiques. La cour a considéré au contraire que l utilisation était limitée «au sein du groupe» et que l utilisation par une société tiers était contrefaisante. 22

Adapter le périmètre contractuel aux besoins de l entreprise: l imprécision des clauses du contrat de licence A l heure des concentrations dans l édition de logiciels et des restructurations que connaissent les entreprises clientes, les discussions portent inévitablement sur la faculté de cession par l une et/ou l autre des parties de ses droits et obligations ou du contrat lui-même à des tiers. Le client pourra prévoir que l accord préalable de l éditeur ne pourra pas être refusé de manière illégitime et que les conditions financières négociées ne seront pas modifiées si les conditions d utilisations sont inchangées. 23

Contrôler les prix des services et des licences Objectif: Connaître la durée et le prix des services et des licences acquises pour évaluer ses dépenses. Connaître le mode de calcul pour évaluer le prix de la licence (mono / multi utilisateur) et la formule de paiement du prix (périodique / up front). Disposer de la licence et des services sans obligations de faire des mises à jour payantes non essentielles au bon fonctionnement du logiciel. La résiliation d un service ou d une licence ne doit pas être conditionnée. L augmentation de la redevance d un service ou d une licence doit être justifiée / négociée. Les limites de la licence et des services doivent être délimités afin d éviter tout dépassement. Fondement juridique: le prix doit être déterminé ou à tout le moins déterminable. 24

Contrôler les prix des services et des licences Mauvaises pratiques - L achat d une licence est conditionné à l achat d un module de formation au logiciel. - La suppression d un service tel que le support technique est lié à une licence spécifique et ne peut être supprimé qu en supprimant la licence attachée. - Le prix des redevances évolue d une année à l autre sans négociation possible. - Les charges liées à la fourniture du service par le concédant sont à la charge du licencié. - Le mode de facturation d un service change sans l information ni le consentement du client. - Le client subit des audits de conformité pour examiner les droits et les utilisations des logiciels et demander des régularisations pour toute erreur ou non-conformité constatée. Les arriérés sont calculés au prix catalogue et non au prix négocié par l entreprise. - Les critères pour établir le mondant de la redevance sont multiples et peu lisibles. 25

Contrôler les prix des services et des licences Exemple de clauses - Licence Oracle «Les redevances de support technique des licences restantes seront calculées conformément à ce sous-groupe aux conditions de support technique en vigueur à la date de la résiliation. La définition du groupe de licences figure aux conditions générales de support technique actuellement en vigueur. Si vous décidez de ne pas acquérir de support technique, vous n êtes pas autorisés à mettre à jour les licences non supportées avec les nouvelles versions.». «Vous devrez aussi rembourser Oracle des frais raisonnables résultant de la fourniture des services. Les redevances indiquées pour les services aux bons de commande s entendent hors taxe et hors frais. Vous reconnaissez que vous n avez pas pris l engagement de payer votre commande en considération de la mise à disposition future d un produit ou d une mise à jour.». «Vous vous engagez à payer dans les 30 jours au plus suivant notification toute redevance supplémentaire de licence et de support en cas d utilisation excédant les droits acquis. A défaut, Oracle aura la faculté de mettre un terme de plein droit aux prestations de support technique, aux licences, et / ou au présent contrat». 26

Contrôler les prix des services et des licences Recommandation - Exemples de clauses Formule: licence «Up front» La licence d'utilisation du logiciel est concédée au Client moyennant un prix forfaitaire de [ ] hors taxes payable: [ ] % à la date de signature du Contrat; [ ] % à l expiration de la période de garantie du logiciel.». 27

Contrôler les prix des services et des licences Recommandation - Exemples de clauses Formule: licence «périodique» En contrepartie du droit d'utilisation cédé par le Prestataire au Client au titre du Contrat, le Client s engage à verser au Prestataire une redevance annuelle de licence fixée pour les douze premiers mois à une somme de [*] hors taxes. Cette redevance pourra être révisée à la demande du Prestataire adressée au Client au moins soixante (60) jours avant chaque date anniversaire du Contrat, sans pouvoir toutefois excéder l augmentation issue de l application de la formule suivante : P = Po x S/So P = prix après révision Po = prix initial pour la première révision, puis prix issu de la précédente révision pour les révisions suivantes ; S = plus récent indice Syntec publié à la date de révision de la redevance ; So = valeur de l'indice Syntec en vigueur à la date où le Contrat a été établi pour la première révision, puis valeur de l'indice Syntec au jour de la précédente révision pour les révisions suivantes. En cas de disparition de l un ou l autre des indices, les Parties conviendront du ou des nouveaux indices pour établissement d une formule à effet comparable.» 28

Formule: licence «périodique» (2) «Le Prestataire s engage à ne pas imposer de nouveaux critères de détermination des redevances, moins favorables au Client." «En cas de désaccord sur le supplément de prix de la redevance du fait du changement des conditions d utilisation du Progiciel, les Parties feront appel à un expert qu elles nommeront d un commun accord. A défaut d accord sur la nomination de l expert dans un délai de [ ], celui-ci sera nommé par le Président du tribunal de Commerce saisi en référé par la Partie la plus diligente. L expert ainsi désigné aura pour mission de fixer le supplément de prix de la redevance qui lui apparaît raisonnable compte tenu des changements de conditions d'utilisation du Progiciel; son avis liera les Parties. Les frais d expertise seront supportés pour moitié par le Client et pour moitié par le Prestataire. En aucun cas, le Prestataire ne pourra profiter de ce désaccord pour remettre en cause le droit d utilisation du Progiciel.». «La licence d'utilisation est limitée à <préciser ici les limites du périmètre d'utilisation qui dépendent du logiciel et qui peuvent être multiples : nombre d'utilisateurs (connectés, simultanés, concurrents, etc.), le nombre de CPU (microprocesseurs) ou le nombre de dossiers/fichiers traités ou bien encore un volume maximal de données>. Au cas où le Licencié souhaiterait augmenter le nombre maximal <préciser ici l'unité d'œuvre concernée> dont il bénéficie au titre des présentes, il en avisera par écrit le Concédant qui lui accordera le droit d'utiliser le Logiciel pour le nombre de <préciser ici l'unité d'œuvre concernée> complémentaires en contrepartie du paiement d'un supplément de redevance calculé conformément aux dispositions de l'annexe <préciser>.» 29 «Tout déplacement sur le site du Licencié ne donnera lieu à aucune facturation complémentaire.»

La complexité des produits logiciels et des méthodes de calcul des redevances La tarification des progiciels est fonction de la machine ou du nombre de machines du client, du nombre d utilisateurs et de leurs profils ou de la nature des droits concédés. Chaque nouvelle configuration architecturale fait naître un nouveau mode de distribution des logiciels (Iaas, Paas, Saas) et donc des nouvelles méthodes de calcul des redevances. Cette évolution génère une infinie variété de licences. Le produit logiciel est souvent composé d un module de base auquel s ajoute des fonctionnalités et des modules complémentaires développés par l éditeur ou des équipes tiers. L ensemble de ces éléments est susceptible d être licencié ensemble ou séparément. 30

La complexité des produits logiciels et des méthodes de calcul des redevances En cas de régularisation, l absence de chiffrage ou de stipulation expresse d une méthode de calcul des redevances complémentaires est souvent à l avantage de l éditeur qui chiffre la régularisation sur la base des tarifs publics et non ceux négociés. Mais la complexité des métriques n est pas toujours à l avantage des éditeurs Cour de cassation, ch commerciale, 12 juin 2012, SSI Inser / Sedit Marianne Société Berger Levrault La chambre commerciale fait ici coïncider la rémunération avec l utilisation effective. Elle relève «attendu que l arrêt retient qu il résulte des conditions générales et particulières du contrat que le montant de la redevance annuelle est fonction du nombre d utilisateurs du progiciel, puisque le prix se trouve déterminé par la somme des redevances spécifiées pour chacune des collectivités concernées et que les parties ont elles-mêmes prévu l évolution à la hausse comme à la baisse du nombre d utilisateurs ; qu il ajoute que la signature d un avenant n était rendue obligatoire qu en cas de réduction du nombre des utilisateurs d origine, de sorte qu il n y a pas eu modification du contrat mais fixation du prix selon ses stipulations, en fonction des utilisateurs restants [ ]» Il s ensuit qu ayant fait usage de son pouvoir souverain d appréciation, la cour d appel a justement interprété l intention des parties et les clauses ambiguës. 31

Responsabilité: des garanties contractuelles favorables à l entreprise utilisatrice Objectif: Disposer de garanties techniques et d un mécanisme de réparation des bugs. Engagement de la responsabilité du concédant en cas de dysfonctionnement du logiciel notamment lors de la délivrance. Fondements juridiques: - Obligation de délivrance conforme - L action en garantie des vices cachés lorsque le logiciel est impropre à l usage auquel il est destiné Mauvaises pratiques: les éditeurs stipulent des clauses limitatives de responsabilité et limitatives de garantie portant sur les points essentiels du contrat, ces derniers n étant pas définis. 32

Responsabilité: des garanties contractuelles favorables à l entreprise utilisatrice Exemple de clauses - Licence Oracle «Pendant un an à compter de la livraison, Oracle garantit que les logiciels fonctionneront comme indiqué dans la documentation, sur tous les points essentiels. Vous devez avertir Oracle de tout manquement à cette garantie dans le délai d un (1) an à compter de la livraison.» «A l exception des actions en paiement ou de celles résultant d une violation des droits de propriété intellectuelle d Oracle, aucune action au titre du présent contrat ne pourra être intentée par l une ou l autre des parties plus de deux ans après les faits ayant causé la dite action.». «Sauf dispositions contraires de la Loi, la responsabilité d Oracle pour dommages directs au titre des présentes ne saurait excéder le montant du prix payé par vous au titre du bon de commande des logiciels ou des prestations de service ayant causé le dommage. Les stipulations du présent contrat répartissent le risque entre les parties. Les prix convenus reflètent cette répartition du risque et la limitation de responsabilité qui en résulte.» 33

Responsabilité: des garanties contractuelles favorables à l entreprise utilisatrice Recommandation - Exemples de clauses «Garantie contractuelle L'Editeur garantit exclusivement la conformité du logiciel aux caractéristiques fonctionnelles et techniques figurant dans la Documentation remise au Client au titre du Contrat (ou dans les Spécifications). A ce titre, l'editeur interviendra gratuitement, pendant <préciser une durée> à compter de la date de livraison (ou d'installation ou de recette) du logiciel, pour corriger les anomalies. Tout déplacement sur le site du Client ne donnera lieu à aucune facturation complémentaire.» «L'Editeur garantit au Client une jouissance paisible du logiciel. Si le Progiciel fait l'objet d'une action en revendication de la part d'un tiers, l'editeur s'engage à assurer la défense du Client et à en supporter tous les frais, dès lors que la prétendue contrefaçon ne résulte pas de modifications ou adjonctions apportées au Progiciel par le Client. Si le Progiciel est reconnu contrefaisant, l'editeur devra, au choix du Client, soit procurer au Client un logiciel non contrefaisant ayant les mêmes fonctionnalités, soit obtenir le droit pour le Client de continuer à utiliser le logiciel, soit résilier le Contrat en restituant au Client le prix versé au titre de la licence, nonobstant le droit du Client de demander indemnisation de son préjudice. D'autre part, l'editeur devra payer au lieu 34 et place du Client tous dommages-intérêts ou autres sommes auxquels ce dernier aurait été condamné.».

Petit rappel: les clauses limitatives de responsabilité En principe les clauses limitatives ou exclusives de responsabilité sont valables entre professionnels lorsqu elles remplissent les conditions suivantes Le montant du plafond négocié est suffisant pour contraindre le débiteur à s exécuter; La limitation de responsabilité est un juste reflet de la répartition du risque; Le contrat prévoit des contreparties à cette limitation; et Le contrat reflète l équilibre entre les droits et obligations réciproques des parties. Elles peuvent être rendue inefficaces : Au stade de la formation du contrat: la clause limitative de responsabilité qui contredit la portée de l obligation essentielle du débiteur prive le contrat de cause. Au stade de l exécution : une faute lourde peut mettre en échec la clause limitative de responsabilité. 35

Synthèse des points à retenir 36

Préconisations pratiques Eviter les ambiguïtés et imprécisions des clauses du contrat de licence et en particulier anticiper les évolutions prévisibles du contrat Évolution de périmètre et ajustement à l utilisation effective Restructuration du groupe de l entreprise utilisatrice et cession du contrat Arrêt de commercialisation du logiciel S assurer de disposer des autorisations d accès et d utilisation du logiciel pour toutes les personnes pour lesquelles ce sera nécessaire, y compris les tiers afin d éviter les violations des obligations contractuelles et les régularisations importantes de l éditeur. Assurer la fin du contrat et la migration vers un autre produit, en anticipant les conditions de réversibilité. Prévoir une clause de chiffrage anticipant les nouvelles acquisitions et les éventuelles régularisations. 37

Préconisations pratiques Prêter attention aux clauses de garantie et aux clauses limitatives de responsabilité. Systématiquement négocier la clause d audit. Anticiper les conditions de résiliation: logiciel substituable, temps et conditions de la migration. Il convient d exiger une garantie de disponibilité du produit sur son cycle de vie ou à tout le moins un engagement de fournir la maintenance le temps de la migration. Résister aux pratiques abusives. 38

Audit de logiciel: focus sur la jurisprudence Oracle 39

Audit de logiciel Les clauses d audit permettent à l éditeur de contrôler le respect des termes de la licence, notamment: la conformité au contrat de l utilisation du logiciel, la concordance entre les redevances contractuelles et celles perçues, le respect des obligations informatives ou déclaratives. Long et couteux pour les parties, il débouche souvent sur une résolution amiable du litige mais les utilisateurs contestent de plus en plus les pratiques des éditeurs. Importance de bien négocier les clauses d audit: Discuter les résultats de l audit avec recours à un expert amiable en cas de désaccord. Régularisation sur la base des conditions tarifaires négociées. 40

La jurisprudence Oracle L utilisation d un produit fourni dans les CDs à installer est non fautive Tribunal de grande instance de Paris, 3e ch, 6 novembre 2014, Oracle / A.F.P.A, Sopra Group SA Sur la qualification applicable aux faits, la Cour retient que «le seul différend existant entre les parties est de savoir si celui-ci incluait ou non le logiciel Purchasing. Il n est a aucun moment soutenu que l AFPA aurait utilisé un logiciel cracké ou implanté seule un logiciel non fourni par la société Sopra Group, ni même que le nombre de licences ne correspondait pas au nombre d utilisateurs. En conséquence le litige soumis au tribunal n est pas un litige de contrefaçon mais bien un litige portant sur le périmètre du contrat et sur sa bonne ou mauvaise exécution [ ] [et] relève de la seule responsabilité contractuelle» Lorsque les parties s opposent sur le périmètre d utilisation, les juges considèrent qu il n y a pas atteinte au droit d auteur mais simple non-respect d une obligation contractuelle de ne pas faire engageant la responsabilité contractuelle du licencié. 41

La jurisprudence Oracle L impossibilité d imposer l exécution de scripts dans le cadre d un audit si cette faculté n est pas prévue au contrat Tribunal de grande instance de Nanterre, Ordonnance de référé, 12 juin 2014, n 13/02965, Oracle Corporation, Oracle International Corporation, Oracle France / Carrefour SA Par une ordonnance de référé rendue le 12 juin 2014 dans un litige opposant Oracle aux sociétés Carrefour SA et Carrefour Organisation et Systèmes Groupe, le Tribunal de grande instance de Paris a considéré qu Oracle ne pouvait pas imposer l exécution de scripts. Le Tribunal justifie l impossibilité d ordonner cette mesure en se fondant, d une part, sur l absence de stipulation contractuelle sur ce point dans les accords liant les parties, et d autre part, sur le fait que les scripts ne constituent pas une mesure d instruction légalement admissible au sens des articles 145 du code de procédure civile et L.332-1-1 du code de la propriété intellectuelle. Les scripts sont des programmes informatiques développés pour procéder au comptage des licences installées sur les systèmes d information des utilisateurs. Ce sont des outils de collecte automatisés qui permettent de réaliser simplement un inventaire du parc des licences installées. 42

Contrats Cloud: focus sur la jurisprudence Oracle 43

La jurisprudence Oracle TGI Nanterre, Ordonnance de référé, 30 novembre 2012, Oracle / UMP Par une ordonnance de référé du 30 novembre 2012, le Tribunal de Grande Instance de Nanterre a condamné la société Oracle, géant américain de l édition logicielle, à garantir à l UMP l exportation des données de ses adhérents hébergées dans le «cloud» d Oracle via la solution Oracle CRM On Demand dans des délais compatibles avec leur reprise par un nouveau prestataire. Dans cette affaire, l UMP et Oracle avait conclu un contrat SaaS à durée déterminée de deux ans pour la gestion et l hébergement de la base nominative des adhérents du parti politique. Au titre de la réversibilité, le contrat prévoyait un délai de soixante jours à compter de la résiliation du contrat pour que l UMP accède au service et récupère son ficher de données. Au terme de ce contrat, l UMP avait souhaité confier la gestion de la base de données à un tiers prestataire mais s était heurtée à un bug de la fonction export de la 20ème version du logiciel qu elle utilisait. En attendant le release de la version suivante, Oracle avait expliqué qu un correctif spécifique était en cours de réalisation et avait offert de maintenir gratuitement l accès au service audelà du terme contractuel jusqu à l exportation complète des données. 44

La jurisprudence Oracle Saisi à la demande de l UMP, le juge des référés a considéré de manière très pragmatique que ces engagements étaient insuffisants pour prévenir le dommage imminent que pourrait subir l UMP si elle n était pas en mesure d accéder à ses données dans un délai suffisant pour permettre à son nouveau prestataire de lancer son opération de reprise des données suffisamment en amont et ainsi être opérationnel dès l expiration du contrat avec Oracle. Alors qu Oracle arguait que le contrat ne prévoyait pas que les services seraient exempts d anomalie, ni ne stipulait de délai de correction des anomalies de fonctionnement, et qu ainsi on ne pouvait lui faire grief d un manquement à ses obligations contractuelles, le juge s est placé sur le terrain de la bonne foi contractuelle pour écarter ces stipulations et étendre les obligations d Oracle au titre de la réversibilité. Envisageant sur le terrain de la bonne foi contractuelle les suites que l équité, entendue dans sa fonction complétive du contenu obligationnel des conventions, donnait à l obligation d Oracle d assurer la réversibilité du service dans le contexte de la survenance du bug, le juge a donc procédé à un rééquilibrage du contrat. 45

Les points spécifiques du marché de l occasion logiciel 46

Le marché de l occasion de logiciels CJUE, 3 juillet 2012, UsedSoft GmbH / Oracle International Corp. En l espèce, la Cour a retenu que le téléchargement par des clients d Oracle d une copie du logiciel à partir du site internet de l éditeur, après acquisition d une licence fixant les conditions d utilisation, constitue «une première vente» épuisant le droit de distribution exclusif de l éditeur et partant, légalisant la commercialisation de «licences d occasion» nonobstant la stipulation d une clause d incessibilité. La théorie de l épuisement des droits s appliquent aux logiciels commercialisés sous forme intangible et corrigé. Le droit d usage d un logiciel accordé pour une durée illimitée moyennant le paiement d une «somme correspondant à la valeur économique de la copie» emporte transfert de propriété et constitue une vente au sens de l article 4 2 de la Directive 2009/24 sur la protection juridique des programmes d ordinateur. La transmission des droits d utilisation de la copie n emporte pas la transmission du contrat de maintenance 47

Le marché de l occasion de logiciels La porte ouverte à la revente des licences de logiciels au sein de l U.E. sous conditions: Seules les licences «perpétuelles» (individuelles ou multiutilisateurs) relèvent de la vente et donne prise au principe d épuisement des droits. Une somme correspondant à la valeur économique de la copie doit être versée; a contrario un échelonnement des redevances n emporte pas transfert de la propriété. Le revendeur doit rendre inutilisable sa propre copie revendue, à défaut il s expose à des poursuites en contrefaçon. Des pratiques commerciales et contractuelles renouvelées de la part des éditeurs pour contourner la jurisprudence Une mise à disposition du logiciel pour une durée limitée et des paiements périodiques de redevance de licence. La mise en place d une obligation de restitution de la «copie immatérielle» à la fin du contrat. De nouveaux modes de commercialisation: SaaS ou Cloud qui excluent la qualification de vente au sens du droit communautaire. 48

Préconisations pratiques Négocier une clause prévoyant les modalités d exercice du droit au téléchargement des logiciels sur les serveurs de l éditeur et au renouvellement des moyens d activation, afin de faciliter une revente des logiciels inutilisés. Négocier la possibilité d une extension de la maintenance aux logiciels d occasion aux mêmes conditions tarifaires que le reste du parc logiciel afin de bénéficier des mêmes montées de version du logiciel. Exemple de clause: «L Editeur s engage à étendre, dans les mêmes conditions financières, le présent contrat de maintenance portant sur des logiciel de type [XXX], à des logiciels du même type qui seraient acquis auprès de tiers non affiliés». 49

Eléonore VARET Associée Cabinet d avocats Gilles Vercken ev@gillesvercken.com 06 77 18 94 13