Approche expérimentale et numérique pour l étude de la vulnérabilité d une structure en béton armé sollicitée par une avalanche de neige

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Approche expérimentale et numérique pour l étude de la vulnérabilité d une structure en béton armé sollicitée par une avalanche de neige Ousset I. 1, Bertrand D. 2, Brun M. 2, Limam A. 2, Naaïm M. 1 1 Irstea, UR ETGR, 2 rue de la Papeterie - BP 76, F-38402 Saint-Martin-d Hères (isabelle.ousset@irstea.fr) 2 INSA, LGCIE, Villeurbanne RÉSUMÉ. Suite aux avalanches qui se sont produites en 1999 puis en 2006 dans la vallée de Chamonix (France, 74), des ouvrages de protection en béton armé ont été endommagés. Afin de mieux comprendre la nature des dégâts observés, des essais de type pushover ont été réalisés en 2005 sur un modèle réduit à l échelle 1/6 ème. Un modèle numérique aux éléments finis est aujourd hui proposé en vue d investiguer davantage la réponse d une structure en béton armé sollicitée par une charge dynamique due à un écoulement avalancheux. ABSTRACT. In 1999 and 2006, in the Chamonix valley (France,74), a protective device dedicated to derive and stop snow avalanches was partially destroyed. Experimental pushover tests on a 1/6-scale model have been performed in 2005 to understand what did happen. A Finite Element Model is yet proposed in order to investigate the mechanical response of a reinforced concrete structure under dynamic avalanche loading. MOTS-CLÉS : structure, béton armé, génie civil, méthode des éléments finis, avalanche, vulnérabilité. KEYWORDS: structure, reinforced concrete, civil engineering, finite element method, avalanche, vulnerability.

31èmes Rencontres de l AUGC, E.N.S. Cachan, 29 au 31 mai 2013 2 1. Contexte Les avalanches de neige menacent de plus en plus de structures et habitations dans les régions de montagne où le manque d espace et le développement de l urbanisation conduisent à augmenter l occupation de zones exposées à ce type d aléa. Dans un contexte d analyse de risque, l estimation de ce dernier doit prendre en compte non seulement la description de l aléa avalancheux mais également l estimation de la vulnérabilité des structures exposées. De nos jours, les structures de protection en béton armé visant à protéger les lieux habités contre les avalanches sont encore pour la plupart dimensionnées suivant une approche statique avec introduction de coefficients de sécurité [ANC 96] [GIV 06]. Ces derniers permettent de pallier le manque de connaissance concernant les effets des avalanches sur le comportement des structures et conduisent généralement à les surdimensionner. L avalanche de Taconnaz qui s est produite en 1999 dans la vallée de Chamonix (France) et a détruit une grande partie du dispositif de protection mis en place, ainsi que celle de 2006, ont montré que cette approche n était malheureusement pas toujours suffisante et pouvait conduire dans certains cas à un sous-dimensionnement [BER 07]. Le présent projet vise à approfondir l étude de l effet dynamique des avalanches sur le comportement des ouvrages en béton armé en considérant un mur en forme de L modélisé selon la méthode des éléments finis et sur lequel est appliqué un signal dynamique réel de type avalancheux. 2. Structure étudiée et Résultats expérimentaux La structure étudiée est un mur en L (Figure 2a) constitué d un voile et d une semelle de hauteur, longueur, largeur et épaisseur variables (Tableau 1). Cette structure est représentative des dents déflectrices (Figure 1) du dispositif paravalanche situé dans le couloir avalancheux de Taconnaz, qui ont été endommagées lors des évènements de 1999 et 2006 et dont l objectif est de permettre l étalement d un écoulement avalancheux avant son ralentissement par des tas freineurs et son arrêt final en amont d une digue frontale. Figure 1 Dent de Taconnaz partiellement détruite en 1999 Des essais expérimentaux sur modèle réduit à l échelle 1/6 ème (Figure 2a) ont été réalisés en laboratoire en 2005 à l INSA de Lyon (LGCIE), afin de comprendre ce qui s est produit lors de la destruction partielle de cette structure à Taconnaz. Ces essais sont présentés de façon approfondie dans le rapport de [LIM 05] et par [BER 07]. Ils

Etude de la vulnérabilité d une structure BA sollicitée par une avalanche de neige. 3 ont consisté à appliquer de façon quasi-statique une distribution uniforme de pression jusqu à la rupture totale du mur. En parallèle, les caractéristiques des matériaux (Tableau 1) ont été mesurées de façon à disposer de données expérimentales complètes. Paramètre Symbole Valeur Unité Géométrie du voile Hauteur h 1,60 ou 9,60 m Epaisseur ep 0,25 ou 1,50 m Longueur L 2,50 ou 14,80 m Géométrie de la semelle Largeur h 1,00 ou 6,00 m Epaisseur ep 0,25 ou 1,50 m Longueur L 2,50 ou 14,80 m Caractéristiques du béton Module d Young E yb de 38842 à 38925 MPa Coefficient de Poisson ν yb de 0,18 à 0,3 - Contrainte limite en compression f cb de 68,4 à 78,3 MPa Contrainte limite en traction f tb de 6,5 à 6,8 MPa Caractéristiques de l acier Module d Young Eya 217000 MPa Coefficient de Poisson νya 0,3 - Contrainte limite élastique fea 575 MPa Contrainte limite ultime fua 620 MPa Déformation ultime ɛua 0,037 - Tableau 1 Propriétés géométriques et physiques de la structure à l échelle 1/6 ème et réelle Le résultat d essai sur lequel est calé le modèle numérique proposé est présenté à la Figure 2b. Il représente le déplacement mesuré en tête du voile en trois points distincts (milieu et extrémités) lors du chargement pushover appliqué. Figure 2 Modèle réduit testé expérimentalement et Déflection mesurée en tête de voile 3. Modèle numérique 3.1. Méthode des éléments finis Pour investiguer la réponse mécanique de la structure étudiée, une modélisation bidimensionnelle aux éléments finis est menée à l aide du code de calcul Cast3M [MIL 93] dont l objectif est la résolution de l équation aux dérivées partielles suivante, pour un système non linéaire : M ü(t) + C u(t) + F int (u, u) = F ext où M désigne la matrice de masse, C la matrice d amortissement, F int les forces internes, F le chargement imposé et u le champ de déplacements recherché. Le maillage retenu pour le modèle numérique est présenté à la Figure 3.

31èmes Rencontres de l AUGC, E.N.S. Cachan, 29 au 31 mai 2013 4 Figure 3 Maillage modèle réduit : béton et acier et conditions aux limites 3.2. Conditions aux limites et chargement Conformément aux conditions expérimentales et de terrain, le modèle réduit modélisé est encastré sur 35 % de la longueur de la semelle (Figure 3a) alors que la dent réelle est totalement encastrée. Le chargement appliqué consiste en un champ de pression appliqué sur la face amont du voile et sur toute la hauteur du voile à partir de la semelle (Figure 3a). 3.3. Caractéristiques et lois de comportement Quatre lois de comportement du béton (Figure 4) ont dans un premier temps été testées et les résultats des simulations comparés aux données expérimentales, sur la base des caractéristiques présentées au tableau 1. 3.3.1. Lois de comportement du béton testées Loi élastique endommageable Le modèle de comportement retenu est le modèle de Mazars [MAZ 86]. Il s agit d un modèle simple de comportement élastique-endommageable, basé sur la mécanique de l endommagement, qui permet de décrire la diminution de rigidité du matériau sous l effet de la création de micro-fissures dans le béton. Dans le cas général, l endommagement conduit à une évolution anisotrope des caractéristiques mécaniques d où une variable d endommagement à caractère tensoriel. Pour réduire le nombre de variables afin de simplifier l identification et les calculs de structure, Mazars a fait le choix d un endommagement isotrope d où une variable d endommagement scalaire D, divisée en deux parties : une partie D t due à des déformations en traction et une autre D c due à des déformations de compression. Le module d Young du béton est alors remplacé par E yb (1 D). Loi élasto-plastique non cyclique Le modèle de comportement retenu est le béton en contraintes planes proposé par le CEA. Il s agit d un modèle purement élasto-plastique développé tout d abord par [NAH 86] et modifié ensuite par [LEP 88]. La surface limite est décrite par deux critères de plastification qui rendent compte des différents modes de dommage du béton :

Etude de la vulnérabilité d une structure BA sollicitée par une avalanche de neige. 5 critère de Rankine pour la fissuration en traction et critère de Drucker-Prager en compression et bi-compression. Le principe du travail plastique maximal est utilisé pour décrire l écoulement plastique en traction alors que pour la compression, l écoulement est associé avec une règle d écrouissage isotrope. Loi élasto-plastique cyclique Le modèle Béton INSA utilisé pour cette étude, développé par [MER 90] et couramment utilisé depuis une dizaine d années dans le domaine du sismique [ILE 00] [ILE 05], est un modèle élasto-plastique fissurable construit dans le cadre de la théorie de la plasticité en contraintes planes. La surface de rupture est décrite par deux critères de Nadaï, de type Drucker-Prager : un pour la traction (fissuration) et un pour la compression et bi-compression. La loi d écoulement associée est isotrope et on lui applique la règle d écrouissage positif ou négatif. La fissuration du béton est considérée comme répartie, le matériau étant représenté comme un milieu continu. Dès que la surface de rupture dans le domaine des tractions est atteinte, la loi de plasticité biaxiale est abandonnée et une loi orthotrope est activée. La description de la fissuration est alors donnée par trois relations entre contrainte et déformation définies dans un système d axes parallèle et perpendiculaire à la direction de la fissure déterminée à partir de l étude isotrope. Ce modèle permet de prendre en compte l effet cyclique de la sollicitation grâce à une technique visant à gérer correctement l ouverture et la refermeture des fissures en restaurant les raideurs correspondantes. Loi élasto-frottante endommageable Le modèle RICRAG [RIC 10] testé a été développé en vue de décrire le comportement du béton sous sollicitations sismiques. C est un modèle couplant élasticité, endommagement isotrope et glissement interne. Il prend en compte les ouvertures et les fermetures de fissures ainsi que le glissement et le frottement mobilisé entre les lèvres de fissures. Il est donc adapté aux cas de chargements monotones et cycliques alternés. Figure 4 Comportement du béton en compression et en traction (sur 1 élément fini)

31èmes Rencontres de l AUGC, E.N.S. Cachan, 29 au 31 mai 2013 6 3.3.2. Loi de comportement de l acier Pour l acier, une loi élasto-plastique quasi-parfaite (avec un léger écrouissage) a été prise en compte (Figure 5) et l hypothèse d une adhésion parfaite entre l acier et le béton a été retenue. Figure 5 Loi de comportement de l acier 4. Résultats 4.1. Validation numérique Le modèle numérique a dans un premier temps été calé avec la loi CEA de façon à reproduire les résultats de l essai présentés à la Figure 2b. Les dimensions du modèle numérique sont dans ce cas celles présentées à la Figure 2a et au Tableau 1 (Echelle 1/6 ème ). Le chargement appliqué est de type pushover et varie linéairement de 0 à 35 kpa avec un pas de chargement de 350 Pa. Le calcul est mené dans des conditions quasi statiques (comme pour l essai expérimental) sans amortissement : F int (t) = F ext (t). Une étude paramétrique approfondie des caractéristiques des matériaux a permis de dégager les différents paramètres influant sur la réponse mécanique de la structure en béton armé dans des conditions statiques (Figure 6). Afin de caler au mieux à la courbe Figure 6 Paramètres de calage du modèle CEA Figure 7 Résultats de calage des différents modèles (chargement pushover) expérimentale, la contrainte limite en traction du béton a été prise égale à 6 MPa et

Etude de la vulnérabilité d une structure BA sollicitée par une avalanche de neige. 7 les caractéristiques de l acier ont dû être dégradées telles que présentées à la figure 5 (Eyb = 170000 MPa, fye = 400 MPa et fyu = 445 MPa). Des essais simples de traction et de compression sur un élément fini ont ensuite été modélisés afin de caler les différents modèles entre eux (Figure 4). Les résultats de calage obtenus sur la base du test pushover expérimental sont présentés à la Figure 7. Seuls les modèles de Mazars et Béton en contraintes planes (CEA) permettent d obtenir la rupture de la structure, la convergence n étant pas assurée pour les deux autres modèles. La prise en compte de lois de comportement non linéaires permet par ailleurs de visualiser le mode de rupture de la structure telle que présentée à la Figure 8. Alors que le modèle CEA fournit des valeurs de pression et de flèche à la rupture plus proches de la réalité que le modèle de Mazars, ce dernier fournit par contre une meilleure description du mode de rupture. (c) Figure 8 Fissuration observée expérimentalement, avec le modèle de Mazars et (c) avec le modèle CEA Le modèle Béton en contraintes planes, moins sensible au pas de calcul et au maillage que le modèle de Mazars, a finalement été retenu pour la suite de l étude, pour lesquelles les valeurs de pression et de flèche à la rupture sont importantes. 4.2. Etude la structure réelle Une simulation de type pushover a tout d abord été réalisée sur la structure réelle (échelle 1) avec une longueur de semelle en proportion plus importante (Tableau 1) et un encastrement total de la semelle en vue d obtenir une courbe de référence ForceFlèche quasi-statique. Dans un second temps, un signal avalancheux d écoulement dense est introduit en vue d étudier la réponse de la structure réelle à ce type de sollicitation. Ce signal est obtenu par analyse inverse à partir de données mesurées sur le site expérimental français du col du Lautaret (Hautes-Alpes) [THI 08] (Figure 9a) et retravaillé afin de réduire le temps de calcul et faire varier la pression maximale. Le signal est ainsi simplifié tel que spécifié à la Figure 9b et la variation de pression au pic est réalisée à taux de chargement et déchargement constants. Afin de tenir compte de l effet dynamique de la sollicitation et d un amortissement de la structure, le calcul est cette fois-ci mené en tenant compte de l équation globale de la méthode des éléments finis. Pour ce faire, une analyse modale de la structure réelle a été réalisée.

31èmes Rencontres de l AUGC, E.N.S. Cachan, 29 au 31 mai 2013 8 L analyse des deux premiers modes conduit aux fréquences propres de la structure suivantes : f 1 = 14, 5 Hz et f 2 = 78, 8 Hz. Le temps caractéristique de la structure peut ainsi être défini comme étant t car = t 1 = 1/f 1 = 0.069 s. L approche de Rayleigh conduit à la matrice d amortissement C = α M + β K où K est la matrice de rigidité et α et β les coefficients de Rayleigh calculés à partir des pulsations propres de la structure ω 1 = 2πf 1 et ω 2 = 2πf 2 et des coefficients d amortissement ξ 1 = ξ 2 = ω = 5 % (valeur classiquement utilisée en génie parasismique) : α = 2 ξ ω1 ω2 ω 1 + ω 2 = 7.677 et β = 2 ξ ω 1 + ω 2 = 1, 70.10 4. Figure 9 Signal avalancheux réel et Réponse de la structure à un signal simplifié et amplifié à 250 kpa Figure 10 Réponses de la structure à différentes sollicitations avalancheuses Les simulations réalisées montrent que la structure réagit à la sollicitation avalancheuse de façon quasi-statique dans la mesure où les parties ascendantes des réponses au test pushover et à la sollicitation avalancheuse se chevauchent (Figures 9b et 10). La Figure 10 permet de vérifier que cette réponse reste quasi-statique tant que le temps de mise en charge t m est supérieur à t car.

Etude de la vulnérabilité d une structure BA sollicitée par une avalanche de neige. 9 4.3. Etude paramétrique Une étude paramétrique a ensuite été menée sur la structure (paramètres matériaux, géométrie). Les résultats de cette étude sont présentés sous forme de courbes de vulnérabilité. Une telle courbe décrit la variation d un indice de dommage en fonction de l intensité de l aléa ; elle est obtenue en faisant varier la pression maximale appliquée. L indice de dommage proposé ici est défini comme étant le rapport entre le déplacement maximal observé pour une intensité d aléa donnée et le déplacement ultime à la rupture. L étude paramétrique sur le taux d armatures est présentée comme exemple à la Figure 11. Les résultats obtenus montrent que la vulnérabilité de la structure en béton armé est fortement dépendante du taux d armatures : plus celui-ci est faible, plus la plastification de l acier est importante et plus la structure est vulnérable. Figure 11 Influence du taux d armatures sur la réponse de la structure Courbe de vulnérabilité 5. Conclusion et Perspectives Afin de mieux comprendre la réponse de structures en béton armé sollicitées par des avalanches de neige dense et d étudier leur vulnérabilité face à de tels aléas, des essais expérimentaux quasi-statiques ont été réalisés par le passé à échelle réduite. Un modèle éléments finis est aujourd hui proposé et validé sur cette base expérimentale. L influence de la sollicitation avalancheuse a été investiguée dans des conditions dynamiques. Le résultat est que la structure présentée dans cette étude répond de façon quasi-statique à un signal avalancheux avec un taux de chargement réel. Il serait maintenant intéressant d étudier d autres types de structures dont les fréquences propres seraient plus faibles et pour lesquelles des effets inertiels pourraient apparaître. Une approche probabiliste dans le cadre d une analyse future de risque sera également proposée. Divers signaux avalancheux pouvant le cas échéant solliciter la structure de façon dynamique seront ainsi pris en compte de façon à approfondir l influence de la sollicitation avalancheuse sur le comportement de l ouvrage. Une analyse paramétrique de la géométrie de la structure sous chargement avalancheux a également été réalisée sous forme de courbe de vulnérabilité. Les résultats présentés portent sur le

31èmes Rencontres de l AUGC, E.N.S. Cachan, 29 au 31 mai 2013 10 taux d armatures et montrent que la vulnérabilité de la structure est fortement dépendante de ce paramètre. Une analyse sur d autres caractéristiques géométriques comme l épaisseur de la semelle ou la longueur d encastrement reste à approfondir. 6. Bibliographie [ANC 96] ANCEY C., Guide neige et avalanches : connaissances, pratiques, sécurité, Edisud, 1996. [BER 07] BERTHET-RAMBAUD P., LIMAM A., ROENELLE P., RAPIN F., TACNET J.-M., «Avalanche action on rigid structures : Back-analysis of Taconnaz deflective wall s collapse in February 1999», Cold Regions Science and Technology, vol. 47, 2007, p. 16-31. [BER 10] BERTRAND D., NAAIM M., BRUN M., «Physical vulnerability of reinforced concrete buildings impacted by snow avalanches», Natural Hazards and Earth System Sciences, vol. 10, 2010, p. 1531-1545. [GIV 06] GIVRY M., PERFETINI P., Construire en montagne : la prise en compte du risque d avalanche, Ministère de l Ecologie et du Développement Durable, www.marc-givryarchitecte.org, 2006. [ILE 00] ILE N., REYNOUARD J.-M., «Nonlinear analysis of reinforced concrete shear wall under earthquake loading», Journal of Earthquake Engineering, vol. 4, 2000, p. 183-213. [ILE 05] ILE N., REYNOUARD J.-M., «Behaviour of U-shaped walls subjected to uniaxial and biaxial cyclic lateral loading», Journal of Earthquake Engineering, vol. 9, 2005, p. 67-94. [LEP 88] LEPRÊTRE C., MILLARD A., COMBESCURE A., JAMET P., «Calcul à la ruine des structures en béton armé - Mise au point d un modèle béton en contraintes planes», Rapport n o DEMT 88/330, 1988, Commissariat à l Energie Atomique, Saclay. [LIM 05] LIMAM A., «Analyse expérimentale et numérique en laboratoire du fonctionnement d une dent modèle.», Projet RGCU/PRANE. Rapport final, p. 223-302, 2005, Institut National des Sciences Appliquées, Lyon. [MAZ 86] MAZARS J., «A description of micro- and macroscale damage of concrete structures», Engineering Fracture Mechanics, vol. 25, 1986, p. 729-737. [MER 90] MERABET O., «Modélisation des structures planes en béton armé sous chargements monotone et cylique», PhD thesis, Institut National des Sciences Appliquées, Lyon, 1990. [MIL 93] MILLARD A., «CASTEM 2000, Manuel d utilisation», Rapport n o CEA-LAMBS 93/007, 1993, Commissariat à l Energie Atomique, Saclay, www-cast3m.cea.fr. [NAH 86] NAHAS G., «Calcul à la ruine des structures en béton armé», PhD thesis, Université des Sciences Appliquées, Paris VI, 1986. [RIC 10] RICHARD B., «Isotropic continuum damage mechanics for concrete under cyclic loading : Stiffness recovery, inelastic strains and frictional sliding», Engineering Fracture Mechanics, vol. 77, 2010, p. 1203-1223. [THI 08] THIBERT E., BAROUDI D., LIMAM A., BERTHET-RAMBAUD P., «Avalanche impact pressure on an instrumented structure», Cold Regions Science and Technology, vol. 54, 2008, p. 206-215.