Projet «Durabilité» : vers une amélioration de la durée de vie des ouvrages extérieurs en bois



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Transcription:

Projet «Durabilité» : vers une amélioration de la durée de vie des ouvrages extérieurs en bois Le projet de recherche «Durabilité» vise à améliorer la durée de vie d ouvrages extérieurs (platelages, bardages, murs en éléments empilés, poteaux ) en bois non traités par des produits de préservation. La phase actuelle consiste à évaluer la durabilité naturelle de six essences indigènes en conditions réelles d'exposition, sur quatre sites soumis à des climats différents. Cette expérimentation permettra également de comparer la durée de service d ouvrages réalisés avec ces essences. Pour contacter l auteur : Magdalena Kutnik magdalena.kutnik@fcba.fr FCBA Pôle Construction Allée de Boutaut 33000 Bordeaux Tél : 05 56 43 64 46 Copyright FCBA INFO, Mai 2010 1

Du fait de sa structure et de sa composition chimique, le bois est un matériau potentiellement sensible aux attaques biologiques (champignons et insectes) et aux variations dimensionnelles (retrait, gonflement). Cette sensibilité est très variable selon les essences considérées, l âge et le diamètre de l arbre au moment de l abattage et la zone de bois considérée (aubier ou duramen). Dans la construction bois, lorsque le matériau est utilisé en extérieur avec des expositions répétées ou permanentes à des humidifications, les risques d altération par des agents de dégradations biologiques sont élevés. Le bois doit alors être protégé de manière adéquate afin que la durée de vie de l ouvrage (ou durée de service) soit en adéquation avec les besoins de l utilisateur final. Les principaux agents de dégradation biologique des bois exposé à l humidité en classes d emploi 3 et 4 ( 1 ) sont les suivants : les champignons de moisissures et de bleuissement, dont l impact sur le bois est essentiellement esthétique (ils n altèrent pas ses qualités mécaniques) ; les champignons lignivores (ou champignons de pourriture), qui dégradent les constituants de paroi cellulaire du bois (celluloses, hémicelluloses, lignines) ; les insectes à larves xylophages, tels que les capricornes, et les termites qui, comme les champignons lignivores, dégradent les composants du bois et engendrent des pertes de matière et donc des propriétés mécaniques. Ces agents s attaquent en priorité aux parties aubieuses du bois, toujours périssables : couches les plus externes constituées de cellules vivantes et 1 Selon la définition de la norme NF EN 335-1 (2007) : Classe d emploi 3 «Situation dans laquelle le bois ou le produit à base de bois n est ni sous abri ni en contact avec le sol. Il est, soit continuellement exposé aux intempéries, soit protégés des intempéries mais soumis à humidification» ; Classe d emploi 4 «Situation dans laquelle le bois ou le produit à base de bois est en contact avec le sol ou avec de l eau douce et est ainsi exposé en permanence à l humidification» Copyright FCBA INFO, Mai 2010 2

riches en composés nutritifs tels que l amidon. Le duramen, partie centrale «morte» du bois, riche en tannins et composés phénoliques, présente en revanche une durabilité naturelle plus ou moins importante. Cette durabilité est classifiée selon un système normatif européen (NF EN 350-2 «Durabilité naturelle du bois massif : guide de la durabilité naturelle du bois et de l imprégnabilité d essences de bois choisies pour leur importance en Europe»). Durabilité conférée et procédés de traitement classiques des bois pour un usage extérieur Pour augmenter la durée de vie des bois en usage extérieur lorsqu ils sont soumis à de fortes humidités, il est indispensable de les traiter afin de prévenir les attaques d origine biologique. Ce traitement consiste en une imprégnation de biocides en surface ou dans la masse, selon l utilisation finale du bois dans l ouvrage. Les spécifications de traitement appropriées en termes de profondeur et de quantité de produit à appliquer sont établies en fonction de la classe d emploi du bois et l imprégnabilité de l essence considérée. Elles doivent satisfaire les exigences de la norme EN 599-1 «Durabilité du bois et des matériaux dérivés du bois Performances des produits préventifs de préservation du bois établies par des essais biologiques Spécifications par classe de risque». L augmentation de la durabilité du bois exposé en extérieur et obtenue classiquement par une imprégnation en profondeur avec des produits de préservation (fréquemment qualifiée à tort d imprégnation «à cœur»). Cette imprégnation, réalisée dans des autoclaves vide et pression, permet de conférer des durées de vie pouvant aller jusqu à plusieurs dizaines d années à des bois dont la durabilité naturelle est insuffisante pour permettre leur utilisation sans traitement dans ce type de configuration. Cependant, une durabilité conférée ne peut être apportée qu à des essences dont l imprégnabilité est suffisante ; en effet, plus les risques d altération Copyright FCBA INFO, Mai 2010 3

biologique des bois sont importants, plus élevées seront les exigences en termes de pénétration et de rétention des produits dans le bois. Par ailleurs, la connaissance actuelle de la durée de vie de référence attendue (durée de service) des ouvrages à base de bois est très limitée. De plus, la difficulté à maîtriser l affectation précise des classes d emploi aux ouvrages en bois est à l origine de nombreuses pathologies (essentiellement fongiques) et d une sinistralité récurrente sur certaines familles d ouvrages (platelages, éléments de charpente extérieure ). Les pratiques courantes comportent en outre des mises en œuvre des bois souvent défaillantes, qui engendrent une humidification répétée et anormale des bois. Le projet «Durabilité» : favoriser la durabilité naturelle et les conceptions salubres Les objectifs Le projet de recherche «Durabilité» est né d une volonté conjointe des pouvoirs publics et des professionnels du bois d optimiser l usage aujourd hui quasi-systématique des traitements de préservation des bois utilisés en extérieur, et de valoriser davantage la durabilité naturelle des essences forestières françaises, notamment pour la construction de bâtiments à qualité environnementale recherchée. Dans sa globalité, ce projet vise ainsi à améliorer la durée de vie d ouvrages extérieurs (platelages, bardages ) donc soumis aux intempéries, mais non traités par des produits de préservation. L atteinte de cet objectif est conditionnée, d une part par la prise en compte de la durabilité naturelle des essences au moment du choix des bois et, d autre part, par l amélioration de la conception et de la mise en œuvre courantes des ouvrages. Copyright FCBA INFO, Mai 2010 4

L étude, subventionnée par la DGFAR (Direction générale de la forêt et des affaires rurales), se subdivise en deux phases. La première phase, achevée en 2005, avait pour objet de réaliser un état des lieux des connaissances sur le bois, sa durabilité et les difficultés potentielles liées à son utilisation (agents de dégradations biologiques, préservation, sinistralité, etc.). La seconde phase, démarrée en décembre 2006, est la partie expérimentale à proprement parler. Elle a pour finalité l élaboration d un protocole expérimental qui permettra d évaluer les performances d un choix d essences en fonction de leur exposition et de leur mise en œuvre. Les objectifs techniques de cette deuxième phase sont l évaluation de la durabilité naturelle de six essences forestières indigènes en conditions d'exposition réelles, sur quatre sites d expérimentation soumis à des contraintes climatiques différentes et la comparaison de la durée de service d ouvrages réalisés avec ces essences. Les résultats de cette expérimentation permettront d enrichir et de parfaire un premier guide (Mémento «Durabilité des ouvrages Bois») élaboré conjointement par FCBA et la FIBC (Fédération de l industrie bois construction) et de mettre au point un guide rassemblant des solutions constructives plus salubres que les pratiques actuelles. Avant d amorcer la partie expérimentale de cette étude, il était essentiel de cibler au mieux les besoins du marché et des professionnels du bois dans la construction. Cette étape a permis de définir précisément les essences de bois dont il serait pertinent d évaluer les performances, les types d ouvrages à expérimenter, les caractéristiques souhaitées et la localisation géographique des sites. Les essences de bois sélectionnées Le choix a été arrêté sur six essences forestières couramment utilisées en construction et présentant des durabilités naturelles différentes : deux essences feuillues (chêne et peuplier) et quatre essences résineuses (épicéa, douglas, mélèze et pin maritime). Copyright FCBA INFO, Mai 2010 5

Durabilité naturelle (hors aubier) Essences Termites ILX Compatibilité dans la classe d emploi S M D S D 1 2 3.1 3.2 4 Bois résineux Épicéa Douglas Pin maritime Mélèze Bois feuillus Peuplier Chêne ILX : insectes à larves xylophages S : sensible, M : moyennement durable, D : durable Le tableau ci-dessus synthétise les performances de ces essences en termes de durabilité naturelle vis-à-vis des termites et des insectes à larves xylophages (ILX), ainsi que leur capacité à être utilisés sans traitement sous différentes conditions d exposition à l humidité. Cette capacité est désignée comme la «Compatibilité dans la classe d emploi» et établie à partir de la durabilité naturelle de ces essences vis-à-vis des champignons de pourriture. Les données présentées dans ce tableau sont extraites de la norme EN 350 «Durabilité du bois et des matériaux dérivés du bois : durabilité naturelle du bois massif». Les ouvrages Les ouvrages exposés sur les sites expérimentaux correspondent à des cas classiques d utilisation du bois en extérieur : platelages, bardages, bois Copyright FCBA INFO, Mai 2010 6

empilés, poteaux (assemblés ou non, à l instar des éléments de charpente extérieurs). Ces catégories d ouvrages se trouvent normalement en classes d emploi 3.1 ou 3.2, telles que définies dans la norme NF EN 335-2 «Définition des classes d emploi Partie 2 : Application au bois massif» : 3.1 : bois en service à l extérieur, au-dessus du sol, protégés (bardages, bois empilés d ossature, éléments de charpente émergeants ou semiabrités) ; 3.2 : bois en service à l extérieur, au-dessus du sol, non protégés (platelages notamment). Les pratiques courantes font souvent appel à des mises en œuvre défaillantes, qui engendrent une humidification récurrente et anormale des bois. Les ouvrages extérieurs peuvent en effet comporter des zones où l eau de pluie est susceptible de s accumuler et stagner de manière quasipermanente. Ces zones constituent généralement le point départ d attaques biologiques, en particulier fongiques. Ces erreurs de conception provoquent souvent un basculement de la situation de service des bois d une classe d emploi 2 ou 3.1 vers une classe 3.2, voire 4, pour lesquelles ils ne sont pas protégés au moment de leur mise en œuvre. L un des objectifs de cette étude est donc de proposer des solutions constructives salubres comme alternative aux conceptions courantes plus classiques. Pour chaque catégorie d ouvrage, plusieurs niveaux de salubrité ont ainsi être envisagés et seront testés tout au long de cette étude. Les deux principaux paramètres qui seront observés sont l effet de la massivité des éléments en bois (différentes épaisseurs de lames de platelage et de bardage, différentes sections de poteaux) et l effet de la «mise hors d eau» des points sensibles à l intérieur des ouvrages, en favorisant les conceptions qui optimisent les écoulements d eau et limitent les contacts directs boisbois et, de manière générale, les zones où l eau peut facilement s accumuler et stagner (zones de contact bois-bois, points de fixation ). Copyright FCBA INFO, Mai 2010 7

Les sites expérimentaux La durabilité naturelle d une essence de bois est très étroitement corrélée à la présence, dans son environnement immédiat, d agents de dégradations biologiques susceptibles de l attaquer et aux facteurs environnementaux qui influencent le développement de ces mêmes agents : humidité, température, rayonnement UV, acidité du milieu, etc. Pour cette raison, il a été décidé d exposer les ouvrages sur des sites expérimentaux dont les caractéristiques écologiques et climatiques diffèrent. Les sites choisis se veulent représentatifs d un climat donné : climat continental : site de FCBA à Charrey-sur-Saône, climat océanique : site de FCBA à Bordeaux, climat méditerranéen : site du CIRAD à Montpellier, climat tropical : site du CIRAD à Kourou en Guyane. La caractérisation des sites d expérimentation comprend une synthèse des données climatiques et géologiques disponibles et exploitables à ce jour. L idée est de pouvoir estimer «l agressivité» des différents terrains d essais en termes de température, d ensoleillement (radiations UV), d humidité, d exposition au vent, au gel et à la pluie, et des agents de dégradations biologiques du bois potentiellement présents (champignons, termites, autres insectes xylophages). Ces différents paramètres sont autant de facteurs qui peuvent avoir un impact sur la tenue des bois et donc sur la durée de service des ouvrages exposés. Les dispositifs expérimentaux Les deux essences les moins durables (peuplier et épicéa) ont été utilisées pour réaliser un premier type de dispositif. Il a été défini de manière à tester le plus grand nombre possible de paramètres susceptibles d influencer la durée de vie des ouvrages exposés : massivité des pièces de bois, exposition aux intempéries, positionnement des bois (verticaux, Copyright FCBA INFO, Mai 2010 8

horizontaux, inclinés), usinages spécifiques des zones de contact bois-bois potentiellement génératrices d insalubrité. Pour chacun de ces types d ouvrages, on cherche à la fois à tester des types de conceptions courants et des types plus ou moins salubres, c'est-à-dire des conceptions qui limitent au maximum les zones d accumulation et de rétention d eau. Faible exposition Forte exposition x 2 espèces (peuplier, épicéa) Dispositif installé à Bordeaux Les ouvrages horizontaux sont ceux dont l exposition est considérée comme la plus sévère du fait des possibilités d accumulation et de stagnation d eau en surface. Six types de platelages, dont la conception limite à des degrés divers les développements fongiques, ont été réalisés avec chacune des deux essences. Copyright FCBA INFO, Mai 2010 9

Conception courante 22 15 17,5 22 5 5 5 18 16,5 14 16,5 14 18 16 16 60 Accumulation et pièges à eau 60 70 50 lames minces vissées par le dessus une solive centrale pas de chevauchement des lames sur les solives Figure 1 : Conception courante défavorable Le premier type de platelage (Figure 1) se veut représentatif d une conception défavorable, du fait de la faible massivité des lames, de leur vissage par le dessus sur les solives, et de la zone de rétention d eau générée sur les solives par le vissage des deux séries de lames positionnées bout à bout. Le sixième type (Figure 2) propose une conception optimisée la plus drainante possible, par l utilisation de lames usinées de manière à favoriser l écoulement d eau (lames profilées en pente), vissées par le dessous sur les lambourdes et dissociées de celles-ci au moment du vissage par des rondelles en nylon ou en EPDM (éthylène-propylène-diène monomère). Les autres types de platelages sont des conceptions considérées comme intermédiaires entre les types 1 et 6 en termes d optimisation du drainage des eaux pluviales. Copyright FCBA INFO, Mai 2010 10

Conception salubre lames profilées en pente vissage par le dessous rondelles d étanchéité lambourdes disjointes Évacuation de l eau améliorée Figure 2 : Conception optimisée la plus drainante possible Les ouvrages verticaux exposés sont des bois empilés (murs de type chalet), des bardages et des poteaux assemblés ou non (éléments de charpente extérieure). Comme pour les ouvrages horizontaux, le but est de tester des ouvrages de conception classique ainsi que des types de conception à salubrité améliorée. La différence en termes de salubrité entre les deux conceptions de bois empilés (Figure 3) réside principalement dans l usinage de forme des madriers. Cette conception améliorée a pour but de limiter les entrées d eau en façade par un système de piégeage de la goutte d eau. Infiltration d eau en façade Déflexion de l eau grâce à l usinage de forme Figure 3 : Conceptions de bois empilés Copyright FCBA INFO, Mai 2010 11

Pour les bardages, quatre conceptions sont étudiées. Elles diffèrent par l orientation des lames (bardage vertical ou horizontal), leur système de fixation (fixations apparentes pour les bardages à rainures et languettes, fixations cachées pour les bardages à clin) et leur massivité (deux épaisseurs : 20 mm et 30 mm). Des poteaux de différentes sections (de 30 à 200 mm) ont été positionnés verticalement et en oblique afin d évaluer l impact de la massivité et de l orientation des bois sur l apparition de déformations mécaniques et de fissures. Des poteaux de 150 mm de section ont été assemblés avec des éléments en bois de plus petites sections afin de représenter des assemblages de charpente de type tenon-mortaise et à «encoche». Pour chacun de ces deux types d assemblages, une solution de conception courante et une solution de conception améliorée a été choisie (Figure 4). Assemblage classique tenon-mortaise Assemblage avec étrier en âme et disjointement de 1 cm entre les deux pièces de bois Assemblage drainant Accumulation d eau au niveau de l assemblage Figure 4 : Conceptions de poteaux Vue du dessous Copyright FCBA INFO, Mai 2010 12

Les quatre autres essences (chêne, douglas, mélèze, pin maritime) ont des duramens qui présentent de bons niveaux de durabilité naturelle vis-à-vis du risque fongique, mais globalement insuffisants pour garantir une tenue des ouvrages satisfaisante au-delà de 10 ans. Elles ont fait l objet d un deuxième type de dispositif. Trois essences guyanaises (angélique, gonfolo et simarouba) ont également été intégrées dans l étude dans le cadre d une subvention du Ministère de l Outre-mer et qui vise à étendre l expérimentation à des essences tropicales. Les ouvrages dont la durée de vie sera étudiée sont des ouvrages horizontaux (platelages) et verticaux (madriers et poteaux assemblés). x 7 espèces (chêne, Douglas, mélèze, pin maritime, angélique, gonfolo, simarouba) Dispositif installé à Charrey-sur-Saône Copyright FCBA INFO, Mai 2010 13

Deux guides pratiques pour une meilleure valorisation de la durabilité naturelle des essences Les normes actuelles ne se réfèrent qu à des règles générales pour définir la classe d emploi d un élément ou d une partie d ouvrage. Seuls les concepteurs avertis sont capables d effectuer des interprétations fiables pour traiter les cas plus complexes où la mise en œuvre peut s avérer délicate. Compte tenu de la sinistralité constatée sur les bois situés en parties extérieures des ouvrages, il est indispensable de concevoir des documents ayant pour vocation d adapter les règles générales à des cas réels récurrents. Le travail proposé ici est de recenser les principaux systèmes constructifs, produits et usages courants pour réaliser une affectation précise dans les classes d emploi, en collaboration entre FCBA et la FIBC. Par ailleurs, cette étude est une occasion d amorcer une approche nouvelle, qui doit faire évoluer les pratiques actuelles vers des systèmes constructifs salubres améliorant la durée de vie du bois en œuvre et valorisant au mieux les essences métropolitaines. A ce jour, les bancs d essai ont été installés sur les sites d expérimentation de Bordeaux, Charrey-sur-Saône et Montpellier. Leur inspection bisannuelle pendant une période qui se veut la plus longue possible (idéalement 10 ans ou plus) permettra d évaluer l impact du choix d essences, de la conception et des contraintes climatiques sur le risque d altération esthétique, biologique et mécanique, et donc sur la durée de vie d ouvrages en bois utilisés en extérieur. Les résultats de l étude «Durabilité» apporteront aux concepteurs les outils nécessaires pour permettre une bonne adéquation entre les choix des matériaux (bois traités ou non traités, essence, provenance), leur mise en œuvre (usinage, pose, exposition) et la durée de vie attendue des ouvrages réalisés. Copyright FCBA INFO, Mai 2010 14