D eux voies majeures de conservation

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Le contexte de ces dernières années particulièrement favorable à la conversion ne doit pas masquer les difficultés techniques de la production céréalière en agriculture biologique. La maîtrise des adventices est un frein majeur à la production et au développement des exploitations céréalières grandes cultures au même titre que la fertilisation azotée ou encore la maîtrise des ravageurs. L objet de ce chapitre est de faire le point sur la biologie des adventices et les pratiques de désherbage en grandes cultures biologiques. J. Arino/CA32 Bineuse avant avec éléments spécifiques. Le mode de survie des espèces dans les cultures D eux voies majeures de conservation des espèces existent : la reproduction sexuée résultant du croisement de deux individus et qui aboutit à la production de graines ; et la multiplication végétative qui procède du fractionnement et du développement d une partie plus ou moins importante de l appareil végétatif d un seul individu. Toutes les plantes ne sont pas aptes à exploiter ces deux voies. On distingue globalement trois groupes : les espèces annuelles, qui se reproduisent exclusivement par graines et dont le cycle de vie est inférieur à une année (chénopode blanc, coquelicot, sétaire verte, folle-avoine, etc.), les espèces bisannuelles et pluriannuelles, qui survivent une ou plusieurs années mais qui finissent par disparaître après plusieurs cycles de grenaison (carotte sauvage, rumex crépu, armoise vulgaire, raygrass d Italie, etc.), les espèces vivaces, qui se multiplient indéfiniment par fragmentation de leur appareil végétatif mettant à contribution des organes spécialisés très variés : - tiges souterraines (rhizomes du chiendent rampant ou du sorgho d Alep), - tiges aériennes rampantes s enracinant aux nœuds (stolons de la potentille), - tiges aériennes nées de bourgeons racinaires (drageons du chardon des champs) - feuilles, tiges ou racines chargées de réserves et tubérisées (tubercules de l avoine à chapelet). On notera par ailleurs que bon nombre d espèces vivaces ont conservé la capacité à produire des semences (chardon des champs, liseron des haies, sorgho d Alep, etc.). Elles ont ainsi deux cordes à leur arc, qui leur procurent une grande souplesse d adaptation aux systèmes de production agricole, qu ils soient conventionnel, raisonné ou biologique. Quelles espèces dans quelles cultures? Les tableaux 1 et 2 synthétisent l ensemble des observations concernant les principales adventices que l on peut rencontrer en culture biologique. Elles sont classées par type biologique. Il n est pas surprenant de retrouver approximativement la même flore adventice qu en culture conventionnelle ; l environnement pédoclimatique est identique. Il existe cependant certaines différences liées aux particularités de la bio. La diversité à la parcelle est plus grande et il est rare d observer des populations monospécifiques de mauvaises herbes sauf dans des cas précis de grosses difficultés ou d impasses techniques. Ces dernières sont très souvent liées à des pratiques culturales déraisonnables ou excessives : rotation appauvrie, premières infestations négligées, etc. C est très souvent le cas de la lampourde (Xanthium strumarium) ou du datura stramoine dans le soja ou le maïs et, céréales à paille et folles avoines. Connaissance de la flore annuelle On peut caractériser les mauvaises herbes par leur comportement grainier. Celui-ci comprend au moins quatre paramètres prépondérants : l époque de germination (voir paragraphe précédent), la quantité de graines produites par la plante, la durée de conservation de ces graines dans le sol, et la profondeur optimale de germination. La production de graines S'il importe de connaître le niveau moyen de production grainière des plantes, il est impossible de préciser quelle sera la production réelle. En effet, la grenaison est liée à l'espèce, mais aussi et surtout aux conditions climatiques et au milieu dans lequel se développe l'adventice. A titre d'exemple, un chénopode blanc produit en moyenne 300 graines/pied en céréales à paille, jusqu'à 1500 en culture sarclée, et audelà de 15 000 en couvert spontané. Il en est de même pour l'ensemble des espèces : plus le couvert est dense et moins la production grainière sera importante. Le tableau 5 (p.24) synthétise les données bibliographiques concernant les productions grainières de quelques espèces communes dans notre région. Nous pouvons constater des variations importantes du nombre de graines par pied, ce qui en rend la maîtrise d autant plus difficile selon le milieu et la situation géographique. Guide pratique Agribio 20 octobre 2004

Tableau 1 : Périodes de levée et cultures affectées de la flore adventice annuelle en région Midi-Pyrénées Périodes de levée Principales cultures affectées automne hiver printemps été céréales lentilles trèfle soja tournesol maïs féverole pois chiche luzerne Graminées annuelles Vulpin des champs - Bromes Avoine stérile ludovicienne ( ) Avoine folle ( ) Pâturin annuel Phalaris paradoxal Ray-grass d'italie Digitaire sanguine Panic pied-de-coq Sétaire glauque Sétaire verte Sétaire verticillée Dicotylédones annuelles Gaillet gratteron ( ) Véronique à f. de lierre ( ) Véronique des champs ( ) - Pensée des champs ( ) - Anthémis cotule - - - - Anthémis élevée - - - Matricaire camomille - - - - Capselle bourse-à-pasteur - Pavot coquelicot - Moutarde des champs - - - Rapistre rugueux - - - Ravenelle - - - Véronique de Perse - - - - - Euphorbe réveil-matin - Géranium disséqué - - Ammi élevé - - Helminthie fausse vipérine - Renouée liseron ( ) - - Renouée des oiseaux ( ) - - - Chénopode blanc - Arroche étalée - Mercuriale annuelle ( ) Linaire bâtarde Linaire élatine Renouée persicaire Renouée à fe. de patience Morelle noire Amarante réfléchie et A. hybride Datura stramoine Lampourde à gros fruits Légende : : présence régulière ( ) : levées possibles mais négligeables - : présence dans la culture possible mais rare ou en faible quantité La survie des semences dans le sol Selon les auteurs, le pourcentage de graines viables du sol est compris entre 63 et 85 %, mais toutes les semences viables enfouies dans le sol ne réaliseront pas nécessairement une plantule. Une quantité non négligeable disparaîtra soit par sénescence, soit par prédation ou parasitisme. D autre part, toutes les graines viables ne germeront pas en même temps du fait de l état de dormance d un certain nombre d entre elles ou de conditions générales défavorables (taux d oxygène ou d humidité, température, etc.). Enfin, toute germination n aboutit pas nécessairement à une plantule émergente : la croûte de battance des sols limoneux ou un enfouissement trop profond sont autant d obstacles à leur levée. Si l on ajoute à cette perte globale de semences la disparition des graines liée aux levées annuelles, on obtient une diminution du stock de semences en l absence de toute réinfestation. Cette baisse est généralement exprimée en pourcentage du stock initial : c est le taux annuel de décroissance ou TAD. Propre à chaque espèce, la prise en compte Bineuse avant sur lupin. J. Arino/CA32 octobre 2004 21 Guide pratique Agribio

Tableau 2 : Périodes de levée ou d émergence et cultures affectées de la flore adventice pluriannuelle et vivace en région Midi-Pyrénées Périodes de levée Principales cultures affectées automne hiver printemps été céréales lentilles trèfle soja tournesol maïs féverole pois chiche luzerne Pluriannuelles Carotte sauvage Rumex à feuilles obtuses Rumex crépu Armoise vulgaire ( ) - - - Graminées vivaces Avoine à chapelets (bulbes) - - - Chiendent rampant (rhizomes) ( ) Chiendent pied de poule Sorgho d'alep Dicotylédones vivaces Rumex à f. obtuses (fragment. souche) Rumex crépu (fragment. de la souche) Renoncule rampante (stolons) - Chardon des champs (drageons) Liseron des haies (rhizomes) Liseron des champs (drageons) - Renouée amphibie (rhizomes) - Prêle géante (rhizomes et tubercules) ( ) Prêle des champs (rhiz. et tubercules) ( ) Légende : : présence régulière ( ) : levées possibles mais négligeables - : présence dans la culture possible mais rare ou en faible quantité A. Rodriguez/ACTA Adonis en fleurs. de ce critère est essentielle pour comprendre la dynamique de levée des mauvaises herbes dans les cultures à court et moyen terme. Les espèces à stock semencier éphémère Elles ont un TAD proche de 100 % (bromes ou tussilage de semis). Elles réapparaîtront peut-être l année de remise en culture mais disparaîtront définitivement l année suivante. Les dommages liés à la grenaison de ces espèces se limitent donc à la première année de culture. Les espèces à stock transitoire La plupart des graminées annuelles et quelques dicotylédones (gaillet gratteron, lampsane commune, matricaires, bleuet) ont un stock de semences transitoire. Leur TAD est compris entre 75 et 85 %. Même si la décroissance annuelle du stock est assez importante, les niveaux de production grainière de ces plantes sont si élevés (composées pour partie, graminées) qu ils peuvent provoquer un fort salissement de la parcelle à moyen terme. En outre, malgré une maîtrise parfaite en culture, ces adventices persisteront pendant 3 ou 4 ans. Les espèces à stock moyennement persistant La majorité des dicotylédones (chénopode blanc, moutarde des champs, éthuse ciguë, coquelicot, pensée des champs, linaires du genre Kickxia, capselle bourse-àpasteur, amarantes, renouées) font partie des espèces à stock moyennement persistant (TAD proche de 50 %). L épuisement d un tel stock sans apport ultérieur nécessite au moins 6 à 8 ans. Les espèces à stock persistant Enfin, le mouron des champs et le mouron femelle ont un TAD voisin de 10 % ; après 10 ans, il reste encore plus de 30 % de l apport initial. Après grenaison, les mauvaises herbes seront d autant plus persistantes dans les cultures que leur production grainière moyenne par pied est élevée et que le TAD est faible. Profondeur de germination et mode de levée La majorité des semences germe dans les 5 premiers centimètres du sol. C'est une zone où les variations climatiques (gel, chaleur, pluie, dessèchement par le vent) s'expriment très rapidement et créent des conditions de germinations très variées favorables à de nombreuses espèces. Par ailleurs, si l'on excepte les périodes de battance sur boulbène, cette couche n'offre que peu de résistance mécanique aux semences en germination. Les levées sont alors généralement assez groupées dans le temps ; dans de bonnes conditions de désherbage, elles sont assez bien contrôlées. Malgré tout, quelques espèces ont la capacité de germer bien au-delà de cette strate ; il s'agit essentiellement de grosses graines suffisamment puissantes pour franchir les 10 à 15 cm de sol les séparant de la surface : au-delà de 10 cm les folles avoines, jusqu'à 10 cm le vulpin des champs, Guide pratique Agribio 22 octobre 2004

Tableau 3 : Les adventices indicatrices de leur milieu ph humidité texture acide neutre basique frais sec limons argiles calcaires autres Panic pied de coq Sétaire verticillée Sétaire glauque Sétaire verte Digitaire sanguine Sorgho d Alep Matricaire camomille battance Anthémis cotule Anthémis élevée Chénopode blanc azote Amaranthe réfléchie Renouée persicaire Helminthie Rapistre rugueux Ravenelle Liseron des haies azote Rumex crépu azote, fourrage Rumex à feuilles obtuses azote, fourrage azote le panic faux millet, la lampourde à gros fruits. Bien souvent, après les levées normales superficielles dans la culture, émergent de nouvelles levées plus profondes qui sont rarement maîtrisées par les désherbages mécaniques. On notera enfin les quelques espèces estivales dont les semences possèdent une épaisse enveloppe extérieure (semences dites indurées ) et qui ont un mode de levée échelonné malgré des levées superficielles : abutilon de Théophraste, datura stramoine. Enfin, chez la lampourde, le fruit contient deux graines. La première graine lève en inhibant la germination de la seconde. Cette dernière n apparaît qu une fois la première au stade plantule. C est un processus qui, au champ, accroît l échelonnement des levées déjà important chez cette espèce. Les adventices indicatrices du milieu Les plantes ne sont jamais présentes en un lieu par hasard. Elles sont souvent le reflet du milieu où elles se développent, et même si, dans leur grande majorité, elles se satisfont de nombreuses situations, il en est qui sont inféodées à des milieux biens précis. La notion de plante indicatrice est très bien connue en pastoralisme car les prairies sont des milieux stabilisés sur 10 à 20 ans et plus. La flore présente est le résultat d une évolution de la flore d origine régionale sous l effet des pratiques d exploitation et du contexte pédoclimatique. En production céréalière, le sol est remué avant chaque culture. Dans ce milieu constamment perturbé, la sélection de la flore se fait selon 5 facteurs essentiels : 3 sont liés au sol : le ph, l humidité et la texture, et 2 sont de nature agronomique : la rotation et la profondeur de travail du sol. On ne peut guère aller plus loin au risque de se tromper en voulant donner à tout prix une signification à un non-événement. Le tableau 3 donne quelques exemples de plantes indicatrices en grandes cultures. Le désherbage des cultures On distingue deux familles d outils : les bineuses et la herse-étrille. La bineuse est employée dans presque toutes les cultures à écartement suffisant. La partie travaillant le sol est munie de lames, de dents, de fraises ou de brosses. La herse-étrille est un outil possédant de nombreuses dents fines et flexibles qui grattent le sol et font vibrer les mottes. Elle est souvent passée à grande vitesse pour augmenter l'effet de choc sur les mottes. Les mauvaises herbes sont déracinées, coupées ou enterrées. L intensité du travail, autrement dit l agressivité de l'outil, est ajustée en modifiant la tension des dents (inclinaison des dents), la hauteur de terrage et la vitesse d avancement. Elle s utilise dans les céréales à paille et les plantes sarclées. Contrairement à la bineuse qui n'agit qu'entre les rangs, la herseétrille a une action sur la totalité de la surface. L efficacité de la herse-étrille sur dicotylédones est satisfaisante (environ 70 % ) quelle que soit la position de l adventice par rapport au rang de semis. Le contrôle des jeunes graminées (jusqu au stade 3 feuilles) est acceptable mais beaucoup plus aléatoire : l intervalle de confiance est d environ 20 % pour des efficacités moyennes de 52 % sur le rang et de 76 % entre les rangs ; au-delà de 3 feuilles, les graminées ne sont plus affectées par les outils. La bineuse est très efficace entre les rangs sur dicotylédones même développées et sur jeunes grami- Glaïeul des moissons. A. Rodriguez/ACTA octobre 2004 23 Guide pratique Agribio

Tableau 4 : Efficacité du désherbage mécanique toutes espèces confondues Herse-étrille inter-rang sur le rang stade efficacité nb mesures D moy efficacité nb mesures D moy dicotylédones cot-f2 70 % 27 80 67 % 39 50 graminées f1-f3 76 % 14 160 52 % 22 130 tallage 0 % 9 80 13% 2 40 Bineuse inter-rang sur le rang stade efficacité nb mesures D moy efficacité nb mesures D moy dicotylédones cot-f2 90 % 69 140 74 % 71 130 f4-f6 98 % 14 40 42 % 12 50 graminées f1-f3 77 % 25 60 68 % 28 140 tallage 43 % 5 70 0% 6 130 Dmoy :densité moyenne des adventices avant passage de l outil (en plantes/m 2 ). nées. Sur le rang, elle a une action de buttage qui permet de contrôler de jeunes plantes jusqu au stade 4 à 6 feuilles pour les dicotylédones et jusqu'au tallage des graminées. Le tableau 4 nous montre l'efficacité du désherbage mécanique avec chacun de ces outils, pour des mesures effectuées sur le rang et l inter-rang, quelles que soient les plantes. Savoir anticiper Il serait illusoire et absurde de vouloir éradiquer la totalité des espèces présentes dans les cultures. Bien au contraire, la diversité des plantes qui se succèdent sur la parcelle garantit un équilibre précieux entre les différentes populations adventices. Si aucune d'entre elles n'est favorisée, aucune ne sera dominante, et leur contrôle en sera facilité. Il s'agit donc de maintenir la flore à un niveau compatible avec l'objectif de production et l'équilibre économique du système. L anticipation est la pierre angulaire d une démarche générale où sont étroitement liées lutte et prévention. Pour cela deux points sont incontournables : une rotation de cultures longue et variée, conserver le labour tout en préservant une bonne structure du sol. La connaissance de la biologie et du comportement des plantes devient alors un outil essentiel à la maîtrise de l enherbement au même titre que le savoir-faire du producteur. C est la combinaison des méthodes préventive et curative qui permet de lever la contrainte importante que représente le contrôle des mauvaises herbes en agriculture biologique. Tableau 5 : Les productions grainières de quelques adventices selon différents milieux TAD en % Paille Chaume Culture sarclée Couvert spontané Amarante réflêchie 33 40 000 Anthémis cotule 45 5 000 à 40 000 Arroche étalée 32 86 à 280 15 000 Avoine folle 83 140 Chénopode blanc 48 350 130 à 8 830 3 500 2 500 à 30 000 Coquelicot 54 21 500 à 36 700 21 500 40 000 à 200 000 Digitaire sanguine 75 420 à 1 350 1 350 6 500 à 23 000 Gaillet gratteron 75 20 à 50 Helminthie fausse vipérine 62 4 000 à 22 000 Liseron des champs 320 300 Matricaire camomille 44 30 000 à 100 000 Morelle noire 35 42 000 3 000 à 10 000 Moutarde des champs 43 800 à 4 500 445 à 9 370 4 500 1 980 Panic pied-de-coq 75 360 à 6 020 1 200 3 000 à 70 000 Rapistre rugueux 29 1 000 à 2 000 Ravenelle 90 à 3 030 200 à 1 500 Renouée des oiseaux 54 8 à 900 900 450 à 2 500 Renouée liseron 54 70 90 à 1 630 400 à 2 000 Renouée persicaire 40 50 à 210 1 400 à 18 000 Rumex crépu 40 6 000 à 22 000 Sétaire glauque 75 100 à 1 300 1 300 500 à 3 000 Sétaire verte 75 170 à 1 730 1 100 3 000 à 20 000 Véronique de Perse 60 170 à 1 150 180 1 500 à 7 000 Véronique des champs 46 60 à 210 2 500 à 15 000 Données issues de synthèses bibliographique s donnant les valeurs minimales et maximales rencontrées Nombre de semences produites par pied TAD : taux annuel de décroissance Guide pratique Agribio 24 octobre 2004