La révolution mobile et numérique en Afrique : le saut qualitatif pour fournir les biens et services



Documents pareils
Connaissances et compétences requises : coordonnées géographiques, réflexion critique, recherche de documentation, rédaction, support cartographique.

de plus de moitié, particulièrement dans les pays où la mortalité infantile est élevée 39.

Rapport 2012 de l Observatoire de la téléphonie mobile en Afrique subsaharienne. Résumé

Docteur Bendeddouche Badis Ministère de l Enseignement Supérieur et de la Recherche Scientifique Directeur EP SNV

THESAURUS ENTREPRISES PUBLIQUES

et à Hammamet (en Tunisie) 4, en mars Ces consultations ont été complétées par une enquête en ligne 5 amorcée en 2011.

L économie Mobile De l Afrique Subsaharienne 2013

FAITS SAILLANTS : 1. CONDITIONS CLIMATIQUES ET ENVIRONNEMENTALES EN AFRIQUE

Pays 1 où il y a un risque de transmission de la fièvre jaune 2 et pays exigeant la vaccination antiamarile

En Afrique, les opportunités d emploi offertes aux femmes proviennent à 92 % de l économie informelle (estimation). JORGEN SCHYTTE/Still Pictures

RÉSULTATS DE LA 1ÈRE SÉRIE D ENQUÊTES AFROBAROMÈTRE AU TOGO 3e Dissemination 26 Juin 2013

LE DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE EN

S engager pour la survie de l enfant: Une promesse renouvelée

Un Aperçu de la Situation de l'assainissement en Afrique

STATUTS DE L ASSOCIATION DES BANQUES CENTRALES AFRICAINES

A. Liste des pays tiers dont les ressortissants doivent être munis d un visa pour traverser la frontière nationale. 1.

Le secteur des Technologies de l Information et de la Communication: Des Réalisations Importantes et des Perspectives Prometteuses

Travailleurs migrants et transferts de fonds vers l Afrique

LE DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE EN RAPPORT 2013 COMMERCE INTRA-AFRICAIN: LIBÉRER LE DYNAMISME DU SECTEUR PRIVÉ

Les synergies à développer dans les TIC Infrastructures régionales de communications

BRIEFING NOTE 1 ETATS DES LIEUX DE LA MICRO-ASSURANCE EN AFRIQUE. 1. Dénombrer les bénéficiaires de la micro-assurance sur le continent africain

Le capital-investissement en Afrique

PAYS INVITE D'HONNEUR :LA FRANCE

29 juin 2010, Luxembourg. Avec Samba Dia, Directeur Adjoint de l ins tu on de microfinance UM-PAMECAS, Sénégal. XIVème Midi de la microfinance

Repères n 7. Le financement des PME en Afrique. par Céline Kauffmann. CENTRE DE DÉVELOPPEMENT DE L OCDE

Le FMI et son rôle en Afrique

Génération des forces de police Standards et Procédures

Fonds. Soutien aux Entreprises en Afrique

Secteur des Technologies de l Information et de la Communication (TIC) PLAN D ACTION

résumé un développement riche en emplois

D A N S L E S PAY S F R A N C O P H O N E S

Examen des dix (10) années de mise en œuvre des décisions et engagements du SMSI-05.

LES DEFIS DU DEVELOPPEMENT DU MARCHE DES SERVICES MOBILES A VALEUR AJOUTEE EN AFRIQUE. Par Dr.-Ing. Pierre-François KAMANOU

Session 9: Suivi de la mise en œuvre de plans nationaux large bande

LE DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE EN AFRIQUE: BILAN, PERSPECTIVES ET CHOIX DES POLITIQUES ÉCONOMIQUES

Réduire la pauvreté : comment les collectivités territoriales peuvent-elles être des catalyseurs du développement économique pro-pauvre?

Plateforme d informations climatiques au Niger Présentation de l opportunité

Le mobile en masse: L éveil du marché marocain

Orange Money un service de paiement et de transfert d argent mobile pour l Afrique

LE CANNABIS EN AFRIQUE. Synthèse

DES ADOLESCENTS ET DES JEUNES EN AFRIQUE SUBSAHARIENNE

LE COMMERCE ELECTRONIQUE OPPORTUNITES ECONOMIQUES ET SOCIALES

Le point sur l épidémie de sida

diffusion externe les services d'orange pour l agriculture en Afrique

Financement de l infrastructure publique en Afrique subsaharienne: scénarios, problèmes et options

Perspectives économiques en Afrique 2014

PAYS LES MOINS AVANCES

Lusaka, 7 mai Note: L'original de l'accord a été établi par le Secrétaire général de l'organisation des Nations Unies le 2 juin 1982.

Perspectives de l économie Internet de l OCDE 2012 Principales conclusions

Etabli par le secrétariat de la CNUCED. NATIONS UNIES New York et Genève, 2005

EN AFRIQUE SUBSAHARIENNE

Comité monétaire et financier international

Perspectives économiques en Afrique 2013

NOVEMBRE Dossier de presse. Société Générale, 1 er réseau de banque universelle. en Afrique au service des Entreprises

Révision des besoins non satisfaits: En bref Résumé de l analyse de MEASURE DHS

Comparaison des dépenses réelles de consommation des ménages et des niveaux de prix en Afrique

Les progrès vers l éducation pour tous stagnent, mais certains pays montrent la voie à suivre

QUATRIÈME CONFÉRENCE DES NATIONS UNIES SUR LES PAYS LES MOINS AVANCÉS ISTANBUL, TURQUIE DU 9 AU 13 MAI 2011

Mobilisation des ressources intérieures

DONNER NAISSANCE NE DOIT PAS ÊTRE UNE QUESTION DE VIE OU DE MORT

La transformation digitale, un enjeux majeur en Afrique

la confiance dans l économie de l information

Thème 2 : Le rôle du «secteur informel» dans l intégration régionale

Communiqué 8 novembre 2012

Mobile Banking.

Le cadre juridique de la fibre optique au Sénégal? Baye Samba DIOP Chef service affaires juridiques ARTP Sénégal

Investir dans la santé pour l Afrique L argumentation en faveur du renforcement des systèmes pour de meilleurs résultats sanitaires

Les inégalités de conditions de vie dans le monde

POLITIQUE D ÉGALITÉ ENTRE LES FEMMES ET LES HOMMES

BOURSES SCOLAIRES. au bénéfice des enfants français résidant avec leur famille à l étranger AGENCE POUR L ENSEIGNEMENT FRANÇAIS À L ÉTRANGER

Burkina Faso Profil pays EPT 2014

Présenté par OUEDRAOGO Adolphe Chef de Brigade de la CIMA. DAKAR, les 3-4 et 5 novembre 2009

DIRECTIVES CONCERNANT LES GROUPES DE COMPÉTITEURS ET LES RAPPORTS DE TENDANCE

Vers des stratégies de développement localisées et plus inclusives en Afrique

Les économies de l Afrique de l Ouest : un portrait statistique

ACCORD RELATIF AU TRANSIT DES SERVICES AÉRIENS INTERNATIONAUX SIGNÉ À CHICAGO LE 7 DÉCEMBRE 1944

WP Board No. 934/03. 7 mai 2003 Original : anglais. Comité exécutif mai 2003 Londres, Angleterre

L affacturage en Afrique : Opportunités et défis

La BAD en bref Mai 2013

Mobile Paiement: perspectives et axes de développement

ACCÉLÉRER METTRE FIN À L ÉPIDÉMIE DE SIDA D ICI À 2030

LE DÉVELOPPEMENT RAPPORT 2014 CATALYSER L INVESTISSEMENT POUR UNE CROISSANCE TRANSFORMATRICE EN AFRIQUE

Décryptage des pouvoirs économiques et politiques du continent africain à travers 5 titres de référence

Attijariwafa bank : un Groupe au service d une Afrique qui avance

IMPACT DE LA CRISE SUR LES ÉCONOMIES AFRICAINES MAINTENIR LA CROISSANCE ET POURSUIVRE LA RÉDUCTION DE LA PAUVRETÉ

Comité monétaire et financier international

Rapport final IGF-AC, edition 2013, Kinshasa

TROISIEME REUNION DU FORUM SUR L ADMINISTRATION FISCALE DE L OCDE

INCITATIONS FISCALES EN AFRIQUE DE L'OUEST

Mots clés : Réforme monétaire, monnaie africaine, développement économique, Afrique.

L implantation des banques marocaines en Afrique

Pourquoi disposer d un site Internet mobile n est qu un début

Mot d ouverture de Mamadou Lamine N DONGO Lead Results Adviser Banque Africaine de Développement Coordonnateur de AfCoP

L INVESTISSEMENT DES CABINETS D AVOCATS EN AFRIQUE

Technologies de l information

BREVET DE TECHNICIEN SUPÉRIEUR INFORMATIQUE DE GESTION

Deuxième Examen global de l Aide pour le commerce

Atelier sur le Financement de la Filière Coton en Côte d'ivoire: Création d'un Fonds de Garantie

POINT DE DÉCISION DE LA FRANCOPHONIE : STOPPER LES NOUVELLES INFECTIONS AU VIH ET GARANTIR LES TRAITEMENTS POUR TOUS

UNE MEILLEURE CROISSANCE, UN MEILLEUR CLIMAT

Transcription:

La révolution mobile et numérique en Afrique : le saut qualitatif pour fournir les biens et services Juillet 2015

SOMMAIRE Introduction... Erreur! Signet non défini.2 I- Tendances et scenarios du secteur numérique... 3 a. La part de l Afrique dans le numérique mondial : statistiques et projections......... 5 b. L impact du numérique sur l économie africaine... 7 c. Progrès réalisés au cours de la dernière décennie et les efforts des gouvernements......... 11 d. Projets structurants à l échelle du continent... 15 e. Tendances et scénarios à moyen et à long termes... 18 II- La communauté numérique africaine et les particularités du modèle africain. 21 a. Le boom du mobile et son impact sur le numérique africain... 21 b. L e-commerce : la floraison des startups et des multinationales... 26 c. L e-gouvernement : timide début......... 27 III- Le boom des télécoms et des réseaux internet en Afrique : quelles implications?......... 32 a. Les défis structurels pour l'ensemble du continent... 32 b. Le poids de l économie numérique...... 45 c. Effets de la future révolution sur l'économie africaine... 47 Conclusion 45 La révolution mobile et numérique en Afrique : le saut qualitatif pour fournir les biens et services Page 2

INTROUCTION Avec 167 millions d utilisateurs internet, une moyenne de 70% de la population abonnée aux téléphones mobiles et la contribution au Produit Intérieur Brut (PIB) des technologies de l information et de la communication (TIC) estimée à 18 milliards de dollars américains. L Afrique présente un potentiel incontesté dans le numérique. Ce potentiel est de plus en plus exploité par les institutions étatiques, les multinationales, les entrepreneurs et les concepteurs mieux ces deux outils ont franchi les limites de leur objet initial et permet de plus en plus d accroître l accès des populations à certains services. Le numérique a permis d innover en Afrique : que ce soit le mobile qui facilite les transactions bancaires et le paiement de facture ou l Internet qui permet de disposer de produits dernier cri, désormais, le citoyen lambda peut jouir de certains privilèges. Il n y a plus aucun doute, la prolifération des mobiles sur le continent et l accès de plus en plus accru au réseau internet témoignent de la grande transformation économique et sociale dans les sociétés africaines. Toutefois, l Afrique doit faire des progrès dans la mise en place des infrastructures et des compétences adéquates pour le développement d une industrie viable des TIC et dans la promotion de la recherche, du développement et de l innovation dans le secteur numérique afin d avoir un avantage comparatif comparé aux autres régions du monde. Le présent rapport vise à établir un état des lieux des avancées qui ont été réalisées dans ces secteurs et comment elles se comparent au reste du monde. Aussi, il analyse les retombées du numérique en Afrique et propose les tendances et perspectives d avenir. Le rapport est présenté comme suit : Les tendances et scénarios du secteur numérique ; Les particularités du modèle africain ; Le boom des télécoms et des réseaux internet en Afrique ; L impact de la révolution digitale sur l Afrique et ses incidences ; Les défis structurels auxquels est confronté le continent. La révolution mobile et numérique en Afrique : le saut qualitatif pour fournir les biens et services Page 3

I TENDANCES ET SCENARIOS DU SECTEUR NUMERIQUE Longtemps restée à la traine au niveau technologique l Afrique rattrape progressivement son retard au niveau des télécoms et de l internet. Selon l Institut Universitaire de Technologie (IUT), le marché des télécoms en Afrique s illustre à travers les usages du mobile car le réseau fixe est essentiellement difficile d accès. On remarque ainsi un développement fulgurant au niveau des télécoms et le renversement des tendances de monopole des opérateurs mobiles dans plusieurs pays. Figure (1) : Evolution des réseaux mobiles 120% 100% 80% 60% 40% 20% 0% 1992 1997 2002 2013 Présence de Réseau mobile Situation de monopole Source : Les enjeux des télécoms dans les pays émergents, Bearing Point 2013 A ce jour, 160 opérateurs de téléphonie mobile composent le paysage télécoms à travers le continent, soit une moyenne de 3 opérateurs par pays. Le continent a enregistré un boom en matière de téléphonie mobile. En 2013, il comptait 66 % d abonnées à la téléphonie mobile soit 617 279 080 personnes avec la moitié des abonnés mobiles qui utilise une connexion internet via leurs réseaux mobiles (USB data internet, les box et les bornes Wifi). Le taux de pénétration à internet haut débit reste cependant faible. La révolution mobile et numérique en Afrique : le saut qualitatif pour fournir les biens et services Page 4

Figure (2) : Taux de pénétration à internet haut débit en Afrique 60 50 40 30 20 10 0 Taux de pénétration à internet haut débit Maroc Seychelles Afrique du Sud Maurice Kenya Nigéria Swaziland Sao Tomé-et-Principe Soudan Sénégal Angola Zimbabwe Guinée équatoriale Ouganda Zambie Botswana Gambie Namibie Ghana Bénin Libéria Togo Burkina-Faso Tanzanie République Guinée-Bissau Côte d Ivoire Tchad République Madagascar Éthiopie Sierra Leone Niger Guinée Somalie Burundi Érythrée Seuls deux pays dépassent le seuil des 50% (Maroc et Seychelles). Ils sont suivis de l Afrique du Sud, Maurice, le Kenya et le Nigéria qui enregistrent des taux compris entre 38 et 50%. Treize pays ont des taux compris entre 10 et 20% et le reste (18 pays) comptent moins de 10% de leur population qui a accès à internet. Ainsi, Internet est accessible et utilisé par la minorité dans les pays africains, généralement, il s agit de ceux qui appartiennent à la classe moyenne. a) La part de l Afrique dans le numérique mondial et les projections sur le numérique africain Malgré son rang de deuxième marché mondial de téléphonie mobile, le continent africain reste encore à la traine. La fracture numérique est encore très grande et constitue un enjeu de développement pour le continent. Selon le Rapport mondial sur les technologies de l information 2015, publié par le Forum Économique Mondial, les pays en développement et émergents ne parviennent pas à exploiter le potentiel des technologies de l information et de la communication pour favoriser la transformation sociale et économique nécessaires pour rattraper les pays plus avancés. La révolution mobile et numérique en Afrique : le saut qualitatif pour fournir les biens et services Page 5

Chiffres clés du numérique dans le monde - 42% de la population mondiale a accès à Internet en 2015 (contre 35% en 2014) ; 3,010 milliards d internautes actifs (taux de pénétration de 42%), + 21% en un an ; 2,078 milliards d utilisateurs actifs sur les réseaux sociaux (taux de pénétration de 29%), + 12% en un an ; 3,649 milliards détenteurs d un mobile (plus de 51% de la population mondiale), soit + 5% en un an ; 1,685 milliard d utilisateurs accèdent aux réseaux sociaux via un mobile (taux de pénétration de 23 %), soit une croissance de 23% en un an. - Figure (3) : Pénétration internet par région Source : http://wearesocial.net/blog/2014/01/social-digital-mobile-worldwide-2014 Chiffres clés du numérique en Afrique - 16% de taux de pénétration internet 167 millions d internautes en Afrique 18 milliards de dollars de contribution de l internet au PIB La révolution mobile et numérique en Afrique : le saut qualitatif pour fournir les biens et services Page 6

Au regard des données ci-dessus, il ressort que la fracture numérique entre le continent Africain et le reste du monde reste important. L Afrique est positionnée en dernière position dans le classement des taux de pénétration d Internet par région. Elle est loin derrière la première région du monde, l Amérique du Nord, dont le taux est quatre fois plus élevé. Cependant, l analyse des progressions au fil des années et les grandes tendances donnent des projections très optimistes pour les années à venir. L Afrique est considérée comme la terre promise des télécoms. Elle a donc pour obligation de trouver des solutions aux problèmes qui freinent son accès et sa contribution à l'information, à la connaissance et aux réseaux. Les prévisions d ici 2025 du cabinet Mckinsey corroborent bien cette thèse. Prévisions Internet pour l Afrique (en 2025) - 50% de pénétration internet - 600 millions d utilisateurs internet - 75 milliards de dollars dans les ventes e-commerce par an - 300 milliards de dollars de contribution d internet à l igdp - 300 milliards de dollars de productivité dans les secteurs clés grâce à l utilisation du numérique. b) L économie numérique et son impact sur l économie africaine L économie numérique est un terme qui tente de conceptualiser le secteur des activités économiques liées au numérique. Aujourd hui les analystes s accordent sur un point: l économie numérique est une manne d or. En effet, elle contribue valablement au PIB et permet aux Etats de disposer de ressources importantes. Dans la note de l IFRI publiée en 2010 sur l Afrique Subsaharienne, les recettes des télécoms représentent près de 5% du PIB des pays africains. De plus, dans les pays comme la Zambie, l Ethiopie ou la Namibie, les ménages dépensent près de 10% de leur revenu mensuel en téléphonie contre 3% (INSEE) dans les pays développés. Le rapport du GSMA sur l économie mobile en 2013 évaluait en 2012 la contribution de l écosystème Mobile au PIB en Afrique Subsaharienne à 60milliards de dollars américains et prévoit d ici 2020 une augmentation de 8% soit 119 milliards de dollars américains en 2020. La révolution mobile et numérique en Afrique : le saut qualitatif pour fournir les biens et services Page 7

Figure (4) : Graphe sur la contribution de l internet à l igdp dans le monde 1 GDP assessed by expenditure method, with a share of each category attributed to the Internet. 2 Aspiring countries data is from 2010. Source: Gartner; IHS Global Insight; Organisation for Economic Co-operation and Development; International Telecommunication Union; International Data Corporation; World Health Organization; ICD; iconsumer US 2012; Euromonitor; La révolution mobile et numérique en Afrique : le saut qualitatif pour fournir les biens et services Page 8

H2 Gambling Capital; PhoCusWright; Pyramid Research; UNESCO (United Nations Educational, Scientific and Cultural Organization); McKinsey Global Institute analysis Bien que l Afrique enregistre le taux le moins élevé de la contribution d internet à l igdp, certains pays africains rivalisent avec les plus grandes économies de ce monde. Il s agit du Sénégal (3.3%), du Kenya (2.9%) et du Maroc (2.3%). Il faut noter que certains pays africains qui enregistrent des taux de pénétration d internet élevés n obtiennent pas les meilleurs scores pour la contribution d internet à l igdp (par exemple l Afrique du Sud). Figure (5) :La contribution directe des opérateurs de téléphonie mobile au PIB dans 25 pays africains (2010) Source : Rapport GSMA 2011 L impact de l économie numérique aujourd hui est la résultante de plusieurs facteurs dans le domaine des télécoms et de l internet. En Afrique, plus de la moitié des connexions internet passent par le mobile, ce qui fait du secteur des télécoms un acteur incontournable dans la connexion du continent au reste du monde. Ensuite, il faut noter que l utilisation du mobile est indéniable dans les flux financiers de nos jours, que ce soit pour le paiement en ligne que pour les transferts financiers. L exemple notable du moyen de paiement Mpesa au Kenya rencontre un succès fulgurant avec plus de 300 millions de dollars par mois qui font l objet de transferts entre particuliers (soit 10% du PIB kenyan en valeur annuelle) et un chiffre La révolution mobile et numérique en Afrique : le saut qualitatif pour fournir les biens et services Page 9

d affaires mensuel de 7 millions de dollars soit 8% du chiffre d affaires global de Safaricom (la société fondatrice du Mpesa). Preuve du succès de ce système, M-Pesa compte aujourd'hui plus de 14 millions d'utilisateurs et 7 milliards de dollars ont transité par ce service en 2010. A présent, au Kenya, grâce au Mpesa 75% des adultes ont accès au système financier contre à peine 20% en 2006. Les réseaux télécoms sont également des grands contributeurs fiscaux des Etats. Actuellement, les impôts des télécoms représentent une source de revenus considérable pour les gouvernements africains. Le marché de la téléphonie mobile produit ainsi 7% des recettes fiscales totales de l Afrique subsaharienne. Le secteur y a généré près de 71 milliards de dollars en recettes fiscales entre 2000 et 2012 selon le rapport sur les télécoms de Bearing point. Selon GSMA, «la croissance du secteur de la téléphonie mobile a eu un impact économique direct de 32 milliards USD, incluant un paiement de 12 milliards USD de taxes et a généré environ 4,4 % du PIB de la région (en incluant les effets de la technologie mobile sur la productivité du travail) créant plus de 3,5 millions d emplois équivalents temps plein (ETP)». Figure (6) : Graphe sur l évolution de la part des revenus télécoms dans le PIB des pays d Afrique Source : Rapport GSMA(2007) La révolution mobile et numérique en Afrique : le saut qualitatif pour fournir les biens et services Page 10

Le tableau ci-dessus, quoique datant de 2005, illustre un point important : la libéralisation du secteur des télécoms engendre des recettes importantes aux Etats. Dans le cas présent, en 2005, la part des revenus télécoms est pratiquement le double des pays non libéralisés (respectivement env. 6% et 3%). L argument financier est assez important pour amener les pays n ayant pas encore libéralisé le secteur à prendre en compte les bénéfices à y tirer. Des études récentes révèlent que 80% de toutes les données dans le monde a été créé dans les trois dernières années. Ceci est une des raisons pour lesquelles les deux tiers du travail de la recherche sur la technologie d'ibm sont maintenant consacrés à des données, des analyses et de l'informatique cognitive. Il y aura également une augmentation de trois fois plus de données de transmission par l'homme en 2017. L'humanité génère actuellement environ 2,5 trillion d'octets de données à partir d'une variété de sources quotidiennes - des e- mails, des blogs et des informations sur le climat à des postes sur les sites de médias sociaux. La part de l'afrique dans ce mélange de données global est destinée à être importante, d'autant plus que l'adoption des communications mobiles et l'utilisation d'internet sur le continent continue de croître. Près de 70 pour cent de la population de l'afrique comprend désormais des apprenants - dont beaucoup ont grandi voir appareils mobiles comme une partie normale de la vie quotidienne. En tant que futurs décideurs, les clients et les mandants de la région, ces apprenants seront les principales parties prenantes dans le succès des entreprises et des gouvernements à la fois en Afrique - d'embaucher les meilleurs talents pour assurer la satisfaction des services publics. c) Progrès réalisés au cours de la dernière décennie et les efforts des gouvernements (Politique des gouvernements à travers partenariats, soutien aux initiatives) L évolution des connexions à l internet sur le continent est impressionnante au cours de la dernière décennie. Selon une étude sur le développement des télécommunications dans les pays du Sud, entre 2000 et 2007, elles ont progressé de 874,6 %, soit près de 4 fois la progression mondiale (244,7 %). Au vu de l importance et de la large contribution des télécoms dans le développement des Etats, plusieurs gouvernements ont pris la mesure des choses La révolution mobile et numérique en Afrique : le saut qualitatif pour fournir les biens et services Page 11

en mettant en place diverses politiques pour faciliter l essor du numérique afin de bénéficier de ses retombées sur l économie. Certaines actions comprennent : - L ouverture de l espace des télécoms à plusieurs opérateurs ; - La suppression des taxes sur l importation des TICS ; - La création des Ministères de l économie numérique ; - L expérience de la télévision numérique et de l e-gouvernement ; - L encouragement des initiatives de développement dans les Tics (centres d incubations). Tableau (1) : Principaux centres d incubations en Afrique Afrique du Nord Afrique de l'ouest Afrique de l'est Afrique du Sud WikiStartp.tn Flat6Labs.com PlugAndPlayEgypt.com Tahrir2.com JokkoLabs.net ilabliberia.org MobileWebGhana.org mfriday.org CCHubNigeria.com WennovationHub.com ActivSpaces.com Tekxl.com IceAddis.com ihub.co.ke HiveColab.org TheHubKampala.com klab.rw Teknohama.or.tz mlab.co.za Google.co.za/Umbono BongoHive.com i-hub.mg Source: ihubet Rapport sur les télécoms et internet 2015 L émergence et la multiplication de centres d incubation dans les grands capitales africaines démontre l esprit d entreprenariat et d innovation qui se développe dans les sociétés africaines. A travers les quatre coins de l Afrique, notamment en Afrique de l Ouest et Centrale, de jeunes «geeks» disposent d espaces de rencontres, réflexion et création afin de développer des applications ou des outils adaptés aux besoins de leurs sociétés et de ses consommateurs. Le rapport Lions go digital: The Internet s transformative potential in Africa du cabinet Mckinsey classe les pays ayant enregistré des progrès suivant quatre catégories: les «leaders», les «suiveurs», les «émergents» et les «sous classés». Les pays leaders que sont le Sénégal et le Kenya, par exemple, doivent leurs positions au sens d éveil de leurs gouvernants qui ont su déceler très tôt l importance du numérique. «Le Sénégal a été l un des premiers pays du continent à investir dans la fibre optique et à promouvoir le déploiement des cybercafés. Le Kenya s est signalé par La révolution mobile et numérique en Afrique : le saut qualitatif pour fournir les biens et services Page 12

sa capacité à développer des services mobiles, notamment dans le domaine bancaire. Les deux pays ont été également précurseurs dans la numérisation de l éducation, de l administration publique et des soins de santé. Le Maroc et l Afrique du Sud, deux des plus importantes économies du continent, ne sont que «suiveurs» en raison du retard de leur stratégie TIC. Quant à l Angola, l Algérie et l Éthiopie, ils sont très en dessous de leur potentiel. À l échelle du continent, Internet représente 1,1% du PIB, contre 1,9% dans les pays émergents et 3,7% dans les pays développés. Figure (7) : Politique TIC Sénégal/ Maroc Orientation stratégique Maroc Numéric Sénégalais Paysage numérique Source : Maroc Numeric 2013 Source : Investir au Sénégal En résumé, en Afrique plusieurs pays comme le Sénégal, le Maroc, le Kenya ou la Côte d Ivoire ont mis en place des politiques nationales afin de promouvoir les Tics. Ces politiques se sont révélées très porteuses et bénéfiques. L autre aspect à ne pas négliger est celui des investissements privés sur le continent. Bien évidemment, les pays, riches en ressources naturelles, comme le Nigéria ont reçu la part du lion au détriment des pays les plus pauvres en ressources, La révolution mobile et numérique en Afrique : le saut qualitatif pour fournir les biens et services Page 13

avec des niveaux de revenu bien inférieurs aux autres régions, une proportion de population rurale plus importante et un niveau d éducation plus faibles qu ailleurs. Avec des revenus supérieurs et des populations rurales moins nombreuses, les pays d Afrique du Nord ont représenté en moyenne 44 pour cent des investissements en Afrique entre 2004 et 2007. Globalement, l investissement privé a représenté en moyenne 1.3 pour cent du PIB de l Afrique entre 2004 et 2007. En valeur absolue sur la période 2004-07, l Afrique a bénéficié en moyenne de 11.5 milliards USD, derrière les pays de l OCDE et l Asie centrale (19 milliards USD) et l Amérique latine et les Caraïbes (13.3 milliards USD), mais juste devant l Asie du Sud (10.8 milliards USD). Les pays d Asie de l Est et du Pacifique sont à la traîne, avec 5.3 milliards USD. Pourtant, comparés aux autres régions du monde, la plupart des pays africains affichent un taux d accès aux services TIC extrêmement faible. Dans l indice Networked Readiness Index (NRI) 2007-08, élaboré par le Forum Economique Mondial (FEM) et l Institut Européen d Administration des Affaires (Insead), qui mesure le degré de préparation d un pays à utiliser les TIC efficacement et à en tirer pleinement parti, les pays d Afrique subsaharienne se classent au bas de l échelle. L Afrique du Nord obtient une meilleure place, l Égypte et le Maroc, et surtout la Tunisie, ayant amélioré leur score. L Afrique du Sud et Maurice se positionnent en tête du classement de l Afrique subsaharienne. Source : http://www.africaneconomicoutlook.org/fr/thematique/ict-africa/infrastructures-technologiques-et-services-tic-en-afrique/ Figure (8) : Graphe sur la progression de l investissement dans les télécoms (investissement privé compris) Source : 1. Infrastructures technologiques et services TIC en Afrique 2008 2. World Bank PPI Data Base La révolution mobile et numérique en Afrique : le saut qualitatif pour fournir les biens et services Page 14

Figure (9) : Investissement annuel des opérateurs GSM dans le monde, et par niveau de développement Note: World includes countries accounting for 91 per cent of world GDP. Developed includes 35 developed countries accounting for 98 per cent of total GDP in the developed world. Developing includes 45 developing countries accounting for 80 per cent of total GDP in the developing world. Source: ITU Bien que les pays avancés investissent des volumes plus importants que les pays en développement (186 milliards contre 121 milliards de dollars), la proportion de ces investissements montre le contraire pendant la période 2007-2012, sauf entre 2010 et 2011. Par exemple entre 2007 et 2008, les investissements des pays en développement atteignaient 20% tandis que ceux des pays avancés étaient inférieurs à 5%. Entre 2008 et 2009, les pays avancés investissaient (-15%) et les pays en développement en investissaient (-5%). Enfin, entre 2011 et 2012, les deux groupes de pays ont investi moins de 5% mais les investissements des pays en développement étaient supérieurs. En somme, le secteur des télécoms représente un secteur de croissance pour les pays en développement dont les secteurs publique et privés y consacrent des sommes importantes. d) Projets structurants à l échelle du continent Pour accompagner les initiatives au niveau des Etats, les organismes régionaux comme internationaux ont mis en place des programmes pour le développement des télécoms et de l internet sur le continent africain afin de réduire autant que possible le fossé numérique entre l Afrique et les autres régions du Monde. Citons les exemples ci-après : La révolution mobile et numérique en Afrique : le saut qualitatif pour fournir les biens et services Page 15

- La fibre optique et le déploiement des câbles sous-marins o Le câble sous-marin WACS (West AfricaCable system) qui relie par fibre optique l Afrique du Sud au Royaume-Uni en longeant la côte occidentale du continent depuis 2012, o En 2013 l installation du câble AfricaCoast To Europe (ACE), permet de raccorder l Afrique à la France. ACE, qui a déroulé près de 12 000 kilomètres de fibre optique, permet de connecter treize pays de la côte ouest africaine au réseau international. Son prolongement de cinq mille kilomètres permet également de connecter six pays supplémentaires (Bénin, Cameroun, RD Congo, Angola, Namibie et Afrique du sud). Il suffirait donc pour le continent de réussir mettre en place des points d échanges Internet pour pouvoir connecter l ensemble du continent. o Le câble sous-marin SAT-3/WASC/SAFE lancé en 2002, «Sat- 3/Wasc/Safe» initié par 36 opérateurs issus de 32 pays dont 12 d Afrique, 7 d Asie, 2 d Amérique du nord, 10 d Europe, et un d Océanie, le câble sousmarin a pour objectif de connecter l Afrique, par la mer, au réseau mondial de câbles à fibres optiques ; de développer les services téléphoniques de base et les services larges bandes et multimédias comme Internet, les téléservices etc. Le câble couvre 28 000 km de longueur et traverse des pays comme l Angola, la Côte d ivoire, le Bénin, l Espagne, le Portugal, l Inde et la Malaisie. La révolution mobile et numérique en Afrique : le saut qualitatif pour fournir les biens et services Page 16

Figure (10) : Carte des installations de câbles sous-marins qui relient l Afrique au monde - «Partenariat stratégique pour le développement du numérique en Afrique» qui est une coopération entre la République d Allemagne et l Afrique afin d aider à réduire le fossé numérique. - Programme e-afrique du Nepad qui vise à relier tous les pays africains entre eux et au reste du monde par des câbles sous-marins (Uhurunet) existants et à construire des câbles terrestres (Umojanet) et à intégrer le continent en permettant des échanges commerciaux, sociaux et culturels aisés et à des coûts abordables. La révolution mobile et numérique en Afrique : le saut qualitatif pour fournir les biens et services Page 17

- Connect Africa Initiative de la banque Africaine de développement. - Les projets de la banque mondiale : o Le programme régional d infrastructures de communication (exercices 2007-2013) par le biais de l IDA et de l IFC pour le développement des câbles sous-marins d Afrique de l Est et d Afrique orientale (de l Afrique du Sud au Soudan) à l Asie et à l Europe. o Le projet e-ghana bénéficie d une conception novatrice reposant sur un partenariat public-privé destiné à transformer la collecte des recettes fiscales par le biais d'une coentreprise entre les régies financières de l État et un partenaire du secteur privé. o Le projet erwanda qui a permis de connecter les administrations locales au gouvernement central de Kigali. e) Tendances et scénarios à moyen et long termes Les recherches et les propos des grands analystes sur le développement numérique de l Afrique laissent penser que les années à venir verront une tendance à l accroissement du secteur numérique avec un impact réel sur l économie. Figure (11) : Apports du numérique à l horizon 2020 Régions Nouveaux types Emplois supplémentaires* d'apports Europe Dividende 119 Milliards 156,000 digitale Asie Pacifique 700MHz US$ 1Millions 2, 100,000 band Amérique 700MHz US$ 370 Milliards 112,000 Latine band Afrique Dividende US$ 49 Milliards 506,000 Subsaharienne Digitale Moyen Orient Dividende digitale 2.6GHz & 1.8GHz US$ 57.5 Milliards * 1, 900,000* La révolution mobile et numérique en Afrique : le saut qualitatif pour fournir les biens et services Page 18

Selon les tendances, l un des principaux secteurs à croître est celui des services à valeurs ajoutée (SVA). En effet les SVA constituent l un des principaux services des réseaux GSM afin de créer de la valeur et de faire de la marge. Ces services à la base circonscris aux SMS et aux carnets d adresse évoluent de plus en plus en Afrique. On assiste maintenant à la création de divers services comme les sonneries personnalisés, les SMS promotionnels etc. Selon le Bearing Point, les «SVA communautaires» sont parmi les plus récents et liés au développement des réseaux sociaux. En Afrique, lorsque les réseaux ne permettent pas l accès aux sites web via Internet, des versions SMS (Facebook via SMS par exemple) constituent des SVA puissants. Ensuite, il y a les «SVA B2B2C», qui permettent aux entreprises de faire de la publicité et des promotions à grandes échelles via les SMS. L autre tendance qui bat tous les records est celui du mobile payment. Très peu de populations en Afrique ont accès aux services bancaires (20% en moyenne et moins de 10% dans plusieurs pays). Le mobile permet de pallier à cette insuffisance en fournissant à chaque détenteur de téléphone portable un portefeuille de crédits qui lui permet de faire des achats, d effectuer les transactions classiques de la banque et même pour certains pays d avoir accès aux micros crédits et aux prêts. A ce jour, 9 opérateurs majeurs ont développé des services de mobile money sur le continent (Bharti Airtel, Etisalat, Millicom, MTN, Ooredoo, Orange, STC, Vodafone et Zain). Stimulée par le programme Mobile Money Interoperability (MMI) du GSMA, ces opérateurs ont signé des partenariats afin de mutualiser leurs infrastructures et de permettre l interopérabilité du mobile money pour un meilleur accès des populations africaines aux services financiers. Pour illustrer cet exemple, dans les pays à revenus intermédiaires africains, 5 milliards de personnes n'ont pas accès à ces services et vivent sous un seuil de La révolution mobile et numérique en Afrique : le saut qualitatif pour fournir les biens et services Page 19

pauvreté difficile à atténuer. Cependant, environ 1,7 milliard dispose d un téléphone portable. Il est donc plus facile pour eux d avoir accès au mobile money et d effectuer divers types d opérations dans leur pays (achats, transferts, paiement de factures, prêts) et dans d autres pays africains (transferts). 10 prédictions sur l évolution des TIC en Afrique en 2015 1. La classe moyenne africaine fera ses emplettes sur Internet 2. De nouveaux géants internationaux (multinationales) s installeront en Afrique 3. Les TIC faciliteront les échanges économiques entre les pays africains 4. Le Mobile Banking s imposera dans les transactions du quotidien 5. ll y aura de plus en plus de connectés via la 3G et la 4G 6. Le combat pour les meilleurs talents s intensifiera 7. Le contenu sera plus roi que jamais 8. Les opérateurs de téléphonie investiront de plus en plus dans les Startups africaines 9. La sécurité des services informatique sera au centre des débats Source : http://www.afriqueitnews.com/2015/01/12/10-predictions-levolution-tic-en-afrique/ Toutes ces tendances cumulées corroborent les prévisions de McKinsey pour l année 2025. Comme dans beaucoup de domaines, l Afrique est vraiment la mine d or qui reste à être exploitée. La révolution mobile et numérique en Afrique : le saut qualitatif pour fournir les biens et services Page 20

II LA COMMUNAUTE NUMERIQUE AFRICAINE ET PARTICULARITES DU MODELE AFRICAIN Dans le Monde en général, le principal terminal utilisé pour accéder au réseau internet est le micro-ordinateur. Il offre une meilleure ergonomie, rapidité et efficacité que les téléphones portables. Mais le constat en Afrique est tout autre : l accès aux informations et aux services se fait bien plus par les mobiles que par les ordinateurs. Ceci vient du fait que les utilisateurs africains ont des caractéristiques particulières vis-à-vis du numérique. Le téléphone portable est mobile, et ce n est pas rien dans des pays où les populations se déplacent en permanence dans des villes très étendues. Les bidonvilles, les réseaux de transports et d énergie parfois anarchiques, ne permettent pas d accès fixes, individuels et rentables. Aussi les coûts d achat et d usage d un portable sont moins élevés et permettent donc d avoir un outil personnel, accessible à toute heure et en tout lieu et leur utilisation ne nécessite pas un niveau d alphabétisation élevé quand on sait aussi que c est une des difficultés du continent. Etudier les particularités du modèle numérique africain passe donc nécessairement par l analyse du développement du mobile sur le continent a- Le boom du mobile et son impact sur le numérique africain L équipement en téléphones mobiles a connu une progression spectaculaire ces dix dernières années comme le montre les statistiques de Royce Fund dans le graphique ci-dessous. Estimé à 130 millions en 2005, le nombre d unités de téléphones portables sur le continent avoisine aujourd hui les900 millions d usagers, soit un taux de pénétration de 85% de la population. Le succès des téléphones portables en Afrique s explique par plusieurs facteurs : La pyramide d âge de la population du continent qui compte une très forte proportion de jeunes âgé de 15 à 25 ans et qui sont très portés vers les nouvelles technologies ; Les coûts et difficultés d'installation des lignes fixes ; La diversité des services offerts par les opérateurs qui s adapte bien aux besoins et particularités du continent ; et Les avantages liés aux coûts. La révolution mobile et numérique en Afrique : le saut qualitatif pour fournir les biens et services Page 21

L autre constat est l accroissement de l utilisation des Smartphones et des divers services liés à ce type de mobile. Selon le cabinet Deloitte, le nombre de Smartphones en Afrique devrait doubler d ici 2017 pour atteindre plus de 350 millions d unités connectées. Figure (12) : Taux de pénétration des téléphones mobiles et nombre d usagers Source : RoyceFund Cette tendance entraînera sans doute une amélioration de la connectivité et permettra de toucher davantage d utilisateurs, faciliter l accès à internet des usagers. Que ce soit dans l'e-commerce, l'e-banque, le mobile-banking ou dans tous ses services dérivés, le développement du mobile est en train de modifier radicalement les modes d organisation et de production des entreprises, les comportements de consommation et plus largement le fonctionnement des économies des pays d Afrique. Figure (13) : Accès aux services de base en ASS La révolution mobile et numérique en Afrique : le saut qualitatif pour fournir les biens et services Page 22

Source : GSMA 2015 La comparaison ci-dessus des taux d accès à divers services en Afrique Subsaharienne met en exergue l importance du mobile. Il se positionne au même rang que des services de bases comme l eau/assainissement et l électricité. En d autres termes, les africains ont presque autant accès à l électricité qu à un téléphone mobile ; ils ont autant accès à un téléphone mobile qu à des services d assainissement ; et ils ont plus accès à un téléphone mobile qu aux services financiers. L accroissement du nombre de téléphones portable a permis de dynamiser plusieurs secteurs de l économie et pratiquement tous les secteurs bénéficient de cette transformation : Les services bancaires : ici le boom du mobile a permis de faciliter les services bancaires mobiles notamment le transfert d argent électronique dont l exemple le plus édifiant est celui du Kenya avec le M-Pesa. Des milliers de personnes exclus du système bancaire traditionnel se retrouvent dans ce type d offres. Les innovations technologiques : ce nouveau secteur d activité a en très peu de temps connu un vrai engouement. On ne compte plus le nombre de startup qui rivalisent dans le domaine des applications mobiles. On peut citer : Mobile Web et mfriday au Ghana. La santé : Le fossé médical entre les centres urbains et les zones rurales se réduit de plus en plus, un exemple est le projet Pésinet au Mali déploie la technologie mobile afin de prévenir les maladies et la mortalité infantiles dans les familles à faible revenu. Bien qu il soit relativement basique, ce système a permis d améliorer considérablement les indicateurs de mortalité infantile. L éducation : le mobile a permis le renforcement des capacités des acteurs et le soutien à la création de contenus éducatifs de qualité. Il a aussi favorisé l accès à ceux-ci. On récence des contenus éducatifs comme WikiAfrica Cameroun (production de contenus à l intention des élèves du primaire) ou Open Sankoré, la mise au point de tablettes éducatives permettant l accès à des contenus éducatifs des classes de la maternelle à l université ; La révolution mobile et numérique en Afrique : le saut qualitatif pour fournir les biens et services Page 23

Ou des projets plus ambitieux tels que ceux visés par l AUF dans le cadre de son dernier appel à projets numériques éducatifs, visant entre autres à inciter les institutions universitaires à créer des MOOCs. Et tutti quanti, la mobilisation des acteurs de tous bords (organisations internationales, gouvernements, milieux associatifs et même entreprises privées) témoigne, de l intérêt de plus en plus manifeste des professionnels de l éducation pour la création de contenus éducatifs numériques en Afrique. Le secteur agricole a su profiter de la révolution industrielle pour décupler ses capacités de production, la révolution numérique lui a fait franchir un pas de plus en terme de productivité et d efficacité. Le service de XamMarse de Manobi au Sénégal est l un des exemples les plus connus. Il consiste à fournir des informations sur les marchés aux agriculteurs et à communiquer la météo et les horaires des marées aux pêcheurs par le biais des téléphones portables. On peut également citer Trade at Hand au Mali, au Mozambique et au Sénégal ainsi que KACE au Kenya. L appropriation de la téléphonie mobile par les Africains a également permis de démultiplier les usages faits de ce réseau. Au cœur de cette révolution et en dehors de la communication téléphonique classique, de nombreuses applications permettent l accès à une multitude de possibilités. Mais c est l utilisation des réseaux sociaux qui est en tête en termes d audience dans plusieurs pays. Vient ensuite les services de recherches d informations et la consultation de courriers électroniques (voir graphe ci-après). La révolution mobile et numérique en Afrique : le saut qualitatif pour fournir les biens et services Page 24

Figure (14) : Connexion internet via mobile Source : reseachictafrica.net Le grand intérêt pour ces applications est qu elles permettent pour la plupart de réduire les frais de communication ce qui explique le succès qu ils rencontrent dans les pays Africains. En résumé, le mobile est venu combler le fossé de la communication et de l échange de données en Afrique. Il est le 1 er moyen utilisé pour se connecter à internet devant les ordinateurs et les autres moyens conventionnels. En plus des avantages classiques (facile à utiliser, consomme peu d électricité, moins cher qu un ordinateur etc.), le téléphone mobile a énormément contribué à développer et réduire le coût de la communication avec les applications (Viber, whatsapp, tango, snapchat, etc.) et les réseaux sociaux (facebook, twitter, etc.) qui suscitent un engouement particulier tant pour les entreprises que pour les particuliers. Figure (15) : Nombre d utilisateurs actifs de Facebook par mois Social Band, 2012 Source : La révolution mobile et numérique en Afrique : le saut qualitatif pour fournir les biens et services Page 25

A titre d exemple, Facebook, le réseau social le plus populaire en Afrique, regroupe plus d un milliard d abonnés par mois via téléphonie mobile. b- L e-commerce : nouveau champ de bataille des startups et des multinationales Les technologies numériques conduisent à une redéfinition des offres de valeur, un renouvellement des compétences dans les entreprises et à une complète redistribution des coûts et des revenus dans les chaînes de valeur. Certains modèles d affaires établis sont ainsi déstabilisés alors que de nouveaux modèles émergents (notamment autour de l intermédiation électronique). C est le cas de l e-commerce qui attire un nombre croissant de startup qui rivalisent dans le domaine pour contrôler le plus possible de parts de marché sur le continent. En réalité, le marché du e-commerce est en plein développement en Afrique. C est dans ce contexte que de grands groupes internationaux d e-commerce s implantent avec pour objectif d être les futurs géants du secteur. Les principaux sont : Africa Internet Group«AIG» CDISCOUNT Konga Le commerce en ligne est en passe de devenir la tendance forte des prochaines années en Afrique. Figure (16) : Différents types de commerce électronique Source : Rapport sur le e-commerce en Afrique du Nord 2011 La révolution mobile et numérique en Afrique : le saut qualitatif pour fournir les biens et services Page 26

Le commerce électronique est un nouveau créneau basé sur le savoir qui apporte des changements sur la pratique des affaires. Il requiert une main d œuvre qualifiée et des «E-entrepreneurs» d un genre nouveau qui maîtrisent les NTIC et sont en mesure d en saisir les opportunités. Dans la mesure où la plupart des pays africains sont en train de d améliorer leur connectivité à Internet, il est important de former les hommes d affaires africains et leurs collaborateurs sur les nouvelles techniques du commerce pour qu ils puissent accroître leur compétitivité et qu ils prennent part au commerce électronique mondial. Les gouvernements africains de par leur position de premier client du pays doivent faciliter la création et le développement du marché institutionnel au niveau national, régional et international. Ils doivent aussi penser à la création d'un cadre juridique de confiance : une approche qualitative pour l'amélioration continue en vue de rendre l'environnement plus propice Ils pourront ainsi jouer un rôle de catalyseur en exigeant des offres électroniques suite à des appels d offres. Cela pourrait inciter les moyennes et grandes entreprises à investir dans les NTIC et à former leur personnel. c- L e-gouvernement : timide début Les gouvernements africains considèrent peu à peu le développement des TIC comme un pré requis pour le progrès économique et social du continent. Dans ce cadre, on remarque depuis quelques années que plusieurs gouvernements ont initiées et accéléré la diffusion des TIC dans les gouvernements locaux à travers le déploiement de systèmes de gouvernement électronique. Selon le rapport de l Organisation des Nations Unies (ONU) sur l egouvernement, le gouvernement tunisien est le plus ouvert aux technologies de l information et de la communication (TIC). Tunis occupe ainsi le premier rang avec une moyenne de 0,54/1. Les indices pris en compte dans la réalisation de cette étude sont la disponibilité des services publics en ligne, le niveau des infrastructures de communication et le capital humain. En Afrique subsaharienne, le Ghana vole la vedette au Nigéria, première puissance économique d Afrique. Accra a obtenu une moyenne de 0,38 contre 0,29 pour Lagos. Kigali (Rwanda) qui se veut la SiliconValley de l Afrique (0.36) est devancé par le Kenya(0,38) et la Namibie (0,39). La révolution mobile et numérique en Afrique : le saut qualitatif pour fournir les biens et services Page 27

Figure (17) : Utilisation des TICs dans les services gouvernementaux Source : Rapport de l ONU sur l e-gouvernement La révolution mobile et numérique en Afrique : le saut qualitatif pour fournir les biens et services Page 28

Figure (18): Défis de l implémentation de l e-gouvernement en Afrique Subsaharienne Aspects Infrastructurels Aspects humains Aspects Financiers Défis de l egouvernement en Afrique Aspects socioéconomiques Aspects Politiques Aspects organisationnel Source: IF-POSH Dans ce schéma réalisé par Electronic Journal of e-government Volume 11 Issue 2 2013, on voit clairement les différents secteurs et aspects qui interagissent pour produire le système e-gouvernement. L implémentation d un système e- gouvernement dans les pays africains nécessite de pouvoir agir sur ces différents aspects que sont : Les aspects infrastructures Il a été démontré par de nombreuses études que la faiblesse des infrastructures de télécommunication en Afrique est l un des obstacles majeurs à une utilisation efficace des TICs sur le continent. Il faudra donc qu à l instar de ce qui se fait déjà un peu partout sur le continent, que des politiques sérieuses œuvrent pour renforcer les infrastructures technologiques en Afrique. Les aspects financiers Le coût qu engendre l implémentation des services e-gouv est souvent substantiel. Il faudra donc mobiliser le plus de ressources possibles pour amorcer les grands chantiers. La révolution mobile et numérique en Afrique : le saut qualitatif pour fournir les biens et services Page 29

Les aspects politiques Le leadership politique est indispensable pour ce genre de projet. Il est important pour les gouvernements de soutenir les initiatives e-gouvernement et de la positionner comme une des priorités des politiques gouvernementale. Les aspects organisationnels A ce niveau, l objectif doit être de réduire le fossé entre un grand nombre de fournisseurs de Services à Valeur Ajouté et les utilisateurs finaux. Le succès des SVA mobiles en Afrique dépend principalement de la création d un écosystème qui permettra à tous les acteurs intervenant dans la chaine de valeur de gagner équitablement sur la base de partage de revenus. Les aspects humains L émergence de centres de formation spécialisés en NTIC peut être un bon levier. Les acteurs ont besoin d être aidés pour avoir les capacités nécessaires pour entreprendre. Dans ce cadre, il faudra un renforcement des capacités, des mécanismes d incubation et la consolidation d une expertise africaine qu il sera aisé de dupliquer. Il est nécessaire d intégrer dans tous les cursus scolaires et universitaires la dimension NTIC. Les opérateurs privés ou public de télécommunication ont quant à eux la responsabilité de démocratiser l accès à travers l octroi de régimes particuliers aux élèves, étudiants, ménages et aux acteurs privés qui travaillent directement sur les NTIC. Web africain et contenu L accessibilité croissante des TIC pour les populations est un facteur de développement pour les pays Africains, et ce à plusieurs niveaux. Face au taux de pénétration d internet en constante évolution et au développement du réseau télécom, l Afrique a plus que jamais besoin d organiser sa politique de production de contenu destiné au web. La 1 ière remarque est que les sites web ou blogs de l Afrique anglophones sont beaucoup plus riches en contenus que ceux d Afrique francophone qui ont des contenus peu variés, la politique étant de loin le sujet le plus traité, même si ces dernières années nous constatons une nette amélioration. Les agrégateurs d information nationale sont les seuls sites médias qui ont réussi à s imposer assez La révolution mobile et numérique en Afrique : le saut qualitatif pour fournir les biens et services Page 30