Société Suisse de Géomorphologie (SSGm) Schweizerische Geomorphologische Gesellschaft Fiches Géomorphologie de la montagne Août 2009



Documents pareils
La fonte des glaces fait-elle monter le niveau de la mer?

Rosemont- La Petite-Patrie. Îlots de chaleur urbains. Tout. savoir! ce qu il faut

Évolution du climat et désertification

Les calottes polaires Isostasie Champ de température

COMMENT CONSTRUIRE UN CRIB A MAÏS?

Synthèse SYNTHESE DIRECTION GENERALE DE L ENERGIE ET DU CLIMAT. Service du climat et de l efficacité énergétique

Les lieux d où l on voit les Alpes font partie de ces espaces chargés de

Le bac à graisses PRETRAITEMENT. Schéma de principe. Volume du bac à graisses. Pose

ISOLER LA TOITURE INCLINÉE

CHAPITRE 6 : LE RENFORCEMENT DU MODELE PAR SON EFFICACITE PREDICTIVE

Styrodur C, un XPS exempt de CFC, HCFC et HFC. De l air, tout simplement. Ecologique, tout simplement.

Thème 17: Optimisation

ARCHITECTE-FICHES RESSOURCES

Efficacité énergétique des logements à haute performance énergétique, HPE : Application au site de Béchar

NOTICE TECHNIQUE SSC : Système Solaire Combiné eau chaude sanitaire / appui chauffage maison / appui eau chaude piscine

Relation entre le changement climatique et les ressources en eau: incidences et mesures d intervention

MISSION DE L ENTREPRISE. Fabriquer grâce à son savoir faire, des produits en acier, aluminium et polymères pour les vendre sur le marché mondial

Chapitre 5 Mesures géophysiques

Fiche de lecture du projet de fin d étude

Principe de fonctionnement de la façade active Lucido. K:\15.Lucido \Dossier d'envoi\annexe\2011_12_explicatif du principe de la façade Lucido.

LES MENUISERIES INTÉRIEURES

RAPPORT D ENQUETE DE TECHNIQUE NOUVELLE

METEOROLOGIE CAEA 1990

Libre-Service de l agence ISOPAR Garges-lès-Gonesse

RÉSUMÉ DES PRINCIPALES RÈGLES CONCERNANT LE RACCORDEMENT D UNE RÉSIDENCE AU NOUVEAU RÉSEAU D AQUEDUC ET D ÉGOUT DU VILLAGE

Carte des Vents de l Algérie - Résultats Préliminaires -

RELEVE D ETAT DU PONT DES GRANDS-CRÊTS. On a procédé une auscultation visuelle entre le 23 et le 29 mars 2007.

ACOUSTIQUE REGLEMENTATION ISOLEMENT AUX BRUITS AÉRIENS ISOLEMENT AUX BRUITS DE CHOCS

Rapport annuel de monitoring automatisé de la qualité de l eau

Vu le dahir du 7 kaada 1371 (30 Juillet 1952) relatif à l urbanisme et, notamment, son article 18 ;

La surveillance appliquée à la gestion des risques géotechniques miniers

L éclairage naturel première partie : Principes de base

CHAUFFAGE RADIANT RÉCHAUFFER LA MAISON AVEC UN PLANCHER CHAUFFANT. Construction Automobile Industrie

Série de publications 1 Rapport 3. PermaNET. Réseau d observation du permafrost sur le long terme RAPPORT DE SYNTHESE

Fribourg. du canton de. Rapport explicatif. Cartes des. dangers naturels. en zone préalpine. Canton de Fribourg

Cours Météo, Club Alpin Suisse, Section de Neuchâtel

La gestion à long terme des déchets de haute activité et/ou de longue durée de vie. Options

Le chauffe-eau thermodynamique à l horizon

(B.O. n 2739 du , page 489) LE PREMIER MINISTRE,

MEDIACOM 3 Immeuble de bureaux à Saint-Denis. JOURDA Architectes Paris

Nouveau. TRIMAXX, le raccourcisseur qui en fait un MAXX.

Unité fonctionnelle de référence, à laquelle sont rapportés les impacts environnementaux du Chapitre 2

FICHE TECHNIQUE POSTE METALLIQUE

ANNEXE 1 1/7 LE BATIMENT

Manuel de validation Fascicule v4.25 : Thermique transitoire des structures volumiques

CONCOURS EXTERNE DE RECRUTEMENT DE PROFESSEURS CERTIFIÉS ET CONCOURS D ACCÈS À DES LISTES D APTITUDE (CAFEP)

Domosol : Système solaire combiné (SSC) de production d eau chaude et chauffage

L inégale répartition de l énergie solaire est à l origine des courants atmosphériques

Non, le Mont Blanc ce n est pas facile!

L équilibre offre-demande d électricité en France pour l été 2015

Paysage de nuages. Objectif. Matériel. Vue d ensemble. Résultats didactiques. Durée. Niveau

Géothermie et stockage: quo vadis? Pascal Vinard

Que nous enseigne la base de données PAE?

VII Escaliers et rampes

Solar Heating System Factsheet (SHSF) - Dossier guide

ISOLER LES MURS PAR L EXTÉRIEUR

Site d étude. Résultats

Isolation de conduites à base d'amiante

Les versants sous-cavés

Climat : vers le point de rupture?

PRÉGYMÉTALTM. Mise en œuvre CONTRE-CLOISONS PRINCIPES DE POSE POINTS SINGULIERS ACCROCHAGES & FIXATIONS LOCAUX HUMIDES LOCAUX TRÈS HUMIDES

Arrêté Royal du 7 juillet 1994 fixant les normes de base en matière de prévention contre l incendie et l explosion : Notice explicative

CENTRALES HYDRAULIQUES

L opération étudiée : le SDEF


Mario Botta (1943) Le Musée d'art moderne de San Francisco

Comment optimiser la performance énergétique de son logement?

Thème Le domaine continental et sa dynamique

Energie solaire

Classement des locaux en fonction de l exposition à l humidité des parois et nomenclature des supports pour revêtements muraux intérieurs

DEMYSTIFIONS L EMAGRAMME, LE «TEMP» ET L ECHAUFFEMENT DE L ATMOSPHERE, première partie.

LE CHAUFFAGE. Peu d entretien. Entretien. fréquent. Peu d entretien. Pas d entretien. Pas d entretien. Entretien. fréquent. Peu d entretien.

Permafrost in France Report n 1

Éclairage naturel L5C 2009/2010. Aurore BONNET

Fiche technique n 1 : le logement construction des boxes.

Pourquoi isoler? Réduire l'usage d'énergie Economiser les frais de chauffage Protéger l'environnement Augmenter la valeur des bâtiments

Fiche d application Aération. Ventilation d hygiène des pièces de service BÂTIMENTS D HABITATION NEUFS. Réglementations Thermique Acoustique Aération

INSCRIPTION, CLASSEMENT ET EMBALLAGE. Communication de l expert de l Afrique du Sud

Prise en compte des nœuds constructifs dans la PEB Formation développée dans le cadre de PATHB2010

MISE EN DÉCHARGE. Une entreprise de Bayer et LANXESS

Installations classées pour la protection de l'environnement Campagne de mesure de bruit SOMMAIRE I. OBJET DE L ETUDE... 3

Projet de parc éolien en mer au large de Courseulles-sur-Mer

Monitoring et suivi du comportement des chaussées

P. VALLON - Retraitement en place à froid - Juillet 2009

Données générales à propos de l Estonie

METEOROLOGIE. Aéroclub Besançon La Vèze. Cours MTO - Ivan TORREADRADO 1. F-SO au FL65 over LFQM

Fiche Technique d Évaluation sismique : Construction basse en Maçonnerie Non-armée, Chaînée, ou de Remplissage en Haïti

L ombre commun dans le canton de Vaud

GESTION ET VALORISATION DES CENDRES DE CHAUFFERIES BOIS

Etanchéité à l air dans la construction bois. Marc DELORME Inter Forêt-Bois 42

Fiche technique ESCALADE

LA MESURE DE LA PRESSION

Liste et caractéristiques des équipements et matériaux éligibles au CITE

ICELAND ROVERS INCENTIVES À L ÉCOUTE DE VOS ENVIES

Déroulement de la certification PEB de votre bâtiment

SEMINAIRES. Déjeuner au restaurant de l hôtel pour apprécier les différentes saveurs de nos produits régionaux

Eau chaude - électricité

Protection thermique d été. Facteurs d influence et méthodologie de planification.

1. Titre du contrat. (si les travaux de montage se font en plusieurs tranches, indiquer quelle est la tranche ou les tranches à assurer)

L énergie dans notre quotidien

Transcription:

Fiche 3.1.1 Page 1 sur 5 3.1.1 Le domaine périglaciaire et le pergélisol Le domaine périglaciaire désigne les zones soumises à des conditions climatiques froides, non glaciaires, où l action du gel et des alternances de gel et de dégel joue un rôle déterminant. On distingue : - Le sol affecté par le gel intermittent (journalier et/ou saisonnier) : tranche supérieure du sol gelant pendant l hiver, et dégelant lors du printemps et de l été suivant. La profondeur varie selon l intensité et la durée du gel, de quelques centimètres à 3 ou 4 mètres. Synonymes : couche active, gélisol, mollisol. - Le pergélisol (gel permanent) : horizon de subsurface d épaisseur variable (mètres à centaines de mètres), gelé en permanence ou qui ne dégèle pas pendant au moins une année entière. Le sommet de la tranche gelée (appelé toit du pergélisol) est généralement surmonté d un horizon affecté par un dégel estival limité la couche active de quelques centimètres à quelques mètres, épaisseur variant selon les années. Des zones non gelées (taliks) sont possibles à l intérieur du corps du pergélisol. Le flux géothermique (d environ 1-3 C par 100 m) limite le gel à la base du pergélisol (fig. 1). Le pergélisol, un phénomène thermique Le pergélisol (ou permafrost en anglais) est un phénomène purement thermique, qui affecte tous les types de roches ou de sédiments. Le mot «glace» n apparaît volontairement pas dans la définition : il n y a en effet pas forcément de la glace dans le pergélisol! Où trouve-t-on du pergélisol? Le pergélisol se retrouve actuellement à haute latitude (pergélisol circum-polaire, fig. 2) et à haute altitude (pergélisol de montagne). Il recouvre environ 25% de la surface terrestre émergée (80% de l Alaska, 50% du Canada, 47.5% de l Euro-Sibérie). Phénomène essentiellement caché sous la surface du sol, l étude du pergélisol requiert l utilisation de différentes méthodes (cf. fiche 1.1.2). Dans les Alpes suisses, le pergélisol se retrouve en moyenne au-dessus de 2500 m environ et concerne potentiellement 5 à 6% du territoire, une surface deux fois plus grande que celle couverte par les glaciers (fig. 3 & 4). La zone de dégel (couche active) est de l ordre de 2 à 5 mètres, mais varie annuellement selon la température de l air ou l épaisseur du manteau neigeux. L épaisseur du pergélisol est en moyenne de 20 à 60 mètres. Cependant, dans le massif du Mont-Rose (VS), le sol peut être gelé jusqu à 500 m de profondeur. En raison de différences de fonctionnement thermique (liées à l importance des facteurs de contrôle, cf. fiche 3.1.3) et d évolution, il convient de distinguer trois types de zones pouvant contenir du pergélisol (fig. 5) : - Zones rocheuses (parois rocheuses, parois glaciaires) (fiches section 3.3). - Zones de matériaux meubles (glacier rocheux, éboulis, moraines, marges proglaciaires) (fiches section 3.4). - Zones situées en dessous de la ceinture alpine du pergélisol discontinu (éboulis ventilés, glacières) (fiches section 3.5).

Fiche 3.1.1 Page 2 sur 5 Fig. 1 Profil vertical d un pergélisol. MAGST signifie Mean annual ground surface temperature (moyenne annuelle des températures de la surface du sol) (adapté de Noetzli & Gruber, 2005). Fig. 2 Modèle de distribution mondiale du pergélisol (source : International Permafrost Association, 2007).

Fiche 3.1.1 Page 3 sur 5 Fig. 3 Distribution probable du pergélisol en Suisse, utilisant des modèles régionaux (basés principalement sur des inventaires de glaciers rocheux et des indices géomorphologiques) (source : Atlas hydrologique de la Suisse, 1999).

Fiche 3.1.1 Page 4 sur 5 PERGELISOL Fig. 4 Modèle de distribution probable du pergélisol en Suisse, basé sur les paramètres topoclimatiques (source : BAFU/OFEV, 2006).

Fiche 3.1.1 Page 5 sur 5 Fig. 5 Evolution de la température moyenne annuelle de la surface du sol pour les trois différentes zones pouvant contenir du pergélisol (cf. fiches 3.3 à 3.5) (la température du 1 er janvier 2003 correspond à la moyenne entre le 1 er janvier 2002 et le 1 er janvier 2003). Ce graphique illustre bien la complexité de l occurrence et de l évolution du pergélisol alpin. Notez qu en 2003, la température moyenne annuelle de la surface du sol fut presque aussi froide dans les épicéas nains de l éboulis du Creux-du-Van à 1'200 m. que dans la paroi rocheuse de la face nord de l Eiger à 2860 m.!