PROGRAMME FRIEND - AGIRE AIDE À LA GESTION Alain DEZETTER Centre ORSTOM 01 BP 182 Ouagadougou 01 BURKINA FASO Les travaux de la conférence internationale sur l'eau et l'environnement (ICWE, Dublin, Janvier 1992) ont permis d'attirer l'attention sur la question sensible des réserves en eau douce et de la manière d'en optimiser l'utilisation à l'avenir. On peut rappeler ici certains extraits de la Déclaration de Dublin sur l'eau dans la Perspective d'un Développement Durable : "La rareté de l'eau douce et son emploi inconsidéré compromettent de plus en plus gravement la possibilité d'un développement écologiquement rationnel et durable. Santé et bien-être de l'homme, sécurité alimentaire et industrialisation sont autant de domaines menacés, de même que les écosystèmes dont ils dépendent, sauf à opter dans la présente décennie et au-delà, pour une gestion plus efficace de l'eau et des sols". "Les problèmes n'ont pas un caractère théorique et ce n'est pas dans un avenir lointain qu'ils affecteront notre planète: ils sont bien réels et nous en ressentons les effets aujourd'hui. Il y va de la survie de millions d'êtres humains et une action efficace s'impose dans l'immédiat". "Les participants à la Conférence demandent que l'on aborde l'évaluation, la mise en valeur et la gestion des ressources en eau dans une perspective radicalement nouvelle, ce qui ne sera possible que par l'engagement de tous les responsables politiques, des plus hautes instances de l'etat aux plus petites collectivités. Cet engagement doit s'appuyer sur des investissements importants, sur des campagnes de sensibilisation, sur des changements législatifs et institutionnels et sur un renforcement des capacités. Pour ce faire, il faut d'abord reconnaître pleinement l'interdépendance de tous les peuples et leur place dans le monde naturel". D'autres conférences consacrées à l'environnement ont également abordé ces problèmes liés à l'exploitation et la gestion des ressources en eau, mettant en avant la nécessité de traiter avec efficacité les quatre grandes questions suivantes: conséquences écologiques et sociales. Ce sont les effets des grands projets d'aménagement hydraulique sur le milieu naturel et sur le bienêtre social des populations. liaisons terre-eau. Cette question implique que la gestion efficace des bassins qui a pour objet la lutte contre l'érosion et la sédimentation ainsi que la conservation de l'eau soit intégrée dans les projets d'exploitation. répartition de l'eau entre des intérêts vitaux. Cette question qui a trait à tous les conflits d'usages de l'eau, voit son importance croître au fur et à mesure que s'intensifient les pressions de la population et de l'activité économique. A. DEZETTER - PROGRAMME FRIEND - AGIRE 1- AIDE À LA GESTION
mise en oeuvre efficace. Les procédures de suivi pour la gestion des impacts sociaux et environnementaux des projets sont souvent demeurées inappliquées. Ce qui accroît considérablement le risque de voir se creuser le fossé entre objectifs prévus et résultats obtenus. Plus récemment (mars 1995), la F.A.O. dans un document intitulé "la mise en valeur des eaux au profit de la sécurité alimentaire" soutient que : "L'une des conditions indispensables pour combler le déficit alimentaire africain, tant sur le plan de la production que sur celui de la consommation, est d'axer les efforts sur la mise en valeur des eaux - ressource dont la rareté est devenu un lourd handicap : longtemps considérée comme une ressource bon marché et abondante, l eau doit être reconnue comme un bien précieux et rare ; les précipitations servant aux cultures vivrières et fourragères doivent être recueillies à proximité de l endroit où elles tombent ; enfin, toutes les ressources hydriques doivent être aménagées de façon efficace." Afin de s'attaquer à ces différents problèmes, l'unesco, dans le cadre du Programme Hydrologique International (PHI), propose de centrer l'attention sur les domaines suivants: Rôles des échelles dans les processus hydrologiques. Vulnérabilité de l'environnement. Gestion intégrée des ressources en eau. Enseignement, formation et transfert de technologie. Nous ne nous intéresserons, ici, qu'à la gestion intégrée des ressources eau, renvoyant aux publications de l'unesco pour ce qui est des autres points. La gestion des ressources en eau doit s'entendre comme un ensemble de mesures destinées à exploiter et maîtriser les apports naturels dans une optique qui soit utile à la société. La démarche du gestionnaire doit alors s'appuyer sur un grand nombre de relations et d'interactions physiques, économiques et sociales: les liens physiques quantitatifs et qualitatifs entre les eaux de surface et les eaux souterraines, i.e. une planification et une exploitation conjointes de ces masses d'eau. les interactions complexes entre les écosystèmes terrestres et les écosystèmes aquatiques. les activités humaines en cours et projetées influant sur les ressources en eau. l'environnement politique, social et économique dans lequel doit s'inscrire la gestion des ressources en eau. Cette démarche, qui doit permettre la mise en évidence des conséquences environnementales et socio-économiques des choix de gestion intégrée, sous-tend le programme AGIRE (Aide à la Gestion Intégrée des Ressources en Eau) mené au sein de l'ur22. Ce programme abordera les questions liées à la gestion intégrée des ressources en eau dans les zones semi-arides (Burkina Faso) et tropicales humides (Côte d'ivoire) d'afrique de l'ouest. A. DEZETTER - PROGRAMME FRIEND - AGIRE 2- AIDE À LA GESTION
Dans les zones semi-arides, le développement est freiné par le manque de ressources en eau. L'étape préalable de l'évaluation précise des ressources disponibles y prend donc toute son acuité. Cette rareté de l'eau impose, en outre, une gestion prudente et précise qui tienne compte de l'ensemble des éléments naturels et anthropiques. Il faut donc faire porter l'effort de réflexion sur l'élaboration de méthodologies et de stratégies de gestion intégrée et de conservation des ressources en eau. La conception d'outils de simulation permettra d'éprouver les choix et les orientations issus de la réflexion. Dans les zones tropicales humides, les problèmes se posent de manière différente. On estime qu'elles représenteront, en l'an 2000, près du tiers de la population mondiale, et que cette proportion continuera d'augmenter au XXI ème siècle. Les actions futures dans le domaine de la gestion des ressources en eau doivent donc nécessairement s'inscrire dans la perspective d'un développement durable, sous peine de graves désordres socioéconomiques d'une part, hydroécologiques d'autres part. Il convient donc, là aussi, de développer une réflexion méthodologique permettant d'évaluer les conséquences à court et long terme des orientations retenues en matière de gestion intégrée des ressources en eau. La conception d'outils de simulation permettra, là encore, de fournir les résultats étayant les conclusions. Pour travailler sur les terrains d'expérimentation retenus dans le cadre du programme AGIRE, la base de ces outils de simulation existe d'ores et déjà. Il s'agit d'hydram, logiciel d'aide à la planification et à la gestion intégrée des ressources en eau. On profitera de ces différentes opérations de recherche pour tenter de le compléter, en ajoutant une composante qualitative à sa seule dimension quantitative actuelle. De même, et pour permettre une réflexion la plus complète possible, conviendra-t-il de prendre en compte les dimensions sociales et économiques. Cela nécessitera un important travail d'enquête et de collecte de données ainsi que l'ouverture du programme vers des scientifiques spécialistes de ces questions. AGIRE au Burkina Faso Le terrain d'expérimentation choisi pour le programme AGIRE au Burkina Faso est la région Sud-Ouest, dont la ville principale est BOBO-DIOULASSO, la deuxième ville du pays. En effet, la Direction Régionale de l'eau des Hauts-Bassins (DREHB), mène actuellement un programme de valorisation des Ressources en Eau du Sud-Ouest (programme R.E.S.O.), financé par le 7ème F.E.D., qui comporte certains objectifs en commun avec le programme AGIRE. Le programme R.E.S.O. est organisé en quatre sous-programmes, parmi lesquels le sous-programme intitulé "Schéma Directeur et planification". Dans le rapport "Approches Méthodologiques et Organisationnelles des Sous-Programmes", la Direction de l'eau définit ce sous-programme de la façon suivante : "Les caractéristiques essentielles et les objectifs d'un tel schéma directeur pour l'aménagement et la gestion des ressources en eau font qu'il définit tout à la fois : le cadre d'une stratégie globale à long terme de l'utilisation et de la conservation des ressources en eau; des principes et des procédés de gestion. Le schéma est l'élément essentiel, la charte, de la politique de l'eau sur les plans technique, administratif, juridique, économique et financier. A. DEZETTER - PROGRAMME FRIEND - AGIRE 3- AIDE À LA GESTION
Il doit aussi se présenter comme un outil d'aide à la décision et au choix d'aménagements pour les maîtrises d'ouvrages publics et privés." L'ORSTOM participera, par l'entremise du programme AGIRE, à l'élaboration d'une partie du schéma directeur d'aménagement et de gestion des ressources en eau du sudouest. On s'attachera à l'élaboration de méthodologies et de stratégies de gestion intégrée et de conservation des ressources en eau. L'utilisation du logiciel de simulation HYDRAM permettra d'éprouver les choix et les stratégies définies. La région concernée par le programme R.E.S.O. comprend plusieurs bassins versants. Une approche d'analyse globale par bassin versant sera développée. Cette approche est la plus logique au sens hydrologique et se rapproche de la volonté de R.E.S.O. de "situer les actions dans une perspective de concertation, responsabilisation des usagers et d'un développement durable". Dans un premier temps, le bassin versant de la comoé sera étudié par l'analyse du système d'eau desservant la ville de Banfora, les périmètres irrigués et les installations (usine, habitations, etc..) de la SO.SU.CO. (Société Sucrière de la Comoé). On mettra en oeuvre le modèle de simulation HYDRAM et les différents scénarios de développement et de gestion seront testés, après leur mise au point en collaboration étroite avec la Direction de l'eau. Cette première phase devra permettre de démarrer les réflexions méthodologiques qui pourront être ensuite appliquées à l'ensemble de la zone concernée. L année 1996 sera consacrée à l étude du système d eau de la Comoé et à la mise au point des méthodologies et des stratégies de gestion adaptées à la zone d étude. Par les contacts avec les différents experts intervenant dans le projet RESO, on s attachera à identifier les éléments autres que quantitatifs à prendre en compte dans l analyse du système : qualité des eaux, données hydrologiques ou agronomiques pertinentes pour les analyses socio-économiques, pratiques culturales, etc.. Le système d eau de la Comoé L intérêt de l étude de ce système réside dans le fait qu il regroupe la plupart des usages de l eau existant dans la région. De plus, les aménagements existants étant gérés par une seule société, la SO. SU. CO., on peut penser que les stratégies et méthodologies mises au point seront plus facilement applicable dans la réalité. Le système actuel est représenté sur le schéma ci-après. A. DEZETTER - PROGRAMME FRIEND - AGIRE 4- AIDE À LA GESTION
Les ressources Au niveau des ressources, le système comporte trois retenues de capacités respectives 38.5, 6.1 et 6 millions de m 3. Le barrage de plus grande capacité, «barrage comoé», est le plus récent, il a été mis en service en 1991, les deux autres datent respectivement de 1982 et 1976. Il existe également dans la zone, deux lacs utilisés comme ressources d appoint mais de moindre importance. Les besoins Au niveau des besoins, la plus grande part revient à l irrigation de la canne à sucre avec 3800 ha irrigués. On a également le périmètre rizicole de Karfiguéla d une superficie de 320 ha, l alimentation en eau de la ville de Banfora, des cités ouvrières et des usines SO.SU.CO. et SOPAL. Des périmètres maraîchers, plus ou moins officiels voient également le jour entre le barrage de Toussiana et la prise d eau de la SO.SU.CO. pour l irrigation de la canne à sucre. On observe donc, dans cette zone, une forte pression sur les ressources en eau avec des concurrences plus ou moins sévères des différentes utilisations. A. DEZETTER - PROGRAMME FRIEND - AGIRE 5- AIDE À LA GESTION
ANNEXES Quelques photos de différents éléments du système. Photo 1 : Barrage de Toussiana - Echelles Photo 2 : Barrage de Toussiana A. DEZETTER - PROGRAMME FRIEND - AGIRE 6- AIDE À LA GESTION
Photo 3 : Barrage de Toussiana - Déversoir latéral Photo 4 : Prise d eau «Karfiguéla» A. DEZETTER - PROGRAMME FRIEND - AGIRE 7- AIDE À LA GESTION
Photo 5 : Canal d amenée «Karfiguéla» A. DEZETTER - PROGRAMME FRIEND - AGIRE 8- AIDE À LA GESTION