CCDM19 : P. Duclos, S. Halperin CCDM18 : P. Duclos 1. Identification Coqueluche Paracoqueluche CIM-9 033.1 ; CIM-10 A37.1 (Croup) Infection bactérienne aigüe du système respiratoire due à Bordetella pertussis. L état catarrhal initial commence de façon insidieuse par une toux irritante devenant progressivement paroxystique, habituellement en une à 2 semaines et dure 1 à 2 mois ou plus. Les paroxysmes sont caractérisés par des quintes de toux répétées et violentes ; chaque quinte de secousses expiratoires est effectuée en apnée et peut être suivie d'une inspiration sifflante caractéristique appelée "chant du coq". Il y a fréquemment expulsion d un mucus tenace clair, souvent suivi d un vomissement en fin de quinte de toux. Des nourrissons de moins de 6 mois, des enfants partiellement vaccinés, des adolescents et des adultes ne présentent souvent pas le «chant du coq» caractéristique en fin de quinte de toux. Le nombre de décès dans la population vaccinée est faible. La plupart des décès se produisent chez les nourrissons de moins de 6 mois, souvent chez ceux trop jeunes pour avoir terminé leur calendrier vaccinal. Ces dernières années, tous les décès dus à la coqueluche dans les pays industrialisés sont des nourrissons de moins de 6 mois. Dans les populations non vaccinées, particulièrement dans un contexte de malnutrition et d infections entériques et respiratoires multiples sous-jacentes, la coqueluche fait partie des maladies les plus mortelles pour les nourrissons et jeunes enfants. Les complications incluent la pneumonie, des attaques, l encéphalopathie, la perte de poids, des hernies et la mort. La pneumonie est la cause la plus courante de décès ; l encéphalopathie mortelle, probablement hypoxique et une inanition due aux vomissements répétés se produit occasionnellement. Le taux de létalité chez les enfants non protégés est inférieur à 1 pour mille dans les pays industrialisés ; dans les pays en voie de développement il est estimé à 3,7% des enfants de moins de 1 an et 1% chez ceux entre 1 à 4 ans. Dans plusieurs pays industrialisés avec une forte couverture vaccinale des nourrissons, pendant de nombreuses années une proportion croissante des cas a été reportée chez les adolescents et adultes dont les symptômes varient d une maladie respiratoire légère bénigne atypique jusqu au croup complet. Beaucoup de ces cas sont des personnes vaccinées précédemment, ce qui suggère une baisse de l immunité acquise par vaccination au cours du temps. 19 ème Edition - 2008 La paracoqueluche est une maladie similaire mais plus rare et plus atténuée due à Bordetella parapertussis. Le diagnostic se base sur la mise en évidence du microorganisme causal à partir de spécimens nasopharyngés, obtenus pendant les phases catarrhale et paroxystique initiale, cultivés sur un milieu de culture Bordet-Gengou ou Regan-Lowe additionnés l un comme l autre de 15% de sang défibriné de mouton ou de cheval. L OMS considère la culture comme la confirmation en 1/6
laboratoire de référence. C'est le diagnostic le plus spécifique, mais il n est pas très sensible (60%). La Réaction de Polymérase en Chaine (PRC) est plus sensible, et peut être faite sur les mêmes échantillons biologiques que les cultures. Cependant, la PCR nécessite plus de savoir faire technique et un matériel plus coûteux. Le marquage fluorescent des anticorps des sécrétions nasopharyngées n est pas recommandé à cause des faux-positifs et faux-négatifs fréquents. Le diagnostic indirect par évaluation de la réponse immunitaire à l infection au lieu de la détection directe du microorganisme (sérologie) se fait par détection des anticorps IgG spécifiques dirigés contre la toxine pertussique dans le sérum du patient infecté, collecté au début de la toux (sérum phase aigüe) et dans le sérum collecté un mois après (sérum convalescent). Des critères pour le diagnostic de la coqueluche avec un seul spécimen de sérum ont été proposés. La présence d anticorps en excès par rapport à des seuils basés sur une population, dans le sérum d un patient non vacciné indique une infection. La sérologie ne peut pas être utilisée pour le diagnostic dans l année qui suit une vaccination, car elle ne différencie pas entre les anticorps dus au vaccin et ceux dus à l infection naturelle. La distinction entre B. parapertussis et B. pertussis se base sur la culture et sur des différences génétiques, biochimiques et immunologiques. 1. Agents infectieux B. pertussis, est le bacille de la coqueluche au sens strict ; B. parapertussis provoque la paracoqueluche. Les Bordetella sont des bactéries aérobies à Gram-négatif ; B. pertussis et B. parapertussis sont des espèces proches mais la seconde n exprime pas le gène codant pour la toxine coquelucheuse. 2. Prévalence Une maladie endémique courante chez les enfants (particulièrement les plus jeunes) partout, sans distinction d ethnicité, de climat ou de zone géographique. Des épidémies se produisent typiquement tous les 3 à 4 ans. Un déclin de l incidence et des taux de décès s est produit ces 40 dernières années, principalement dans les communautés avec des programmes de vaccination et où une bonne nutrition et des soins de santé sont disponibles. En 2003, malgré une couverture vaccinale mondiale globale estimée à 75% avec 3 doses de vaccins anticoquelucheux, le nombre de cas de a été estimé à 17,6 millions avec 279 000 décès estimés. Une proportion importante de ces décès se produit en Afrique où la couverture vaccinale est la plus faible. Au total pour 2006, il est estimé que 26,3 millions d enfants n ont pas reçu une vaccination complète avec trois doses de DTP. Les incidences ont augmenté dans les pays où les taux de vaccination contre la coqueluche avaient diminué dans le passé (ex. : Japon au début des années 1980, Suède et Royaume Uni), puis ils ont baissé à nouveau quand les programmes de vaccination ont été réinstaurés. Dans les pays avec une couverture vaccinale importante, l'incidence chez les moins de 15 ans est inférieure à 1 pour 100 000. 4. Réservoir On pense que les humains sont le seul hôte de la coqueluche. B. parapertussis peut aussi être isolé chez les ovins. 5. Mode de transmission Par contact direct avec les rejets de membranes muqueuses respiratoires de personnes infectées par la voie aérienne, probablement par des gouttelettes. Chez les populations vaccinées, la bactérie est fréquemment ramenée à la maison par un frère ou une sœur plus âgé(e) et parfois par 2/6
un des parents. La propagation indirecte par l air ou des objets contaminés se produit rarement voire jamais. 6. Période d incubation Moyenne de 9-10 jours (intervalle de 6 à 20 jours). 7. Période de contagion Hautement contagieux pendant la phase catarrhale précoce et au début de la phase de toux paroxystique (premières 2 semaines). Ensuite, la contagiosité décroît graduellement et devient négligeable en environ 3 semaines, malgré la persistance d une toux spasmodique avec croup. Les patients traités à l érythromycine, la clarithromycine ou l azithromycine ne sont plus contagieux après 5 jours. 8. Prédisposition La prédisposition des personnes non-vaccinées est universelle. L incidence la plus élevée de coqueluche est chez les nourrissons, et les enfants d âge scolaire sont souvent la source d infection pour les frères et sœurs plus jeunes à la maison, mais l infection peut aussi se produire chez les adolescents et les adultes. L incidence, la morbidité et la mortalité sont plus élevées chez les femmes que chez les hommes. Des taux d attaques secondaires jusqu à 90% ont été observés chez des contacts familiaux non vaccinés. Bien que les anticorps traversent le placenta, l immunité transplacentaire des nourrissons n a pas été démontrée. L'incidence est la plus élevée chez les enfants de moins de 5 ans, sauf là où des programmes de vaccination des nourrissons ont été efficaces et un glissement vers les adolescents s est produit. Des cas silencieux et de faible intensité se produisent chez toutes les classes d'âge. Une attaque fournit habituellement une immunité prolongée, bien que des attaques suivantes (certaines pouvant être attribuées à B. parapertussis) puissent se produire. Des cas chez des adolescents et adultes vaccinés dans des pays avec des programmes efficaces de vaccination mis en place depuis de nombreuses années se produisent à cause de la baisse de l immunité acquise par le vaccin au cours du temps. Ils sont alors une source d infection pour les jeunes enfants non vaccinés. 9. Méthodes de contrôle A. Mesures préventives 1) Éduquer le public, en particulier les parents de nourrissons sur les dangers de la coqueluche et sur les avantages de démarrer la vaccination à temps (à un âge entre 6 semaines à 3 mois, suivant le pays) et de respecter le calendrier vaccinal. Cette formation du public continue d'être importante à cause de la publicité négative donnée aux réactions secondaires à la vaccination. 2) La vaccination est la façon la plus rationnelle de contrôler la coqueluche : Les vaccins cellulaires contre la coqueluche préviennent de façon efficace contre la coqueluche depuis plus de 40 ans. La première vaccination active contre l infection par B. pertussis se fait par 3 doses de vaccin, consistant en une suspension de germes désactivés entiers («whole» d où wc) ou en des préparations acellulaires (ac) contenant entre 1 et 5 éléments différents de B. pertusis. Ces vaccins sont habituellement donnés en combinaison avec les anatoxines diphtériques et tétaniques adsorbés sur des sels d aluminium (Anatoxines diphtériques et tétaniques et vaccin coqueluche adsorbé, DTwC, DTaC). En termes de réactions secondaires, les vaccins ac et wc semblent avoir le même niveau de sûreté ; des réactions systémiques locales et transitoires sont plus rares avec les vaccins ac. Les meilleurs vaccins ac et wc ont des efficacités similaires (plus de 80%), mais pour chaque type de vaccin, l efficacité varie dans chaque groupe. La protection est la meilleure 3/6
contre la maladie grave et commence à décliner après environ 5 ans. Les vaccins acellulaires anticoquelucheux ne protègent pas contre la paracoqueluche due à B. parapertussis. Les vaccins acellulaires ac sont moins communément associés à des réactions locales et systémiques comme la fièvre, mais les vaccins entiers wc sont bien meilleur marché et sont donc les vaccins de choix dans la plupart des pays en voie de développement. Le Japon, les USA et de nombreux autres pays industrialisés ont complètement remplacé les vaccins wc par des ac. Le calendrier vaccinal varie : La France et le Royaume Uni vaccinent à 2, 3, 4 mois ; la Suède à 3, 5, 12 mois et l Amérique du Nord à 2, 4, 6 mois. De nombreux pays en voie de développement vaccinent à 6, 10 et 14 semaines, en accord avec le programme étendu de vaccination proposé. Dans tous les pays, et en particulier là où la coqueluche est encore endémique et pose un problème de santé publique important, la priorité devrait être d atteindre au moins 90% de couverture vaccinale avec 3 doses de DTP chez les nourrissons dans toutes les régions. Dans les pays où les programmes de vaccination ont réduit considérablement l incidence de la coqueluche, il est recommandé de faire un rappel environ un à 6 ans après la série vaccinale primaire. La date optimale du rappel pour le DTC ainsi que le besoin et le calendrier éventuel d autres doses de rappel ultérieures dépend de la situation épidémiologique et doit être évaluée par des programmes nationaux. Certains pays recommandent un rappel entre 15 et 18 mois lors de l entrée à l école. En 2007, 67 des 193 pays membres de l OMS avaient des calendriers recommandant de faire un rappel en plus de la série initiale et 57 pays recommandaient 2 rappels ou plus. Les vaccins à germes entiers (wc) ne sont pas recommandés après 7 ans, vu que les réactions locales peuvent être accrues chez les enfants plus âgés et les adultes. Des formulations de vaccin anticoquelucheux acellulaires pour utilisation chez les adolescents et adultes ont été approuvées et sont disponibles dans plusieurs pays. En 2006, 10 pays rapportaient l ajout de doses de rappel pour adolescents ou adultes dans le calendrier de vaccination habituel. Le DTaC/DTwC peut être donné simultanément avec le vaccin polio oral (VPO), le vaccin polio inactivé (VPI ou IPV en anglais), le vaccin contre Hemophilus influenzae type b (Hib), le vaccin contre l hépatite B (HepB), les vaccins conjugués pneumocoques et ménigocoques. Il peut aussi être donné avec le vaccin contre la rougeole, les oreillons et la rubéole (ROR Vax) s il est injecté à un site différent. Les vaccins combinés avec Hib, VPI et HepB sont disponibles et utilisés largement en Europe et en Amérique du Nord. L administration d un vaccin entier entraîne souvent (1 cas sur 2 à 10 injections) des réactions indésirables minimes telles qu érythème ou œdème localisés, de la fièvre et de l agitation. Des pleurs prolongés et les convulsions dues à de la fièvre sont plus rares (<1 sur 100) ; des épisodes d hypotonicité-hyporéactivité sont rarissimes (<1 sur 2000). Aussi inquiétants que puissent être, pour les parents comme pour les médecins, ces convulsions fébriles et ces épisodes d hypotonicité-hyporéactivité, suivant une injection de DTwC, il n y a aucune preuve scientifique que ces réactions entraînent des séquelles permanentes. Des examens détaillés des résultats de toutes les études disponibles ne mettent en évidence aucun lien de cause à effet entre la vaccination par le DTwC (vaccin entier) et des troubles chroniques du système nerveux chez l enfant. La seule contrindication réelle à la vaccination avec le wc ou ac est une réaction anaphylactique à une dose précédente ou à l un quelconque des constituants du vaccin. Les nourrissons chez lesquels il y a suspicion d une maladie neurologique progressive évoluant, la vaccination peut être différée de quelques mois pour permettre le diagnostic, dans le but d éviter la confusion sur les causes possibles des symptômes. 4/6
3) Lors d une épidémie, envisager la protection des personnels de santé qui ont été exposés à des cas de coqueluche, par un traitement de 7 jours à l érythromicine. La clarithromycine et l azithromycine sont des alternatives coûteuses mais mieux tolérées. La vaccination avec un vaccin acellulaire peut être envisagée pour les personnels de santé là où des inquiétudes existent sur une transmission prolongée. B. Contrôle du patient, des contacts et de l'environnement immédiat 1) Notification de cas à l'autorité sanitaire locale : Notification obligatoire d épidémies de cas suspectés ou confirmés dans la plupart des pays, Classe 2 (voir Déclaration) ; une notification précoce permet un meilleur contrôle de l épidémie. La définition clinique recommandée par l OMS est «un cas de coqueluche diagnostiqué par un médecin ou une personne présentant une toux paroxystique de 21 jours et au moins l un des symptômes suivants : Paroxysmes avec quintes de toux, «chant du coq» à l inspiration, vomissements immédiats après la toux sans autre cause apparente. 2) Isolement : Isolement respiratoire pour les cas connus. Les cas suspectés doivent être éloignés de la présence des jeunes enfants et nourrisson, particulièrement les nourrissons non vaccinés, jusqu à ce que le patient ait reçu au moins 5 jours d'antibiotiques. Les cas suspectés ne recevant pas d antibiotiques doivent être isolés pendant 3 semaines à compter du début de la toux paroxystique ou la fin de la toux, suivant celui qui se produit en premier. 3) Désinfection concomitante : Les mesures de désinfection ont peu d effet. 4) Quarantaine : Les contacts familiaux insuffisamment vaccinés de moins de 7 ans peuvent être tenus à l écart des écoles, garderies et lieux publics pendant 21 jours après la dernière exposition ou jusqu à ce que les cas et contacts aient reçu 5 jours d antibiothérapie appropriée. 5) Protection des contacts : Tous les contacts doivent vérifier leur couverture vaccinale et la mettre à jour si besoin est. Il n a pas été démontré d efficacité de l immunisation passive et aucun produit de ce type n est disponible commercialement. Commencer une immunisation active en vaccinant suite à une exposition récente n est pas efficace contre l infection, mais la vaccination peut être faite pour protéger l enfant contre des expositions futures au cas où il n aurait pas été infecté. Les contacts proches de moins de 7 ans qui n ont pas reçu 4 doses de DTC ou n ont pas reçu de dose de DTC dans les 3 dernières années doivent recevoir une dose aussi rapidement que possible après exposition. Pour les foyers avec un enfant de moins de 1 an, 7 jours d érythromycine ou de clarithromycine, ou 5 jours d azithromycine, sont recommandés pour les membres du foyer et les contacts proches, sans distinction d'âge ni de couverture vaccinale. L antibiothérapie prophylactique pendant la période d'incubation précoce pourrait prévenir la maladie, mais la difficulté d un diagnostic précoce, les coûts associés et les inquiétudes liées à la prévalence de résistances aux antibiotiques limitent le traitement prophylactique aux conditions individuelles sélectionnées : Enfants de moins d un an et femmes enceintes dans les 3 dernières semaines de la grossesse (à cause du risque de transmission au nouveau-né) Arrêter l infection chez les membres d une même famille en particulier si la famille comporte des enfants de moins d'un an et des femmes enceintes dans les 3 dernières semaines de la grossesse. 5/6
6) Enquête sur les contacts et la source de l'infection : La recherche de cas précoces, non diagnostiqués ou atypiques est indiquée si un nourrisson ou jeune enfant non vacciné est ou risque d être exposé. 7) Traitement spécifique : L érythromycine, la clarithromycine et l azithromycine raccourcissent la période de contagiosité mais ne réduisent pas les symptômes, sauf si elles sont données pendant la période d'incubation, la phase catarrhale ou tôt dans la phase paroxystique. C. Mesures épidémiologiques Une recherche des cas notifiés et non notifiés peut être indiquée pour protéger les enfants d âge préscolaire de l exposition et pour garantir des mesures de prévention efficaces pour les enfants exposés de moins de 7 ans. Une vaccination accélérée, avec la première dose entre l âge de 4 et 6 semaines et les deux doses suivantes à intervalles de 4 semaines peut être indiquée ; il est encore plus important de vérifier que la vaccination est complétée pour ceux dont la vaccination est partielle et que les vaccins sont donnés à temps en accord avec le calendrier national. D. Conséquences pour la gestion de catastrophes La coqueluche est un problème potentiel si elle est introduite dans des camps de réfugiés contenant des enfants non vaccinés. E. Mesures internationales S assurer que la vaccination primaire des nourrissons et jeunes enfants est terminée avant de voyager dans d autres pays ; vérifier le besoin éventuel d une dose de rappel. 6/6