Les technologies énergétiques fossiles Les combustibles fossiles les plus couramment utilisés dans le monde pour produire de l électricité sont le charbon et le gaz. Le pétrole est toujours utilisé quand les autres combustibles ne sont pas facilement accessibles, par exemple dans les îles ou les sites isolés, où quand il fait partie des ressources locales. Ensemble, le gaz et le charbon représentent actuellement plus de la moitié de l approvisionnement électrique mondial. Technologies au charbon Dans une centrale au charbon conventionnelle, du charbon pulvérisé (en poudre fine) est injecté dans une chambre de combustion où il est brûlé à haute température. Les gaz chauds et la chaleur générés transforment de l eau en vapeur qui passe dans des conduits autour de la chaudière. Cela fait tourner une turbine à vapeur qui génère de l électricité. Plus de 90% de la capacité mondiale de génération au charbon utilise ce système. La capacité des centrales au charbon peut varier de quelques centaines de mégawatts à plusieurs milliers. Un certain nombre de technologies ont été introduites pour améliorer la performance environnementale de la combustion de charbon conventionnelle. Cela comprend la purification du charbon (pour réduire la quantité de cendres) et diverses technologies de «bout de chaîne» ou «à rajouter» (bolt-on) servant à réduire les émissions de particules, de dioxyde de souffre et d oxyde d azote, les principaux polluants issus de la combustion du charbon en dehors du dioxyde de carbone. La désulfuration des effluents gazeux (FGD), par exemple, implique généralement le filtrage des effluents gazeux au travers d un sorbant alcalin, le plus souvent à base de chaux ou de calcaire. Des changements plus fondamentaux ont été apportés dans la façon dont le charbon est brûlé à la fois pour améliorer le rendement et pour réduire davantage les émissions polluantes. Cela comprend : La gazéification intégrée à un cycle combiné (GICC) : le charbon n est pas brûlé directement mais après avoir réagi avec de l oxygène et de la vapeur pour former un «syngaz» composé principalement d hydrogène et de monoxyde de carbone, qui est purifié puis brûlé dans une turbine à gaz pour produire de l électricité ainsi que de la vapeur qui va faire tourner une turbine à vapeur. La GICC améliore le rendement de la combustion du charbon de 38-40 % à 50 %. La combustion supercritique ou ultra-supercritique : ces centrales fonctionnent à des températures plus élevées que pour la combustion conventionnelle, améliorant ainsi le rendement d environ 50 %. La combustion sur lit fluidisé : le charbon est brûlé dans un réacteur constitué d un lit dans lequel est injecté du gaz pour maintenir le combustible dans un état turbulent. 1
Cela améliore la combustion, le transfert de chaleur et la récupération des déchets. En élevant la pression à l intérieur du lit, on peut créer un flux de gaz sous haute pression pour faire tourner une turbine à gaz et générer de l électricité. Les émissions de dioxyde de souffre et d oxyde d azote peuvent être réduites de façon importante. La combustion de charbon pulvérisé sous pression : principalement développée en Allemagne, cette technologie s appuie sur la combustion d un nuage de particules de charbon finement broyé et génère de la vapeur à haute température et haute pression pour produire de l électricité. Les effluents gazeux chauds sont utilisés pour générer de l électricité comme dans un système à cycle combiné. D autres futures technologies potentielles impliquent une utilisation accrue de la gazéification du charbon. La gazéification souterraine du charbon, par exemple, implique la transformation du charbon non exploité se trouvant profondément sous terre en gaz combustible pouvant être utilisé pour le chauffage industriel, la génération d électricité ou la production d hydrogène, de gaz naturel synthétique ou d autres substances chimiques. Ce gaz peut être traité pour en extraire le CO 2 avant de le livrer aux utilisateurs finaux. Des projets pilotes sont en cours en Australie, en Europe, en Chine et au Japon. Technologies au gaz Le gaz naturel peut servir à générer de l électricité soit avec des turbines à gaz, soit avec des turbines à vapeur. Pour une quantité de chaleur équivalente, le gaz produit environ 45 % de dioxyde de carbone de moins lors de sa combustion que le charbon. Les centrales à turbine à gaz utilisent directement la chaleur du gaz pour faire tourner la turbine. Les turbines au gaz naturel peuvent démarrer rapidement, et sont par conséquent souvent utilisées pour fournir un appoint énergétique lors des périodes de consommation de pointe, mais à un coût supérieur par rapport aux centrales à charge de base. Des rendements particulièrement élevés peuvent être obtenus en combinant une turbine à gaz et une turbine à vapeur en cycle combiné. Dans une centrale à turbine à gaz en cycle combiné (TGCC), un générateur à turbine à gaz génère de l électricité, puis les effluents gazeux de la turbine à gaz sont utilisés pour produire de la vapeur et générer davantage d électricité. Le rendement des centrales à TGCC modernes peut être supérieur à 50 %. La plupart des nouvelles centrales au gaz construites depuis les années 1990 sont de ce type. Au moins jusqu à la récente augmentation des cours mondiaux du gaz, les centrales à TGCC ont été l option de génération électrique la moins coûteuse dans de nombreux pays. Les coûts d investissement étaient fortement inférieurs à ceux des centrales au charbon et des centrales nucléaires, et les délais de construction plus courts. Technologies de réduction des émissions de carbone Quand on brûle du charbon ou du gaz, on produit inévitablement du dioxyde de carbone (CO 2 ). Selon le type de centrale, une quantité plus ou moins grande de ce gaz va se disperser dans l atmosphère et contribuer aux changements climatiques. Une centrale 2
au charbon noir rejette environ 720 grammes de dioxyde de carbone par kilowattheure, une centrale au gaz moderne environ 370 g CO 2 /kwh. Pour qu aucun CO 2 ne sorte de la cheminée d une centrale, ce gaz doit être capturé avant d être stocké quelque part. Ces deux opérations (la capture et le stockage) ont leurs limites. Même en employant les technologies de capture proposées, une quantité résiduelle de dioxyde de carbone (entre 60 et 150 g CO 2 /kwh) va continuer d être émise. Stockage du dioxyde de carbone Le CO 2 qui est capturé au point d incinération doit être stocké quelque part. Il est actuellement envisagé de le séquestrer au fond des océans ou à plus de 3 000 pieds sous terre. Comme dans le cas des déchets nucléaires, la question se pose de savoir si cela ne fait pas que déplacer le problème. Les dangers du stockage océanique Le stockage océanique pourrait provoquer l acidification (réduction du ph) accélérée de grandes zones marines à proximité des sites d injection, ce qui nuirait à de nombreux organismes, si ce n est à des écosystèmes entiers. Le CO 2 ainsi supprimé est susceptible de retourner dans l atmosphère en un temps relativement court. Les océans sont à la fois des ressources productives et le patrimoine naturel commun de notre génération et des générations futures et valent la peine d être préservés. Compte tenu des nombreuses autres possibilités envisageables pour régler le problème des émissions de CO 2, le stockage direct au fond des océans, des mers, des lacs et autres réservoirs ouverts est une option à écarter. Les dangers du stockage géologique Les gisements pétroliers et gaziers vides sont criblés de trous qui ont été forés lors des phases de prospection et de production. Pour stocker le CO 2, ces trous doivent être scellés. Un ciment spécial est normalement utilisé, mais le dioxyde de carbone réagit assez facilement avec l eau et attaque le ciment et les métaux, ce qui fait que même des trous de forage scellés présentent peu de garanties de sûreté. Pour de nombreux experts la question n est pas de savoir si des fuites auront lieu, mais quand. Du fait du manque d expérience en matière de stockage du CO 2, la sûreté de cette pratique est souvent comparée à celle du stockage de gaz naturel, une technologie expérimentée et testée depuis des dizaines d années et présentée par l industrie comme comportant peu de risques. Greenpeace ne partage pas ce point de vue. Un certain nombre de fuites graves depuis des installations de stockage de gaz ont déjà eu lieu un peu partout dans le monde, et ont parfois nécessité l évacuation des riverains. Une fuite soudaine de CO 2 peut être fatale. Le dioxyde de carbone en lui-même n est pas toxique et est présent (environ 0,04 %) dans l air que nous respirons. Mais à mesure que sa concentration augmente, il remplace l oxygène qui nous est vital dans l air. Respirer de l air dont 7 à 8 % du volume est composé de CO 2 entraîne la mort par asphyxie en 30 à 60 minutes. Il y a également du danger pour les personnes quand une forte concentration de CO 2 provoque une explosion. Bien que normalement le gaz se disperse assez vite après avoir fui, il peut aussi s accumuler dans des dépressions ou des bâtiments fermés, le 3
dioxyde de carbone étant plus lourd que l air. Il est également dangereux quand il s échappe lentement, sans être remarqué, dans des zones résidentielles, par exemple dans des caves. Les dangers de telles fuites sont connus par le biais du dégazage naturel de CO 2 par les volcans. En 1986, du gaz échappé du cratère du lac Nyos au Cameroun, en Afrique, a tué plus de 1 700 personnes. Au moins dix personnes sont mortes dans la région du Latium en Italie au cours des 20 dernières années à cause de rejets de CO 2. Stockage du carbone et objectifs climatiques Le stockage du carbone peut-il contribuer aux objectifs de lutte contre les changements climatiques? Pour éviter une dangereuse perturbation du climat, il nous faut réduire les émissions mondiales de CO 2 de 50 % d ici 2050. Les centrales qui stockent le CO 2 ne sont encore qu en cours de développement et pourraient ne devenir une réalité que d ici une quinzaine d années au minimum. Cela signifie qu elles ne contribueront en aucune façon à la protection du climat avant 2020. Elles sont par conséquent sans intérêt pour la poursuite des objectifs du Protocole de Kyoto. Le stockage du CO 2 n est pas non plus d une grande utilité pour atteindre l objectif de 80% de réduction d ici 2050 dans les pays de l OCDE. Si jamais l usage de cette technique devient possible en 2020, la plupart des centrales à travers le monde auront déjà été renouvelées. La seule chose qui pourrait encore être faite à ce moment-là serait de rééquiper des centrales existantes pour capturer le CO 2 de leurs effluents gazeux. Comme cela coûte très cher, il faudrait un prix élevé des permis d émission de carbone pour que ce soit rentable. La capture du CO 2 va aussi augmenter le prix de l électricité produite à partir de combustibles fossiles. Bien que le coût du stockage dépende de nombreux facteurs, notamment le type de technologie utilisée pour la capture, le transport et le type d installations de stockage, les membres du Groupe d experts intergouvernemental sur l évolution du climat des Nations unies ont calculé des coûts supplémentaires compris entre 3,5 et 5,0 centimes d euro par kwh d électricité. Etant donné que les coûts de production avec des éoliennes modernes bien exposées au vent les rendent déjà compétitives aujourd hui par rapport aux nouveaux modèles de centrales au charbon, la capture du CO 2 représentera probablement la plus coûteuse de toutes les options, cette technologie doublant les coûts de production par rapport à aujourd hui. Conclusion Des sources d énergie renouvelables sont déjà disponibles, et sont dans bien des cas moins coûteuses et dépourvues des impacts environnementaux négatifs liés à l exploitation, au transport et à l utilisation des combustibles fossiles. Ce sont ces énergies renouvelables, combinées à l efficacité énergétique et aux économies d énergie (et NON la capture et le stockage du carbone), qui doivent croître mondialement pour faire disparaître la cause principale des changements climatiques : l utilisation de combustibles fossiles comme le charbon, le pétrole et le gaz. Greenpeace s oppose à tous les projets de capture et de stockage du carbone (CSC) qui ont pour effet : 4
De saper ou menacer les réglementations mondiales et régionales existantes concernant l immersion des déchets en mer (qu il s agisse de déposer le CO 2 sur le plancher océanique ou de l enfouir au dessous). De prolonger ou accroître le financement du secteur des combustibles fossiles au détriment des énergies renouvelables et de l efficacité énergétique. De faire stagner les énergies renouvelables, l efficacité énergétique et les économies d énergie. De faire passer cette éventuelle technologie future comme la seule vraie solution contre les changements climatiques, ce qui pourrait favoriser un renouveau des combustibles fossiles (en particulier les centrales à la lignite et au charbon noir) et donc une augmentation des émissions à court et moyen terme. 5