Le courant est trop fort! Il ne viendra pas. Il a l habitude et il sera bien payé. Il viendra. Il viendra.

Transcription

1 Le courant est trop fort! Il ne viendra pas. Il a l habitude et il sera bien payé. Il viendra. Il viendra. Nous allons appeler le meunier qui habite en face. C est lui qui fait traverser les voyageurs avec sa barque.

2 Hooo, Meunier! Hooo! Le yas!!! Grand dieu, Nous sommes perdus! C est

3 À l aube du XVIIe siècle, dans les Ardennes, au Nord du Duché de Luxembourg. Un ciel bas, humide et froid. Une rivière sombre et glaciale se fraie un chemin parmi les falaises de roches noires. Des forêts de chênes entrecoupées de maigres pâturages sur les plateaux. Des broussailles qui s accrochent aux ravins abrupts. Un paysage rude, peuplé de paysans sans pitié, sans sourires, durs à la tâche, qui se soumettent, grands et petits, à Dieu et au maître.

4 Ton heure a sonné, bâtard! Arrêtez!

5 Laissez mon frère tranquille! Pauvre Maurin! Quand apprendras-tu à te défendre? Oh Alix, je Mère va s occuper de tes blessures.

6 Tire-toi, bâtard! Tiens Jeanne! Une vraie Petite femme, ta fille! Viens-là, ma petite. Tu n as pas envie de gagner quelques sous, comme ta mère? J-Je ne veux pas! Lâche-la, sale brute! Colin, de grâce, ce n est qu une enfant!

7 Vous vous l aurez voulu. Vous allez voir! Ne reviens plus, Colin! Plus jamais, tu entends?! j ai peur, mes enfants! peur pour nous tous

8 Quelques mois plus tard Maurin était le bâtard du comte, un enfant du péché. Mais Maurin n était pas un petit garçon comme les autres, et le comte le savait. Voilà pourquoi Jean de Wiltz tenait à ce que son fils vînt régulièrement au château, afin de bénéficier d une éducation digne d un descendant de la noblesse. Qu est-ce qui t arrive, Maman? Ce n est rien, ma fille. Maintenant que le printemps est là, ça ira mieux.

9 Qui est-ce? Les rumeurs se répandaient vite dans la petite ville de Wiltz, et Maurin se savait observé, lorsqu il longeait seul les ruelles vers le château. Personne! Juste ce petit bâtard qui se prend pour un prince Dites-moi, mon brave, qui est ce gamin qui entre chez le frère bernard? c est le petit maurin, monseigneur. vous désiriez le faire instruire, rappelezvous BIEN SÛR, OÙ AVAIS- JE LA TÊTE! IL A GRANDI, DEPUIS LE TEMPS!

10 père Bernard?... Ah, te voilà enfin! Allons, au travail! D abord le latin! As-tu tes affaires? tiens-toi droit, voyons! Doucement, petit diable! Nous ne sommes pas en bataille bien. Allons voir comment tu te débrouilles à l escrime aujourd hui

11 Touché! cela t apprendra à te laisser distraire qui... qui est-ce, mon père? Si ce n était pas que du bois, je vous aurais battu depuis longtemps, mon père. On l accuse de sorcellerie. Elle attend son procès. à condition qu elle reste en vie, evidemment. Mais nous sommes là pour autre chose, ne l oublie pas. comment oses-tu me parler sur ce ton, insolent?! En garde!... Va-t-en! Tu reviendras quand tu auras médité sur ton comportement.

12 Quel petit furieux. La maison! C est ta colère qui te perdra un jour mon pauvre maurin. Mère? Alix? Elles sont parties, mon garçon. Colin!! Il est arrivé quelques chose. Je le sens Où sont-elles? Pourquoi es-tu ici? Je suis là pour t avertir, petit bâtard ta soeur, je m en occupe. fais-moi confiance, Elle ne manquera de rien chez le vieux colin! Ah-Ah-Ah! et toi, Tu ferais mieux de déguerpir, si tu ne veux pas finir comme ta sorcière de mère!

13 Il doit avoir une sacrée rancune, le Colin, pour dénoncer la pute. Qu estce qu elle a bien pu lui faire? Tu crois qu elle tiendra le coup? Ce serait dommage si elle lâchait maintenant. Mère, Tiens bon! Le comte ne nous laissera pas tomber. Ça fait longtemps qu on n a pas eu de procès. La dernière n a pas survécu à la tour aux sorcières. Tu n avais qu à cogner un peu moins fort. Tu vois bien qu elle est malade. Ta ta soeur, Maurin Colin lui fera du mal Fini de bavarder! Va-t-en, ou tu tiendras compagnie à ta mère. Sois tranquille, Maman. Colin ne fera plus de mal à Alix

14 Halte! Que veux-tu, petit? le comte! Je dois voir le comte. Il faut qu il les empêche d enfermer ma mère. Elle n est pas une sorcière, je vous le jure Laissez-moi voir le comte. Il est parti à la guerre, le comte. Tu ne le savais donc pas? C est moi qui surveille le château jusqu à son retour.

15 Depuis son fief surplombant le village, le compte Jan de Wiltz régna sur une grande partie de l Ardenne. C est lui qui donna au château son allure impérieuse. Mais les luttes de pouvoir et les guerres religieuses qui, en ces temps de malheurs ensanglantèrent l Europe, les maladies et la famine l empêchèrent de mener son œuvre à bonne fin.

16 Quelques semaines après son arrestation, la mère de Maurin succomba aux sévices qu on lui fit subir à la tour aux sorcières. Alix fut séparée de son frère et devint la servante d un riche paysan, Maurin se retrouva seul. Fais voir! Tu m as l air en bonne santé! Eh, toi! monte. J ai besoin d un nouveau valet. Tu auras à manger et un coin pour dormir. Viens par ici!

17 Ainsi le petit Maurin entra au service de Joseph. Il dut travailler comme une bête de somme et, en hiver, il dormait dans l étable près des deux vaches de Joseph. La jeunesse de Maurin arrive à son terme. Son père naturel, le comte Jan de Wiltz, se bat sur les champs de bataille d une Europe à feu et à sang. Séparé de sa sœur Alix, sa mère sacrifiée sur l autel de la bêtise, de l inculture et de la bestialité des hommes et de l époque, sa vie sera difficile. Mais, nous le savons, Maurin n est pas un garçon comme les autres, et ses ressources sont hors du commun. D autres épreuves l attendent. Être valet de ferme au service d un fruste paysan ne sera qu une étape dans la terrible épopée qui sera la sienne. On se souviendra de lui encore longtemps dans les chaumières de l Oesling!