DECISION DU TIERS DECIDEUR



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Transcription:

CENTRE BELGE D ARBITRAGE ET DE MEDIATION DECISION DU TIERS DECIDEUR PRO-DUO NV / CENAL.COM Affaire n 44150 : PRODUO.be 1. Les Parties Le Plaignant : PRO-DUO NV, ayant son siège social Palinghuizen, 68 à 9000 Gent Représenté par le cabinet Conseil en marques Gevers & Associates, Kouter 1, bus 3, à 9000 Gent Plaignante ; Le Titulaire : CENAL.com ayant son siège social à 12 Harcourt Road, 3705 Central Hong Kong ayant comme personne de contact Monsieur Lam YU; Titulaire du nom de domaine «PRODUO.be» Le Titulaire n a pas de représentant ;

2. Le Nom de Domaine Le nom de domaine litigieux est le nom de domaine «PRODUO.be» enregistré le 28 août 2004 (ci-après le «Nom de Domaine»). 3. Antécédents de la procédure Le 4 novembre 2008, l a Plaignante a introduit une plainte (ci après la «Plainte») auprès du secrétariat du CEPANI. Le titulaire n a pas répondu. Le 9 décembre 2008, le CEPANI a désigné Monsieur Etienne Wery en sa qualité de tiers-décideur (ci-après le «Tiers Décideur»), conformément à l article 6.2 du Règlement pour la résolution des litiges concernant des noms de domaine (ci-après le «Règlement»). Le même jour, le Tiers Décideur a adressé au secrétariat du CEPANI la déclaration d indépendance, conformément à l article 7 alinéa 3 du Règlement. Les débats ont été clôturés le 17 décembre 2008 conformément à l article 12 du règlement. 4. La plainte 4.1. La Plaignante se présente comme une société belge active dans la vente, à des professionnels, de produits de beauté et de coiffure. Etablie en Belgique depuis 1999, elle souligne que ses activités se sont successivement étendues jusqu en France et Espagne. A l heure actuelle, elle disposerait de 27 points de vente en Belgique et 13 en France. La Plaignante expose : - qu elle est titulaire d une marque verbale communautaire PRODUO n 1053776 du 26 janvier 1999 enregistrée pour des produits de classes 3, 11, 21 et 26 et dont elle fait usage. 2

- qu elle a enregistré le nom de domaine pro-duo.be, le 11 juin 2003, le nom de domaine produo.com le 24 septembre 1999 et le nom de domaine produo.fr le 8 janvier 2003. - qu elle peut faire valoir des droits sur le nom commercial PRO-DUO en Belgique et en France. Elle dépose à l appui de ces affirmations les données liées à l enregistrement de sa marque communautaire, un extrait de son site web pro-duo.be ainsi que des documents prouvant ses activités en Belgique et en France, sous le nom PRO-DUO. Elle estime que cela permet à suffisance d attester l usage public qu elle fait de son nom commercial. 4.2. La Plaignante établi qu en date du 28 août 2004, le titulaire a enregistré le nom de domaine «PRODUO.be». Elle produit les informations relatives à cet enregistrement auprès de DNS ainsi que la première page du site web correspondant au nom de domaine www.produo.be sur laquelle apparaissent divers liens sponsorisés qui renvoient vers d autres sites web promouvant des produits esthétiques et cosmétiques. 4.3. La Plaignante estime que le nom de domaine PRODUO.be est strictement identique à sa marque communautaire PRODUO, valable sur le territoire Benelux ainsi qu a son nom commercial. Elle estime également que le Titulaire n a aucun droit sur le nom de domaine ni aucun intérêt légitime qui s y attache. La Plaignante argumente en ce sens que : - elle n a aucun lien avec le titulaire et elle ne lui a, par ailleurs, jamais autorisé ni conféré de licence d utilisation de son nom commercial ou de sa marque PRODUO ; - il n existe aucun élément qui démontre que le Titulaire est connu de manière usuelle sous la dénomination PRODUO. Selon la Plaignante : le titulaire «n utilise pas le nom de domaine en vue d offrir de bonne foi des produits et services. Au contraire, le nom de domaine est utilisé par le Titulaire pour rediriger des visiteurs, par le biais de liens sponsorisés, vers d autres sites sur lesquels sont offerts des produits esthétiques de sociétés concurrentes de la Plaignante. L usage du nom de domaines par le Titulaire vise à produire du revenu par le biais des liens sponsorisés et cela ne représente pas un usage d un nom de domaine en vue d offrir de bonne foi des produits et services. ( )» La Plaignante souligne enfin que le nom de domaine du Titulaire a été enregistré et utilisé de mauvaise foi. Elle se base sur les faits suivants : 3

- Le Titulaire a indiqué sur son site web «PRODUO.be» que ce nom de domaine «pourrait être à vendre». - Le Titulaire utilise son nom de domaine à des fins lucratives afin d attirer sciemment les internautes en créant un risque de confusion entre la marque PRODUO et le nom de domaine et, automatiquement, les sites auxquels ce dernier renvoie. - Le Titulaire et son organisation cenal.com ont déjà été impliqués dans plusieurs procédures d arbitrage au cours desquelles, il a été constaté que ce dernier avait enregistré et/ou utilisé les noms de domaine concernés de mauvaise foi. Aux termes de sa plainte, la Plaignante demande le transfert de ce nom de domaine à sa faveur. 4.4. Le Titulaire n a transmis aucun formulaire de réponse et n a pas communiqué l identité de son conseil au secrétariat du CEPANI. A cet égard, le Tiers décideur ne connaît pas la position du Titulaire de nom de domaine. 4.5. Conformément à l article 5.4. du Règlement, compte tenu de l absence de réponse du Titulaire, le litige sera tranché par le Tiers Décideur sur base de la Plainte. 5. Analyse de la Plainte 5.1. Conformément à l'article 15.1 du règlement CEPANI pour la résolution des litiges concernant des noms de domaine, le tiers décideur tranche conformément à ce règlement et aux Lignes directrices de DNS.BE. Conformément à l'article 10, b)1 des conditions générales pour l'enregistrement des noms de domaine dans le domaine ".be" géré par DNS.BE, pour obtenir l annulation d un nom de domaine ou le transfert de celui-ci, le plaignant doit faire valoir et prouver que : «le nom de domaine du détenteur est identique ou ressemble au point de prêter à confusion à une marque, un nom commercial, une dénomination sociale ou un nom de société, une indication géographique, une appellation d'origine, une indication de provenance, un nom de personne ou une dénomination d'une entité géographique sur laquelle le Plaignant a des droits; et le détenteur n'a aucun droit sur le nom de domaine ni aucun intérêt légitime qui s'y attache ; et 4

le nom de domaine du détenteur a été enregistré ou utilisé de mauvaise foi. 5.2. Examen des conditions : 1 «Identité ou ressemblance au point de prêter à confusion entre le Nom de Domaine «PRODUO.be» et la marque PRODUO 5.2.1. La Plaignante est titulaire de la marque verbale «PRODUO» qui fait l objet d un enregistrement communautaire n 1053776 du 26 janvier 1999 pour des produits de classes 3, 11, 21 et 26. Cet enregistrement communautaire de la marque «PRODUO» a effet dans le Benelux. La Plaignante produit cet enregistrement en annexe à la plainte qu elle a introduite le 4 novembre 2008 (annexe 2). Elle prouve donc ses droits à la marque «PRODUO». 5.2.2. Le Nom de domaine enregistré par le Titulaire est «PRODUO.be». Ce Nom de domaine est identique à la marque «PRODUO» qui fait l objet de l enregistrement communautaire n 1053776 susmentionné dont la Plaignante est titulaire dans la mesure où le suffixe.be n est pas pertinent à cet égard. En effet, il selon une jurisprudence bien établie, le suffixe.be, ajouté au signe enregistré comme marque ne suffit pas pour établir l absence de ressemblance prêtant à confusion. (Affaires du Cepani n : 4002, 4003, 4019, 4021, 4025, 4030, 4031, 4033, 4034, 4035, 4038, 4039, 4042, 4052, 4053, 4054, 4056, 4059, 4060, 4061, 4067, 4068,4076, 4088, 4094, 4095) En tout état de cause, le titulaire ne conteste pas la ressemblance prêtant à confusion entre le nom de domaine et le signe protégé de la Plaignante. 5.2.3. Il s ensuit que la première condition prévue par l article 10 b) 1 du Règlement est remplie. 2 Le Titulaire du nom de domaine n a aucun droit sur le nom de domaine «PRODUO.BE» ni aucun intérêt légitime qui s y attache 5.2.4. La Plaignante soutient que le titulaire n a aucun droit sur le nom de domaine ni aucun intérêt légitime qui s y attache. 5.2.5. En principe, la charge de la preuve lui incombe. Cependant, la jurisprudence est unanime pour dire que : «Sur le plan de la preuve, et à peine d'exiger de lui la preuve impossible d'un fait négatif (negativa non sunt probanda), il ne peut être demandé 5

davantage au plaignant que son affirmation, non dénuée de vraisemblance, compte tenu des circonstances, d'une telle absence de droit ou d'intérêt légitime"; Voir entre autres : affaires n 44030, 44064, 44030, 44013, 44020, 44039) En d autres termes, il est demandé à la Plaignante de démontrer que «compte tenu des circonstances de l'espèce, il existe des raisons sérieuses de considérer que le Titulaire n'a pas de droit ou d'intérêt légitime relatif au nom de domaine» (Affaires n 4013, 4030, 4125) 5.2.6. Par ailleurs, en vertu du droit belge (applicable en l'espèce quant à la question de la preuve) les parties doivent collaborer à la charge de la preuve : si une partie doit démontrer un fait négatif, l'autre partie peut collaborer en établissant l'existence d'un fait positif (Cass., 24 mars 1947, Pas. 1947, I, p. 123 Affaires n 4082, 4088) 5.2.7. In specie, afin d étayer l absence de droit et d intérêt légitime du Titulaire sur le nom de domaine litigieux, la Plaignante invoque les raisons suivantes : - d une part qu elle est titulaire de la marque «PRODUO» et qu elle n a jamais autorisé ni conféré de licence d utilisation de son nom commercial ou de sa marque au Titulaire et - d autre part, que le Titulaire usurperait ladite marque, pour en détourner sa clientèle. La Plaignante estime en effet que le nom de domaine utilisé par le Titulaire vise à produire des revenus par le biais des liens sponsorisés et que cela ne représente pas un usage d un nom de domaine en vue d une offre de produits ou de services bona fide. Selon la Plaignante, le titulaire a choisi ce nom de domaine uniquement afin de bénéficier de l association avec sa marque. 5.2.8. Le Titulaire n'a transmis aucune réponse. Il n'a dès lors a fortiori pas fourni la moindre explication ou preuve susceptible d'établir qu'il aurait des droits et/ou un intérêt légitime se rattachant au Nom de Domaine qu'il a enregistré de sorte que les affirmations vraisemblables de la Plaignante ne sont pas contredites. (Affaires n 4030-4038-4082) 5.2.9. La deuxième condition prévue par l article 10 b) 1 du Règlement est donc, sur la base des éléments en possession du Tiers Décideur, remplie. 3 Le nom de domaine «PRODUO.be» a été enregistré ou utilisé de mauvaise foi 5.2.10. Aux termes de l article 10 b) 2, la preuve que le nom de domaine a été enregistré ou est utilisé de mauvaise foi peut être considérée comme établie lorsque : 6

1 les faits montrent que le nom de domaine a été enregistré ou acquis essentiellement aux fins de vendre, de louer ou de céder d'une autre manière ce nom de domaine au Plaignant qui est le détenteur de la marque, nom commercial, dénomination sociale ou nom de société, indication géographique, appellation d'origine, indication de provenance, nom de personne ou dénomination d'une entité géographique, ou à un concurrent de celui-ci, à titre onéreux et pour un prix excédant le montant des frais que le preneur de licence peut prouver avoir déboursé en rapport direct avec l'acquisition de ce nom de domaine; 2 le nom de domaine a été enregistré en vue d'empêcher le détenteur de la marque, nom commercial, dénomination sociale ou nom de société, indication géographique, appellation d'origine, indication de provenance, nom de personne ou dénomination d'une entité géographique de reprendre ce signe sous forme de nom de domaine, et le preneur de licence est coutumier d'une telle pratique; 3 le nom de domaine a essentiellement été enregistré en vue de perturber les opérations commerciales d'un concurrent; 4 en utilisant ce nom de domaine, le preneur de licence a sciemment tenté d'attirer, à des fins lucratives, les utilisateurs de l'internet sur un site Web ou autre espace en ligne lui appartenant, en créant une probabilité de confusion avec la marque, le nom commercial, la dénomination sociale ou le nom de société, l'indication géographique, l'appellation d'origine, l'indication de provenance, le nom de personne ou la dénomination d'une entité géographique du Plaignant en ce qui concerne la source, le sponsoring, l'affiliation ou l'approbation du site Web ou autre espace en ligne du preneur ou d'un produit ou service qui y est proposé; 5 le preneur de licence a fait enregistrer un ou plusieurs noms personnels sans qu'il y a un lien démontrable entre le preneur de licence et les noms(s) enregistré(s). Ces circonstances ne sont ni cumulatives, ni exhaustives. (Affaires n 4010, n 4002, n 4030) 5.2.11. En principe, la mauvaise foi ne se présume pas mais doit être raisonnablement prouvée. (Affaires n 4049, n 4067) 5.2.12. Cependant, selon une jurisprudence bien établie, la mauvaise foi peut être démontrée par toutes voies de droits, en ce compris les présomptions et les circonstances qui indiquent, avec un degré raisonnable de certitude, son existence. (Affaire n 4002, n 4013, n 4014, n 4030, n 4067) A titre particulier, concernant la passivité du Titulaire, il a été décidé qu on ne pouvait pas déduire la mauvaise foi du simple fait qu un titulaire ne remplisse pas le formulaire de réponse. (Affaires n 4030, 4045, 4053 ; 4067). Cependant, bien que n étant pas en elle-même une preuve suffisante de mauvaise foi, on a estimé que 7

l absence de réponse, en combinaison avec d autres éléments, pouvait servir de preuve circonstanciée afin d établir la mauvaise foi du titulaire. (Affaire n 4067) 5.2.13. En l espèce, sur la base du dossier de la Plaignante et après vérification des différentes données exposées, l on peut estimer qu il existe suffisamment d indices objectifs sérieux et concordants qui par leur convergence, sont de nature à établir la mauvaise foi dans le chef du Titulaire. - Premièrement, comme précité, le titulaire ne démontre aucun lien avec la Plaignante ni même aucun contrat de licence. Il ne démontre nullement qu il développait ou préparait une activité présentant un rapport quelconque avec le cosmétique ou l esthétique. Il n existe dès lors aucune explication raisonnable concernant l adoption du nom de domaine «PRODUO». - Deuxièmement, le Titulaire fait apparaître sur la page d accueil de son site web correspondant au nom de domaine, que ce dernier «pourrait être à vendre», littéralement : «THIS DOMAIN MAY BE FOR SALE» (annexe 5). Lorsque l internaute clique sur l hyperlien lié au mot «sale», une nouvelle page s ouvre lui indiquant qu il peut envoyer un email «to the current registrant of produo.be». Le sujet de l email peut au choix consister en : «inquiry», «spam/abuse», ou «offer». L on peut présumer de ces premiers faits que le Titulaire n exclut pas la revente de sorte que sur base des éléments en possession du Tiers Décideur, on peut estimer qu il a eu l intention d enregistrer le nom de domaine litigieux dans le but premier de le vendre, par exemple, à la Plaignante, titulaire de la marque et du nom commercial correspondant. - Troisièmement, les éléments du dossiers indiquent que le Titulaire utilise le nom de domaine «PRODUO.be» afin de diriger les internautes sur son site qui contient des liens sponsorisés vers d autres sites web offrant des biens et services similaires à ceux de la Plaignante, à savoir des produits de beauté et autres produits esthétiques. («SCHOONHEID, SCHOONHEID TIP, PARFUM, MAKEUP, COSMETICA») Ceci semble indiquer que l enregistrement est de mauvaise foi au sens du 3 et 4 reproduits ci-dessus. - Quatrièmement, il ressort des éléments du dossier qu au moment de l enregistrement du nom de domaine, le Titulaire connaissait ou devait connaître le signe «PRODUO» de la Plaignante. Il semble en effet impossible ou à tout le moins extrêmement improbable que le titulaire ait enregistré le Nom de domaine «par hasard». 8

La Plaignante expose qu elle utilise ce signe «PRO-DUO» depuis 1999 sans discontinuer à la fois comme nom commercial et comme marque, en Belgique et (ultérieurement) en France, pays dans lesquels elle possède respectivement 27 et 13 points de vente. En enregistrant en 2004 ce nom de domaine particulier afin de renvoyer les internautes vers des produits si spécifiques (produits de beauté et d esthétique), le Titulaire ne pouvait pas ne pas connaître le signe enregistré à titre de marque communautaire «PRO-DUO» et utilisé comme nom commercial pour ces mêmes produits depuis plus de 5 ans. Ceci semble indiquer que l enregistrement est de mauvaise foi au sens des 3 et 4 reproduits ci-dessus. - Cinquièmement, le titulaire ne fournit aucune justification qui serait de nature à expliquer pourquoi il a procédé à l enregistrement du nom «PRODUO» sous le domaine «.be». Ce domaine est en effet en rapport direct avec le marché naturel de la Plaignante (entreprise belge) et au contraire il ne semble présenter aucun intérêt pour le Titulaire, domicilié à Hong Kong, qui n exerce de primes abords, aucune activité pertinente dirigée vers ce marché. - Sixièmement, la Plaignante mentionne que le Titulaire et son organisation cenal.com ont déjà été impliqué dans plusieurs procédures d arbitrage au cours desquelles il a été constaté que le Titulaire avait enregistré et/ou utilisé les noms de domaines concernés de mauvaise foi. Après vérification de ces données auprès des instances compétentes (Cepani décision n 44067 du 15 août 2005, rembostyling.be ; OMPI décision n D2007-1250 du 17 octobre 2007, darlingbuildingsociety.com ; National Arbitration Forum décisions n 508512 du 19 août 2005 winespectatoronline.com et n 520056 du 1 er septembre 2005 insurenadgo.com, insurendgo.com), il semble en effet que le Titulaire ne soit pas à son premier enregistrement de nom de domaine «litigieux». Même si ce seul argument tiré de l existence de procédures intentées et clôturées en défaveur du titulaire ne peut à lui seul emporter la preuve de la mauvaise foi de ce dernier, il peut cependant, à l appui et en combinaison avec d autres éléments, permettre d atteindre un tel constat. En l occurrence, la plupart des litiges ci-mentionnés concernent des faits globalement similaires au présent contentieux : - enregistrement d un nom de domaine (correspondant au site web du titulaire) identique ou similaire à la marque antérieure du Plaignant (rembostyling.be/ darlingtonbuildingsociety.com ) 9

- un site internet qui contient des liens sponsorisés «pay per click» qui dirige les internautes vers des produits identiques ou similaires concurrents aux produits marqués du Plaignant ; - un titulaire qui ne fournit aucune justification dans le cadre de la procédure de plainte. 5.2.14. La troisième condition prévue par l article 10 b) 1 du Règlement est établie. 6. La Décision Le Tiers Décideur décide que la Plainte de la Plaignante est recevable et fondée. Par ces motifs, En application des conditions d enregistrements des noms de domaines sous le domaine «.be» opéré par DNS.be et du règlement du Cepani pour la résolution des litiges en cette matière. Le transfert à la Plaignante du nom de domaine «PRODUO.be» est ordonné. Ainsi fait à Bruxelles, le 29 décembre 2008, Le Tiers Décideur, Etienne Wery 10