Banque & Finance. Sommaire. De plus en plus de «pêcheurs» de coordonnées bancaires sur le web.



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Banque & Finance Lettre trimestrielle d informations juridiques Buyle Dieryck Maingain Sommaire page 2 La dépossession de titres au porteur et ses avatars Le contrôle des agents délégués et la vie privée des clients page 3 L information du client à la suite d un dépôt de titres page 4 Les limites au respect des objectifs de placement d un client sous gestion Les comptes-rendus de réunion en matière de gestion de fortune page 5 La cotation en ligne n était pas correcte page 6 La sanction de l article 1451 C. jud. n est pas automatique Blanchiment : le GAFI évalue la Belgique et entend des avocats page 7 La fourniture de renseignements commerciaux page 8 La remise d un chéquier constituet-elle une faute en soi? page 10 Le traitement diligent d un chèque L unicité de comptes d un emprunt solidaire De plus en plus de «pêcheurs» de coordonnées bancaires sur le web. es dernières études en matière de criminalité informatique pointent L au niveau des risques plus particulièrement encourus par les banques et les institutions financières, une inflation inquiétante des arnaques de type «phishing». Ces arnaques consistent à créer des faux sites aux couleurs d institutions financières ou de sociétés de commerce électronique bien connues et, parallèlement, à inviter par email les titulaires de compte à encoder leurs coordonnées bancaires sur ces faux sites, par exemple, pour «vérifier» - simple routine ou événement dramatisé pour des raisons de fraude - ces coordonnées ou encore pour se faire payer le gain d un jeu concours Apparu en 2002, le «phishing» - contraction des mots phreaking (pirater le réseau téléphonique) et fishing (pêcher) - a connu une véritable explosion en 2004. Selon les derniers chiffres publiés, depuis le mois de juin 2004, le nombre d emails interceptés liés aux pratiques de phishing aurait progressé de plus de 34 % par mois, pour un total de 18 millions sur l année 2004. Au niveau du résultat, on estime toutefois que moins de 5 % des e- mails destinés à rabattre les Internautes sur les sites leurre sont efficaces, le piège étant souvent «trop gros». Les mesures qui peuvent être prises pour lutter contre le phishing sont rendues difficiles du fait de la localisation des pirates dans un pays tiers, souvent exotique. Il n est toutefois pas inutile de prendre des mesures en Belgique et notamment de porter plainte auprès d une des brigades de la police fédérale spécialisée en matière de criminalité informatique. Si les chances de retrouver les pirates sont minces, les autorités policières peuvent très souvent identifier l hébergeur du site leurre et adresser à ce dernier une mise en demeure l invitant à désactiver ledit site sous peine de poursuites pénales. L institution ou la banque visée peut également utilement adresser directement à l hébergeur une demande de désactivation du site pirate en faisant valoir une possible action en dommages et intérêts en cas d inertie. Très souvent les hébergeurs, d autant plus lorsqu ils sont situés aux Etats-Unis, ne veulent pas prendre le risque d une telle action et acceptent de désactiver le site pirate, sans autres formalités. De manière préventive, il peut également être utile d informer le public des risques liés aux phising, par exemple, en faisant figurer sur son site Internet, un avertissement relatif à ce phénomène. Jean-Pierre Buyle www.banquefin.be Bureau de dépôt 1040 Bruxelles 4

Technologies de l information Le contrôle des agents délégués et la vie privée des clients Deux fédérations professionnelles d agents indépendants avaient assigné une banque pour faire constater qu elle avait violé la loi du 8 décembre 1992 relative à la protection de la vie privée, en utilisant des données relatives à la clientèle d agences bancaires communiquées dans le cadre d ordres de paiement, pour contrôler ses agents délégués. La banque avait constaté des mauvais résultats dans deux de ses agences bancaires. Elle avait mené une enquête et découvert que ses agents commercialisaient des produits d institutions financières concurrentes, au mépris de leur obligation contractuelle d exclusivité. Constatant cette fraude, la banque avait immédiatement résilié les contrats qui la liaient aux agents concernés. Mais pour procéder à des investigations plus approfondies à l égard de ces agents, la banque avait utilisé les données relatives à la clientèle afin d identifier les clients dont les comptes présentaient une diminution de capitaux inhabituelle. La justice a donné raison aux fédérations professionnelles et a ordonné, en première instance et en appel, que la banque mette fin à l utilisation des données relatives à la clientèle des agences d une manière qui viole la loi sur la protection de la vie privée, et ce, sous peine d astreinte. La Cour d appel a considéré que l utilisation par la banque des données personnelles des clients ne respectait pas le principe de finalité des traitements de données posé par la loi. Même si le règlement général des opérations de la banque contenait une clause par laquelle le client était informé de ce que ses données personnelles pouvaient être utilisées à des fins de contrôle de la régularité des opérations et de détection des irrégularités, la Cour a estimé que les clients n avaient pas été suffisamment informés de la possibilité pour la banque d utiliser leurs données LA DÉPOSSESSION DE TITRES AU PORTEUR ET SES AVATARS est une loi bien ancienne et connue à travers le milieu C professionnel, que cette loi du 24 juillet 1921 relative à la dépossession de titres au porteur. Toutefois, cette loi qui ne contient que 47 articles, et qui fait l objet de peu de contributions doctrinales ou de jurisprudence publiées, ne cesse pas de poser des problèmes. Le système qu elle met en place est pourtant simple, et peut être résumé en quelques lignes. Celui qui est dépossédé involontairement de titres au porteur, peut faire opposition à l encontre de ces titres auprès de l Office National des Valeurs Mobilières. Cette opposition est publiée dans le Bulletin des Oppositions. Au bout d une période de publication sans interruption de 4 ans, le titre frappé d opposition perd sa valeur, et l opposant a droit, soit au paiement des dividendes, des intérêts et éventuellement du principal devenu exigible, soit à la délivrance d un titre nouveau portant le même numéro que le titre originaire. Si par contre, pendant la période de publication, quelqu un fait valoir des droits sur le titre frappé d opposition, ce qu on appelle aux termes de la loi «la contradiction», l émetteur en avise l opposant et l Office National des Valeurs Mobilières. A partir de cette notification, il incombe à l opposant d agir endéans un délai de deux mois. Soit il renonce à ses droits, soit il introduit une action en revendication. A défaut d action de la part de l opposant, l opposition est levée d office trois mois après la notification de la contradiction, ce qui entraîne la reconnaissance des droits du contradicteur sur le titre. Ce système est intimement lié au rôle des intermédiaires financiers. Pour que l opposition à l encontre du titre perdu ou volé soit efficace, il est essentiel que la circulation du titre en question, ainsi que l exécution des droits sur le titre, soient suspendus. A cet effet, la loi prévoit un triple technique, à savoir : une obligation dans le chef de l émetteur, ainsi que dans le chef de tout intermédiaire financier, de saisir le titre frappé d opposition dès réception ; une interdiction de procéder au paiement du titre ; l inopposabilité de tout acte de disposition après la publication de l opposition à l égard de l opposant. Les devoirs de l intermédiaire financier sont clairs. Dès qu il reçoit un titre frappé d opposition, il le saisit (sans le payer), et il en informe l émetteur. Ce dernier en informe l opposant et l Office National des Valeurs Mobilières. L opposant dispose alors du délai précité de deux mois pour se mettre en contact avec le contradicteur, et prendre position (transiger ou introduire l action en revendication). La question finale en ce qui concerne le droit de propriété sur le titre frappé d opposition est résolue entre l opposant et le contradicteur. Ce débat ne concerne pas l intermédiaire financier. Dans la pratique, force est de constater que peu d intermédiaires financiers procèdent à la saisie du titre frappé d opposition. Ceci résulte sans doute de problèmes pratiques qui les empêchent de 2

Technologies de l information procéder à la vérification requise pour tous les titres qui leur sont remis, compte tenu du nombre important de transactions journalières. Souvent on constate qu un titre frappé d opposition transite via plusieurs intermédiaires financiers, avant d être finalement saisi par l émetteur. Dans ce cas, le dernier intermédiaire financier qui a omis de saisir le titre en question, sera le contradicteur aux termes de la loi. L opposant recevra dès lors les coordonnées de cet intermédiaire financier, et se mettra en contact avec ce dernier. Toutefois, dans la mesure où l intermédiaire financier ne souhaite pas faire valoir des droits sur le titre (il n intervient en effet que comme intermédiaire), il n est pas en mesure de transiger avec l opposant, et ce dernier se voit contraint, vu le délai de deux mois, de lancer l action en revendication à l encontre de l intermédiaire financier. Comment sortir de cette situation? Dans la mesure où l objectif de la loi est de régler le conflit relatif au droit de propriété sur le titre frappé d opposition entre l opposant et le remettant du titre, la seule solution consiste à remonter la chaîne des intermédiaires financiers intervenus, jusqu au premier remettant. L intermédiaire financier cité en justice, invitera dès lors le remettant du titre auprès de lui (le cas échéant un autre intermédiaire financier), à intervenir volontairement. A défaut, il le citera en intervention forcée. Si ce remettant est un autre intermédiaire financier, il agira de même, et ainsi, l opposant se retrouvera finalement confronté au remettant final, ce qui permettra au tribunal de trancher la question de la propriété du titre litigieux. Bien que cette solution soit la seule façon de combler les inadvertances des intermédiaires financiers intervenus, il faut constater que très souvent les intermédiaires intervenus refusent toute collaboration, se retranchant derrière leur devoir de discrétion, ou en invoquant le non-respect des dispositions légales par l intermédiaire financier intervenu après eux dans la chaîne, tout en oubliant leur propre manquement. Dans la mesure où l action principale ne peut être retardée par l action en intervention, le but recherché par cette solution pratique n est pas toujours atteint, et le tribunal tranchera parfois en faveur de l opposant, sans que ce dernier soit confronté au remettant final. Dans ce cas, si les droits de l opposant sur le titre litigieux sont reconnus, et si le remettant a déjà encaissé le produit du titre, une perte sera enregistrée, soit dans le chef du premier intermédiaire intervenu, soit dans le chef d un des autres intermédiaires. Dans cette hypothèse, la loi prévoit la possibilité pour le tiers porteur (en l espèce un intermédiaire financier) de se retourner à l encontre de celui qui lui a remis le titre frappé d opposition. Il s agit d une action en répétition de l indu. Mais cette action n aboutira pas toujours, par exemple parce que le remettant fait valoir des moyens attestant de ses droits sur le titre. En outre, même si le but recherché par cette solution pratique est atteint, souvent le remettant final fera défaut, et l action en répétition de l indu à son encontre se heurtera pratiquement à une insolvabilité dans son chef. Dans les deux cas, un des intermédiaires financiers supportera les conséquences financières du non-respect des dispositions de la loi du 24 juillet 1921. personnelles pour des contrôles internes auxquels ils étaient étrangers. Il n entrait pas, selon la Cour, dans les prévisions raisonnables des clients qu une telle utilisation puisse être faite. Cette décision est intéressante dans la mesure où la circulaire de la CBFA du 21.10.93 exige que les banques exercent un contrôle interne approprié à leurs activités pour préserver l intérêt des clients. Comment dorénavant une banque peut-elle encore contrôler ses agents indépendants si elle ne peut plus utiliser les données de ses clients? Cet arrêt va en tous les cas forcer les banques et l autorité de contrôle à revoir leurs procédures et sans doute à adapter les conditions générales bancaires. L information du client à la suite d un dépôt de titres Un client avec déposé sur son dossier-titres plusieurs centaines d actions d une société cotée sur le marché de Milan. A la suite d une augmentation de capital de ladite société, la banque avertit son client d une possibilité de droit de souscription préférentielle de nouvelles actions. Il s en suivit un litige entre le client et sa banque à laquelle il reprochait, malgré ses demandes répétées, de ne pas l avoir renseigné sur le cours des droits litigieux, et de ne pas avoir exécuté les ordres de vente passés par lui. La banque contestait avoir commis une quelconque faute. A l appui de sa demande, le client plaidait que le contrat qui liait les parties devait s analyser comme un contrat de gestion discrétionnaire de fortune, ce que contestait la banque. Le tribunal rappela que l existence d un tel contrat suppose que le banquier ait le droit d effectuer toutes les opérations que comporte la gestion d un portefeuille soit des actes juridiques de disposition. 3

Or, la lettre par laquelle la banque avisait son client de l opération litigieuse démontre qu elle attendait des instructions, ce qui contredisait la thèse avancée par le client selon le tribunal. Ce dernier qualifia le contrat qui liait les parties comme contrat de dépôt de valeurs mobilières, qui n exclut nullement certaines vérifications de la part du banquier (entre autres des ouvertures d un droit de souscription comme en l espèce), et par lequel le banquier à l obligation d assurer la garde matérielle et juridique du portefeuille lui confié. Le tribunal rappelle également qu en exécutant les instructions de son client relativement à l achat et la vente de valeurs, le banquier est un simple intermédiaire. Le client reprochait enfin à la banque de l avoir informé avec retard puisque la cotation des droits à souscription était ouverte deux jours avant la communication faite par la banque, et que le cours n avait fait que descendre au fil des jours jusqu à la fin de la période de cotation. Le tribunal constate que le client ne démontrait pas qu il était en droit de s attendre à obtenir de la banque une information anticipative relative à la souscription préférentielle des titres litigieux et à obtenir une information sur la cotation, au jour le jour, des droits de souscription en question. Elle déclara donc l action non fondée. Les comptes-rendus de réunion en matière de gestion de fortune Dans le cadre d un litige qui l opposait à son gestionnaire de fortune, un client avait demandé au tribunal de condamner la banque, dans un jugement avant dire droit, à produire sous peine d astreinte journalière de 150,00 une copie conforme de : l ensemble des procès-verbaux et comptes-rendus des réunions qui s étaient sont tenues entre lui-même et la banque et des renseignements éventuels des entretiens téléphoniques qui Technologies de l information Enfin, souvent l opposant réclamera en outre les frais qu il a dû exposer dans le cadre de l action en revendication. L intermédiaire financier ayant méconnu les dispositions légales devra également les supporter, compte tenu de l article 18 de la loi qui prévoit que : «Les intermédiaires financiers sont responsables envers tous les intéressés du préjudice résultant pour eux de l inobservation de l article 17 ou de la nullité prévue par l article 16». En conclusion, la pratique courante de l inobservation par les intermédiaires financiers des dispositions de la loi du 24 juillet 1921, ne joue pas toujours en leur faveur. On ne peut que conseiller aux intermédiaires financiers d être plus vigilants, et à défaut, dès que le problème se pose, de veiller à organiser une confrontation entre le remettant final et l opposant le plus vite possible. Sinon, la loi du 24 juillet 1921 relative à la dépossession de titres au porteur risque de devenir un piège du secteur financier. LES LIMITES AU RESPECT DES OBJECTIFS DE PLACEMENT D UN CLIENT SOUS GESTION Un client avait confié ses avoirs en gestion discrétionnaire à une société de gestion de fortune. Le profil de risque choisi était qualifié de «croissance forte/risque élevé». Deux mois plus tard, il fut modifié vers un profil «croissance équilibrée/risque moyen». Un an plus tard constatant les pertes enregistrées dans son portefeuille, le client demanda à la société de gestion de ne plus effectuer de transaction en actions jusqu à nouvel ordre, ce qui amena la société de gestion à résilier la convention de gestion. Le client cita la société de gestion devant le tribunal de commerce de Bruxelles en réparation du préjudice subi. Le tribunal releva dans un premier temps qu il n était pas «contesté ni contestable que les opérations boursières litigieuses intervenues entre parties ont été passées à une période boursière difficile et risquée au cours de laquelle un grand nombre de valeurs sûres ont chuté. Il est constant que la simple constatation qu un portefeuille subit une moins-value n est pas constitutive de faute, tant les décisions en la matière (financière) sont aléatoires. Il en va ainsi à plus forte raison lorsque la gestion incriminée s étend sur une période d importante détérioration boursière. Si le professionnel doit se comporter comme un mandataire normalement prudent et diligent dans l exercice de sa mission et gérer en bon technicien, informé de l évolution des marchés et des perspectives d avenir des sociétés émettrices, il ne répond, à cet égard que d une obligation de moyen». Selon le tribunal, le client soutenait à tort qu il aurait voulu une gestion en bon père de famille, c est-à-dire défensive et exempte de risque, alors même qu il avait choisi une formule de gestion à haut risque : le client avait ainsi autorisé le placement dans son portefeuille d options, de warrants, etc, titres représentant un risque élevé. Le client reprochait par ailleurs à la société de gestion de ne pas avoir respecté les objectifs arrêtés conventionnellement, parce que cette dernière aurait investi dans les titres que le client qualifiait de 4

Technologies de l information spéculatifs. Selon le tribunal, si la formule de gestion choisie présentait une pondération en actions de 65% par rapport à 25% d obligations et de 10% de liquidités, il est certain que l usage de ces pourcentages pour répartir la composition du portefeuille entre différents instruments financiers ou liquidités doit nécessairement, dans l intérêt du client, être assorti d une certaine souplesse. En l espèce, définir une politique de placement de façon trop stricte (X% en actions, y% en obligations, z% en liquidités) peut parfois se révéler très dangereux compte tenu de l évolution des cours. Ainsi, si le cours des actions investies monte à ce point que les pourcentages prédéfinis sont dépassés, le gestionnaire devra vendre. Ceci ce révélera peut-être une fort mauvaise opération pour le client. Dans ce cas, les conséquences en matière de responsabilités ne sont pas toujours faciles à déterminer. Il est également constant que le principe de répartition des risques ne doit pas être appliqué de façon absolue mais doit être mesuré en fonction de l importance du profil de l investisseur, que le gestionnaire doit prendre en compte, ou des exigences particulières du client. En l occurrence, si la pondération dont le client se prévaut résulte d un document établi en début de relation, le tribunal constate que le client ne s est jamais plaint à la réception des bordereaux qui lui ont été transmis ainsi que des relevés de portefeuille et des rapports de gestion. Ceci vaut approbation de la gestion, en ce compris la pondération adoptée entre les différents produits. LA COTATION EN LIGNE N ÉTAIT PAS CORRECTE e site internet d une banque associait erronément les initiales L de cotation d un titre à la raison sociale d une autre société également cotée en bourse sans toutefois que le cours affiché soit celui de cette dernière société. Un client introduisit par l intermédiaire du site de la banque un ordre d achat portant sur le titre erronément référencé. A la suite de son ordre, il reçut un bordereau de confirmation mentionnant le nom de société qui ne correspondait toutefois pas à l acquisition qu il avait en fait réalisée, sans cependant qu il s en aperçoive. Deux ans plus tard, le client contacta sa banque à la suite de la fusion de la société qu il pensait détenir en portefeuille. La banque prit alors conscience de l erreur de référencement précitée et rectifia les données sur son site. Elle proposa à son client de l indemniser en échangeant les titres reçus par des titres de la société que le client pensait avoir achetés à concurrence du montant souscrit. Le client refusa, s estimant en droit de réclamer un nombre de titres égal à celui des titres achetés et non à concurrence du montant souscrit. Les parties se retrouvèrent devant le tribunal de commerce de Bruxelles pour régler la réparation du dommage, la faute n étant pas contestée. Le tribunal constata que l indemnisation sous forme d un nombre identique à celui des titres achetés ne pouvait être admis, car celleci dépassait de loin le dommage subi. avaient eu lieu entre lui-même et la banque. l ensemble des directives et avis rendus par le Comité d investissement de la banque destinés à ses gestionnaires de fortune, pour la période litigieuse. Le client demandait en fait le bénéfice de l article 877 du code judiciaire qui stipule que lorsqu il existe des présomptions graves, précises et concordantes de la détention des parties ou un tiers, d un document ou une copie de celui-ci certifiée conforme, soit déposé au dossier de la procédure. Le tribunal rappelle à cette occasion l enseignement de la Cour de cassation qui précise que recourir à cet article «est, pour le juge, une simple faculté laissée à son appréciation et non une obligation». La banque qui avait versé aux débats un certain nombre de comptes-rendus de réunions précisait qu il pourrait y en avoir d autres mais ce serait en ce cas, des messages internes à l entreprise qui ne regardaient pas son ex-client. Pour ce qui concerne les documents rédigés par son Comité d Investissement qui contenaient selon elle des renseignements confidentiels, la banque excipait du secret des affaires. Elle estimait par ailleurs que la demande de son client excédait son devoir de collaborer loyalement à l administration de la preuve tandis que celui-ci irait, par ce biais inacceptable en son principe, à la pêche aux informations. Le tribunal constate que la demande du client ne peut être accueillie parce que son libellé est tout à fait général et imprécis et que le client ne peut raisonnablement se référer à un ensemble de pièces sans indication plus spécifique. Le client ne démontre pas non plus, selon le tribunal, que cet ensemble de pièces comporterait la preuve d un fait pertinent au sens de l article 877 du code judiciaire. 5

Enfin, pour le tribunal, il n existe aucune présomption de l existence d enregistrements téléphoniques dont le caractère éventuel expressément reconnu par le client fait à lui seul obstacle à la demande de production les concernant. La sanction de l article 1451 C. jud. n est pas automatique Une société avait fait signifier une saisie-arrêt conservatoire entre les mains de l un des débiteurs du client défaillant, espérant obtenir par ce biais une garantie de paiement de ses factures. La saisie-arrêt n eut cependant pas le résultat souhaité puisque le débiteur paya ce qu il devait à la société défaillante en effectuant le versement sur un compte tenu auprès d une banque qui lui avait signifié un acte d affectation en gage de créances à son profit. Le débiteur se défendait d être en situation d encourir la sanction de l article 1451 du code judiciaire (se voir déclarer débiteur pur et simple des causes de la saisie par suite du dessaisissement des sommes faisant l objet de la saisie alors qu il avait connaissance ou aurait dû avoir connaissance de l acte contenant saisie-arrêt). Il affirmait ainsi que l ordre de paiement était déjà tracé le jour de réception de l exploit de saisie-arrêt conservatoire. Il ressortait du dossier que l ordre fut exécuté par la banque du débiteur saisi le lendemain de la saisie sur base d un ordre collectif contenu dans une disquette informatique déposée par un chauffeur. Selon la Cour d appel qui eut à connaître du litige, un jour de décalage sépare habituellement le dépôt d un ordre de virement ou son exécution en sorte que l on peut retenir que les instructions d effectuer le versement ont bien été données le [jour précédant la saisie]. La Cour précise que la sanction de l article 1451 du code judiciaire n est pas automatique et est appliquée en fonction des circonstances que le juge relève ; que le législateur n entend sanctionner la collusion avec le débiteur saisi, la Technologies de l information La différence de cours entre les deux types d actions à l époque montre que l achat au prix payé par le client était irréalisable et que la faute commise par la banque n avait pas eu pour conséquence de créer un dommage équivalent à la différence entre les deux cours. Le tribunal par contre accueillit la demande du client visant à obtenir le remboursement de la somme investie erronément majorée d un intérêt au taux légal depuis que l ordre avait été enregistré. Il précise également qu il appartenait à la banque, en sa qualité d intermédiaire professionnel mettant sur le marché un système d acquisition se voulant performant mais étant imparfait de proposer elle-même d emblée l annulation pure et simple de l opération avec la restitution de l investissement litigieux à leur client et la reprise par elle des titres «mal» acquis. Une telle proposition ne ressortant d aucun élément du dossier, le tribunal condamne la banque en outre au paiement d une indemnité de 2.000 euros compte tenu de la procédure judiciaire que le client avait dû engager. BLANCHIMENT : LE GAFI ÉVALUE LA BELGIQUE ET ENTEND DES AVOCATS e Groupement d Action Financière sur le blanchiment de L capitaux, créé par le G7 au sommet de l Arche à Paris en juillet 1989, procède régulièrement à des évaluations mutuelles des Etats membres. A cette occasion, une délégation d experts internationaux se rend sur place et évalue le caractère effectif de la mise en œuvre de ses recommandations et l efficacité des lois et des mécanismes pris pour lutter contre le blanchiment. L objectif est également d assurer le suivi des observations formulées lors des précédents tours d évaluation. La Belgique a déjà été évaluée à deux reprises, en 1993 et en 1997. En janvier 2005, le GAFI était à Bruxelles pour une quinzaine de jours, en vue de procéder à une nouvelle évaluation. Depuis 2004, les avocats sont soumis à la législation préventive antiblanchiment, pour une partie non négligeable de leurs activités. A ce titre, des représentants de la profession, d une part, et des autorités ordinales, d autre part, ont été entendus séparément et à huis clos au siège de la C.T.I.F. Juste avant eux, c était le tour des experts-comptables, tandis que par la suite étaient auditionnés des diamantaires et des exploitants de casinos, parmi d autres. Aux côtés d un administrateur du GAFI, siégeaient plusieurs experts provenant de la Banque de France, de l administration des finances du Canada, de la cellule de renseignement financier du Grand Duché de Luxembourg et un conseiller spécial de la justice en Norvège. La discussion fut libre et assez longue. Des questions très concrètes ont été posées aux avocats, du type : Certaines dispositions de la loi belge vous posent-elles problème? Comment identifiez-vous les ayants droit économiques des clients qui vous consultent? Dans quel ordre identifiez-vous les clients existants? Donnez-vous par exemple priorité aux personnes morales par rapport aux personnes physiques? Comment réagissez-vous si une personne morale étrangère vous consulte en vue de la 6

Technologies de l information représenter lors d une acquisition immobilière chez un notaire? Identifiez-vous le client dans tous les cas? Le dénoncez-vous? Quelle est l incidence de votre secret professionnel? Si un homme politique français devait vous consulter pour vous demander d assurer la défense de ses intérêts, vous montreriez-vous particulièrement vigilant et si oui, dans quelles circonstances? Comment au sein de vos cabinets, la décision d acceptation d un client se prend-t-elle? Acceptez-vous de commencer à travailler pour un client avant d être mis en possession des documents probants relatifs à son identification? Dans quelles hypothèses dénoncez-vous un client à votre bâtonnier?... Chacun des quatre avocats auditionnés ont fait part de leurs très vives critiques à l égard de l extension aux professions juridiques de la législation blanchiment. Ils ont informé les experts de ce que l Ordre des barreaux francophones et germanophone ainsi que l Ordre français du barreau de Bruxelles avaient introduit un recours devant la Cour d arbitrage en vue de faire annuler certaines dispositions de la loi du 12 janvier 2004 qui modifie la loi du 11 janvier 2003 relative à la prévention d utilisation du système financier aux fins du blanchiment de capitaux et du financement du terrorisme. Ils ont également indiqué qu étant assermentés, ils s étaient engagés à obéir à la loi et qu en conséquence, leurs cabinets respectifs avaient décidé d implémenter la législation nouvelle, en prévoyant des procédures adéquates en matière d identification du client, de conservation de documents, de dénonciation aux autorités ordinales, de collaboration avec la C.T.I.F., de formation du personnel et des avocats, de vigilance et n ont pas caché qu au début, ils avaient rencontré une résistance d ordre psychologique et philosophique auprès de plusieurs membres de leur cabinet. Ils ont aussi fait part aux représentants du GAFI des difficultés auxquelles ils étaient confrontés, particulièrement en matière d identification des clients. Contrairement à d autres professionnels tels que les notaires, l identification des clients n était pas jusqu ici de l essence de la profession des avocats. Comment identifier un client sans personnalité juridique, tel qu un syndicat? Quels documents demander à une personne morale de droit public telle qu une commune? Peut-on se borner à identifier les ayants droit économiques finaux, sans document probant? Peut-on se limiter à identifier le bénéficiaire économique final et non pas les étapes intermédiaires d actionnariat dans un groupe de sociétés où plusieurs sociétés seraient interposées entre le client et ce bénéficiaire économique final? Faut-il systématiquement traduire en français ou en néerlandais les statuts rédigés en langue étrangère des clients personnes morales ou peut-on se limiter à une traduction dans l une des langues comprises par l un des associés?... Lors de l audition, il était frappant de voir combien ceux qui entendaient les avocats connaissaient mal ou peu la loi belge antiblanchiment plus encore les spécificités de la profession d avocat dans notre pays. Certains experts se sont étonnés d apprendre que les avocats belges ne faisaient pas de gestion de fortune. Certains ne voyaient pas de différence fondamentale entre les activités d un banquier et celles d un avocat et ne comprenaient pas pourquoi les règles édictées par la CBFA par exemple, en matière d identification de clients à distance ne pouvaient pas être transposées telles quelles aux professions juridiques. fraude ou la négligence fautive du tiers qui volontairement ne tient pas compte de la saisie-arrêt frappant la créance du débiteur saisi de l indisponibilité immédiate. La Cour relève par ailleurs que l heure à laquelle l huissier a signifié la saisie-arrêt n est pas précisée ; qu outre que la signification ait pu avoir lieu après l heure de fermeture habituelle des banques, il n est pas réaliste de penser que mis en possession de l acte de saisie-arrêt, son destinataire ait pu sans aucun délai identifier les coordonnées du dossier concerné par l acte et réagir utilement pour intercepter un ordre de paiement déjà tracé par le service chargé de la trésorerie qui, dans une administration ou entreprise d importance, n est pas celui qui programme et autorise le règlement des factures soumises à vérification. La Cour en conclut que matériellement, il n était pas possible dans les circonstances de la cause de tenir compte de la saisie-arrêt en empêchant le transfert des fonds, ce transfert étant en cours et qu en l absence de négligence fautive du débiteur saisi, l action à son encontre n est pas fondée. La fourniture de renseignements commerciaux Offrant des renseignements commerciaux et financiers à ses clients, une société avait dressé un rapport détaillé avec analyse des trois derniers bilans d une société partenaire de l un de ses clients. Elle lui avait donné un «rating vert» après avoir relevé une absence de protêt, de paiements réguliers et le bon respect de ses engagements. Quelques mois plus tard, un nouveau rapport fut établi. Ce rapport précisait que la société avait procédé à une augmentation de capital tout en précisant qu aucune publication officielle n avait encore été faite. Le même rapport dénonce une baisse du chiffre d affaires de 15% environ, un ratio d endettement total qui se détériore, un faible ratio de liquidités, une situation de trésorerie serrée et une durée moyenne de paiement aux fournisseurs atteignant 104 jours. 7

La courant d affaires entre les deux sociétés s accroît jusqu à ce que spontanément plusieurs renseignements sont adressés à quelques jours d intervalle : une assignation de l ONSS et le dépôt de bilan de la société partenaire. Dans ce dernier courrier, il est également précisé que l augmentation de capital ne s est jamais réalisée. Admis au passif chirographaire de son client, le fournisseur n obtient aucun dividende. Après un stérile échange de correspondances, le fournisseur saisit le tribunal de commerce de Bruxelles pour lui demander de condamner la société de renseignements à l indemniser des montants laissés impayés au motif que cette dernière l avait induit en erreur sur la matérialité de l augmentation de capital. Le premier juge rejeta la demande du fournisseur qui interjeta appel de la décision. La Cour d appel rappelle que «celui qui procure des renseignements commerciaux n assume qu une obligation de moyen, l inexactitude du renseignement fourni n entraîne pas ipso facto sa responsabilité, cette responsabilité nécessite un manque de prudence et de diligence dans la recherche ou dans la communication de l information». Elle constate que plutôt que d annoncer l augmentation de capital comme accomplie mais non encore publiée, la société, qui reconnaît avoir recueilli ces renseignements dans la presse sans s être pour autant déjà réalisée, aurait dû se faire l interprète du scepticisme exprimé par la presse. En l absence de telles précisions, le rapport laissait entendre à la fois que l augmentation de capital était acquise (chacun, dans les affaires, sachant que la publication des actes des organes des sociétés a pour objet d informer les tiers et non de permettre à ces actes de développer leurs effets) et que la situation difficile allait se résoudre à la faveur de l augmentation de capital obtenue. La société de renseignements invoquait ses conditions générales Technologies de l information Certains experts étaient surpris d apprendre qu en Belgique, peu d avocats ont fait l objet de poursuites et de condamnation en matière de blanchiment alors que la deuxième directive européenne a expressément justifié l extension de la réglementation à ces professionnels en prétendant qu ils s étaient avérés particulièrement susceptibles d être utilisés à des fins de blanchiment de capitaux. Il a dû leur être rappelé qu en près de 15 ans, les condamnations d avocats du fait de blanchiment ont été exceptionnelles et rarissimes. Les responsables du GAFI ont par ailleurs été totalement insensibles aux critiques et aux émotions manifestées à l égard d une telle législation scélérate. Ils se sont bornés à déclarer que cette réaction leur rappelait celle qu avaient eu les professions financières lorsque la législation leur avait été imposée il y a une dizaine d années. Les enquêteurs ont annoncé que leur rapport d évaluation serait publié en juin 2005. LA REMISE D UN CHÉQUIER CONSTITUE-T-ELLE UNE FAUTE EN SOI? ne banque avait ouvert un compte en faveur d une société U étrangère auquel était adjoint un carnet de chèque. Deux personnes avaient pouvoirs de signatures sur ce compte. Cette société tira un chèque en faveur de l une de ces personnes. Celle-ci ouvrit un compte dans la banque et remit le chèque pour encaissement. Selon le préposé de la banque, il fut toutefois décidé de ne présenter le chèque à l encaissement que lorsque le compte de la société serait suffisamment approvisionné. Six mois plus tard, n ayant jamais vu arriver de fonds pour couvrir le chèque, le préposé restitua le chèque à un représentant de la société qui l avait assuré qu il prendrait d autres dispositions pour le payement du bénéficiaire du chèque. Le préposé négligea cependant de faire signer un reçu à son client. Peu de temps après, le chèque fut présenté à l encaissement et fut retourné pour manque de provision. Constatant l absence de mouvement depuis l ouverture du compte personnel du bénéficiaire du chèque, la banque le clôtura d office. A une date non déterminée, le pouvoir de signature du bénéficiaire du chèque sur le compte de la société lui fut retiré. Quelques mois plus tard alors que le bénéficiaire du chèque souhaitait effectuer un transfert au départ de son compte personnel, il lui fut répondu qu il n y possédait aucun compte. Le bénéficiaire du chèque cita la banque en paiement du montant du chèque devant le tribunal de commerce de Bruxelles qui le débouta. Il interjeta appel, en soutenant que le préposé de la banque lui aurait assuré que la société américaine bénéficiait d une ouverture de crédit et que le chèque pouvait dès lors être payé par prélèvement sur le solde disponible. Il niait avoir marqué son accord de suspendre la présentation du chèque jusqu à ce que le compte de la société soit suffisamment provisionné. S il devait être établi qu il n existait pas d ouverture de crédit, l employé, considérait alors que la banque avait commis une faute : - en remettant un carnet de chèque à la société ; - en acceptant un chèque qu elle savait sans provision ; 8

Technologies de l information - en ne prévenant pas le déposant de cet état de fait ; - et en restituant ce chèque au tireur. La banque exposait qu elle n avait pas accordé d ouverture de crédit à la société mais qu elle l avait autorisée à effectuer, par le débit de son compte, deux opérations de change. Elle soutenait que cette tolérance ne permettait ni à la société, ni au bénéficiaire du chèque de considérer qu il existait une provision suffisante pour couvrir le chèque et que partant elle n était pas tenue de l honorer. La Cour d appel précise dans un premier temps que pour qu une ouverture de crédit puisse valoir de provision à un chèque, il convient que cette ouverture de crédit résulte d un engagement, exprès ou tacite, mais certain du tiré (le banquier) envers le tireur (le client) antérieur à l émission du chèque, d où il découle que le tiré mettra certainement à la disposition du tireur un montant au moins égal à celui du ou des chèques émis par le tireur. Des facilités de caisse ou dépassements de crédit consentis par le tiré ne constituent pas pareille provision selon la Cour. Il ne ressortait pas du dossier une présomption pouvant laisser supposer que la banque aurait nonobstant ses dénégations, accordé néanmoins une ouverture de crédit à la société. A cet égard, la Cour rappelle que le fait qu un compte bancaire présente un solde débiteur n implique pas nécessairement l existence d une ouverture de crédit. Il n y a dès lors pas de présomptions graves, précises et concordantes de l octroi d une ouverture de crédit. Il n y a pas lieu d ordonner la production des documents sollicités par le bénéficiaire du chèque sur base de l article 877 du Code judiciaire. Eu égard aux circonstances de l espèce, et particulièrement au fait que le bénéficiaire du chèque n était plus titulaire du chèque (ce qui laissait supposer, selon la Cour, qu il était en conflit avec elle) il ne convient pas de contraindre la banque à s expliquer sur les raisons pour lesquelles elle avait consenti à effectuer, à découvert, des opérations de change et ainsi à devoir justifier le solde débiteur du compte. Ce faisant, la Cour contraindrait inutilement la banque à violer son devoir de discrétion et à dévoiler des secrets d affaires de sa cliente qui n était d ailleurs pas à la cause. La Cour rappelle également que le fait pour un banquier de remettre à son client un carnet de chèque ne constitue pas une faute en soi. Il n était pas contesté que le chèque ait été tracé en présence du préposé de la banque. On ne peut cependant, selon la Cour, en déduire que la banque aurait créé à cette occasion, une fausse impression de solvabilité, susceptible de causer un préjudice au bénéficiaire du chèque. En effet, il ressortait de l instruction pénale à l encontre dudit préposé que les parties avaient opté pour l émission d un chèque à conserver par la banque dans l attente de l arrivée des fonds, plutôt que d opérer un simple transfert par virement, puisque le compte n était pas suffisamment provisionné. Le bénéficiaire ne peut prétendre qu il ignorait cet arrangement, car pendant plus d un an, il ne s était pas préoccupé de l état de son compte bancaire censé, selon lui, être créditeur du montant du chèque. Par ailleurs, il n avait émis aucune protestation lorsque le chèque lui fut restitué par le représentant de la banque et retourné pour manque de provision. suivant lesquelles «les renseignements commerciaux fournis sont rédigés consciencieusement et impartialement, cependant sans responsabilité quelconque et excluent toute assurance». La société invoquait également les mentions «sous réserves d usage» figurant sur certains rapports. Le fournisseur lésé voulait écarter ces conditions au motif qu elles ne lui avaient jamais été communiquées bien qu il reconnaissait que le premier rapport comportait un renvoi à ces conditions. La Cour précise que s il était autrefois enseigné qu un tel renvoi, de même que celui à des conditions générales pouvant être obtenues sur demande, n est en principe pas suffisant pour rendre ces conditions générales applicables, car incompatible avec la rapidité inhérente aux opérations commerciales, il en va autrement depuis que les moyens de communication modernes, tel que le télécopieur auquel les parties admettent avoir recouru pour les besoins de leurs communications modernes ( ) permettent la communication instantanée de la demande du texte des conditions générales, du contenu de celles-ci et de leur contestation éventuelle. En l absence de toute protestation à l encontre des mentions exonératoires de responsabilité, celles-ci n ont donc pas à être écartées. Quant au lien de causalité, la Cour rappelle que «le client doit établir le caractère déterminant de l influence de l information ou du conseil reçu sur sa décision», tout en précisant que lorsque cette influence présente ce caractère, encore faut-il s assurer qu il n a pas été accordé une confiance excessive au renseignement communiqué, lequel doit être considéré comme un élément d appréciation parmi d autres. Or, la Cour constate que le fournisseur a poursuivi ses prestations en dépit de l absence de paiement de sa facturation échue et qu il n a jamais exigé de sûreté de la part de son client. Il n apparaît pas non plus, selon la Cour, que le fournisseur se soit inquiété de la matérialisation effective de l augmentation de capital. Le Cour déclara l appel non fondé sur ces points. 9

Technologies de l information Agissant de la sorte, le fournisseur a choisi de s exposer au risque de la faillite de son client. Dès lors, il appartient au fournisseur, selon la Cour, d assumer toutes les conséquences de son choix. L unicité de comptes d un emprunt solidaire Souvent les banquiers font crédit à un groupe de sociétés via une ouverture de crédit au terme de laquelle chacune des sociétés du groupe peut employer seul le crédit tout en étant chacune redevable seule de la totalité du solde débiteur du crédit. Il est d usage pour la facilité des crédités que le banquier ouvre toutefois plusieurs sous-comptes actant les utilisations respectives du crédit. Les étroites relations que peuvent entretenir ces sociétés entre elles sont généralement à l origine de faillites en cascade lorsqu une des sociétés vient à faire défaut. Ce défaut provoque souvent la dénonciation du crédit par la banque à l égard de l ensemble des crédités. A cette occasion, le banquier procède généralement à la compensation des soldes se retrouvant sur les différents comptes des sociétés conformément aux dispositions de son Règlement général des opérations. Celles-ci précisent habituellement que les soldes débiteurs exigibles pourront être apurés de plein droit au moyen des soldes créditeurs au nom de personnes qui sont obligées conjointement ou solidairement envers la banque. Il arrive que certains curateurs contestent encore la validité et l opposabilité de ce genre de clause. Un jugement récent du tribunal de commerce de Huy s est penché sur cette question. Selon le tribunal, la clause d unicité de comptes a pour effet de faire apparaître une seule et unique opération de prêt, au travers d un seul et unique solde qui s établira, au jour de la clôture, par la compensation globale des soldes LE TRAITEMENT DILIGENT D UN CHÈQUE ne cliente avait déposé le 10 septembre dans son agence un U chèque de 100.00 euros tiré par l un de ses fournisseurs sur une banque tierce en demandant que le montant soit porté au crédit de son compte. Le même jour, la banque crédite le compte de sa cliente sous réserve d encaissement et deux jours plus tard, soit le 12 septembre, remet physiquement le chèque en Chambre de Compensation. Suite à l interpellation de la cliente par téléphone et par télécopie, les préposés de l agence confirmèrent le 12 septembre, après avoir pris contact avec la banque tierce, que le chèque était suffisamment provisionné à ce moment et qu il pouvait être présenté. Le 17 septembre, la banque tirée refoula le chèque, celui-ci n étant pas approvisionné, ce qui fut précisé par courrier du même jour à la cliente. Ce 17 septembre, la cliente retira à son agence 5.000 euros en chèque bancaire et 25.000 euros en espèces, somme qu elle retira à nouveau le 18 septembre. Le 20 septembre, la banque débita le compte de sa cliente du montant du chèque non provisionné, soit 100.000 euros plaçant ainsi le compte en situation débitrice. Le même jour, la cliente dépose un montant de 20.000 euros sur son compte d épargne en vue de réaliser une opération immobilière. Le 24 septembre, la banque écrit à sa cliente en lui transmettant toutes les informations relatives au refus de paiement du chèque. Deux mois plus tard, le solde restant débiteur, la banque dénonça le compte courant de sa cliente et en application de la clause d unicité de comptes prévue dans ses conditions générales met sa cliente en demeure de rembourser le solde de compte débiteur. Faute de remboursement, la banque cita sa cliente devant le tribunal de commerce de Tournai. Estimant que la banque avait manqué de diligence dans l encaissement du chèque en cause et avait bloqué sans avertissement préalable, la cliente cita sa banque devant le même tribunal. Les demandes furent jointes pour connexité. La cliente reprochait à la banque d avoir procédé avec retard à l encaissement du chèque à la Chambre de Compensation empêchant ainsi un encaissement immédiat de celui-ci bien que provisionné au moment de sa présentation. Elle lui reprochait également d avoir manqué à son devoir d information en négligeant d avertir de l absence de provision dudit chèque la laissant procéder à des retraits importants de son compte et d avoir bloqué son compte d épargne sans mise en demeure préalable. Le tribunal rappelle dans un premier temps que l article 29 de la loi du 1 er mars 1961 concernant l introduction dans la législation nationale de la loi uniforme sur le chèque et sa mise en vigueur (ciaprès la loi sur le chèque) dispose que «le chèque émis et payable en Belgique doit être présenté au paiement dans le délai de 8 jours» et l article de la même loi prévoit que «la présentation à une Chambre de Compensation désignée par le gouvernement équivaut à la présentation 10

au paiement». Technologies de l information L article 61.3 de la loi sur le chèque dispose que le tireur ne peut retirer tout ou partie de la provision sous peine de sanction pénale de l article 4 4 de la même loi prévoit que seul le chèque certifié a pour effet de bloquer la provision au profit du porteur sous la responsabilité du tiré jusqu au terme du délai de présentation. En présentant le chèque litigieux à la Chambre de Compensation deux jours après sa remise, le tribunal estime que la banque n a pas manqué de diligence. L alinéa premier de l article 42 de la loi sur le chèque prévoit que le porteur doit donner avis du défaut de paiement à son endosseur et au tireur dans les quatre jours ouvrables qui suivent le jour du protêt ou de la constatation équivalente, et, en cas de clause de retour sans frais, le jour de la présentation, le délai courant dès réception de l avis précité. Or, la banque avait reçu l avis d impayé le 18 septembre faisant débuter le lendemain, soit le 19 septembre, le délai expirant le 24 septembre compte tenu de ce que le 18 septembre était un mercredi. La banque a donc, selon le tribunal, respecté le délai prévu par loi pour donner avis de non paiement dès lors que dès le 24 septembre, elle a adressé un courrier à sa cliente pour l aviser du refus de paiement du chèque. Cet avis figurait en outre dans les extraits de compte de la cliente dès le 20 septembre. Le tribunal relève par ailleurs, qu en transférant la somme de 20.000 euros du compte d épargne au compte courant de la cliente, la banque a fait une juste application de ses conditions générales auxquelles la cliente avait adhéré dès lors qu elle a reconnu en avoir reçu un exemplaire lors de l ouverture de ses comptes. La cliente «ne peut se prévaloir de sa propre imprévoyance si elle a négligé d en prendre connaissance avant d apposer sa signature à l ouverture des comptes». Le tribunal précise également que si le banquier a certaines obligations d information à l égard de son client, il n a de manière générale pas à le conseiller sur l utilisation de la gestion des comptes ouverts à son nom auprès de ses établissements. Il appartenait à la cliente, en tant que titulaire du compte et ayant adhéré aux conditions générales de la banque d être prudente pour l utilisation d un compte crédité d un chèque encaissé «sous réserve de bonne fin». LES OBLIGATIONS D UN BANQUIER FINANÇANT UN ACHAT DE PARTS SOCIALES ne banque avait accordé un crédit à l un de ses clients pour le U rachat des parts d une société. Ce crédit était notamment garanti par la caution solidaire et indivisible des deux futurs administrateurs. Un an plus tard, la banque est amenée à dénoncer ce crédit suite au défaut de remboursement de l une des échéances. Les cautions introduisirent une action en responsabilité contre la banque à qui elles reprochaient de leur avoir accordé un crédit de manière totalement imprudente. créditeurs ou débiteurs des différents «sous-comptes» qui le composent. La Cour de Cassation a énoncé qu en principe une telle clause d unicité est licite et opposable aux tiers, dont les curateurs, pour autant qu elle ne soit pas artificielle, c est-à-dire : qu elle n ait pas été conclue pendant la période suspecte en cas de faillite ; qu elle ait été conclue sans fraude ; qu elle corresponde à une réalité économique. Le tribunal releva qu en l espèce l octroi d un seul crédit utilisable par les quatre sociétés au travers d un seul compte courant divisé en sous-comptes pour des raisons pratiques correspondait à la réalité économique : ces quatre sociétés appartenaient à un seul et même groupe avec lequel la banque était en relation d affaires anciennes et suivies ; elles étaient étroitement imbriquées les unes dans les autres, avaient des activités complémentaires et indépendantes, des capitaux dont l origine était identique et leurs conseils d administration respectifs étaient constitués des mêmes personnes. La famille s agrandit... Savez-vous que depuis l année 2004, EX TAX LEGIS est le pendant fiscal de nos lettres trimestrielles d informations juridiques? Une synthèse rigoureuse de l information fiscale concernant la majorité des contribuables ou qui modifient de manière substantielle un régime fiscal tant en matière d impôts directs qu indirects vous est dorénavant accessible via courriel. EX TAX LEGIS vise tant les dispositions légales, les arrêts des Cours et tribunaux que les instructions administratives. Intéressé? N hésitez à pas à nous le faire savoir via l adresse suivante : mc.fichaux@elegis.be 11

Elles soutenaient qu en sa qualité de professionnel, la banque aurait dû apprécier raisonnablement le risque pour agir avec prévoyance et précaution et vérifier la solvabilité du partenaire commercial. En manquant à ces obligations, les époux estimaient que la banque les avait induits en erreur sur la situation réelle de la société dont ils avaient racheté les parts. Ils sollicitaient par conséquent la résolution de leur acte de cautionnement ainsi que divers engagements aux torts de la banque. Le tribunal précise que la jurisprudence considère que le donneur de crédit ne méconnaît pas ses obligations contractuelles en octroyant le crédit que lui demande le preneur de crédit dans les conditions prévues au contrat, à condition d agir de bonne foi et avec prudence. Si le banquier se doit d être prudent et diligent dans le cadre de l octroi d un crédit, il n a, ni en droit ni en vertu de sa déontologie professionnelle, l obligation de jouer le rôle de directeur de conscience économique et financier des clients qui sollicitent une ouverture de crédit sauf à avoir accepté de jouer ce rôle dans certaines hypothèses, ce qui selon le tribunal n est nullement le cas en espèce. Il apparaît en effet du dossier que la convention de cession avait été négociée en dehors de toute intervention de la banque ; cette dernière n avait dès lors aucune obligation de conseiller l une des parties à ce contrat, ni sur l opportunité de racheter les parts sociales ni sur le prix de vente de celles-ci. La banque n avait pas d avantage l obligation de procéder à une analyse approfondie de la situation existante et projetée de la société pour en vérifier notamment la faisabilité. La technique du «credit scoring» n est pas, dans le chef des banques et autres organismes dispensateurs de crédit, une opération obligatoirement prévue dans le cadre de l octroi d un crédit, à peine d engager leur responsabilité. Cette analyse incombe en réalité à l acquéreur, lequel est tenu de s entourer des précautions élémentaires lorsqu il contracte. La banque n a ni le pouvoir de procéder personnellement à de telles investigations, elle doit tout au plus recueillir des renseignements objectifs, ce qu elle a fait en l espèce selon le tribunal. Le juge rappelle en outre que le devoir d information du banquier ne porte pas sur des faits que toute personne ou toute entreprise normalement diligente doit connaître pour la gestion de ses affaires ou de son entreprise ( ) ; que le banquier doit, avant d accorder un crédit sollicité, vérifier si le type de crédit et son montant sont adaptés aux dimensions et aux besoins de l entreprise, ce qui implique dans son chef, un examen des documents comptables que lui soumet le demandeur de crédit ( ) ; qu elle ne commande pas que la banque fasse procéder à des analyses comptables en vue de confirmer ou de rejeter les documents du candidat au crédit qu une vérification raisonnable fait apparaître comme normaux ; ( ) que le droit de toute personne de gérer ses biens et d entreprendre ses affaires comme elle l entend exclut de transformer l obligation du banquier en une tutelle des banques jugeant souverainement de l opportunité de traiter les opérations nécessitant un crédit et réexaminant en lieu et place du crédité «minorisé» tous les aspects de son projet comme celui-ci devrait le faire en adulte responsable gérant ses intérêts «en bon père de famille». Banque & Finance est publié par l association d avocats Buyle Dieryck Maingain, société civile à forme de S.C.R.L. www.elegis.be avec la collaboration de André-Pierre ANDRE - DUMONT Edmond BRONDEL Olivier CREPLET Paul FALAISE Mady GEERTS Filip MALFAIT Miguel MAIRLOT François MOÏSES pour le droit belge, Nicolas DAUBIES Sylvie DECOSTER Christophe STEYAERT pour le droit européen et le droit français et réalisation Alphonse HOTTAT mise en page Colette FLAHAUT Les informations publiées par Banque et Finance sont données à titre de renseignements. Il ne s agit pas de consultations juridiques portant sur des situations déterminées. Les destinataires de cette lettre d informations sont informés par la présente de ce qu ils sont enregistrés dans un fichier établi en vue de l envoi de la lettre d informations. Le cas échéant, ils peuvent demander l application de la loi du 8 décembre 1992 relative à la protection de la vie privée. Reproduction autorisée, sauf à des fins commerciales, moyennant mention de la source. Prochain numéro : Juin 2005 Le tribunal déclara l action non fondée. 12 Editeur responsable : Jean-Pierre Buyle Rue A. De Boeck, 54-1140 Bruxelles Tél 32 2 240 15 20 - Fax : 32 2 240 15 30 jp.buyle@elegis.be