Génération de champ magnétique par effet dynamo : l expérience VKS Nicolas Mordant Laboratoire de Physique Statistique 6 Novembre 2007 Compte-rendu de Luc Deike et Stéphanie Couvreur Introduction Les mouvements de convection d un métal liquide peuvent générer un champ magnétique par induction : c est l effet dynamo. L expérience VKS (Von Karman Sodium), développée en partenariat entre l ENS Paris et Lyon et le CEA de Saclay et Cadarache, a pour objectif de générer un tel champ magnétique afin de permettre une meilleure compréhension de la magnétohydrodynamique et des champs magnétiques naturels. 1 Champs magnétiques naturels La plupart des panètes du système solaire ont un champ magnétique naturel. Il est intéréssant de remarquer quel axe du dipôle magnétique en correspond pas toujours à l axe de rotation de la planète. Grâce au paléomagnétisme, il est facile de reconstruire l histoire du champ magnétique terrestre. Au cours du temps, le dipôle qu est la Terre s est de nombreuses fois inversé. La dispersion temporelle de ces inversions est très grande : une période de signe de dipôle constant peut varier de quelques milliers d années 1
à une quarantaine de millions d années. Le Soleil possède lui aussi un champ magnétique naturel. Les taches solaires, facilement observables, sont en fait des tubes de champ magnétique qui sortent de la surface solaire. Enfin, les galaxies ont aussi un champ magnétique. Quelle est l origine de ces champs magnétiques? 2 Magnétohydrodynamique 2.1 Dynamo de Bullard En 1919, Larmor émet l hypothèse que le champ magnétique solaire est généré par effet dynamo : de petits mouvements de métal liquide générent des courants qui induisent un champ magnétique qui produit lui-même des courantes, etc. Le phénomène s auto-entretient et crée ainsi un champ magnétique permanent. Un premier modèle de Dynamo est développé par Bullard : L équation qui régit la dynamique du système est : L di dt = MΩI RI Pour avoir un effet dynamo, il faut que di dt > 0, il existe donc une vitesse de rotation seuil : Ω > R M. En pratique, cette vitesse est très grande et très difficile à réaliser : d après la loi de Lenz, la force d induction créée par les courants va s opposer aux mouvements et va être d autant plus grande que la vitesse de rotation sera élevée. 2.2 Les équations de la magnétohydrodynamique La magnétohydrodynamique est le couplage entre l hydrodynamique et le magnétisme. Les équations utilisées vont donc être les équations de Maxwelle et de Navier-Stokes. 2
Fig. 1 Dynamo de Bullard Equations de Maxwell sur le champ magnétique : B t = (u B) + ν m 2 B.B = 0 ν m = 1 σµ 0 est la diffusivité magnétique (effet Joule). Equation de Navier-Stokes pour un fluide en présence d un champ magnétique et incompressibilité : u t + (u. ) u = P ρ + ν 2 u + 1 ρµ 0 (( B) B).u = 0 2.3 Les mécanismes d induction Quels sont les mécanismes susceptibles de produire un champ magnétique. On suppose que notre fluide conducteur est parfait, c est à dire que ν m = 0, on néglige la diffudion. L équation de 3
l induction peut alors se réécrire : B t + (u. ) B = (B. ) u Dans la limite du conducteut parfait (ou limite non diffudise), les lignes de courant et le champ magnétique sont transportés et déformés par l écoulement. On distingue deux types de mécanismes d induction : l effet α et l effet ω. Effet α L hélicité (vorticité et advection) déforme les lignes de champ. Une boucle de courant est ainsi formée, créant un champ magnétique orthogonal au champ magnétique initial. Effet ω Deux disques tournent dans des sens opposés et provoquent 4
la torsion des lignes de champ. Cet effet est facilement observable. 3 L expérience VKS 3.1 Ecoulement Von Karman Cet écoulement est mis en mouvement par deux disques contrarotatifs. L effet ω est donc observable avec la rotation différentielle. De plus, le fluide est éjecté vers l éxtérieur par la force centrifuge provoquant de l hélicité. A partir de ce dispositif mêlant effets α et ω, est-il possible de générer une rétroaction positive et produire ainsi un champ magnétique spontané? L écoulement est caractérisé par deux nombres sans dimension : le nombre de Reynolds Re = Lu ν et le nombre de Reynolds magnétique Re m = Lu ν m. Un bilan d énergie nous donne l équation sans dimension : de m = I m + P J dt R m Le signe de I m dépend des conditions d expériences, il va donc falloir trouver la bonne configuration pour qu elle soit positive. P J est la puissance par effet Joule, elle est donc négative, il faut donc se placer à grand nombre de Reynolds magnétique pour que 5
l effet dynamo puisse avoir lieu ( de m dt > 0). Le fluide choisi est le sodium. De bonne conductivité thermique, il est étudié dans l écoulement de Von Karman à un nombre de Reynolds magnétique de 10 et de nombre de Reynolds de 10 6 1. L écoulement sera donc turbulent. Ce très grand nombre de Reynolds rend les simulations numériques directes impossibles. Les premières expériences de dynamo ont été réalisées à Riga et Karlsruhe. D autres expériences utilisant aussi le sodium sont en cours à Grenoble, aux USA (Los Alamos, Madison, Maryland) et en Russir (Perm). Cependant, aucune n a réussi à créer une dynamo produisant un champ magnétique de dipôle aléatoire au cours du temps. 3.2 Dispositif expérimental On utilise une cuve cylindique de 60 cm de hauteur et 30 cm de diamètre, dans laquelle sont placés 160 l de sodium liquide à 110-150 C. Des pâles sont fixées sur chaque disque rotatif afin de mieux brasser le fluide. 300 kw de puissance mécanique et 200 kw de refroidissement sont utilisés. L ajout d un anneau equatorial sera necessaire afin de supprimer la dynamique lente des tourbillons de la couche de cisaillement. Les disques utilises sont en fer pur. 6
3.3 Mesures dans VKS2 On mesure le champ magnetique a l aide d un reseau de 10 sondes 3 axes, la pression par un capteur piezoelectrique en paroi, le couple de chaque moteur afin davoir la puissance mecanique, enfin la temperature du sodium dans chacun des compartiments. 3.4 Regimes observes On observe differents regimes de dynamo stationnaire. Pour des forces differntes, il serait equivalent de se placer dans un referenciel en rotation : il s agit d un regime decale. On observe egalement toute une zoologie de dynamique oscillante, et nous observons bien a plusieurs reprise une dynamique de renversement qui fait penser a la dynamique du champ terrestre. Nous pouvons alors effectuer une representation dans un espace des phases de dimension reduite. On a alors un diagramme tres riche (la figure n ayant pas encore ete publie, Nicolas ne nous l a pas laisse pour les compte rendu...). Tous les regimes ne sont pas compris, cependant il vient une premiere conclusion, ce n est pas un regime chaotique puisque l on reste restreint a une zone fermee de l espace des phases. 7
Conclusion En conclusion, nous avons observé une dynamo dans un écoulement turbulent non contraint comportant un certain nombre de caractéristique semblable a la dynamique du champ terrestre. La plus importante est bien sur le renversement du champ au cours du temps. D autres caracteristiques ont ete mis en evidence : la saturation du champ magnétique provient des termes non linéaires et non des termes dissipatifs, les fluctuations ont une importance dans la structure du mode dynamo (mis en évidence par l observation d un dipole axial au lieu d un dipole transverse qui serait un signe d un écoulement moyen). Ensuite, on a pu mettre en évidence plusieurs modes dynamos, et il semblerait que l on puisse les étudier dans un espace des phases de dimension réduite. Cette représentation dans un espace des phases n est pas encore complètement comprise. Cette expérience ouvre un large champ de perspectives, tout d abord il est nécessaire de comprendre le role des différents éléments du dispositif. Quel est l importance réelle de l anneau équatorial, dans quel mesure peut on faire varier les conditions aux limites (une idée serait de remplacer le disque en fer doux par un disque isolant, afin de conserver l écrantage). Enfin un travail théorique est nécessaire afin de bien comprendre quel mécanisme de dynamo fonctionne dans VSK2. 8