JEANNINE RICHET MAE / DGCID / BUREAU DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE ET DE L ENSEIGNEMENT TECHNIQUE Réflexions en cours sur les orientations stratégiques du MAE en matière d enseignement technique et de formations professionnelles Avant d exposer les réflexions en cours sur les orientations stratégiques du MAE, je voudrais vous présenter les excuses de Monsieur Serge TOMASI, Sous-directeur du développement social et de la coopération éducative, qui devait intervenir aujourd hui, mais qui a été retenu au dernier moment à Paris. Il me charge de vous faire part de ses regrets et du plaisir qu il aurait eu à participer à cette rencontre. Notre Sous-direction, avec l appui de nombreux partenaires, travaille, depuis plusieurs mois, sur les orientations stratégiques du MAE dans le domaine de la formation professionnelle. Ces travaux me permettent, aujourd hui, de vous présenter l état nos réflexions en cours. Je me propose de dérouler mon intervention en deux parties : 1. nos réflexions sur la formation professionnelle en général ; 2. nos réflexion sur la formation professionnelle dans le secteur rural. Je développerai plus largement cette seconde partie puisque c est un sujet qui nous préoccupe plus particulièrement en tant que participants aux VIII e journées d Ingénierie des dispositifs de formation. 1/ Les orientations stratégiques du MAE en matière de formation professionnelle 1.1/ La réorientation de nos interventions : 1. Partir des besoins en emplois et qualifications des économies duales et qui le resteront à moyen / long terme : s interroger sur les cibles, sur les finalités de notre coopération ; 2. Intégrer le secteur informel et le secteur rural dans le champ d action de notre coopération : prendre en compte le genre et les besoins spécifiques des femmes (part importante du secteur informel) ; soutenir l apprentissage et les formations en alternance, notamment dans le secteur informel urbain ; contribuer à la mise en place de dispositifs nationaux de formation rurale (60 à 80 % de la population active dans le secteur rural) ;
3. Réorienter l enseignement technique initial : développer l éducation de base et la formation professionnelle dans le cadre des Objectifs du Millénaire et de la lutte contre la pauvreté 1 ; assurer la continuité entre l éducation de base et la formation professionnelle initiale 2, 4. Consolider les premiers éléments d une formation professionnelle continue. 1.2/ Les axes d intervention de coopération du MAE : contribuer à la rénovation du rôle de l Etat (soutien aux politiques publiques) ; développer le partenariat avec les organisations professionnelles ; former à des métiers et certifier les qualifications ; réorienter les établissements, les enseignants et les diplômes de l enseignement technique ; optimiser les moyens actuels : mobiliser les ressources latentes ; développer les compétences en ingénierie des dispositifs de formation ; redéployer les ressources affectées à l enseignement et à la formation professionnelle. 1.3/ Les outils du MAE : redéfinir le rôle et les profils de l assistance technique ; mobiliser et coordonner l action des partenaires français de l APD ; rechercher la synergie de nos actions avec celles des autres bailleurs bilatéraux et multilatéraux et mieux s inscrire dans le Cadre Stratégique de la Lutte contre la Pauvreté ; faire évoluer les projets FSP dans le sens des principes définis pour ces orientations ; favoriser la prise en compte de la formation professionnelle dans les C2D et les DSRP. Dans la plupart des pays d Afrique subsaharienne, le cycle primaire étant le cycle terminal, le MAE mène, avec ses partenaires, une réflexion sur le post primaire et sur le continuum enseignement primaire - post primaire - insertion par l emploi. 2/ LES ORIENTATIONS DE NOS ACTIONS EN FORMATION PROFESSIONNELLE DANS LE SECTEUR RURAL 2.1/ Le contexte 3 : A/ Démographie et urbanisation : un fort impact sur le secteur agricole. la population mondiale estimée à plus de 6 milliards pourrait atteindre 9 milliards en 2050, essentiellement sur deux régions : l'asie et l'afrique Subsaharienne ; cette rapide urbanisation n'a toutefois pas pour corollaire une régression démographique du milieu rural : populations urbaine et rurale continueront à croître mais à des rythmes différents ; 1 De gros efforts ont été effectués par le MAE pour réorienter sa coopération sur l éducation de base. Depuis 5 ans, l éducation de base représente les 2/3 de nos actions alors qu elle n en représentait seulement 1/3, à la fin des années 90. 2 Nous interroger sur le contenu de cette éducation de base (en particulier par l apprentissage des gestes de base et pas seulement les savoirs de base : savoir lire, écrire et compter mais aussi tenir un marteau, entretenir un potager ). 3 Sources : travaux de Pierre DEBOUVRY ; groupe de travail MAE / MAAPAR sur l enseignement et la formation professionnelle.
B/ Les incidences de ces progressions démographiques sont multiples, particulièrement pour les pays subsahariens : une progression constante des importations céréalières, sous-tendant une incapacité du secteur agricole à répondre à cette demande ; une maîtrise du foncier totalement remise en cause : passage d'un statut de bien inaliénable (parce que propriété des ancêtres) à celui de bien marchand ; un appauvrissement de la biodiversité et dégradation des sols ; une remise en cause des systèmes d exploitation en termes de : productivité du sol (montée des densités rurales) ; productivité du travail (évolutions du rapport urbains/ruraux au profit des urbains) ; entraînant la question de la productivité du capital à investir pour répondre aux besoins en équipements et intrants des exploitations agricoles. C/ Des cohortes d'enfants et de jeunes adultes de plus en plus nombreuses : le risque, notamment pour les populations rurales et féminines, de ne pas avoir accès aux savoirs fondamentaux ; le constat partagé de l entrée en obsolescence des savoirs et savoir-faire traditionnels et de leur incapacité à répondre, à eux seuls, aux changements sociaux, environnementaux et économiques ; le secteur rural représente encore aujourd'hui, et selon toute vraisemblance pour plusieurs années encore, le principal gisement d'emplois et d'auto emplois. 2.2/ L appui à la mise en place de dispositifs nationaux de formation rurale : un des points majeurs de nos réflexions en cours A/ L exploitation agricole au centre des enjeux : la petite exploitation agricole concerne environ 70% des actifs agricoles en Afrique subsaharienne ; sa transformation est un impératif qui doit placer le «ménage rural 4» au centre de la politique de développement du secteur agricole ; la relance de la productivité de l agriculture africaine passe nécessairement par une formation de masse centrée sur le développement des exploitations agricoles 5. B/ Des dispositifs de formation en regard à une politique nationale : politique assignant le rôle économique, environnemental et social de l agriculture et portée par l ensemble des acteurs du monde rural (politique à mettre au cœur des stratégies de réduction de la pauvreté et des inégalités) ; politique favorisant la production : accès au foncier, aux financements et au marché ; politique précisant le rôle de la formation rurale et des dispositifs à mettre en place (renforcer le lien entre la politique de développement de la formation professionnelle rurale et les politiques de développement de l agriculture). C/ Des dispositifs de formation, en rapport avec les nouvelles exigences de l économie et centrés sur les acteurs : prendre en compte les pratiques collectives et individuelles des acteurs ainsi que leurs préoccupations sociales ; retenir le meilleur de la fonction sociale et culturelle des apprentissages traditionnels ; 4 Producteurs, productrices, aides-familiaux 5 Etudes de la Banque mondiale qui mettent en exergue le lien entre la productivité des exploitations rurales avec le niveau de formation du chef d exploitation.
apporter des connaissances nouvelles afin que les jeunes générations puissent mieux suivre le rythme impose par les évolutions en cours et ainsi contribuer a la relance de la productivité de l agriculture africaine. D/ Des acteurs qui doivent être formes pour peser sur des choix collectifs et individuels Cette dimension doit nécessairement guider les interventions d appui du MAE pour la rénovation ou a la mise en place de dispositifs de formation rurale. Mettre les producteurs et les productrices en situation de porteurs de projets exige de développer : une recherche agronomique concertée et participative ainsi qu une information technique et économique réactive, au service de ces producteurs et les productrices ; des dispositifs de formation mobilisant tous les acteurs (les administrations, les institutions privées, les paysans et leurs organisations, les formateurs, l ensemble des bailleurs de fonds) ; des formations tant techniques que citoyennes. 2.3/ Les principes pour une intervention du MAE : répondre à la demande de pays engagés dans la réforme de la formation rurale ; agir en concertation avec les autres bailleurs de fonds ; mobiliser les expertises nationales et françaises. Le MAE souligne l importance qu il apporte à un réseau nord-sud en matière de formation rurale et au développement de l expertise du Sud et de l échange Sud Sud, avec des coopérations triangulaires 6. 2.4/ Les pistes d action du MAE qui pourraient contribuer à la mise en place de dispositifs nationaux de formation rurale. Sans prétendre tout vouloir faire, ni faire tout seul, le MAE pourrait, à la demande, appuyer : la formulation et la mise en cohérence des orientations politiques, des particularités territoriales et des demandes professionnelles, en matière de formation rurale ; une approche volontariste pour la formation au métier d agriculteur et d agricultrice prenant en compte sa polyvalence et la pluri-activité familiale ; une meilleure participation des organisations professionnelles au processus de rénovation et d orientation des dispositifs de formation rurale, à leur financement et à la gestion des fonds ; la recherche des équilibres et complémentarités entre : l éducation de base (enseignement des sciences de la vie) ; l enseignement technique (priorité à la formation de formateurs) ; l enseignement supérieur et la recherche (typologie agro-écologique, diagnostic des pratiques paysannes et évolution des systèmes de production, étude des marchés) ; la formation professionnelle de masse, centrée sur les exploitations agricoles et la productivité de l agriculture (alphabétisation, formations hors mur, apprentissage par alternance, formations techniques, technologiques et à la gestion, etc ) ; 6 A titre d exemples : - avec le Niger et la Tunisie sur un projet santé/reproduction au Niger ; les A.T., ainsi que le chef de projet sont tunisiens ; - en Mauritanie sur l Education de base où les experts nigériens s informent auprès de leurs collègues mauritaniens sur le système d Information Global de l Education (SIGE) mauritaniens et viennent en appui pour l élaboration des documents de politique sectorielle.
Le pilotage des dispositifs : organisation institutionnelle ; gestion paritaire des ressources et des allocations ; coordination des orientations et du suivi ; élaboration du cadre juridique (harmonisation des référentiels en fonction de la demande, accréditation des établissements, certification En conclusion, pour atteindre ces objectifs, je voudrais réitérer la volonté affirmée du ministère des Affaires étrangères de travailler en collaboration étroite avec ses partenaires du Nord et du Sud. (bailleurs de fonds, ministères techniques, ONG, opérateurs privés, organisations professionnelles ) Enfin, je voudrais tout particulièrement remercier Messieurs Michel BROCHET (CNEARC / DGER) Michel CHARLOT (BCI / DGER), Pierre DEBOUVRY, Jean MADEC (BCI / DGER) et Alain MARAGNANI (Inspection / DGER) pour leur contribution à nos réflexions. Je vous remercie de votre attention.