Jugement n 2015-0003 Audience publique et délibéré du 5 mars 2015 OFFICE DE TOURISME DE LA VILLE DE TOULOUSE N du compte : 031 035 972 Poste comptable : RECETTE DES FINANCES DE TOULOUSE MUNICIPALE Exercice 2010 REPUBLIQUE FRANÇAISE AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS La chambre régionale des comptes de Midi-Pyrénées Vu le réquisitoire n 2014-0022 du 28 juillet 2014, par lequel le Procureur financier a saisi la Chambre en vue de la mise en jeu de la responsabilité personnelle et pécuniaire de M. X, comptable de l office de tourisme de la ville de Toulouse, au titre de l exercice 2010 ; Vu les comptes rendus en qualité de comptable de l office de tourisme de la ville de Toulouse, pour l exercice 2010, par M.X, ensemble les comptes et budgets annexes ; Vu le code des juridictions financières, notamment son article L. 242-1 ; Vu l article 60 modifié de la loi de finances n 63-156 du 23 février 1963 ; Vu le décret n 62-1587 du 29 décembre 1962 portant règlement général sur la comptabilité publique ; Vu les lois et règlements relatifs à la comptabilité des communes ; Vu le rapport n 2014-1095 de M. Thierry TEULIERE, premier conseiller, communiqué au procureur financier le 3 décembre 2014 ; Vu les conclusions n 2014-1095 du 20 février 2015 de M. Christian BUZET, procureur financier ; Vu les pièces du dossier ; Entendus à l audience publique, M. Thierry TEULIERE, premier conseiller, en son rapport, M. Christian BUZET, procureur financier, en ses conclusions orales et M. X, comptable ; Ayant délibéré hors la présence du rapporteur et du procureur financier ;
Sur l unique présomption de charge à l encontre de M. X au titre de l exercice 2010 pour le paiement de deux mandats d un montant global de 121 113,14 ; 2 1 - Sur le réquisitoire du procureur financier Considérant qu aux termes du I de l article 60 de la loi n 63-156 du 23 février 1963 susvisé, les comptables publics sont personnellement et pécuniairement responsables des contrôles qu ils sont tenus d assurer en matière de dépenses dans les conditions prévues par le règlement général sur la comptabilité publique ; que leur responsabilité est engagée dès lors qu une dépense a été irrégulièrement payée ; Considérant que M.X a effectué, en 2010, deux paiements au bénéfice de la «SEM développement tourisme» par mandats : - n 518 du 14/06/2010 pour un montant de 24 698,06 ; - n 957 du 08/10/2010 pour un montant de 96 415,08 ; Considérant que ces mandats n étaient appuyés que de factures émises par la SEM ; que, pour le premier, la facture jointe précisait : «travaux d aménagement des locaux immeuble Marengo, acompte de 30 %», pour le second, une première facture de 57 628,81 précisant «travaux d aménagement des locaux - immeuble Marengo 2ème acompte de 70 %», une deuxième facture de 38 786,27 indiquant «mobilier locaux arche Marengo» ; Considérant que ces paiements auraient dû être appuyés des pièces justificatives prévues à l annexe à l article D. 1617-19 du CGCT, relatif aux pièces justificatives de dépense, à savoir : - s il peut être considéré que les prestations ont été directement réalisées par la SEM : les pièces requises par la rubrique 42, pour les marchés publics, dont notamment un contrat écrit, les prestations d un montant supérieur à 20 000 devant en effet donner lieu à établissement d un contrat écrit (article 11 du code des marchés publics en vigueur lors du paiement) ; - soit, s il peut être considéré que la SEM agissait dans le cadre d un mandat que lui aurait confié l office de tourisme, ce qui semble résulter des éléments du dossier, les pièces prévues à la rubrique 494 21 pour le paiement de sommes à un mandataire non doté d un comptable public : la convention de mandat conclue entre l office de tourisme et cette SEM ; Considérant qu aucune de ces pièces n étaient présentes à l appui de ces deux mandats ; que dès lors le comptable aurait dû exiger, à l appui des mandats 518 et 957 de 2010, la production desdites pièces, et qu en l absence de ces dernières il était tenu de suspendre le paiement desdits mandats ; qu en ne le faisant pas, M.X semble avoir engagé sa responsabilité ; 2 - Sur la réponse du comptable Considérant que M. X rappelle que les services de la SEM développement tourisme et de l'office de tourisme ont été relogés dans des locaux de l'immeuble Marengo appartenant à la commune de Toulouse, et que les mandats litigieux avaient pour objet de rembourser à la SEM développement tourisme, locataire principal et maître d'ouvrage, la part des travaux et acquisitions de mobiliers réalisés pour le compte de l'office de tourisme ; que les dépenses portaient sur des travaux d'aménagement compte 2181 pour 82 326,87 et sur l'acquisition de mobiliers compte 2183 pour 38 786,27 remboursés par l'office de tourisme à la SEM développement tourisme ;
3 Considérant qu il soutient, en premier lieu, que bien que non formalisé par une convention de mandat, l'accord des parties pour la réalisation des aménagements ne fait pas de doute ; qu à l appui de ce moyen, il précise que l installation de la SEM développement tourisme et de l'office de tourisme dans l'immeuble Marengo a été voulue et facilitée par la ville de Toulouse, propriétaire des lieux ; que le directeur de la SEM était en charge du projet de relogement commun ; que divers mails ont été échangés entre l office, la SEM, et les services et élus de la commune entre octobre 2009 et octobre 2010 ; que la ville de Toulouse a délivré dès le 31 mai 2010 une autorisation d'occupation temporaire au bénéfice de la SEM développement tourisme portant sur une surface de 228 m²,- cette surface étant à l'évidence destinée aux deux entités -, pour lui permettre de réaliser les travaux d'aménagement nécessaires à son installation ; que la convention d'occupation temporaire conclue entre la commune et la SEM développement tourisme le 23 décembre 2011 a réduit le montant de la redevance due par le locataire principal pour tenir compte des travaux réalisés ; Considérant qu il observe que la ville, l office et la SEM ont une gouvernance politique commune et souligne qu à aucun moment, il n a été consulté sur les conditions de réalisation de cette opération ; Considérant que le comptable soutient, en second lieu, que l'office du tourisme n a pas subi de préjudice financier, comme le confirme l ordonnateur dans sa réponse du 22 septembre 2014, et observe que la convention d'occupation temporaire du 23 décembre 2011 précise en son article 4-2 que la commune accepte l'office de tourisme en tant que sous-locataire ; qu il résulte du contrat de sous location dont bénéficie l'office de tourisme que le loyer est proportionnel aux surfaces occupées et réduit du montant des travaux réalisés pour le compte du bailleur; que, par ailleurs, la clé de répartition de la charge financière des travaux et des acquisitions de mobilier résulte d'un accord entre l'office et la SEM développement tourisme ; qu enfin, s'agissant plus spécialement des acquisitions de mobilier, l'office de tourisme a produit un relevé global des biens dont il a ainsi fait l'acquisition pour un montant de 38 786,27 ; Considérant qu il fait enfin valoir que les responsables administratifs de la SEM étaient peu familiarisés aux règles du droit financier des collectivités locales et que la situation de la recette des finances de Toulouse Municipale était très tendue à l'époque où ces mandats ont été payés ; 3 - Sur la réponse de l ordonnateur Considérant que l'ordonnateur soutient que l office de Tourisme n'a subi aucun préjudice financier ; que les prestations (travaux d'aménagement et acquisition de mobiliers) ont été réalisées par la SEM dans le cadre d'une convention d'occupation établie avec la commune de Toulouse aux fins de mise à disposition de locaux situés à l'espace Marengo ; que les dépenses engagées par la SEM au titre de ces aménagements ont été facturées à l'office de Tourisme intervenant en tant que sous locataire au prorata des espaces occupés ; qu un contrat de sous location a été établi entre l'office de Tourisme et la SEM Tourisme mais qu aucune convention de mandat n'a été conclue entre les deux structures pour le règlement de ces factures ;
4 - Sur les suites à donner 4 4.1. Sur l existence d un manquement du comptable Considérant qu il est constant que la SEM pour «le développement du tourisme de la région toulousaine» a engagé des dépenses au titre de travaux d aménagement et d achat de mobiliers relatifs à des locaux situés au 2 ème étage de la petite pile de l Arche Marengo, pour lesquels elle bénéficiait d une autorisation d occupation temporaire délivrée par la ville de Toulouse puis d une convention d occupation temporaire du domaine public conclue avec la ville; que les dépenses en litige ont été refacturées à l office de tourisme, sous-locataire de la SEM pour une partie de ces locaux, au prorata des espaces occupés ; que la SEM a également refacturé à l office de tourisme la part des achats de mobiliers lui revenant ; qu il n est pas contesté que, pour les opérations d aménagement et d achat dont il s agit, la SEM agissait dans le cadre d un mandat confié par l office de tourisme de la ville de Toulouse ; Considérant qu'il appartient au comptable de s'assurer de la production des pièces requises au titre de l'article D. 1617-19 du code général des collectivités territoriales avant tout paiement de dépenses ; que l annexe à cet article, dans sa rédaction applicable à compter du 1 er mai 2007, prévoit comme pièce justificative, dans sa rubrique 49421 relative au paiement d opérations réalisées sous mandat pour le financement des opérations effectuées par le mandataire lorsque ce dernier est un organisme non doté d un comptable public, la production d une convention de mandat ; Considérant que les mandats litigieux n 518 et n 957 n étaient appuyés que de factures émises par la SEM ; que si, comme le soutient le comptable, l accord entre les différentes parties pour réaliser ces aménagements ne fait pas de doute, il est constant qu aucune convention de mandat n a été formalisée entre la SEM et l office de Tourisme ; Considérant, dès lors, que le comptable aurait dû exiger, à l appui des mandats 518 et 957 de 2010, la production d une convention de mandat, et qu en l absence de cette pièce justificative, il était tenu de suspendre le paiement desdits mandats ; qu en ne le faisant pas, M. X a commis un manquement de nature à engager sa responsabilité ; que ce manquement ne résulte pas de circonstances de force majeure; que les difficultés du poste comptable ne sauraient constituer de telles circonstances ; 4.2 L existence d un préjudice financier du fait du comptable Considérant que, par les paiements litigieux, l office de tourisme a réglé des dépenses d aménagement en proportion de la surface des locaux qu il occupait ainsi qu un achat de mobiliers destiné à ses bureaux, ainsi qu en atteste le relevé des biens acquis par l office de tourisme ; que des indices concordants, tirés d échanges de courriels entre l office de tourisme et la SEM en octobre 2009, attestent la volonté de l office de tourisme de participer à cette opération ; que, dès lors, le manquement du comptable n a causé aucun préjudice financier à l office de tourisme de la ville de Toulouse ; 4.3 Le montant de l amende forfaitaire Considérant qu en application du paragraphe VI, alinéa 2, de l article 60 modifié de la loi du 23 février 1963, la juridiction peut obliger le comptable à s acquitter d une somme arrêtée, pour chaque exercice, en tenant compte des circonstances de l espèce lorsque son manquement n a pas causé de préjudice financier ; que le montant maximal de cette somme est fixé par le décret n 2012-1386 du 10 décembre 2012 à un millième et demi du montant du cautionnement prévu pour le poste comptable, soit à 340,50, compte tenu d un cautionnement de 227 000 attendu pour le poste comptable en 2010 ;
5 Considérant qu il y a lieu, dans les circonstances de l espèce, d arrêter la somme non rémissible mise à la charge de M. X à 340 au titre de l exercice 2010 ; Ordonne ce qui suit : PAR CES MOTIFS Article 1 : M. X est constitué redevable envers l office de Tourisme de la ville de Toulouse au titre de l exercice 2010 de la somme de trois cent quarante euros (340 ) ; Article 2 : M. X est déchargé de sa gestion du 1 er janvier 2010 au 31 décembre 2010. Fait et jugé à la chambre régionale des comptes de Midi-Pyrénées le 5 mars 2015 hors la présence du rapporteur et du procureur financier par : M. Jean-Paul SALEILLE, président de section, président de séance ; MM. Nicolas GODARD et Oliver PAGES, premiers conseillers ; Le greffier, Le Président de la Chambre, Le Président de section, président de séance Vincent BUTERI Jean MOTTES Jean-Paul SALEILLE La République Française mande et ordonne à tous huissiers de justice, sur ce requis, de mettre ledit jugement à exécution, aux procureurs généraux et aux procureurs de la République près les tribunaux de grande instance d'y tenir la main, à tous commandants et officiers de la force publique de prêter main forte lorsqu'ils seront légalement requis. P/La Secrétaire générale Le greffier, Vincent BUTERI