NOTE D INFORMATION RELATIVE A LA CONNAISSANCE ET A LA GESTION DU GIBIER. Perdrix grise



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Transcription:

NOTE D INFORMATION RELATIVE A LA CONNAISSANCE ET A LA GESTION DU GIBIER Perdrix grise Rédaction : CNERA PFSP équipe perdrix grise faisans sur un questionnement de la DIR NO Se référer pour plus d information aux articles de Faune Sauvage (ou bulletin mensuel) cités et aux lettres d information du réseau perdrix-faisans, en particulier à la note accompagnant le n 22 d où est tirée une partie importante du texte ci-dessous. L ensemble des publications de l ONCFS sur la perdrix grise est disponible à la page : http://www.oncfs.gouv.fr/programme-derecherche-appliquee-sur-la-perdrix-amp-nbsp-ru140#publication Les 7 dernières lettres du réseau sont accessibles depuis la page http://www.oncfs.gouv.fr/reseau-perdrix-faisans-download99 et la note spéciale est à la page http://www.oncfs.gouv.fr/img/file/oiseaux/galliformes/plaine/perdrix_grise_note_speciale_fev20 14.pdf Préambule et contexte : L ONCFS œuvre pour la conservation et la gestion des populations sauvages de perdrix grises, selon l article L421.1 du code de l environnement. Dans cet objectif, il recherche et développe les éléments de connaissance nécessaires et les met à la disposition des chasseurs pour qu ils puissent prendre les décisions de gestion adaptées. Depuis les années 80, l ONCFS a accompagné techniquement les FDC pour leur fournir des outils de suivi et de gestion des populations à l état sauvage (cf. Reitz, 2003 FS n 260). Cela a abouti dans de nombreux départements, en particulier du centre-nord, à la mise en œuvre de cette gestion sur de vastes zones, la chasse de perdrix grises issues d élevage étant marginalisée. Suite aux deux dernières années de reproduction (2012 et 2013), particulièrement mauvaise dans le Bassin parisien, les densités de reproducteurs ont dans certaines régions très fortement chuté, réduisant très fortement ou annulant les possibilités de prélèvement par la chasse sur l espèce à l état sauvage sur plusieurs années et suscitant des interrogations quant à la nécessité de procéder à des repeuplements ou renforcements de populations. 1-6

Questions Eléments de réponses Sources Les printemps froids et particulièrement humides de 2012 et 2013 Bro et al., expliquent en grande partie les deux très mauvaises 2013 FS n Comment expliquet-on les mauvais succès de la reproduction? Connait-on l importance relative de chaque facteur? reproductions de 2012 et 2013. Les années de mauvaise reproduction sont caractérisées le plus souvent par une forte pluviométrie en fin de printemps début d été. De façon générale, les conditions météorologiques ont été largement pointées comme un facteur majeur influençant la reproduction, de façon directe (par exemple, froid lors des éclosions) et/ou indirecte (par exemple, abondance en insectes). D autres facteurs (sol, état de la végétation, qualité de l habitat, abondance des prédateurs et de leur proies principales, etc ) peuvent bien sûr intervenir, notamment localement. 298 Bro et al. 2009 FS n 286 Bro et Reitz, 2014 FS n 302 La PG est une espèce avec une variabilité interannuelle importante des populations. Avec l historique des suivis réalisés dans le cadre du réseau perdrix-faisans ONCFS-FNC-FDC, considère-t-on la baisse de ces dernières années comme tendancielle ou conjoncturelle? Quels aménagements du territoire sont à privilégier? Les deux phénomènes coexistent vraisemblablement. On a observé dans les années 80-90 une augmentation de la mortalité naturelle des adultes, une tendance semble se faire jour d une moins bonne réussite des nids de remplacement et les conditions environnementales, essentiellement météorologiques, ont fait que parmi les six dernières années, on a connu trois mauvaises années de reproduction et une année médiocre. Mais il y a eu aussi deux très bonnes années (2010 et 2011) qui n autorisent pas à conclure à une tendance marquée à la baisse du succès reproducteur de l espèce. La variabilité naturelle observée depuis longtemps sur l espèce semble en revanche s être accrue récemment. Le «tabouret» des bonnes pratiques cynégétiques a quatre pieds : l aménagement de l habitat, l agrainage, le piégeage et la gestion des prélèvements. Les trois derniers peuvent être pratiqués par les seuls chasseurs sans implication des agriculteurs et ont fait leur preuve au moins dans certaines situations (voir ci-dessous). L aménagement de l habitat est plus difficile à pratiquer et les expérimentations menées (bandes de couvert hivernal, bandes de rupture dans les céréales) n ont pas abouti positivement. L aménagement n a donc pas fait ses preuves lorsqu il est isolé des autres pieds du tabouret. Néanmoins de nombreuses études ont montré que la perdrix peut être fortement dépendante de la qualité de son habitat (alimentation, choix du site de nidification, couvert de refuge contre les prédateurs) et on a donc tout intérêt à l améliorer dans la mesure du possible. La brochure «la faune sauvage en milieux cultivés» rédigée par le CNERA et éditée par l ONCFS en 2007 fait un point complet sur ce sujet. Les expérimentations et démonstrations menées dans le cadre du programme Agrifaune (ONCFS, APCA, FNC, FNSEA), notamment sur les intercultures et les bords de champs, apportent des solutions pratiques et opérationnelles pour l'amélioration des territoires agricoles. Bro et Reitz, 2014 FS n 302, lettre 22 du réseau perdrixfaisans Dossier gestion des territoires 2009, FS n 283 Mayot et al. 2004, FS n 262 Bro et al. 2009, FS n 286 Bro et Ponce- Boutin, 2004, FS n 273 FS spécial Agrifaune, 2011, n 291 2-6

L agrainage est-il nécessaire? Les compléments alimentaires joints au blé dans les agrainoirs sont-ils à encourager? Le piégeage est-il nécessaire? Si oui y a-t-il des espèces à privilégier? Comment gérer et répartir au mieux les prélèvements? Ouverture anticipée? Plan de chasse/plan de gestion? Est-il opportun d agir à la fois sur la quantité du prélèvement et sur la durée d ouverture? Quand repeupler? Les résultats des expérimentations menées concernant l agrainage avec du grain sont mitigés quant à l impact sur la démographie de l espèce. L agrainage, très pratiqué comme technique d aménagement, permet de maintenir une mobilisation des chasseurs sur le terrain toute l année. Les tests réalisés d un agrainage à partir de granulés pour les jeunes n ont pas donné de résultat positif. De nombreuses études, entre autre une très démonstrative sur la perdrix grise en Angleterre, ont montré que le retrait de prédateurs permet d améliorer le succès reproducteur d espèces gibier telles que les galliformes ou les tétraonidés. Les prédateurs principaux de la perdrix grise qu il est possible de piéger (selon liste départementale) sont le renard, la fouine, les corvidés. Ne pas oublier de remédier aussi dans la mesure du possible à la présence d autres prédateurs avérés : chats errants, rats La gestion des prélèvements est le 1 er pied du tabouret! Peu importe les outils réglementaires mis en place pour limiter les prélèvements dès l instant où le nombre d individus prélevés par la chasse est en rapport avec la démographie de l espèce. La limitation du nombre de jours facilite le contrôle et permet de gérer plus facilement les chasseurs ; le marquage des individus prélevés, que ce soit sous forme de plan de chasse ou de gestion permet de mieux ajuster le nombre d oiseaux prélevés à l état des populations. La combinaison des deux permet de cumuler les avantages et éventuellement de mieux distribuer les possibilités de prélèvement entre chasseurs lorsque le nombre d attributions est faible. L ouverture anticipée permet de chasser la perdrix tôt en saison au chien d arrêt lorsque des couverts sont encore en place. Compte tenu de la plus forte sensibilité supposée des jeunes oiseaux à la pression de chasse (la plupart des jeunes de l année n ont pas la taille adulte début septembre), il est impératif que le nombre d oiseaux prélevés soit limité par un plan de chasse ou de gestion. Les chasseurs ont obtenu cette possibilité dans 7 départements suite à une bonne gestion cynégétique de populations ayant bénéficié de bonnes années de reproduction. Envisager un repeuplement mérite une réflexion en amont car une telle opération se révèle lourde et coûteuse. Les retours d expérience montrent qu un échec est une source de démotivation conséquente et bien souvent durable. D un point de vue technique, cela doit être un ultime recours, par exemple si les densités stagnent pendant plusieurs années après avoir chuté endessous d un seuil de quelques couples / 100 ha. A-t-on mis en œuvre tous les autres moyens de gestion de la population de perdrix et de son habitat et de façon aussi importante que possible? Dans l affirmative, on peut alors effectivement tenter un repeuplement. Dans ce cas, pour mettre toutes les chances de son côté, il convient de respecter le cahier des charges, établi à la lumière des enseignements du passé. A noter cependant que si les problèmes qui fragilisent les populations sont récurrents (météo devenant plus chaotique ou encore phénomènes de pullulations de micro-mammifères par exemple induisant une sur-abondance de prédateurs), cela risque d amener le gestionnaire à repeupler régulièrement - ce qui implique un coût en moyens humains et financiers non négligeables sans avoir souvent la possibilité de chasser. Mayot, 1999, FS n 249 Mayot et al, 2009, FS n 283 Reitz, 2001, FS n 254 Pour les causes de mortalité des perdrix : Bro et al., 2013, FS n 298 Voir aussi Bro et al., 2008, FS n 281 Reitz, 2003, n 260 Reitz, 2003, n 258 Bro et al., 2012, n 295 Rapport interne «ouverture anticipée», 2008, résumé dans lettre n 16 du réseau, 2009 Bro et Mayot, 2006, FS n 274 3-6

A partir de quelle densité en couples estime-t-on que la question du repeuplement puisse se poser? Si rien de plus n est fait sur le territoire (aménagement de l habitat, piégeage, agrainage), le repeuplement est-il pertinent? Quelle réussite escompter? Il est difficile d apporter une réponse définitive à cette question car cela dépend de la qualité de l habitat et des chances que la population sauvage se redéveloppe d elle même. Cela a ainsi été observé sans repeuplement avec des populations de moins de 5 couples / 100ha. Il serait par ailleurs absurde d envisager un repeuplement dans une population réduite à moins d 1 ou 2 couples / 100ha si le milieu est devenu totalement hostile. Il ne faudrait donc envisager un repeuplement que si 1. la densité observée est de toute évidence très faible au regard de la valeur de l habitat et a décliné depuis plusieurs années, 2. la situation est due à un accident climatique ou à un facteur jouant sur la démographie (environnement, pression de chasse inadaptée) auquel on a remédié au préalable. Au-dessus de quelques couples aux 100 ha, il n y aura aucune difficulté pour que la population se redéveloppe d elle-même si elle se retrouve dans un contexte favorable. Relâcher des oiseaux issus d élevage alors qu il reste une population sauvage susceptible de se redévelopper d elle-même peut se révéler contre-productif (risques sanitaires, de pollution génétique ou de modification des rapports prédateurs-proies) pour la conservation de cette population et inutilement coûteux. Comme dit ci-dessus, si l habitat ou la pression de chasse sont la cause de la régression de la population, il y a peu de chances que des oiseaux issus d élevage, même de qualité, réussissent mieux que la population sauvage. Le repeuplement aura d autant moins de chance de réussir que le milieu sera moins favorable. Pour survivre, les oiseaux relâchés, plus fragiles que les sauvages, doivent bénéficier des conditions environnementales les meilleures possibles. Une analyse réalisée sur plus de 100 opérations a montré que le taux de succès* des repeuplements avec arrêt de la chasse pendant 2 ou 3 ans est généralement de 100% juste après les lâchers, de 50% dans les 10 ans et de 25% au-delà de 10 ans. La réussite de ce type d opérations n est donc pas toujours garantie à moyen terme (une sur deux en moyenne). Néanmoins, le taux de réussite n est pas nul non plus, et un repeuplement bien réalisé peut, dans certains cas, permettre de rebooster une population fragilisée. Toutefois, il est nécessaire de réfléchir avant de lancer ce type d opération aux possibilités de prélèvements cynégétiques suite aux repeuplements. * Le succès est défini comme le constat d une densité plus élevée à une date t après la fin des lâchers que celle de la situation initiale avant lâcher. Voir le «spécial repeuplement», 2006, FS n 274 Voir le «spécial repeuplement», 2006, FS n 274 Bro et Mayot, 2006, FS n 274 4-6

Quelle technique utiliser? L expérimentation menée sur des perdreaux F1 issus de parents sauvages reproduits en captivité au sein d un élevage conservatoire n a pas montré de façon probante que ces perdreaux présentaient une meilleure survie après le lâcher et une meilleure capacité à la reproduction que leurs homologues issus d élevages conventionnels. Ils disposent néanmoins d un patrimoine génétique a priori plus proche des sauvages que celui d oiseaux maintenus en élevage depuis de nombreuses générations et il convient donc de privilégier dans la mesure du possible ces oiseaux pour le repeuplement. Des chercheurs anglais ont également testé différentes techniques d élevage et de lâchers (couples lâchés au printemps, compagnies de jeunes de 10-12 semaines lâchés à l automne avec parents adoptifs en élevage, adoption de jeunes de 6 semaines élevés de façon conventionnelle, adoption de jeunes de 6 semaines élevés sous poules naines) et comparé les résultats obtenus en matière de survie et reproduction sur le terrain (Buner et al. Biol. Cons., 2011). L expérimentation a été menée sur des terrains aménagés à hauteur de 3% de la SAU, piégés et agrainés par un garde-chasse. Ce sont les lâchers de jeunes adoptés par des adultes sauvages qui ont donné les meilleurs résultats. Dans la région du sud de l Angleterre, le taux de survie 2 mois après les lâchers était de 70-80% (suivi par télémétrie) et de 17-30% 6 mois après les lâchers (contact visuel de bagues colorées). On constatera toutefois que si les techniques «lourdes» d élevage donnent les meilleurs résultats, elles n empêchent pas les pertes d être assez lourdes (1 oiseau survivant en janvier pour 3 à 4 oiseaux lâchés en août). On remarquera également que les différences initiales de résultats entre les techniques s amenuisent au fil du temps. Quant à la capacité de reproduction des oiseaux lâchés, elle est inférieure à celle des oiseaux sauvages mais ne présente pas de différence significative entre les méthodes de lâcher. Mayot et al., 2012, FS n 297 Bech et al. 2012 FS n 297 5-6

Peut-on poursuivre la chasse lors d une opération de repeuplement? Quid des centres de sauvetages? Peut-on librement collecter les œufs de perdrix en nature? Repeupler signifie lâcher des oiseaux en vue d augmenter l abondance de l espèce mais pas uniquement au moment de la chasse. Les expériences passées ont montré qu on n obtient jamais une augmentation durable de l abondance au printemps lors de lâchers avec maintien de la chasse, sauf cas particulier de plan de chasse sur les oiseaux sauvages. Cela s explique par le fait que les chasseurs, croyant prélever les oiseaux lâchés, exercent un prélèvement trop important sur la population sauvage relictuelle si les individus de celle-ci ne peuvent être distingués des oiseaux lâchés. Petit à petit la population sauvage laisse alors la place à des reliquats de lâchers qui seront moins aptes à se reproduire sur le terrain que les sauvages. Pour éviter cette situation et s il est inévitable de s orienter vers ce type de gestion très risqué pour la conservation de la population sauvage, il importe de prendre toutes les précautions de nature à limiter le plus possible ces risques : en particulier, tous les oiseaux lâchés devraient être marqués (par ponchos, à défaut par baguage), les prélèvements doivent être limités en quantité et dans le temps pour éviter une forte pression de chasse sur les oiseaux nés sur le terrain et celui-ci doit être impérativement aménagé pour faciliter le maintien d oiseaux sauvages. A noter par ailleurs que la pratique de lâcher des oiseaux issus d élevage en maintenant la chasse n est pas toujours de nature à inciter les chasseurs à la gestion des territoires et les habitue à des prélèvements réguliers plus ou moins conséquents rendant difficile un retour à la gestion des populations sauvages. L expérience acquise dans le cas du faisan commun autorise à le redouter. Associé aux repeuplements, Ils permettent de collecter et de relâcher sur leur terrain d origine des perdreaux issus de nids abandonnés. Cette technique présente l avantage de pouvoir mettre en place un projet départemental et de proposer à tout chasseur d agir pour «ses» perdrix. Elle ne soulève pas, en principe, les questions liées à la génétique des oiseaux lâchés. Un tel projet a lui aussi un coût humain, logistique et financier qu il convient d évaluer au préalable. En outre les potentialités de collecte de nids abandonnés lorsque les densités sont faibles sont limitées. Quant aux résultats, cela peut donner un coup de pouce aux populations mais n empêche pas une tendance lourde de se poursuivre. La collecte des œufs en nature est par ailleurs restreinte par l article L.424-10-2 ème alinéa du code de l environnement qui stipule : «Les détenteurs du droit de chasse et leurs préposés ont le droit de recueillir, pour les faire couver, les œufs mis à découvert par la fauchaison ou l enlèvement des récoltes.» Bro et al., 2006, FS n 274 Mauvy et al., 1992, BM n 171 Ponce-Boutin et al., 2006, FS n 274 Fournier, 1981, BM n 43 Berger, 1987, BM n 118 Mérieau et Bro, 2009, FS n 283 Bech et al., 2012, FS n 297 Millot et al., 2012, FS n 296 6-6