CONCURRENCE DANS LES PROFESSIONS LIBERALES : QUELS AVANTAGES POUR LE CONSOMMATEUR? MARIA JOSÉ BICHO. DG Concurrence - Commission Européenne



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Transcription:

CONCURRENCE DANS LES PROFESSIONS LIBERALES : QUELS AVANTAGES POUR LE CONSOMMATEUR? MARIA JOSÉ BICHO DG Concurrence - Commission Européenne Journée européenne de la concurrence Forum Telecom- Picoas Lisboa, le 9 juin 2000

PLAN DE L EXPOSÉ 1. Introduction 2. Politique de la Commission - objectives - comportements condamnés - comportements acceptables 3. Avantages pour les consommateurs 4. Avantages pour les praticiens 5. Conclusion 2

(Traduction) CONCURRENCE DANS LES PROFESSIONS LIBERALES : QUELS AVANTAGES POUR LES CONSOMMATEURS? 1. Introduction Nous tous, en tant que citoyens, avons besoin, à des degrés divers, des médecins, des dentistes, des pharmaciens, des avocats, des notaires, des architectes, pour ne pas citer d autres professions également importantes. Les entreprises que ce soit les grandes, les petites ou les moyennes font fréquemment appel aux services des avocats, des experts comptables, des notaires des conseils en brevets, etc. Il y a eu une époque où la concurrence était supposée être incompatible avec les valeurs de l éthique, de l intégrité, de l honnêteté et de la compétence propres aux professions libérales. Les gouvernements des Etats membres ont alors décidé de faire bénéficier les professions libérales d un statut particulier en les distinguant des autres secteurs de l économie. Les temps changent. Les marchés des services perdent de plus en plus leur dimension locale ou nationale. L internationalisation oblige les membres des professions libérales à faire face aux défis du grand marché intérieur et à la libéralisation en cours au niveau mondial. Dans ce contexte, les pratiques restrictives et certaines réglementations nationales constituent aujourd hui des entraves sérieuses à l adaptation des services des professions libérales aux besoins nouveaux des consommateurs. Pour cette raison, plusieurs Etats membres ont récemment mis en oeuvre ou ont entamé des réformes de leurs législations. L objectif de ces réformes est de progresser dans la deréglementation afin d intensifier la concurrence au sein des professions libérales dans l intérêt des consommateurs. 3

2. La politique de concurrence de la Commission en matière de professions libérales 2.1. Quels sont les objectifs de la Commission dans ce domaine? Premièrement, l objectif de la Commission dans ce domaine est d exiger que les activités des membres des professions libérales s exercent en concurrence, en tenant compte des spécificités de la profession libérale en cause. Cet objectif, implique, sans aucun doute, l abolition de certains privilèges économiques des ordres professionnels, pour empêcher que leur pouvoir d autoréglementation ne soit pas utilisé au seul profit des membres de la profession, au détriment de la grande majorité des citoyens. Toutefois, cet objectif n oblige pas à démanteler les ordres professionnels ni met en cause leur pouvoir réglementaire sur les questions de nature nonéconomique. Ceci veut dire que la Commission 1 a l intention d identifier et de séparer les mesures privées ou étatiques qui sont inacceptables, de celles qui sont acceptables, dans une économie de marché. De cette façon, elle contribuera à améliorer la transparence et à augmenter la sécurité juridique des intervenants dans le secteur et, en même temps, à rendre les services des professions libérales plus accessibles aux consommateurs. Deuxièmement, la Commission développe sa politique de concurrence avec l objectif de soutenir la tendance vers la libéralisation et d inciter les Etats membres à progresser dans cette voie. Le Commissaire Mario Monti considère le secteur des professions libérales comme prioritaire et il souhaite que l action de la Commission puisse être utilisée comme catalyseur des réformes nécessaires. 2.2. Quels sont les critères sur lesquels se base la politique de la Commission? Les critères généraux qui sont à la base de l action de la Commission ne sont pas différents de ceux qui sont suivis dans d autres secteurs de l économie : (1) l action de la Commission porte sur les cas qui présentent une dimension communautaire ; (2) les membres des professions libérales sont des entreprises lorsqu ils exercent leur profession à titre d indépendant ; (3) les ordres professionnels sont des associations d entreprises lorsqu ils représentent leurs membres en tant qu entreprises ; (4) le statut particulier dont un ordre professionnel bénéficie, c est-à-dire, le fait qu il s appelle, par exemple, «corporation d intérêt public» ou 1 Par le biais de sa pratique administrative et décisionnelle. 4

«association d intérêt public» n a pas d incidence sur l application des règles de concurrence à ses comportements restrictifs ; (5) le fait que les décisions restrictives d un ordre professionnel soient prises sur la base d une délégation de pouvoir attribuée par les pouvoirs publics ne les exclut pas, nécessairement, du champ d application des règles de concurrence. 2.3. Quels sont les comportements que la Commission considère comme condamnables et pourquoi? La Commission reconnaît que la concurrence dans les professions libérales doit se faire essentiellement par la qualité des services. Cependant, la concurrence, en particulier, sur les prix des services et sur l information exacte et complète sur les services disponibles doit également être possible. La fixation collective d honoraires (qui soient minima, fixes, maxima ou indicatifs), c est-à-dire l établissement de barèmes de prix par les ordres professionnels fait partie des plus graves infractions aux règles de concurrence du Traité. Les barèmes d honoraires rendent difficile l entrée sur le marché et empêchent l innovation. En 1993, la Commission a obligé l ordre professionnel des expéditeurs en douane en Italie à mettre fin aux tarifs minima et maxima obligatoires qui étaient par la suite entérinés par loi 2. Elle a également condamnée la loi italienne qui conférait à l ordre professionnel le pouvoir d établir les tarifs. Le juge communautaire a confirmé aussi bien la décision de la Commission contre l ordre en cause 3 que celle contre l Etat italien 4. Plus tard, en 1995, l ordre professionnel des agents de brevets en Espagne a été obligé à mettre fin aux barèmes d honoraires minima, une compétence qui lui était conférée par loi 5. Les limitations injustifiées à la publicité véridique sont inacceptables. La Commission considère que l interdiction totale de la publicité en général et de la publicité comparative, en particulier, n est pas acceptable. Elle accepte, toutefois, des limitations nécessaires à garantir la déontologie. La publicité lorsqu elle n est pas trompeuse constitue un moyen important 2 Décision de la Commission du 30 juin 1993, CNSD, (JO L 203 du 13.8.93). 3 Arrêt du Tribunal de première instance du 30 mars 2000, affaire T-513/93, CNSD/Commission, non encore publié. 4 Arrêt de la Cour de Justice du 18 juin 1998, affaire C-35/96, Commission/Italie, Recueil 1998, p.i- 3851. 5 Décision de la Commission du 30 janvier 1995, COAPI, (JO L 122 du 2.6.1995 ). 5

d informer les consommateurs sur les services qui sont disponibles et sur leurs prix. Dans une décision de 1999 concernant l Institut des mandataires agréés auprès de l Office européen des brevets 6, la Commission a apprécié, pour la première fois, les aspects relatifs aux restrictions à la publicité. Les restrictions injustifiées à l offre active des services sont également inacceptables. Le principe suivi par la Commission consiste à considérer que les membres d une profession libérale doivent pouvoir rechercher activement des clients. Des exceptions peuvent être admises à ce principe pour éviter des excès. Ce n est que dans le contexte propre à chaque profession qu il est possible d établir les exceptions à la règle. Dans sa décision de 1999, la Commission a également apprécié ces aspects et a obligé l Institut des mandataires agréés auprès de l OEB à mettre fin à l interdiction de démarcher sauf pour ce qui concerne les affaires en cours. Les entraves excessives à l entrée dans la profession imposées par les ordres professionnels doivent être bannies. L imposition par les ordres professionnels de conditions supplémentaires aux conditions établies par loi pour exercer une profession est, en principe, interdite. En constituent des exemples l obligation de réussir un examen comme condition d affiliation à l ordre ou la limitation du nombre de stagiaires si ces mesures ont le même effet que, par exemple, les numerus clausus. Une organisation professionnelle peut également enfreindre les règles de concurrence, lorsqu elle applique de façon non-objective ou discriminatoire les conditions d accès à la profession établies par la loi. Les limitations aux formes d exercice de la profession peuvent également être néfastes. Les restrictions à la collaboration avec d autres professions ou à la constitution de sociétés sont des sujets d actualité en discussion dans plusieurs Etats membres et dans des enceintes internationales telles que l OCDE. Jusqu à présent, la Commission ne s est pas encore prononcée, formellement, sur ce type de restrictions qui, sans doute, empêchent la création de nouvelles structures, le cas échéant, plus efficaces. Cependant, il est probable qu une interdiction totale de collaboration d une profession avec une autre ne soit pas, en principe, acceptable. 6 Décision de la Commission du 7 avril 1999, IMA, (JO L 106 du 23.4.1999). 6

2.4. Quelles pratiques considère la Commission comme acceptables? Il est courant que de nombreuses professions libérales ressentent également comme déontologiques des pratiques qui sont réellement restrictives de concurrence et qui protègent uniquement les intérêts de leurs membres. Pour cette raison, ce n est que dans le contexte propre à chaque profession que l on peut identifier les règles qui sont vraiment déontologiques. Les exemples les plus communs sont : les règles destinées à assurer le secret professionnel ou à éviter les conflits d intérêt. les règles qui sont nécessaires pour éviter la publicité trompeuse ou mensongère. les règles qui imposent des devoirs de compétence, d impartialité, d intégrité et de responsabilité. les règles qui évitent une sollicitation excessive de la clientèle, par exemple, dans certaines conditions, la sollicitation active d un client dans une affaire qui est en cours auprès d un autre membre de la profession. Je viens de parler des comportements des ordres professionnels, des inacceptables, même si les législations nationales les autorisent, et de ceux qui sont acceptables. Voyons maintenant ce qui se passe avec les comportements étatiques. 2.5. Est-il possible que les Etats membres enfreignent les règles de concurrence? La réponse à cette question est affirmative. Les Etats Membres peuvent enfreindre les règles de concurrence du Traité, lorsqu ils imposent ou renforcent, par le moyen de législation, des restrictions de concurrence du type que j ai indiqué comme inacceptable. Cette situation peut avoir lieu lorsque qu une législation délègue à l organisation professionnelle le pouvoir d adopter de telles pratiques restrictives, mais également lorsque la législation se limite à approuver les pratiques restrictives qui ont été adoptées par les organisations professionnelles je cite comme exemple la législation italienne encadrant les expéditeurs en douane en Italie qui d une part déléguait à l ordre le pouvoir de fixer le tarif et d autre part entérinait par loi le tarif fixé par l ordre professionnel. La Commission, considère que les législations de ce type doivent être abrogées. 7

Il existe, toutefois, des législations qui sont, en principe, compatibles avec règles de concurrence du Traité. Je peux citer l exemple d une législation qui prévoit les conditions de qualification pour exercer une profession ou des normes de compétence professionnelle (exigence de diplôme ou titre, stage, affiliation obligatoire à l ordre professionnel, etc.), si ces conditions sont nécessaires pour atteindre l objectif d assurer la qualité des services. La Commission admet la nécessité de garantir l existence d un certain niveau de réglementation (que se soit publique ou privée) pour assurer la qualité des services. L important est de trouver un bon équilibre entre réglementation et concurrence. 3. Les avantages pour les consommateurs que l action de la Commission entraîne Nous savons qu en raison des restrictions qui, prétendument au nom de la préservation de l intégrité et de l indépendance du praticien et également de la protection du consommateur, existent dans la plupart des professions libérales, le citoyen a beaucoup de difficulté à trouver le praticien qui lui convient que ce soit en matière de service ou de prix. Comment la politique de la Commission, que je viens d exposer, peut-elle améliorer cette situation? La ligne que la Commission préconise et recommande aux Etats membres de suivre fera augmenter la concurrence, en préservant, en même temps, la qualité des services et la protection du consommateur et créera les conditions pour donner au citoyen une possibilité de choix diversifié et motivé sur le praticien à qui s adresser. Pourquoi? Premièrement, parce que la prohibition de la fixation d honoraires par les ordres professionnels implique que chaque membre d une profession libérale doit fixer individuellement le prix des services qu il fournit. Les conditions pour la diversification des services disponibles sont ainsi créées. Le consommateur pourra donc choisir entre un service plus cher car de meilleure qualité ou plus complet et un service de moindre qualité ou plus rudimentaire mais moins cher7. Les prix auront tendance à baisser. Les services des professions libérales seront plus accessibles aux citoyens. Deuxièmement, parce que, la suppression, exigée par la Commission, des restrictions à la publicité véridique, implique que les praticiens pourront 7 Si l on dispose seulement de services de qualité élevée, le prix est également élevé et beaucoup de consommateurs doivent s en passer. 8

annoncer librement et sans limitation dans le temps, leur cabinet que ce soit dans la presse ou dans les pages jaunes. Ils pourront également annoncer les services qu ils offrent ainsi que leurs prix. L annonce d une spécialisation, expertise ou expérience professionnelle particulières et encore la comparaison objective, exacte et vérifiable des conditions des services qu ils offrent avec celles des concurrents est également possible. Le consommateur disposera ainsi d une information exacte et précise sur les services professionnels qui sont disponibles et sur leurs prix. Troisièmement, parce que, la possibilité de mettre en oeuvre des nouvelles formes de collaboration entre membres de la même profession et éventuellement entre professions différentes, entraînera la création de nouvelles structures qui permettront le développement de services fournis sous forme de guichet unique. Les utilisateurs (entreprises et citoyens) pourront, dès lors, s adresser à un seul cabinet même quand ils ont besoin de services de plus d une profession. 4. Avantages pour les praticiens résultant de la concurrence Les praticiens tirent également des avantages d une concurrence saine. Ils pourront adapter leurs services aux besoins des utilisateurs et à l évolution des services au niveau mondial. Ce seront les meilleurs, les plus compétents qui auront la plus grande probabilité de voir leurs mérites reconnus et de réussir. L entrée sur le marché sera plus facile pour les jeunes. Les plus sclérosés seront obligés de se moderniser, d offrir des nouveaux services et/ou de baisser les prix, enfin, à devenir plus compétitifs. Par ailleurs, les ordres professionnels pourront se concentrer sur des fonctions qui remplissent des intérêts plus généraux, telles que la mise en oeuvre d actions de formation, l amélioration de la qualité des services, enfin, ils pourront contribuer davantage à l augmentation de la réputation de la profession. 5. Conclusion Par le développement des lignes d action en matière d application des règles de concurrence du Traité aux professions libérales, que je viens d exposer, la Commission européenne : Incite les Etats membres à progresser dans la voie de la libéralisation du secteur, en abrogeant la législation qui protège uniquement les intérêts économiques des membres des professions libérales ou qui n est pas nécessaire ou est excessive pour garantir la qualité des services. 9

Incite les praticiens à suivre la voie d une concurrence saine et efficace, par la fixation individuelle et libre de leurs prix, par l information précise des conditions des services qu ils fournissent ainsi que de leurs expertises particulières, par l innovation dans les services et dans les formes de les fournir, par la pénétration dans des marchés transfrontaliers. Incite les ordres professionnels à abandonner les pressions qu ils exercent sur les pouvoirs publics avec l objectif d empêcher la libéralisation et d assurer des avantages économiques dont les bénéfices sont, à long terme, illusoires, compte tenu de l évolution des marchés des services au niveau mondial. Incite les consommateurs et leurs organisations à devenir plus exigeants quant aux informations disponibles sur les services professionnels et sur les prix à payer de façon à pouvoir procéder à leur comparaison avant de prendre une décision. Elle les incite également à dénoncer aux autorités de concurrence nationales ou à la Commission européenne, des pratiques qui faussent le jeu de la concurrence. Le renforcement de la concurrence dans les professions libérales, selon l orientation que la Commission préconise, permettra à ce secteur de donner des réponses plus adéquates aux exigences de dimension, de globalisation et de productivité imposées par l internationalisation de marchés davantage concurrentiels, aspects qui sont de plus en plus présents dans les nouvelles demandes des clients. En résumé, le secteur deviendra globalement plus efficace et les professions libérales rendront un meilleur service à la société. Plus de concurrence signifie, il est certain, plus de liberté qui, à son tour, demande plus de responsabilité aux membres des professions libérales. Mais les femmes et les hommes qui exercent une profession libérale connaissent bien la responsabilité et ne vont, sûrement, pas craindre la responsabilité accrue que la concurrence entraîne. Merci de votre attention Lisbonne, le 9 juin 2000 10