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Transcription:

MC PRODUCTIONS 9, boulevard de Strasbourg - 83000 TOULON - Tél : 94 09 08 28 - Fax : 94 62 30 21 Dépôt légal avril 1995 - ISBN 2-87764 - 337-9 Tous droits d'adaptation et de traduction strictement réservés pour tous pays. Conception graphique : LAURENT ARNAUD mise en page STUDIO BRUN Photogravure couverture : QUADRISCAN - LA BRILLANNE Photogravure cahier photo : OFFSET-MEDITERRANEE - GOLFE-JUAN

A R R E C K X SENATEUR ET... PARRAIN? JOSÉ LENZINI PLEIN S UD

Dans la même collection : «Ils ont tué YANN PIAT» de CLAUDE ARDID. «L'AFFAIRE Violaine, une mère en prison» de JEANNINE MEUNIER-COLETTE.

A Julie, son frère et son père... «ce cri qui n'a pas la rosette»

En abordant cette biographie, nous souhaitions répondre à quelques questions importantes : Qui était Maurice Arreckx? Comment avait-il évolué dans ce Var qui, initialement, lui était tellement étranger? Était-il seulement le «parrain» politique (l'expression est de lui) de ce département? Avait-il mis en place un système? Quelles étaient ses éventuelles relations avec le milieu? De sérieuses investigations nous ont permis d'apporter des réponses dans les pages qui suivent. Mais il nous est également apparu qu'un système pouvait en générer ou en cacher d'autres. Que certains élus étaient à l'affût d'opportunités, depuis de nombreuses années. Et que bien d'autres, à l'instar de M. Arreckx lui-même, avaient choisi le silence et, parfois l'amnésie. En reconstruisant le puzzle d'une vie, nous avons mis à jour des situations, des hommes et des comportements inattendus. Par ailleurs, en février 1995, nous avons pris contact avec M. Maurice Arreckx, incarcéré à la prison-hôpital des Baumettes, pour lui proposer de sortir de son mutisme, de s'exprimer dans le cadre d'un chapitre

complémentaire de cette biographie à laquelle il n'aurait pas accès avant sa publication. Il nous donna son accord. Il s'ensuivit une série d'échanges émaillés de questions auxquelles il a répondu. C'est l'objet du dernier chapitre de ce livre dans lequel il livre sa vérité, en s'adressant «à ceux qui lavent plus blanc que blanc». Puisque le sénateur ne les nomme pas, sans doute se reconnaîtront-ils... Toulon, avril 1995

L'homme allait d'un pas de sénateur. Juillet tirait à sa fin, la lumière était douce. Maurice Arreckx venait de quitter son domicile dont les fenêtres s'ouvrent sur la place de la Liberté ; il trottinait sur le trottoir du boulevard de Strasbourg, artère principale de Toulon. Flanqué d'un de ses derniers fidèles, il guettait les regards amis, allait au devant de poignées de mains plus rares. Il marqua une halte à l'angle du bâtiment du Conseil général, dont la pompeuse architecture Napoléon III pouvait attirer l'œil. Il n'était qu'à quelques pas de ce vaste bureau de président situé au premier étage ; un bureau qu'il occupait encore quelques semaines auparavant. Un homme s'approcha, le salua d'une accolade cérémonieuse et d'un œil humide. - Nous sommes tous avec toi, Maurice! Le visage du sénateur s'éclaira. Plus qu'à tout autre moment, cette familiarité lui allait droit au coeur ; il s'était toujours plu à répéter que la véritable reconnaissance de l'électeur et du citoyen, c'est quand il vous appelle par votre prénom. C'était l'avis d'alain Poher, président du Sénat qui, présidant son jubilé politique, estimait qu'il «existe dans notre pays quelques villes qui appellent le souvenir d'un homme. Paris et

Étienne Marcel, Bordeaux et Michel de Montaigne, peut-être aussi des noms plus contemporains! Toulon semble bien devenir une de ces villes grâce à Maurice Arreckx.» Dans l'onctueuse dithyrambe, M. Poher faisait preuve - cette fois-là - d'esprit prophétique. Heureux... il l'était le Maurice en ce début d'été, même si on le sentait un peu moins alerte qu'à l'habitude, manquant de cette tonicité sur laquelle le temps ne semblait jusqu'alors n'avoir eu aucune prise. Brusquement, ses 77 ans se rappelaient à son (mauvais) souvenir. Il paraissait las, un peu voûté dans son costume bleu nuit. Je m'étais approché pour lui demander une interview. Arriva un policier municipal, juché sur son cyclomoteur. En quelques secondes à peine, le sénatorial visage se ferma, ses traits se crispèrent. Le pandore passa sans le saluer. Le sénateur amorça un quart de tour sur lui-même pour suivre le brigadier. Sur les traits de l'élu, la crispation s'effaça sous l'inquiétude ; il s'était retourné vers son accompagnateur, comme pour se rassurer puis, vieux réflexe politique, il s'était recomposé un sourire de circonstance et m'avait lancé, maladroitement : - Non! Bien sûr... ça n'est pas pour moi! Ce 27 juillet 1994, le «maire du Var», comme il aimait à s'auto-proclamer, m'était apparu comme un homme traqué, seul, à la dérive. Quelques jours plus tard, il acceptait de me recevoir chez lui pour une interview. À la condition expresse que nous ne parlions pas de «son affaire». Ce qui ne l'avait pas empêché de s'étonner, d'entrée de jeu, de «l'entreprise de déstabilisation menée contre lui, au cœur de

la campagne pour les élections cantonales» qu'il devait perdre au profit de la candidate du Front national. Et de manifester son indignation devant un amalgame, faisant que «l'affaire Piat est devenue l'affaire Arreckx.» Lâché par la plupart de ses collègues politiques toulonnais et varois, par ses collègues du Sénat, il l'était également par son ami de plus de trente ans, Guy Liautaud, qui le désignait quasiment comme la clé de voûte d'un système politico-financier au sein duquel le milieu avait trouvé ses marques. J'avais hasardé une question concernant un éventuel compte en Suisse ; il s'était borné à répondre : «Ils n'ont qu'à vérifier...» La suite devait nous prouver que l'honorable Maurice ne possédait pas un, mais deux comptes suisses. Confiant dans l'avenir et attaché à défendre son honneur, le vieil homme s'estimait «amnistié, d'avance, par une grande partie de la population» et attendait «une véritable absolution ne pouvant venir ni d'un juge, ni des politiques mais des électeurs.» Il était décidé à briguer un nouveau mandat au Sénat. Nous étions le samedi 30 juillet. Deux jours plus tard, il devait être entendu par le juge Thierry Rolland. Face à cette échéance, il affichait une sérénité empruntée : «Ma valise est prête. Si c'est la décision du juge de me placer en détention, je m'y plierai et je ferai retraite en prison, j'emporterai une bible qui m'accompagne depuis de nombreuses années.» Le lundi 1er août, au terme d'une très longue audition, Maurice Arreckx, ancien maire de Toulon durant 27 ans, ancien président du Conseil général du Var et,

toujours, sénateur, était incarcéré à la prison-hôpital des Baumettes sous la triple inculpation de corruption active, de recel d'abus de confiance et de complicité d'abus de confiance. «Emprisonner un sénateur septuagénaire, atteint d'un cancer... ce serait une première!» avait-il ironisé, au terme de notre entretien. Ce fut une «première». Une carrière de 35 ans prenait fin avec aussi peu de relief que celle d'un «parrain» : terme dont M. Arreckx avait revendiqué la paternité sur une radio périphérique, avant de se justifier en expliquant qu'il entendait ce mot dans son sens chrétien. Terrible chute pour cet homme plus énigmatique qu'il n'y semblait jusqu'alors. Les mythes enluminant le personnage apparaissaient alors sous un nouveau jour. Comment ne pas évoquer ses amitiés sulfureuses, notamment avec «ce commerçant de ses amis» Jean- Louis Fargette, patron du milieu toulonnais? Comment ne pas s'interroger sur cette existence étrange au sein de laquelle le président était tantôt un honnête bourgeois, bon père de famille, catholique et pratiquant ; tantôt un «parrain» gérant les équilibres politiques du département, menant une vie plus ou moins bourgeoise dans l'évasion touristique... ou de fonds? Toujours affable et souriant, serviable et courtois, il était populiste comme d'autres sont abonnés au téléphone. Avec une bonne nature qui le rendait outrageusement sympathique. Il est vrai que l'actualité - fortement aidée par des magistrats dignes de leur fonction - allait nous prou-

ver qu'ils étaient quelques uns, ici et là, à ne pas être aussi exigeants vis à vis d'eux-mêmes qu'ils l'étaient dans leurs programmes, leurs discours. Nous serions tenté de penser et d'écrire qu'en la matière toute personne existant, ayant, ou devant exister, et susceptible de se reconnaître dans le portrait qui suit, ne serait pas le fait du hasard. Peut être celui de nécessités dont certains hommes politiques, certains élus outrepassent parfois les limites jusqu'à ne les plus retrouver, reconnaître ou apprécier. A force de pouvoir, ils édifient subrepticement les critères de nouvelles lois qui, pour n'être pas conformes avec celles des Codes, n'en deviennent pas moins les leurs. Erreurs de jeux. Petites tricheries sous l'œil d'un public amusé, admiratif ou complaisant. Jusqu'au moment où, sur un hors-jeu, l'arbitre sort un carton rouge! Tragique sortie de scène pour Maurice Arreckx, un homme longtemps écartelé entre morale et compromis, entre religion et pouvoir, entre liberté et expiation. Et si nous avons voulu dresser, ici, l'itinéraire d'un enfant gâté par la vie et le succès... c'est aussi à titre d'exemple, parmi tant d'autres. Parrain? M. Arreckx l'est peut-être devenu, au-delà de ses aspirations religieuses. Quand, à force de puissance, il lui a fallu assumer le quotidien, le devenir de ses nombreux neveux en politique et réussite. La plupart de ces hommes constituant les rouages d'un système souffrant aujourd'hui d'une égale amnésie. Alors, une petite rétro-projection s'imposait. Histoire de rafraîchir les mémoires, de reconstituer ce puzzle dont bon nombre d'observateurs avaient vécu chaque pièce avec une évidente circonspection. Nous voilà

aujourd'hui face à cette vaste mosaïque dont il faut bien reconnaître qu'elle n'est pas entièrement reconstituée. Et le sera-t-elle un jour? Il manque ici ou là quelques éléments qui permettraient de discerner quelques visages qu'on pressent, mais qui gardent cette belle pudeur de l'anonymat. Aux excessives confidences des uns et des autres succède le temps du silence. Un mutisme qui ressemble à l'omerta. On tenait enfin les meurtriers de Mme Piat mais connaîtrait-on un jour le commanditaire et le mobile de cet assassinat qui avait permis de mettre à jour «des affaires»... qui, de toute évidence, en cachaient bien d'autres? Revenons au début de l'année 1994. Maurice Arreckx ne savait pas encore qu'il allait perdre son poste de conseiller général et, par là même, de président de l'assemblée départementale. Il avait usé et abusé de sa popularité. Le temps avait passé. Les prochaines élections cantonales lui paraissaient moins favorables. Il se sentait menacé mais espérait un sursaut ultime de son électorat traditionnel. Mauvaise analyse. Cette année serait celle de tous les dangers pour le vieux sénateur. Elle sonnerait le glas de sa carrière. Lui qui craignait la solitude aurait à en faire l'épreuve. Au soir du second tour des cantonales. Devant les juges. Dans cette minuscule cellule de la prison-hôpital des Baumettes où il médite sur cette formule qui lui était chère, du temps de sa gloire et de son pouvoir : «La justice pour tous, les faveurs pour mes amis.»

CHAPITRE PREMIER UN 8 JANVIER 1992... Stupeur dans le Var et en France, ce 25 février 1994. Il est 20 h 08 ; Mme Yann Piat, une député varoise de quarante-quatre ans, a été exécutée de deux balles de gros calibre par deux tueurs à moto alors qu'elle regagnait son domicile situé sur les hauteurs de Hyères. D'importantes forces de police sont aussitôt dépêchées de Paris. Le ministre de l'intérieur déploie la grande artillerie : Jacques Franquet, directeur central de la PJ (police judiciaire), et son adjoint Ange Mancini viennent prêter main forte à Marc Pasotti, patron de la «Crime» (brigade criminelle) de Marseille. Un nombre impressionnant de policiers enquêtent et auditionnent sans relâche. Une certitude se dégage immédiatement: les circonstances de cet assassinat, la méthode employée indiquent qu'il s'agit d'un «contrat» monté par des professionnels. Les enquêteurs semblent privilégier l'hypothèse d'un règlement de compte politique: en effet, Mme Piat avait déjà été menacée de mort, au cours de la campagne pour les élections législatives de 1993. Femme au caractère affirmé et à la personnalité contrastée, la parlementaire varoise comptait des amis, mais des adversaires et détracteurs également. Ceux

du présent, comme ceux rencontrés et affrontés au fil d'une carrière politique relativement atypique. Entrée à l'assemblée nationale en mars 1986, elle y sera, deux ans plus tard, la seule députée du Front national réélue après le retour au scrutin majoritaire. Jean-Marie Le Pen la présente comme sa «filleule» ; mais dès juin 1988, quelques mois seulement après sa réélection, elle prend ses distances avec ce parrain dont elle dit ne pas apprécier les jeux de mots, notamment le calembour visant Michel Durafour, ministre de la fonction publique, qualifié alors de «Durafour crématoire». Le 10 octobre de la même année, elle est exclue de la formation d'extrême-droite au sein de laquelle elle militait depuis 10 ans. Ses dirigeants lui reprochent en particulier d'avoir appelé à voter pour un candidat du RPR au second tour des élections cantonales, dans le Var. On ne lui pardonne pas, non plus, d'avoir fait savoir qu'elle voterait le projet de loi sur le RMI auquel M. Le Pen est opposé. Dépitée, elle claque la porte et annonce son «refus de rallier une quelconque formation de droite. On peut avoir sa force propre, hors de tout parti.» La bouillante député peut s'appuyer sur un électorat. Elle a le vent en poupe et certains amis prévenants ne manquent pas de lui rappeler l'engagement de M. Arreckx (président départemental de l'udf et président du Conseil général du Var) qui, le 30 mai 1988, avait déclaré : «Je préfère voir un député du Front national élu plutôt que le candidat du Parti socialiste» avant d'ajouter : «On ne peut ignorer 25% des Varois qui ont voté pour le FN.» Les consignes du président

avaient favorisé l'élection de la candidate d'extrêmedroite qu'elle était alors. Reconnaissante, et surtout consciente que nulle carrière politique n'est possible hors des appareils, elle transige, met un bémol à sa fugace détermination d'indépendance pour rallier l'udf. Certains mal-pensants prétendront qu'il s'agit là d'une «récupération» en vue d'éliminer, à terme, cet électron libre et particulièrement incontrôlable dont l'important crédit électoral ne doit pas se diluer, retourner au Front national. Encore moins s'éroder au fil des consultations électorales. Candidate aux élections législatives de mars 1993 dans la 3ème circonscription du Var dont elle est député sortant, elle devance largement le candidat du Front national dès le premier tour. Elle est élue au second. Ces dernières élections ont été agitées ; elles ont laissé des traces dans les mémoires. Alors même que les enquêteurs s'activent pour retrouver les criminels et remonter jusqu'au commanditaire, les commentaires vont bon train. Les proches de Mme Piat rappellent que la permanence de la député a été plastiquée le 18 janvier 1993, qu'on a lancé des engins fumigènes au cours de l'un de ses meetings et que, dans la nuit du 20 mars 1993, elle a même reçu des menaces de mort par téléphone, à trois reprises : un correspondant anonyme l'informait qu'elle-même et sa fille aînée faisaient l'objet d'un «contrat». Elle avait déposé une plainte et trois de ses agresseurs présumés étaient interpellés les 12 et 13 août suivants : il s'agit de Michel Guigou, d'epifanio Perricolo et d'eric Jouhannel. Ce dernier reconnaissait avoir perturbé le

meeting de Mme Piat dans le cadre d'une «opération» menée avec le concours de vigiles d'une boîte de nuit; il mettait en cause Michel Guigou dans l'attentat contre la permanence. À la même époque, Jouhannel passait d'autres aveux : il avait été approché pour «réaliser un contrat ; on m'a proposé une forte somme d'argent pour tuer une personnalité dont on me donnerait le nom plus tard. Comme j'ai refusé, je n'ai jamais su de qui il s'agissait.» Difficile d'affirmer que Yann Piat était alors visée. Toujours est-il que des investigations sont ouvertes. Mollement. Un peu trop au gré de certains magistrats estimant rétrospectivement qu'on aurait pu avoir à cette époque des renseignements utiles, procéder à des interpellations, calmer les velléités de certains excités. Nous avons eu confirmation, de source judiciaire autorisée, que, dans la troisième quinzaine du mois d'août 93, suite à ce témoignage, un rapport circonstancié mettait en évidence certaines relations entre le milieu et un homme politique varois qui aurait pu être entendu - comme témoin - si le dossier n'avait mis près de trois mois pour être rouvert, non sans avoir transité par de multiples bureaux et par la Chancellerie. Il est hasardeux de tirer des conclusions sur les auditions qui auraient pu alors avoir lieu. Elles auraient pu, cependant, influer sur le cours des choses... Qui donc avait intérêt à faire disparaître Yann Piat? Qui avait osé abattre une femme dans de pareilles circonstances? Chacun pointe le doigt en direction du milieu : il s'agit sans doute d'une vengeance des amis de

Fargette, ce chef de la mafia toulonnaise assassiné en Italie le 1 7 mars 1993. Il se trouve même une personnalité politique influente pour multiplier suggestions et déclarations en ce sens. Comme nous le verrons, cette piste n'est pas la meilleure. Même (et surtout) si elle permet à certains de retourner dans l'ombre. De fait, pour le milieu comme pour de nombreux affairistes nourris au béton, celle qu'on avait - peutêtre abusivement-surnommée «Yann d'arc» devenait gênante. Et pour de multiples raisons dont il n'est pas évident qu'elles étaient toutes fondées. La parlementaire ne cachait pas sa volonté de conquérir la mairie d'hyères ; elle avait les moyens d'y parvenir. Soucieuse de s'imposer dans le monde un tantinet phallocrate et conservateur de la politique varoise, avide de médiatisation, elle multipliait déclarations et mises en garde à peine voilées : «Doit-on se résigner à ce que Hyères et sa région soient une «zone franche» pour le banditisme et la délinquance en tout genre?» s'interrogeait-elle dans un communiqué publié le 29 janvier par la presse départementale. Ce à quoi elle répondait sans ambages : «Pour ma part, j'estime qu'il est grand temps de mettre un coup d'arrêt à cette dérive.» Et chacun d'interpréter cette mise en garde avec une égale inquiétude, y voyant une attaque contre tel ou tel «secteur»... C'était selon les intérêts des uns et des autres. Ce pouvait être le blanchiment d'argent sale provenant de la drogue ou de la fausse monnaie, par le biais du casino, des machines à sous ou de l'immobilier. D'autres y sentaient une menace contre le bitume ou les résidences pour personnes âgées fleu-

rissant dans ce département vieillissant. Certains, et non des moindres, ne trouvaient plus leurs repères et appréhendaient un grand vide risquant d'être rapidement comblé par de nouveaux «entrepreneurs» plus ou moins occultes. Au-delà de cette cité balnéaire, c'est l'agglomération toulonnaise qui risquait d'amorcer une trop rapide mutation. Au détriment de tous et de chacun, consensuellement unis dans le même souci d'expansion économique sur fond de marinas, d'aménagements touristiques et balnéaires, d'infrastructures, de maisons de retraite ou de golfs... pas toujours très clairs sur les bords de notre Méditerranée. Or, voilà qu'une parlementaire se mêlait de vouloir briser cette belle harmonie. Une femme qu'on pensait influente et dont certaines amitiés faisaient également craindre une redistribution de cartes politiques et économiques à Hyères comme au-delà. En plus, elle laissait entendre qu'elle avait des dossiers. Peut-être un peu trop fort. Et à trop de gens frileux ou angoissés. De fait, cette femme très active vivait sur le terrain, accumulait des informations, des confidences qu'elle consignait sous forme de notes manuscrites prises à la diable au fil de rencontres, à l'issue de réunions, de déjeuners en ville ou de discussions plus personnelles. Elle n'avait généralement pas le loisir d'y mettre de l'ordre, de confectionner des fiches, des dossiers. Mais était-ce utile? Elle faisait confiance à sa (bonne) mémoire. En fait, Mme la député affectionnait l'écriture. Mais beaucoup plus pour son plaisir. Il y a quelques années, elle nous confiait que, lors des trop longues séances de l'assemblée nationale, elle écrivait

de petits contes pour ses filles. Et elle regrettait de n'avoir pu faire une carrière plus littéraire. Mais la politique n'est souvent qu'un mauvais roman. Noir. S'il est difficile aux enquêteurs de reconstituer le puzzle de ces billets épars, au moins pourront-ils s'intéresser à une lettre de Mme Piat qui, de fait, est un véritable réquisitoire «post-mortem». Dès le lendemain de l'assassinat, Geneviève Cassése, attachée parlementaire de Mme Piat, se rend chez les policiers et leur remet une lettre que lui a confiée la député, deux ans auparavant, en lui demandant de l'ouvrir s'il lui arrivait malheur. Ayant appris le drame, elle a décacheté l'enveloppe contenant un feuillet manuscrit par Mme Piat elle-même. Daté de Paris, le 22 janvier 1992, le texte tient en quelques lignes : «Je soussignée Yann Piat, saine de corps et d'esprit, accuse en cas «d'accident» mortel sur ma personne ou autre suicide MM. M. Arreckx, JL. Farget, JL. Barrault, Bernard Tapie, D. Savastano avec qui je suis en relation politique «forcée». Photocopies de la présente sont déposées chez Me Raffaelli, conseiller juridique (Hyères, Var), Me Georges Louis Bachelot (notaire). L'original est confié à Mme Geneviève S.» Cette lettre terriblement accusatrice appelle quelques observations. D'une part, l'orthographe de certains prénoms et patronymes : la personne à qui Mme Piat confie cette lettre se prénomme Ginette et non Geneviève ; il y a des erreurs dans l'orthographe de Farget(tte) et de Barrau(lt) dont le prénom est Jean- François et non JL. Par ailleurs, les enquêteurs ne manqueront pas de s'interroger sur les «relations politiques «forcées» évoquées par la député dont l'habituelle

méfiance peut expliquer qu'elle ait pris la précaution de déposer cette lettre en trois endroits différents. Ce qui est plus étrange, c'est que cette accusation écrite remontant à 1992, elle n'ait pas jugé bon de la retirer. Mal assortie, tout de même, cette galerie de portraits où voisinent d'honorables élus et deux curieux paroissiens. Maurice Arreckx est sénateur, président du Conseil général du Var (depuis 1985) ; il a été maire de Toulon de 1959 à 1985 et arbore le ruban rouge au revers du veston. Bernard Tapie est député des Bouches du Rhône, président du prestigieux OM (qui, à l'époque, écrit son histoire sur les pelouses avant de fréquenter les prétoires), ancien ministre de la ville et industriel ambitieux. Il a été récemment élu régional sous l'étiquette d'»energie radicale». Jean-François Barrau est un jeune chef d'entreprise qui a été conseiller général de 1979 à 1985 ; ami de François Léotard, cet ancien élu socialiste est vice-président de la Chambre de commerce et d'industrie du Var. Jean- Louis Fargette, caïd du milieu varois, est en cavale en Italie depuis 1982 et sera assassiné le 17 mars 1993 : on comprend mal, dès lors, comment Mme Piat peut être en relation - volontaire ou forcée - avec lui. Daniel Savastano fait partie du milieu marseillais ; c'est un ami de Fargette. Quels types de relations pouvait bien avoir Mme le député avec un aréopage aussi hétéroclite? Pourquoi écrit-elle cette lettre accusatrice en 1992? Pourquoi le 22 janvier? Voilà qui n'est pas le fait du hasard. Nous aurons l'occasion d'y revenir dans les pages qui suivent...

Dès le début de leurs investigations, les enquêteurs sont troublés par cette lettre. Agissant en procédure de flagrant délit, les policiers organisent un large coup de filet au cours duquel ils interpellent une trentaine de suspects ; parmi eux figurent de nombreux repris de justice et autres malfrats. Mais, surprise, on trouve également du «beau linge» : rien moins que trois des vice-présidents du Conseil général du Var, MM. Michel Hamaide (ancien suppléant de François Léotard), Raymond Nicoletti (président de l'office HLM du Var) et Joseph Sercia dont le nom alimente la rumeur dès le lendemain de l'assassinat. Il ne cessera d'être accolé aux «affaires» qui, bientôt, viendront se substituer au crime de la député, jusqu'à le faire passer au second plan. Pour l'heure, il convient de retrouver les deux assassins ; un portrait-robot est établi à la suite des dépositions d'un témoin. Le 3 mars, les deux tueurs présumés sont arrêtés : il s'agit de Denis Labadie et d'epifanio Pericolo dont il a déjà été question lors des incidents survenus au cours d'un meeting organisé par Mme Piat. De surcroît, tous les deux figurent sur une photo prise le 1 7 mars 1993, lors d'un réunion publique de M. Sercia dont ils paraissent bien faire partie de la garde rapprochée. L'enquête paraît avancer à grands pas et, fort judicieusement, les médias bénéficient de fuites leur permettant de divulguer des documents importants. C'est d'abord l'hebdomadaire VSD et le quotidien France-Soir qui publient les extraits de cette fameuse lettre que Yann Piat aurait adressée au procureur de la République de Toulon plusieurs mois avant sa mort.

CHAPITRE XIV MAURICE ARRECKX «À CEUX QUI LAVENT PLUS BLANC QUE BLANC» Ce chapitre est le résultat d'une longue interview que M. Arreckx nous a accordée, au fil de plusieurs échanges. Comme nous le précisions dans les premières pages de ce livre, notre souhait était qu'il puisse y exprimer sa vérité en toute liberté. Pour autant, il acceptait de n'avoir pas accès aux chapitres précédents, nous laissant entière liberté dans notre enquête et la relation des faits, quels qu'ils puissent être. D'une dizaine de questionnaires, il ressort une interview dont nous avons conservé l'essentiel, n'éliminant que les éléments redondants. Suivant notre engagement, nous avons soumis le texte qui suit à M. Maurice Arreckx. Il l'a amendé, corrigé. Nous le reproduisons ici, non sans avoir prévenu le lecteur que - pour des raisons techniques - nos dernières questions, et les réponses afférentes, datent de la première semaine d'avril 1995. Le lundi 1 er août 1994, j'étais, pour la première fois depuis de longs mois, entendu par le juge d'instruction Thierry Rolland, au palais de justice à Toulon. À 14 heures 45, c'est de mon appartement que je

pars en voiture accompagné de deux de mes enfants. Devant le palais : la meute des journalistes, radios, télévisions, et au bas des escaliers, trois de mes avocats. Me voici enfin dans le petit bureau du juge avec son greffier et une secrétaire. Il me donne tout de suite la parole, et je comprends très vite que sa décision est prise... Il va m'imposer la détention préventive. Pour ce premier entretien, il me pose peu de questions. Puis vient la deuxième partie de l'audition à laquelle participe le procureur de la République qui présente ses réquisitions : il préconise la détention car, dit-il, l'ordre public est menacé ; il faut éviter l'élimination de preuves et de contacts avec les suspects. La vraie raison : il y a déjà quatre personnes qui ont été incarcérées ; il faut que le plus haut responsable ne soit pas épargné... Mes trois avocats plaident successivement en ma faveur ; ils le font avec talent et conviction, mais cela n'ébranle pas le juge qui, après avoir établi un texte justifiant sa décision, me la fait connaître : c'est l'hôpital-prison des Baumettes. Vu mon âge et le fait que je suis sénateur, je garderai longtemps le souvenir du voyage, avec trois policiers, dans une voiture - banalisée mais repérée tout de suite par les journalistes - lancée à toute allure, avec trois motards acrobates. Il était 21 heures 15, à la prison, quand j'ai subi toutes les formalités : photos avec numéro d'identification, fouille complète (à poil), empreintes digitales, formulaire d'écrou rempli et signé. Ensuite, je suis conduit dans une cellule où je suis seul : assez grande, car prévue pour deux lits, W-C, télé, frigo, bon matelas, barreaux aux fenêtres et projecteur au-dessus