DROIT DE LA CONSOMMATION REFLEXIONS DE LA CGPME Réponse à la consultation publique sur le Livre Vert relatif à la révision de l acquis communautaire en matière de protection des consommateurs Le 8 février 2007, la Commission européenne a adopté le Livre Vert sur la révision de l acquis communautaire en matière de protection des consommateurs. Par ce biais, elle souhaite ouvrir le débat sur la portée d une révision du droit communautaire encadrant les contrats de consommation. Ce Livre Vert synthétise les premières observations de la Commission sur l objectif et le statut de la révision de l acquis communautaire et lance une consultation publique. Certains consommateurs n ont pas confiance dans les offres qui leur sont proposées au sein de l Union européenne. Ils ne connaissent pas leurs droits lorsqu il s agit d achats communautaires. Pourtant, il existe déjà une politique communautaire de protection des consommateurs. Toutefois, cette dernière est composée essentiellement de directives portant sur des sujets particuliers et bien souvent obsolètes par rapport à l évolution des techniques de vente. Cet exercice concerne les huit directives suivantes : le démarchage à domicile, les voyages à forfait, les clauses abusives, la vente à distance, l information sur les prix, les actions en cessation, la garantie des biens de consommation et l achat immobilier à temps partagé ou «time-share». Dans la mesure où ces directives prévoient des socles minima de protection, chaque état reste libre de mettre en place un niveau de protection plus élevé. Cela ne permet donc pas une protection communautaire harmonisée. Le Livre Vert s articule autour des différentes options envisagées pour conduire cet exercice de révision et pose un certain nombre de questions spécifiques. Avril 2007 1
Concernant l approche législative générale : Proposition : La législation en matière de protection des consommateurs peut être révisée de différentes manières : - une approche verticale consistant en la révision des différentes directives - une approche mixte combinant l adoption d un instrument cadre réglant les questions horizontales pertinentes pour l ensemble des contrats de consommation et la révision des directives sectorielles existantes dans les cas où cela s avère nécessaire. Avis de la CGPME : Il apparaît préférable à la Confédération que l approche mixte soit privilégiée. Une simple mise à jour des directives existantes n est pas suffisante et ne répond pas à l objectif que s est fixé la Commission européenne qui est de «Mieux légiférer» en simplifiant et en complétant le cadre réglementaire existant. Par contre, l approche mixte combinant l adoption d un instrument cadre et la révision des directives sectorielles existantes nous semble la plus adaptée. En effet, un «socle minima de protection» permettra : - de renforcer la confiance des consommateurs qui bénéficieront d un environnement réglementaire stable. - de faciliter les relations entre consommateurs et professionnels des Etats membres qui pourront commercer plus aisément dans l ensemble de l Union européenne. - d avoir une certaine sécurité juridique grâce à une simplification de la législation: exigence primordiale pour les PME. - de garder une certaine souplesse compte tenu des directives sectorielles. Concernant le champ d application d un éventuel instrument horizontal : Proposition : La Commission européenne propose trois alternatives. La première option consisterait à appliquer l instrument à tous les contrats de consommation, qu il s agisse de transactions nationales ou internationales. La seconde possibilité serait une application aux seuls contrats transfrontaliers et pour la dernière alternative : seuls les contrats à distance, qu ils soient conclus au niveau transfrontalier ou national, seraient concernés. Avis de la CGPME : Dans un souci de simplification et de sécurité juridique, la CGPME considère la première option comme la plus satisfaisante. L application du socle commun de garanties protectrices du consommateur aux contrats nationaux et internationaux permettra aux entreprises de bénéficier d un environnement réglementaire plus prévisible. Le niveau de protection des consommateurs sera équilibré et harmonieux, ce qui facilitera le commerce et évitera de créer des barrières au marché intérieur. Avril 2007 2
Concernant le degré d harmonisation : Proposition : La législation actuelle contient des clauses minimales qui permettent aux Etats membres d adopter des règles nationales plus strictes. La Commission européenne propose deux degré d harmonisation : - une harmonisation maximale complétée par une clause de reconnaissance mutuelle : C est-à-dire qu aucun Etat membre ne pourrait appliquer des règles plus strictes que celles définies au niveau communautaire sauf sur certains aspects des directives qui ne feraient pas l objet d une harmonisation maximale. - Une harmonisation minimale combinée avec une clause de reconnaissance mutuelle ou le principe du pays d origine : C'est-à-dire que les Etats membres auraient toujours la possibilité d introduire dans leur législation nationale des règles plus strictes mais qu ils n auraient pas le droit de les imposer aux entreprises établies dans d autres Etats membres (clause de reconnaissance mutuelle) ou que les entreprises établies dans d autres Etats membres devraient seulement se conformer aux règles applicables dans leur pays d origine (principe du pays d origine). Avis de la CGPME : La confédération est plus favorable à une harmonisation maximale complétée d une clause de reconnaissance mutuelle. En effet, cette solution permet de surmonter la difficulté probable d une harmonisation maximale et donc de garder une certaine souplesse sur certains points difficiles et en même temps, d éviter une trop grande différence entre les législations des Etats membres concernant le niveau de protection des consommateurs. La législation applicable sera plus facilement déterminée puisqu il existe un socle commun de garanties auquel les Etats membres ne pourront pas déroger. De plus, il n y aura pas de distorsion de concurrence comme celle qui aurait pu être créée par une harmonisation minimale combinée avec une clause de reconnaissance mutuelle ou le principe du pays d origine. La législation pourrait être plus ou moins rigide d un Etat membre à un autre et de ce fait, inciter les entreprises à s installer où les règles sont les moins contraignantes. Concernant les questions horizontales : - la définition des notions de «consommateur» et de «professionnel» Actuellement, il n existe pas de définition des notions de «consommateur» et de «professionnel». Les huit directives divergent sur ce point. C est pourquoi la CGPME est favorable à un alignement des définitions existantes et même un élargissement de ces notions. En effet, il est important de prendre en compte le fait que les entrepreneurs individuels ou les petites entreprises peuvent parfois se retrouver dans une situation similaire à celle d un consommateur. Avril 2007 3
A cet effet, la CGPME propose que le terme de «non- professionnels» soit utilisé comme dans la législation française (article L.132-1 du code de la consommation) et son champ d application soit étendu aux personnes morales afin de protéger les PME lorsqu elles se comportent en consommatrices. - les consommateurs agissant par l entremise d un intermédiaire Actuellement, la transaction effectuée entre consommateurs, bien que l une des parties ait recours à un intermédiaire professionnel, n est pas qualifiée de contrat de consommation. La Confédération trouve cette position satisfaisante car il existe plusieurs degrés d intervention de l intermédiaire. On ne peut pas généraliser. Si un consommateur a recours aux services d un intermédiaire professionnel, c est lui qui engagera sa responsabilité et non l intermédiaire. Cependant, il aura la possibilité de faire un recours contre l intermédiaire qui aurait été défaillant. Le consommateur est protégé à ce titre, il n est donc pas nécessaire de prévoir une protection plus importante. - les concepts de bonne foi et de loyauté dans l acquis en matière de protection des consommateurs Actuellement il n y pas de dispositions générales concernant les concepts de bonne foi et de loyauté. La bonne foi conditionne non seulement la conduite des parties dans le cadre d une relation commerciale mais également l interprétation du contrat et le contenu implicite de ce contrat. La CGPME n est pas opposée à l intégration d une disposition générale dans l instrument cadre concernant ces deux concepts même si l obligation de bonne foi pèse particulièrement sur le professionnel. Elle traduit la confiance nécessaire du consommateur à l égard du professionnel. Cela permettra également de «mieux légiférer» puisque la bonne foi et la loyauté permettront de donner des indications sur l interprétation de certaines dispositions du contrat. - le champ d application des dispositions communautaires relatives aux clauses abusives, la liste des clauses abusives et la portée de l appréciation du caractère abusif Au niveau communautaire, les dispositions concernant les clauses abusives ne s appliquent qu aux clauses n ayant pas fait l objet d une négociation. En France, la législation s applique que la stipulation présumée abusive ait été négociée ou non. La Confédération est favorable à l extension du champ d application des dispositions communautaires aux clauses ayant fait l objet d une négociation individuelle car elle privilégie l équilibre entre les droits et obligations des parties aux contrats et admet que les consommateurs n ont souvent pas la possibilité d influencer le contenu des clauses du contrat. La CGPME considère que certaines clauses doivent être complètement interdites alors que d autres ne devraient faire l objet que d une liste indicative non exhaustive qui ne bénéficie pas d une présomption réfragable de caractère abusif. Avril 2007 4
En effet, la charge de preuve doit être apportée par celui qui invoque une clause comme étant abusive et non l inverse. Compte tenu du fait que la plupart des contrats de consommation sont des contrats d adhésion, cette présomption réfragable reviendrait à imposer aux professionnels de ramener la preuve du caractère non abusif des clauses de leur contrat. Cela n est pas envisageable et aurait, en plus, un coût financier important pour les entreprises qui seraient obligées d engager des frais non négligeables pour leur défense. La directive communautaire concernant les clauses abusives prévoit que l appréciation du caractère abusif ne peut porter ni sur la définition de l objet principal, ni sur l adéquation du prix. La CGPME souhaite que cette limitation à la portée de l appréciation du caractère abusif soit conservée mais à condition que les clauses soient rédigées de façon claire et compréhensible. Le consommateur, même s il est caractérisé comme la «partie faible» du contrat, ne doit pas être «surprotégé» au détriment du professionnel et doit conserver une certaine responsabilité par rapport aux engagements contractuels qu il a pris. Donc, à moins que ces clauses soient rédigées de façon obscure, les parties au contrat ne devraient pas pouvoir invoquer le caractère abusif des clauses concernant l objet principal et l adéquation du prix. - exigences en matière d information Avant, pendant et après la conclusion d un contrat, le professionnel doit fournir des informations aux consommateurs. Cette obligation d information est parfois difficile à remplir pour le professionnel compte tenu du développement des différents modes de commerce. Au niveau communautaire, il est constaté que les consommateurs ne disposent pas toujours d un recours contre le professionnel en cas de non-respect par ce dernier de son obligation d information. Dans ce contexte, la CGPME serait plutôt favorable à une réparation uniforme en cas d inobservation des exigences en matière d information par un nouveau délai de réflexion si le défaut d information est avéré. Sa durée serait identique au délai de réflexion du contrat. Cela permettra de rétablir l équilibre des relations contractuelles entre les parties et en même temps de protéger les entreprises d un délai de réflexion trop long. - droit de rétractation Les directives européennes actuelles prévoient des délais de rétractation d une durée différente, dont le mode de calcul varie entre la prise en considération de jours calendrier ou de jours ouvrables et avec des modalités d exercice et des effets réglementés de diverses façons. Pour accroître la sécurité juridique et harmoniser ces directives, la Confédération ne serait pas contre l application d un délai de réflexion unique calculé en jours calendrier. Les PME ne pourront qu être favorisées par cette simplification. Au niveau des modalités d exercice de ce droit de rétractation, il conviendrait également de convenir d une forme de notification unique. L exercice de la faculté de rétractation entraîne l anéantissement du contrat. La CGPME suggère que les frais directs de renvoi des marchandises soient à la charge du consommateur. En effet, si l entreprise a déjà dû supporter le coût de l envoi, il paraît juste de laisser les frais de renvoi à la charge du consommateur qui change d avis. Avril 2007 5
Le coût de ce délai de rétractation est déjà important pour les PME, il ne doit pas être encore plus lourd à supporter pour ces dernières. - recours contractuels généraux Au niveau communautaire, aucun ensemble général de recours à la disposition des consommateurs n a été prévu. Dans un souci d harmonisation et de simplification de la réglementation, la Confédération est plutôt favorable à l intégration dans l instrument cadre de recours communs à l échelle de l Union européenne. Cependant, cela ne doit pas conduire à une «superposition» des procédures qui finalement complexifierait la réglementation. - droit général à indemnisation La question de l indemnisation n est pas réglementée dans l acquis communautaire tel qu il existe actuellement. Avis «réservé» Concernant les règles spécifiques applicables à la vente des biens de consommation : - types de contrats à couvrir La directive concernant la vente des biens de consommation s applique aux contrats de vente et à aucun autre type de contrats ayant trait à la fourniture de biens sauf à ceux portant sur des biens à fabriquer dans le futur. Un consommateur qui loue une voiture ou qui télécharge légalement de la musique sur Internet n est pas protégé. Dans un souci de protection de tous les consommateurs, la Confédération ne serait pas opposée un élargissement du champ d application de l instrument cadre aux types de contrats dans le cadre desquels des biens ou des services à contenu numérique sont fournis à des consommateurs. - biens d occasion vendus aux enchères Au niveau communautaire la notion de «bien de consommation» n inclue pas les biens d occasion vendus aux enchères publiques. La CGPME a déjà exprimé sa position sur les contrats entre consommateurs, elle ne souhaite pas qu ils soient considérés comme des contrats de consommation. Cela donnerait une trop grande responsabilité au consommateur considéré comme un professionnel. Avril 2007 6
- obligations générales d un vendeur livraison et conformité des biens La directive sur la vente de biens de consommation énonce que le vendeur est tenu de livrer au consommateur un bien conforme au contrat de vente mais ne définit pas la notion de livraison. La Confédération souhaite que la livraison soit caractérisée par la prise de possession physique des biens par le consommateur. Cependant, la CGPME, très attachée à la liberté contractuelle des parties, considère que cette définition ne serait d usage que si les parties ne se sont pas mises d accord sur ce point. Cette souplesse n est pas négligeable pour les PME. - le transfert du risque dans les ventes au consommateur Chaque Etat membre a sa propre législation concernant le transfert du risque dans les ventes aux consommateurs. Dans un souci d harmonisation, la CGPME est favorable à ce que le transfert des risques soit réglementé au niveau communautaire et lié au moment de la livraison mais uniquement si les parties n ont pas choisi une autre solution. - conformité des biens Au niveau communautaire, la responsabilité du vendeur est engagée au regard de tout défaut de conformité qui existait au moment de la livraison et qui devient apparent dans un délai de deux ans à compter de ce moment. La Communauté européenne se demande si ce délai ne pourrait pas être prolongé de la durée de la période pendant laquelle le consommateur n a pas été en mesure d utiliser les biens parce que ceux-ci étaient en réparation. La Confédération n est pas opposée à cette extension du délai. Il peut arriver que des défauts réparés réapparaissent après l expiration de la garantie légale. Dans ce cas, certains Etats membres ont pris leur disposition. La CGPME est également favorable à ce que la durée de la garantie soit prolongée d une durée à préciser à compter de la date de réparation afin de couvrir la réapparition. En ce qui concerne les biens d occasion, les parties ont la possibilité de convenir d une période de responsabilité plus courte mais pas inférieure à un an. La Commission Parlementaire propose de prévoir la même période de responsabilité pour les biens d occasion soit deux ans ou de laisser le choix aux parties mais cette durée ne pourra être inférieure à 1 an. Compte tenu du fait qu il s agit de biens d occasion, la Confédération propose que les parties puissent convenir librement de la durée de la période de responsabilité compte tenu de la vétusté du bien d occasion. - charge de la preuve La directive instaure une présomption réfragable selon laquelle tout défaut de conformité qui apparaît dans un délai de six mois à compter de la livraison est présumé avoir existé au Avril 2007 7
moment de la livraison. Cependant, cette présomption ne s applique pas lorsqu elle est incompatible avec la nature des biens ou celle du défaut de conformité Cela veut dire qu après 6 mois, la charge de la preuve appartient au consommateur. Le professionnel étant le mieux placé pour accéder aux informations utiles, la Commission propose qu il incombe au professionnel de prouver que le défaut n existait pas au moment de la livraison pendant toute la durée de la garantie légale, aussi longtemps qu il y a compatibilité avec la nature des biens et celle des défauts. La CGPME ne trouve pas cette solution satisfaisante car cela aurait un coût trop important pour les PME. De plus, les petites entreprises qui cherchent à innover seraient fortement impactées. Elles seront freinées au niveau de l innovation puisque le consommateur aurait deux ans pour remettre en cause leur production. - Recours Actuellement, il est prévu un ordre particulier dans lequel les modes de dédommagement peuvent être invoqués : dans un premier temps, la réparation ou le remplacement et ensuite la résolution. La Confédération souhaite maintenir ce schéma c'est-à-dire que les consommateurs seraient obligés de demander d abord la réparation, le remplacement ou une réduction de prix et n auraient la possibilité de demander la cessation que si ces solutions ne sont pas réalisables. - notification du défaut de conformité Au niveau communautaire, le consommateur a deux mois au minimum pour informer le vendeur du défaut de conformité à compter de la date à laquelle il l a constaté. La CGPME trouve qu introduire une obligation de notification au vendeur de tout défaut de conformité est une solution satisfaisante car cela simplifiera les relations entre consommateurs et professionnels. - engagement direct de la responsabilité du producteur en cas de nonconformité Dans le contexte de la révision de l acquis, la question de la responsabilité du producteur se limite aux situations dans lesquelles un bien n est pas en conformité avec le contrat de consommation. La Confédération considère qu il n est pas nécessaire d introduire une responsabilité directe des producteurs pour non-conformité puisqu il existe déjà une directive sur la responsabilité du fait des produits défectueux. Avril 2007 8
- garanties des biens de consommation Au niveau communautaire, rien n est prévu pour le contenu de la garantie commerciale. La position de la CGPME à ce sujet est que la garantie commerciale est un service rendu par le professionnel au consommateur en plus de ses obligations légales. Cette clause est négociée par les parties et résulte de la liberté contractuelle. L instrument cadre ne doit donc pas légiférer sur ce sujet. Avril 2007 9