Observations de l ASF, concernant le crédit-bail, sur le document consultatif de la Commission européenne sur son futur ratio de solvabilité. - Pour le crédit-bailleur l opération de crédit-bail consiste à donner en location un bien dont il reste propriétaire pendant toute la durée du contrat, ce dernier étant assorti d une option d achat exerçable en fin de contrat par le locataire. La conservation de la propriété du bien donné en crédit-bail pendant toute la durée de l opération confère à celle-ci une sécurité qu on ne retrouve dans aucune autre forme de financement, si tant est qu on puisse parler de «financement» pour le crédit-bail du fait de sa nature juridique de location assortie d une promesse de vente. - Cette sécurité explique que le crédit-bail constitue un outil privilégié pour les PME puisqu il leur permet, alors qu elles n ont pas ou peu de garanties à offrir, de disposer des biens d exploitation dont elles ont besoin tant au stade de leur création qu en phase de développement ultérieur. En outre en crédit-bail, immobilier notamment, la compétence des équipes des établissements permet d assurer au locataire un service d expertise et de conseil dans la réalisation de son projet qui conditionne son exploitation future. - La nature de location du crédit-bail est la raison pour laquelle l exercice de cette activité ne requiert pas dans la plupart des pays l adoption du statut d établissement de crédit. De ce fait, l opération n est généralement pas au plan mondial et même européen le fait d établissements de crédit soumis aux exigences en fonds propres posées par le Comité de Bâle ou les Autorités de la Commission européenne. Or, pour les établissements résidant dans des Etats soumettant l activité de créditbail à l adoption du statut d établissement de crédit, l exercice des mêmes activités dans les Etats de l Union européenne par des établissements non soumis aux contraintes réglementaires en fonds propres, constitue une distorsion de concurrence grave à laquelle il convient de remédier, dans le cadre du futur ratio européen de solvabilité, en prenant en compte à sa juste valeur la sécurité conférée par le crédit-bail.
- 2 - - Or jusqu à présent le crédit-bail n a pas été pris en compte convenablement dans les travaux de Bâle et de Bruxelles Si dans son dernier document, probablement à la suite des actions de sensibilisation de plusieurs Etats de l Union européenne, le Comité de Bâle a accepté de reconnaître l existence du crédit-bail à l occasion de ses développements sur la méthode IRB fondation, il ne lui a pas pour autant accordé de traitement particulier autre que l application des LGD prévus pour les collatéraux garantissant des crédits classiques. Au plan européen, les opérations de crédit-bail immobilier ont, dans le cadre du ratio de solvabilité mis en place en 1991, bénéficié d une pondération spécifique de 50%. Le document consultatif de la Commission européenne de novembre 2002 indique seulement, sans apporter plus de précisions, qu en méthode standard pour les prêts garantis par des biens immobiliers à usage commercial il devrait être proposé une pondération de 50%. On observe qu il n est pas question du créditbail. Par ailleurs rien n est prévu concernant les collatéraux physiques constitués par des biens mobiliers. En matière d IRB fondation, il est expressément prévu que les opérations de leasing devraient bénéficier des LGD applicables aux prêts garantis par des collatéraux : les LGD applicables à ces prêts sont de 40% (au lieu de 45% pour les créances non garanties) en matière mobilière avec une surcollatéralisation de 140%, et de 35%, toujours avec une surcollatéralisation de 140%, en matière immobilière commerciale. - Il nous semble erroné d assimiler purement et simplement le crédit-bail à un prêt garanti par un bien appartenant à l emprunteur. Il apparaît donc nécessaire de reconnaître l application d un traitement spécifique au crédit-bail en méthode standard et pour les LGD en IRB fondation. En effet, alors que le prêteur qui se voit remettre un bien appartenant à l emprunteur peut se trouver primé par des créanciers titulaires de créances privilégiées, en crédit-bail, au contraire :
- 3-1. Le crédit-bailleur, qui reste propriétaire du bien pendant toute la durée du contrat, peut en cas de difficultés du crédit-preneur, reprendre son bien sans être primé par aucun créancier de son client. A cet égard, la réglementation concernant les procédures collectives respecte intégralement le droit de propriété du crédit-bailleur.(1) 2. En outre, les procédures de récupération du bien dont le crédit-bailleur est propriétaire sont beaucoup plus rapides et souples que celles relatives à la saisie d un bien remis en gage par un emprunteur, ce qui se comprend du fait de la nécessité d assurer à ce dernier une protection particulière du fait de l atteinte à son droit de propriété. Les travaux statistiques déjà menés sur la question ont confirmé qu il est justifié d appliquer un traitement spécifique au crédit-bail dans toutes les méthodes, qui soit fondé sur une approche propre au produit, et distinct de celui envisagé pour les prêts classiques garantis par un bien de l emprunteur. Dans ce contexte, il nous semblerait pertinent que la future réglementation européenne adopte : - En méthode standard : a) une pondération du crédit-bail immobilier de 40%. Comme déjà indiqué, la Commission européenne dans son denier document n a pas fait référence, en méthode standard, à un traitement spécifique du crédit-bail immobilier, mais a simplement indiqué qu il devrait être proposé une pondération de 50% pour les prêts garantis par des biens immobiliers à usage commercial. (1) Si l opposabilité du droit de propriété du crédit-bailleur est subordonnée à une publicité, simplement destinée à informer les créanciers et les tiers sur le gage apparent du locataire, le bailleur ne manque jamais de la faire pour préserver ses droits
- 4 - Nous ne souhaitons pas d alignement du crédit-bail sur les prêts classiques ainsi garantis, car si la Directive 98-32 du 22 juin 1998 prévoit bien la possibilité pour les Etats membres d appliquer pour les prêts garantis par des hypothèques sur des bureaux ou des locaux commerciaux à usages polyvalents une pondération de 50%, cette pondération ne joue que sur la plus basse des limites suivantes : 50% de la valeur vénale de l immeuble ou 60% de sa valeur hypothécaire, la pondération de 100% s appliquant à la partie du prêt qui dépasse ces limites. Si l on devait envisager de reconduire cette pondération selon les mêmes modalités d application, il serait bien entendu impensable d estimer que la spécificité du crédit-bail pourrait être prise en compte par l application de cette pondération (1), alors que la même Directive du 22 juin 1998 a prévu la possibilité d appliquer une pondération de 50% au crédit-bail sans aucune limite de l assiette de la pondération (cf. aussi article 62 1 et 2 de la Directive 2000/12 du 20 mars 2000). Dans ces conditions, au minimum le crédit-bail devrait continuer à bénéficier d une pondération de 50% applicable à l ensemble de l engagement de crédit-bail, dont l expérience, dans le cadre européen, a montré qu elle était justifiée. Dans l hypothèse où la Commission européenne retiendrait pour les prêts garantis par une hypothèque sur un bien commercial une pondération de 50% sur la totalité de l engagement du prêteur, il serait normal pour les raisons indiquées plus haut que le crédit-bail bénéficie d une pondération inférieure, que nous proposons de fixer à 40%. b) une pondération de 50% pour le crédit-bail mobilier. En méthode standard, les concours aux PME ne bénéficient d aucune spécificité du fait de l absence de prise en compte des collatéraux physiques ou de traitement particulier correspondant à une courbe spéciale en matière IRB, d où la nécessité de prendre en compte par le biais de pondérations la sécurité offerte par le crédit-bail. (1) A fortiori un mode d application de la pondération de 50% qui se réfèrerait à des critères plus restrictifs que prévoit le Comité de Bâle ( cf. son dernier document «Technical Guidance», note de bas de page n 18, p 11 et 12 ) ne saurait donner satisfaction.
- 5 - - En méthode IRB fondation : a) en crédit-bail immobilier, une LGD de 30%, inférieure à ce qui est prévu pour les prêts garantis par un bien immobilier à usage commercial, et la non-application de mesures de surcollatéralisation ; b) en crédit-bail mobilier, une LGD de 35%, inférieure à celle prévue pour les prêts garantis par un collatéral physique propriété de l emprunteur, et la non-application de mesures de surcollatéralisation. Les LGD que nous souhaitons voir retenus sont nettement supérieurs à ceux que font apparaître les statistiques (déjà fournies dans le passé, dont ci-joint, un nouvel exemplaire), ce qui justifie le souhait de non-application de mesures de surcollatéralisation. L adoption de ces dispositions paraît extrêmement importante afin de continuer à permettre les financements par voie de crédit-bail présentant par nature une sécurité accrue par rapport aux crédits classiques garantis, tout en permettant de prendre en compte le moindre risque qui leur est attaché, conformément à l objectif de la nouvelle réglementation. A défaut d adopter ces dispositions, on s expose à un enchérissement sensible des conditions des opérations de crédit-bail du fait du surcoût injustifié des charges réglementaires en fonds propres, qui aura pour conséquence que certains investissements voire certaines créations de PME- ne seront pas effectués, ou s ils le sont, se verront appliquer des conditions grevant de façon importante et dommageable les budgets de ces entreprises. Bien entendu, les demandes formulées ci-dessus et ci-après concernent également les opérations de location financière que peuvent réaliser les établissements crédit-bailleurs à côté de leurs opérations de crédit-bail. Elles présentent en effet les mêmes caractéristiques de sécurité que ces dernières du fait de la conservation de la propriété du bien par le bailleur.
- 6 - Annexe Certains autres points nous paraissent également appeler des observations afin de pouvoir prendre en compte le crédit-bail dans les meilleures conditions possibles pour lui permettre de jouer le rôle attendu de lui au plan économique : - Toujours dans le même souci de ne pas limiter le recours au crédit-bail du fait de conditions trop élevées, qui remettraient en cause des investissements de PME utiles à l économie, il est nécessaire que les contraintes en matière d évaluation des biens demeurent raisonnables. A cet égard notamment, il conviendrait de pouvoir effectuer les réévaluations sur la base de pools d actifs homogènes, de supprimer l exigence d inspection physique impossible à mettre en œuvre en crédit-bail mobilier, et de prévoir que la gestion de la localisation du bien ne peut être imposée que pour les matériels pour lesquels cela a un sens (impossible à effectuer pour les matériels susceptibles d être déplacés (véhicules, grues ). - Dans le même objectif de ne pas imposer de contraintes injustifiées dont le coût serait inéluctablement répercuté sur les locataires, il convient, pour le crédit-bail, d écarter, en méthode IRB, les obligations de révision des cotations des locataires et de révision de l affectation des opérations dans les différentes catégories de crédit, ces obligations n étant manifestement pas adaptées à ce type de financement. Les opérations de crédit-bail mobilier sont en pratique apportées par des prescripteurs (vendeurs..) aux établissements de crédit-bail, généralement établissements spécialisés. Les modes de traitement des opérations - octroi et gestion des risques reposant sur des scorings - sont identiques à ceux suivis pour les opérations de «retail». Il est donc normal que puissent alors être appliquées, sur option, les règles applicables en matière de retail même si la contrepartie est un corporate. 31/01/2003