N 379 SENAT SECONDE SESSION ORDINAIRE DE 1990-1991. Annexe au procès- verbal de la séance du 12 juin 1991. PROPOSITION DE LOI



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Transcription:

N 379 SENAT SECONDE SESSION ORDINAIRE DE 1990-1991 Annexe au procès- verbal de la séance du 12 juin 1991. PROPOSITION DE LOI tendant à abroger l'article 9 de la loi n 90-1260 du 31 décembre 1990 afin de rétablir les droits acquis des travailleurs non salariés non agricoles en matière d'assurance maladie. PRÉSENTÉE Par M. Marcel RUDLOFF, Sénateur. (Renvoyée à la commission des Affaires économiques et du plan sous réserve de la constitution éventuelle d'une commission spéciale dans les conditions prévues par le Règlement) Assurance maladie maternité.

- 2 - EXPOSÉ DES MOTIFS MESDAMES, MESSIEURS, Introduit in extremis dans le texte du projet de loi réformant la «loi Royer», l'article 9 de la loi n 90-1260 a eu pour but de priver l'ensemble des travailleurs non salariés non agricoles (T.N.S.) ayant pris leur retraite entre 1983 et le 31 mars 1989 du bénéfice de la loi du 19 janvier 1983 modifiant le régime d'assurance maladie des T.N.S. et de leurs droits acquis au remboursement de suppléments de cotisations indus sous la contrainte et à l'indemnisation des préjudices résultant des actions abusives des caisses d'assurance maladie. Le maintien de ce cavalier législatif aurait pour conséquence de mettre à néant des dizaines de décisions de tribunaux des affaires sociales, de cours d'appel et de la Cour de cassation et de faire échec aux nombreux recours actuellement pendants. L'article 22 de la loi du 19 janvier 1983 fixait l'assiette des cotisations d'assurance maladie des T.N.S. retraités. Ce texte, supprimant la double cotisation demandée précédemment aux «nouveaux retraités» pendant leurs quinze à vingt-six premiers mois de retraite, a limité les cotisations demandées à tous les «T.N.S.» retraités à un «pourcentage des pensions ou allocations de retraites servies pendant l'année en cours...» Elles seraient précomptées ou, à défaut, évaluées à titre provisionnel et régularisées a posteriori. 11 eu résultait clairement que «dès leur cessation d'activité, les retraités n'étaient plus redevables de la cotisation prévue pour les assurés actifs», comme l'a constaté postérieurement la Cour de cassation (voir cass., 5 IV 90 G.P. 21 VIII 90 p. 11). M. Claude Evin, alors président de la commission des affaires sociales et rapporteur, avait bien précisé, avant le vote de l'amendement dont il était l'auteur et qui devint l'article 22 : «Les cotisations des retraités seront assises sur les recettes de l'année en cours. Pour les retraités actifs (exerçant une autre profession non salariée), elles s'ajoutent aux cotisations assises sur leurs revenus professionnels» (J.O. A.N. 1983 p. 8134). L'art. 22 fixant cette assiette plus restreinte était immédiatement applicable, l'art. 24 précisant au surplus qu'en attendant de nouvelles

- 3 - modalités à fixer par décret, les cotisations prévues à l'art. 22 devaient être calculées selon les modalités antérieures à l'entrée en vigueur de la loi (soit 5 % des retraités, par application du décret 81-813 du 27 août 1981). Or, pendant six ans, par des arguments divers, les caisses, ayant caché à leurs administrateurs comme à leurs assujettis la portée de la loi de 1983, ont exigé sous la contrainte, comme dans le régime antérieur, le paiement par les «nouveaux retraités» de cotisations calculées sur leurs quinze à vingt-six derniers mois d'activité, dans la plus parfaite incohérence, certaines appliquant le cumul avec les cotisations sur les retraites, d'autres ne l'appliquant pas, d'autres l'appliquant à partir du cinquième trimestre, etc. Elles s'appuyaient sur une interprétation aberrante d'un décret du 9 août 1985 qui, selon elles, maintenait à la charge des nouveaux retraités l'obligation de double cotisation supprimée par la loi de 1983, interprétation condamnée à maintes reprises depuis lors par les tribunaux. Les retraités, contraints de payer sous peine de perte du droit aux prestations, étaient ensuite obligés de former des demandes en restitution d'indu devant les juridictions de sécurité sociale. Saisies de multiples réclamations et ayant perdu différents procès, notamment devant les cours d'amiens et de Grenoble, les caisses obtinrent, sur leur avis conforme, un décret du 3 mars 1989 modifiant l'article D. 612-2 du code de sécurité sociale entrant en vigueur le 1er avril 1989 qui selon elles : faisait cesser, à partir de cette date seulement, l'obligation des nouveaux retraités à cotisations sur leurs période d'activité antérieures au départ en retraite (alors que cette obligation avait pris fin en 1983), mais justifiait a posteriori les perceptions de cotisations sur revenus d'activité antérieure à la retraite qu'elles avaient effectuées du 19 janvier 1983 au 31 mars 1989. D'ou la tentative de la C.A.N.A.M., qui gère l'ensemble du régime des T.N.S., d'obtenir une loi privant rétroactivement d'effet les décisions judiciaires condamnant les caisses. D'où l'article 9 de la loi du 31 décembre 1990, discrètement glissé par amendement dans l'actualisation de la loi Royer, et adopté sans débat par les Commissions et les Assemblées en toute méconnaissance de cause.

- 4 - On constate, en effet, que cet amendement, de rédaction extrêmement obscure, ne mentionnait même pas la loi 83-25 dont il tendait à abolir l'application et masquait le débat réel aux yeux des parlementaires. Et, par dessus tout, l'on constate que l'adhésion du ministre et du Parlement à un texte à effet rétroactif bafouant la volonté clairement exprimée du législateur de 1983 et de dizaines de décisions de jurisprudence, n'a pu être obtenue qu'à la faveur d'un exposé singulièrement inexact de la situation. Il était exposé que la jurisprudence confirmée par la Cour de cassation avait pour conséquence «d'exonérer de toute cotisation pendant douze mois les personnes nouvellement retraitées» et «d'admettre ainsi l'ouverture de droits gratuits, alors que les droits aux prestations sont subordonnés au paiement préalable de cotisations». Or, cette double affirmation était totalement erronée : les dizaines de jugements et les 23 arrêts de la cour d'appel connus à ce jour de l'auteur de la présente proposition ont tous décidé, tout en condamnant les causes, que celles-ci conserveraient les cotisations sur retraites «dès la date de cessation d'activité» et les caisses ont chaque fois prélevé ces montants. La doctrine validée par la Cour de cassation est exactement contraire à la présentation qui en a été faite et qui a déterminé le vote surprise aux Assemblées. Le Parlement a donc été trompé par ce «cavalier législatif» et amené à voter un texte qu'il n'aurait certainement pas voté (et qui ne lui aurait même probablement pas été soumis) s'il avait fait l'objet d'une procédure normale. Il ne s'agit pas ici d'un débat technique de sécurité sociale mais d'un grave désordre apporté à l'application des lois par un texte venant, sept ans après, sur un fondement totalement erroné, infirmer un ensemble de décisions de justice qui contraignaient les organismes privés que sont les caisses d'assurance maladie à exécuter ce que le législateur avait clairement décidé, en instaurant, dès le 19 janvier 1983, le régime actuel de cotisations des retraités. C'est la raison pour laquelle la proposition de loi suivante est soumise au Parlement.

- 5 - PROPOSITION DE LOI Article Premier. L'article 9 de la loi n 90-1260 d'actualisation de dispositions relatives à l'exercice des professions commerciales et artisanales est abrogé. Art. 2. Les charges entraînées par l'application de la présente loi sont couvertes par une augmentation à due concurrence des droits de timbre visés aux articles 919 et 919 A du code général des impôts.