Évaluation de l impact d une isolation thermique sur le confort d été et les besoins énergétiques d un bâtiment ancien



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Transcription:

Évaluation de l impact d une isolation thermique sur le confort d été et les besoins énergétiques d un bâtiment ancien STÉPHAN Emma 1,2, CANTIN Richard 2, MICHEL Pierre 2, CAUCHETEUX Antoine 1, TASCA-GUERNOUTI Sihem 3 1 CETE de l Ouest, Laboratoire Régional d Angers, 23 avenue de l Amiral Chauvin BP 20069 49136 Les Ponts de Cé cedex, France. emma.stephan@developpement-durable.gouv.fr antoine.caucheteux@developpement-durable.gouv.fr 2 Entpe LASH, Université de Lyon, Rue Maurice Audin, 69518 Vaulx-en-Velin, France richard.cantin@entpe.fr pierre.michel@entpe.fr 3 CETE de l Ouest, MAN, rue René Viviani, BP 46223, 44262 Nantes, cedex 2, France. Sihemn.tasca-guernouti@developpement-durable.gouv.fr RÉSUMÉ. La réhabilitation des bâtiments anciens est une nécessité pour les réductions des consommations énergétiques. Les solutions de réhabilitation proposent souvent la mise en œuvre d isolation thermique pour réduire les besoins de chauffage. Toutefois, l impact de l isolation sur le comportement thermique global de ces bâtiments reste méconnu principalement sur le confort d été, qualité vantée de ce patrimoine. Le travail de recherche présenté dans cet article propose, à partir d une étude de cas, l évaluation de l impact de différentes solutions d isolation sur le comportement thermique d un bâtiment ancien. ABSTRACT. Reduction of energy consumptions needs retrofitting of old buildings. These retrofitting propose generally thermal insulation to decrease heat demand. However, impact of insulation on global thermal behavior of old building is unknown, overall on summer comfort, an important quality of this park. The work presented in this paper proposes, with a case study, an evaluation of the impact of various insulation s solutions on thermal behavior of old buildings. MOTS-CLÉS : Inertie thermique, isolation, confort d été KEY WORDS: Thermal inertia, insulation, summer comfort

XXX e Rencontres AUGC-IBPSA Chambéry, Savoie, 6 au 8 juin 2012 2 1. Introduction Dans le contexte actuel de réchauffement climatique, les consommations énergétiques deviennent une problématique majeure. Le bâtiment, premier secteur en terme de consommations d énergie, doit donc être optimisé du point de vue thermique pour être un levier dans la campagne de réduction des consommations. Trois classes de bâtiments sont distinguées : la première, le bâti ancien, celle qui nous intéresse, se différencie des deux suivantes par une construction locale et traditionnelle. Ces bâtiments ont été construits avant le milieu du 20 ème siècle et l apparition des constructions manufacturées. En France, plus de 10 millions de logements ont été construits avant 1948. La seconde classe se compose des bâtiments construits entre 1948 et 1975. Ces bâtiments correspondent à une architecture industrialisée sans préoccupations énergétiques. Enfin, les bâtiments construits après 1975, année de la première réglementation thermique, présente des constructions moins consommatrices d énergie. Ils se distinguent du point de vue thermique par une prise en compte de l environnement climatique proche lors de la construction, l utilisation de matériaux locaux et une corrélation forte entre les conditions hygrothermiques intérieures et extérieures [CAN 2010]. Par ailleurs, les consommations énergétiques de ce patrimoine sont inférieures à celles des bâtiments construits entre 1948 et 1975 : entre 110 et 227 kwh/m².an pour le bâti ancien et 364 kwh/m².an pour ceux entre 1948 et 1975. De plus, l inertie thermique permet aux bâtiments anciens de disposer de conditions confortables en été (variations faibles de la température et moyenne comprise entre 23 et 27 C sur 10 bâtiments [CAN 2010]) et de réduire les consommations liées à la climatisation [BRA 1984]. Le contexte génère une volonté de réhabilitation de ce parc. De fait, l objectif de cette étude est d analyser l impact d une isolation thermique (étape d une réhabilitation) sur les besoins énergétiques d un bâtiment et son confort. 2. Démarche Nous nous intéressons à l impact d une réhabilitation et plus spécifiquement d une isolation sur le comportement thermique d un logement ancien. Pour cela, nous construisons un modèle thermo-aéraulique d une maison ancienne. Ce modèle construit sur TRNSYS-COMIS est ensuite validé avec des mesures réalisées sur le site. Une analyse de sensibilité sur les hypothèses est effectuée pour mettre en évidence la précision à apporter aux paramètres entrants du modèle. Ce modèle est alors utilisé pour étudier l impact de différentes solutions d isolation sur le comportement thermique du bâtiment. Les solutions simulées font varier la position de l isolant, son épaisseur et l intégralité ou non de l isolation. Elles sont évaluées du point de vue des besoins énergétiques (climatisation et chauffage) et du confort intérieur.

Évaluation de l impact d une isolation thermique sur le confort d été et les besoins énergétiques d un bâtiment ancien 3 3. Présentation de l étude de cas 3.1. Description générale L étude de cas est une maison individuelle en pierre calcaire tendre située en France dans le département du Vaucluse. Le tableau 1. présente les caractéristiques principales de la maison. Localisation Bollène (84) Descriptif Type d habitation Maison individuelle mitoyenne Nombre de niveau 3 (RDC, 1 er et grenier aménagé) Surface habitable 118m² Enveloppe Équipements Moellons de pierre calcaire enduits d épaisseur comprise entre 48 et 50cm Chauffage : chaudière gaz Climatisation : aucune Ventilation : naturelle Historique Construit au XVIème siècle avec ajout d une extension comprenant une cuisine, un séjour, une salle de bain et une buanderie en 1985. Caractéristiques - Angle d une rue qui suit un axe Nord/Sud principales - Façades Ouest et Nord mitoyennes - Rue étroite donc forte présence de masques - Occupation permanente - Logement non traversant Tableau 1. Caractéristiques générales du bâtiment ancien étudié 3.2. Instrumentation Cette maison a été instrumentée pendant l été 2009. Nous utiliserons les données de mai et juin 2009. Le séjour, une chambre et une salle de bain ont été instrumentés. La température ambiante et l humidité relative ont été mesurées dans chacune des pièces. La température et l humidité relative extérieure ont été mesurées à proximité du site. En ce qui concerne le vent (vitesse et direction) et le rayonnement solaire, les données proviennent de la station météorologique de Carpentras à 35 km du logement. 4. Construction d un modèle thermo-aéraulique Le modèle est construit sous le logiciel TRNSYS-COMIS. Les simulations ont été réalisées en reprenant les données du 7 mai au 7 juin 2009. Le modèle réalisé est monozone et basé sur le séjour situé au rez-de-chaussée de la maison individuelle.

XXX e Rencontres AUGC-IBPSA Chambéry, Savoie, 6 au 8 juin 2012 4 4.1. Hypothèses de modélisation Les conditions météorologiques utilisées sont celles de la station de Carpentras en ce qui concerne la vitesse et la direction du vent et le rayonnement global horizontal. La température et l humidité relative extérieures intégrées au modèle sont celles mesurées à proximité du site. L hétérogénéité de la paroi a été négligé dans le modèle, les caractéristiques thermiques des matériaux sont supposées constantes dans la paroi. Elles sont issues des mesures effectuées sur site ou des valeurs de la RT2005 [RT 2005]. Le logement est occupé en permanence par une personne seule. Nous avons considéré que le séjour était occupé de 8h à 23h avec des apports internes basés sur la norme ISO 7730 [ISO 7730]. Par ailleurs, l occupant ouvre ses fenêtres toute la journée en été. Un scénario d ouverture a donc été intégré dans COMIS pour prendre en compte les transferts aérauliques provoqués. La température ambiante de la pièce située à l étage supérieur du séjour a été mesurée pendant cette même période. Nous l avons donc considérée comme condition aux limites pour la paroi séparant les deux espaces. 4.2. Validation du modèle 4.2.1. Paramètres de validation L objectif de ce travail est d analyser l impact d une isolation sur le confort et les besoins énergétiques. Or, les travaux de [BRA 1984] mettent en évidence l influence de l inertie thermique d un bâtiment sur ces deux critères. Nous allons donc valider la prise en compte du phénomène d inertie thermique dans le modèle. Pour cela, différentes méthodes de caractérisation de ce phénomène (masse utile, Th-I de la RT2005, capacité thermique effective [ANT 1998], déphasage et amortissement, etc.) ont été évaluées sur l étude de cas précédente. Il en ressort deux difficultés inhérentes au patrimoine ancien : l hétérogénéité des parois et la méconnaissance de leurs caractéristiques [DGU 2007]. De plus, elles ne prennent pas en compte les phénomènes influant le comportement d un volume habité (rayonnement extérieur, occupation, ventilation, etc.) qui jouent pourtant un rôle dans ce phénomène [ORO 2011]. Nous avons choisi de caractériser l inertie thermique par la méthode nous apparaissant la plus adaptée pour prendre en compte l ensemble du volume habité : la caractérisation par le déphasage et l amortissement entre la température ambiante intérieure et la température extérieure (formules [1] et [2]). Elle permet de s affranchir des caractéristiques des parois et de prendre en compte les phénomènes influant le comportement thermique au travers de la température ambiante intérieure. Déphasage d en heures A t 1, T int (t 1 )=T max A t 2, T int (t 2 )=T min Alors, d= t 2 -t 1 [1]

Évaluation de l impact d une isolation thermique sur le confort d été et les besoins énergétiques d un bâtiment ancien 5 Amortissement m sans unité m=(t max,ext -T min,ext )/(T max,int -T min,int ) [2] Avec : - T int la température ambiante intérieure en C - T ext la température ambiante extérieure en C - T max le maximum de température atteint sur la période considérée (dans notre cas : une journée) en C - T min le minimum de température atteint sur la période considérée (dans notre cas : une journée) en C 4.2.2. Étude de sensibilité Les choix effectués par l utilisateur et la complexité de la simulation énergétique des bâtiments peut générer des variations des résultats [BRA 2004]. Nous allons analyser l influence des hypothèses effectuées lors de la construction du modèle de notre étude de cas pour juger de la précision à apporter à la connaissance des paramètres entrants. Les hypothèses sont de trois classes : météorologiques, caractéristiques des matériaux et caractéristiques aérauliques. Huit paramètres liés aux hypothèses que nous avons prises sont étudiés parmi lesquels : la température extérieure, la conductivité thermique des matériaux, le pas de temps pour le calcul dans le logiciel, le renouvellement d air, etc. Chaque paramètre est testé sur 3 niveaux (+1 ;0 ;-1) et l effet est calculé par la formule suivante : Effet = (Valeur niveau +1-valeur niveau -1)/valeur niveau 0 [3] Figure 1. Effet de 8 paramètres sur la température intérieure et sur l amortissement

XXX e Rencontres AUGC-IBPSA Chambéry, Savoie, 6 au 8 juin 2012 6 La figure 1. présente les effets de la variation de chaque paramètre sur la température ambiante intérieure et sur l amortissement de la température suivant la formule [3]. La validation du modèle se concentre sur la température de l air intérieur et sur les indicateurs d inertie thermique. La figure 1. met en évidence que le paramètre le plus influant sur la température intérieure est la température extérieure. Les autres paramètres ont une influence de l ordre du dixième de degrés. La température extérieure est par conséquent le paramètre à connaître avec le plus de précision pour valider le modèle. Le déphasage n est pas impacté par ces paramètres. Cependant, l amortissement de la température intérieure est influencé principalement par le pas de temps de calcul et par le renouvellement d air. Nous allons maintenant étudier les résultats observés par le modèle. 4.2.3. Comparaison aux mesures La validation du modèle se fait par rapport à trois indicateurs : la température ambiante intérieure, le déphasage et l amortissement de la température intérieure par rapport à l extérieur. L écart entre la température ambiante calculée et celle mesurée est inférieure à 1 C. Au niveau de l inertie thermique, les deux indicateurs présentent des ordres de grandeur similaires entre les mesures et le modèle de l étude de cas. Les résultats sont présentés dans le tableau 2. Indicateur Mesures Modèle Déphasage (h) 3 2 Amortissement (sans unité) 4 5,6 Tableau 2. Comparaison des indicateurs d inertie thermique entre les mesures et le modèle L inertie thermique est impactée principalement par le renouvellement d air et le pas de temps de calcul de la fonction de transfert du mur. En ce qui concerne le renouvellement d air, celui-ci est modélisé par le logiciel COMIS. Le choix de la valeur du pas de temps pour les bâtiments anciens est basé sur l expérience d utilisateurs de TRNSYS ([BRA 2004], [FLO 2008]). Le modèle traduit donc de manière précise le phénomène d inertie thermique et présente peu d écart avec les mesures. Nous considérons donc les hypothèses prises comme valables.

Évaluation de l impact d une isolation thermique sur le confort d été et les besoins énergétiques d un bâtiment ancien 7 5. Impact d une isolation sur les besoins énergétiques d un logement Les simulations sont réalisés sur deux climats de trois semaines chacun. Les conditions sont identiques chaque jour et la température varie sinusoïdalement. Deux climats sont considérés : le premier correspond à un hiver à proximité du site de l étude de cas (Sud de la France) et le second à un été dans cette même zone. Les résultats sont analysés sur la dernière journée de simulation. Trois critères permettent d évaluer des solutions d isolation : - Le Vote Moyen Prévisible : il s agit d un indice permettant d évaluer la sensation de confort thermique d un groupe important de personnes [ISO 7730]. - Les besoins de chauffage en kwh sur 24h de la simulation d hiver. - Les besoins de climatisation en kwh sur 24h de la simulation d été. 5.1. Position de l isolant Trois positions de l isolant ont été testées : l absence d isolant, un isolant intérieur et un isolant extérieur. L isolant considéré est une laine de verre de conductivité thermique égale à 0,04 W/m.K et d épaisseur 10 cm. Ces simulations montrent qu une isolation, quelque soit sa place, dégrade le confort d été. En effet, la figure 2. met en évidence l augmentation du PMV sur la dernière journée de simulation d été. Par ailleurs, l amplitude de variation du PMV est plus élevée avec une isolation : 0,44 sans isolant, 0,49 avec une isolation extérieure et 0,58 avec une isolation intérieur. L occupant doit alors adapter sa vêture et/ou son comportement à cette variation au cours de la journée. Figure 2. Influence de la place de l isolant sur le confort d été En parallèle du confort qui se dégrade, les besoins de climatisation augmentent. L isolation extérieure reste moins pénalisante que l isolation intérieure avec une

XXX e Rencontres AUGC-IBPSA Chambéry, Savoie, 6 au 8 juin 2012 8 multiplication par 4 des besoins de climatisation en kwh pour une isolation intérieure et par 3,5 pour une isolation extérieure. A l inverse, les besoins de chauffage sont divisés par 2,5 avec la mise en place d une isolation. La position de l isolant n influe pas de manière significative sur ceux-ci. Il est important de souligner que les besoins de chauffage sont plus de 20 fois supérieurs aux besoins de climatisation à l état initial (sans isolation). Du point de vue annuel, la réduction des besoins de chauffage est donc majoritaire par rapport à l augmentation des besoins de climatisation. 5.2. Épaisseur de l isolant Trois épaisseurs ont été testées : 5, 10 et 15 cm sur les deux cas précédents : en isolation intérieure et en isolation extérieure. L augmentation de l épaisseur d isolant augmente les besoins de climatisation quelque soit la position de l isolant. Toutefois, les besoins de chauffage sont plus de 10 fois supérieurs, aussi l effet sur la diminution des consommations annuelles est significatif avec l augmentation de l épaisseur. Figures 3 a. et b. Impact de l épaisseur de l isolant sur les besoins énergétiques pour un isolant intérieur et un isolant extérieur Les figures 3 a. et b. mettent en évidence les effets contraires de l augmentation d épaisseur suivant que l on considère les besoins de chauffage ou les besoins de climatisation. En effet, l augmentation de l épaisseur multiplie les besoins de climatisation par plus de 3 et divise par plus de 2 les besoins de chauffage. Cependant, nous pouvons aussi en concordance avec les résultats précédents mettre en avant l effet moins pénalisant de l isolation extérieure sur les besoins de climatisation (figure 3 a.). Ces résultats montrent que ces solutions classiques d isolation ne permettent pas de conserver le confort d été (qualité du patrimoine ancien [CAN 2010]) tout en réduisant les consommations de chauffage.

Évaluation de l impact d une isolation thermique sur le confort d été et les besoins énergétiques d un bâtiment ancien 9 5.3. Orientation des façades isolées Nous avons simulé une solution plus originale pour trouver un compromis entre besoins de climatisation et besoins de chauffage. Pour cela, nous avons choisi d isoler une seule façade sur les deux en contact avec l extérieur (les façades en contact avec l extérieur sont orientées Est et Sud cf. Tableau 1.) et d analyser les résultats suivant l orientation de la façade isolée. La figure 4. présente la somme des besoins de climatisation sur une journée type été et de chauffage sur une journée type hiver obtenus pour chaque simulation. Figure 4. Besoins énergétiques suivant l orientation de la façade isolée Les résultats obtenus montrent que si nous nous intéressons uniquement aux besoins énergétiques annuels, la solution la plus efficace est l isolation complète. Cependant, l isolation de la façade Est permet de réduire de plus de 30% les besoins de chauffage tout en conservant des besoins de climatisation plus avantageux que les autres solutions. Le bâti ancien est souvent soumis à des contraintes architecturales sur les façades qui ne permettent pas la mise en place de solutions d isolation extérieure. Aussi cette solution est un compromis efficace entre confort d été et besoins de chauffage, principalement dans le cas où une isolation extérieure n est pas possible. En effet, une isolation intérieure complète est fortement pénalisante pour les besoins de climatisation (multiplication par 5 des besoins par rapport à une absence d isolation), aussi l isolation partielle intérieure peut être une solution pour conserver le confort d été tout en améliorant les besoins de chauffage. Il n est pas possible de généraliser ces préconisations à l ensemble des bâtiments car la géométrie de la pièce influe sur ces résultats. Dans notre cas, la façade Est dispose d une fenêtre et d une porte-fenêtre, alors que la façade Sud ne possède qu une surface vitrée. Cette solution d une isolation de la façade Est peut ne pas être pertinente sur un autre bâtiment. Cependant, une configuration proche (deux façades en contact avec l extérieur orientée Sud et Est avec présence de surface vitrée) devrait pouvoir bénéficier de ce compromis.

XXX e Rencontres AUGC-IBPSA Chambéry, Savoie, 6 au 8 juin 2012 10 6. Conclusion Ces résultats mettent en avant le fait que l isolation thermique, bien que bénéfique pour les besoins de chauffage, dégrade le confort d été, qualité vantée dans le patrimoine ancien. De ce fait, la préservation de cette caractéristique doit faire l objet d une étude thermique spécifique en amont des projets de réhabilitation. Par ailleurs, les simulations ont aussi mis en évidence que des compromis étaient possibles comme par exemple la solution d une isolation partielle des façades. D autant plus pour les bâtiments anciens où l isolation extérieure est souvent compromise par des contraintes architecturales. En effet, il est alors possible de mettre en place une isolation partielle intérieure qui pénalisera moins le confort d été. En ce sens, cette étude est une contribution nécessaire à la compréhension de l impact d une isolation thermique sur la performance énergétique globale du bâtiment, et à l optimisation des stratégies de réhabilitation des bâtiments anciens. 7. Bibliographie [ANT 1998] ANTONOPOULOS K.A, KORONAKI E., «Apparent and effective thermal capacitance of buildings», Energy, vol. 23, 1998, p. 183-192. [BRA 1984] BRAU J., DEPECKER P., YEZOU R., Influence de l inertie thermique sur les consommations d énergie et de confort, Comportement thermique dynamique des bâtiments, 1984. [BRA 2004] BRADLEY D., KUMMERT M., MCDOWELL T., «Converging on a recommended set of interpretations and assumptions in applying standard tests to energy analysis tool», IBPSA USA SimBuild, 2004. [CAN 2010] CANTIN R., BURGHOLZER J., GUARRACINO G., MOUJALLED B., TAMELIKECHT S., ROYET B.G, «Field assessment of thermal behavior of historical dwellings in France», Building and Environment, vol. 45, 2010, p. 473-484. [DGU 2007] DGHUC, CETE de l Est, DGCB-LASH, MP, Connaissance des bâtiments anciens et économies d énergie, Rapport de synthèse, août 2007. [FLO 2008] FLORY-CELINI C., Modélisation et positionnement de solutions bioclimatiques dans le bâtiment résidentiel existant, Thèse de doctorat, Université Lyon 1 Claude Bernard, 2008. [ISO 7730] NF EN ISO 7730, «Ergonomie des ambiances thermiques Détermination analytique et interprétation du confort thermique par le calcul des indices PMV et PPD et par des critères de confort thermique local», 2006 [ORO 2011] OROSA J., OLIVEIRA A., «A field study on building inertia and its effects on indoor thermal environment», Renewable energy, 2011, p. 1-8. [RT 2005] RT 2005, Règles Th-I.