LE COUVENT DES TRINITAIRES



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Transcription:

LE COUVENT DES TRINITAIRES Fondation et implantation L'Ordre des Trinitaires, fondé en 1198 par un provençal, Jean de Matha, avait pour but de racheter aux Barbaresques les chrétiens enlevés lors des razzias en Méditerranée. En 1199, Jean de Matha revenant d'un voyage autour du bassin méditerranéen revint à Rome en passant par Arles. Il recruta quatre frères : Boniface, Osbert, Vital et Mathieu qui fondèrent à Arles le couvent des Trinitaires. L'archevêque Imbert d'ayguyères leur fit présent d'un jardin entre la ville et le Bourg. Il comprenait une petite chapelle des pèlerins et un petit logement qui fut annexé à la nouvelle maison. La chapelle fut reconvertie en hôpital des pèlerins sous le nom de la Sainte-Trinité. C'est là qu'étaient soignés les captifs rachetés par les frères qui parcourraient le pays à dos d'âne, d'où le nom de "Frères aux ânes" qui leur fut attribué. Du fait de l'extension de la ville, le couvent se trouva situé dans le quartier qui formait la Lice ou Régale de la ville, devenue plus tard rue de la Trinité. Bien opérationnelle dès 1199,ce n'est qu'en 1203 que la congrégation des Trinitaires fut officiellement reconnue et que les pères purent enfin construire leur première église. Le bâtiment obéissait à la règle principale de l'ordre : la simplicité. L'édifice de petite taille, "tirait en long du levant au couchant". Il longeait la rue de la Trinité. Le clocher et la sacristie étaient orientés à l'ouest. Le clocher était une petite tour dont les fenêtres, appelées aussi "oyes" se distinguent encore au début du XIX e siècle, fermées sous de petits arceaux. La sacristie était proportionnelle à la taille du clocher. Le grand autel se trouvait à l'emplacement actuel de la première chapelle au coin gauche de la nouvelle église qui "tire du midi au nord". Le bâtiment contigu au clocher était le petit hôpital des pèlerins. 1

Les Pères Trinitaires possédaient un immense terrain qu'ils aliénèrent dès 1220 en donnant des baux pour s'en faire des revenus. Mais ce terrain fut tronqué par deux fois : en 1253 lors de l'élargissement et la reconstruction des remparts de la ville (c'est à ce moment que furent créées et érigées la place et la porte du Marché-Neuf. ; en 1572 lors de l'achat par la ville d'une partie du jardin pour construire l'hôtel-dieu-du-saint Esprit. Un père trinitaire et ses élèves La ville acquit donc une vaste parcelle de terrain au prix de trente florins d'or et pour indemniser les pères de la perte du terrain, elle leur offrit une terre hors de la porte du Marcanou et une ruelle non passante comprise entre l'hôpital et le couvent, ainsi que cinquante sols pour les employer à fermer cette rue. Bien que fort petit et menaçant ruine, le couvent subsista dans son état primitif jusqu'en 1606, année ou le révérend père en Dieu Guillaume ou Claude Commendataire fit allonger 1'église. Puis,en 1620, il donna à François Lebattut, maître maçon, un prix-fait de la nouvelle église et du nouveau couvent dont l'entrée était sur la rue tirant du puits de la Trinité à la porte du Marché- Neuf. La chapelle des Trinitaires Pour récupérer les terrains aliénés depuis quatre siècles, les pères trinitaires essuyèrent de nombreux procès. La première église, ainsi que les bâtiments conventuels furent démolis en 1629 pour obtenir une plate-forme assez spacieuse pour bâtir une nouvelle église dont la première pierre fut posée le 24 février 1630. Ce nouveau bâtiment fut édifié dans un sens nord-sud, l'entrée étant située rue des Trinitaires et le chevet jouxtant l'hôpital. C'est grâce à la générosité des fidèles que la construction fut menée à bien. La chronologie en est la suivante : - 1631, prix-fait de l'achat d'une nouvelle maison le long de la rue tirant de la porte du Marché- Neuf. - 1632, prix-fait de la cave derrière la chapelle Notre-Dame. - 1640, une partie de la voûte s'écroula : les maçons n'avaient pas bien calculé sa portée. Le bâtiment construit en 1640 n'avait pas de choeur derrière l'autel, il s'achevait par un chevet plat. 2

La chapelle Notre-Dame-du-Bon-Remède fut construite au dépens du couvent et fut donnée à Messire Richard Duport qui fit faire une tombe pour la sépulture de sa famille. A l'arceau où se trouve la banque des consuls on projeta de faire construire une chapelle à saint Roch. Le grand autel était dressé contre la muraille du chevet plat. Cette dernière était couverte d'un grand bois avec des colonnes, corniches et chapiteaux, et les statues de saint Jean et saint Félix relevées en bosse. - 1672, on construisit un réfectoire avec cave en dessous, chambre en dessus, cuisine, petit salon et salle capitulaire à côté du réfectoire. "Voilà une nouvelle église, un nouveau cloître en sus l'autre, avec sa galerie sur voûtes posées sur des arceaux qui se trouvent dans les maisons voisines, voilà une nouvelle cuisine, réfectoire et suite de bâtiments avec sa nouvelle cave qui ont été bâtis depuis l'an 1620 jusqu'en 1765" écrivait au début du XIX e siècle un père trinitaire chargé de raconter l'histoire de son ordre. - 1720, on projeta d'édifier un nouveau sanctuaire. Les maçons retrouvèrent derrière le grand autel des fondements anciens rejetés lors de la construction de 1630. Dans cette campagne de reconstruction, les travaux portaient surtout sur le choeur, la sacristie et un nouveau clocher. Le 12 septembre un prix-fait fut donné et la première pierre posée à l'endroit où se trouve le grand autel en l'honneur de saint Roch. Plan relevé par Pierre Véran au début du XIX e siècle La peste de 1720-1721 arrêta tout de suite les travaux. Les fidèles ayant invoqué saint Roch pour les immuniser du fléau firent de nombreuses offrandes pour le remercier de sa protection et insistèrent pour que le sanctuaire soit achevé. Entre 1725 et 1732, on assista a un nouvel arrêt des travaux. Dans cet intervalle, la bâtisse exposée aux intempéries souffrit terriblement. 3

"Les deux pilastres à côté de l'epitre et de l'evangile élevés jusqu'à la corniche, et l'ancienne muraille qui se trouvait bâtie de haut en bas derrière l'autel occasionnaient de grandes incommodités par des ouvertures qui donnaient du jour de chaque côté. Les pierres de taille de cette muraille sur laquelle l'ancien retable s'appuyait étaient pour la plupart ébranlées et ne tenaient qu'à demi les unes sur les autres à cause des susdits pilastres que l'on commença à élever en 1723" commente l'historien de l'ordre. - 1732, Borel, maître-maçon reprend les travaux. Messire Jacques de Perrin, lieutenant criminel paie les mandats. Pour le remercier et croyant bien faire, les pères firent mettre ses armoiries en pierre au fond du choeur sur le contour de la corniche. Or cet argent était un dû et le sieur Perrin avait mis beaucoup de temps pour honorer sa promesse."pour trois cent livres données ces armoiries qui ont coûté vingt livres occupent une place indue dans le choeur de cette église ; de ce fait, Messire Perrin aurait pu payer toutes les dépenses du sanctuaire" continue le narrateur. La communauté urbaine,qui avait aussi fait un don de trois cent livres, demanda à ce que les armoiries de la ville soient gravées sur le haut de l'arc doubleau qui est au-dessus de 1'autel. Pour chacune de ces armoiries,on paya vingt livres à Jean Mirancel, sculpteur, en l'année 732. - 1733, Jean Bonnafous, maître-maçon reçut le prix-fait pour rehausser le sanctuaire et le pavé des tombes qui s'y trouvent, afin de rehausser d'une marche l'accès au choeur. Le pavage devait aller jusqu'à la porte de la sacristie. Il fit aussi dresser un autel en pierre, retailler et dresser les pierres des degrés de l'autel, élargir une fenêtre, en fermer une autre qui était sur la porte du cloître, entrant dans le choeur. La charpente en couvert du choeur, le rehaussement de la niche de l'autel se trouvent compris dans le devis. Le 17 avril 1733, en présence d'une foule enthousiaste, le père Pierre Poire bénit solennellement l'église. La même année, on remit un tambour neuf à la porte de l'église. - 1771, installation d'un bénitier de marbre. - 1791, l'église et le monastère furent vendus comme biens nationaux à l'administration des malades. Le clocher fut revendu et démantelé. Choeur de la chapelle aujourd'hui 4

Le cloître des Trinitaires En 1879 eut lieu la démolition du cloître des Trinitaires dont les galeries vétustes formaient des dépendances de l'hôtel-dieu-saint-esprit. Les galeries du cloître, voûtées d'ogives dataient du XIII e siècle. On peut encore en apercevoir des travées en entrant dans le café «Le Jardin des Arts» de la rue de la République. Au premier étage,une galerie en plein air était protégée par une toiture supportée par des colonettes à chapiteau non ouvragé. Englobées dans des constructions datant du XIX e, il en reste quelques vestiges dans la partie nord du cloître visibles du Jardin des Arts de la Médiathèque. La partie est du cloître avait déjà disparu en 1630 lors de la reconstruction de l'église. Vestige de galerie ouest du cloître depuis le Jardin des Arts En 1832, lors de l'épidémie de choléra, l'administration détruisit les cellules des moines qui existaient encore et elle raccorda à l'hôtel-dieu-saint-esprit cet ancien monastère acheté par divers propriétaires lors de la vente des biens nationaux. On y établit deux salles dites des Trinitaires, l'une au premier étage comprenant 32 lits, l'autre à l'étage supérieur contenant 30 lits. La façade rue Dulau menaçant ruine, la ville décida de détruire ce dernier vestige du cloître. Les salles furent reconstruites et abritèrent les militaires. En 1883, on projeta de restructurer la façade de l'église rue de la république. Plusieurs dessins furent proposés. Celui qui fut adopté attire encore aujourd'hui nos regards. Extrait de «Espace Van Gogh : autopsie d'un hôpital» / Nathalie Rivière ; D.E.A. D'Histoire de l'art, Université Paul Valéry, Montpellier, 1989. 5