Prévention des accidents d exposition au sang (AES) : le cadre juridique Annie LEPRINCE, Institut national de recherche et de sécurité, Centre de Paris 1 Rappel de la hiérarchie des textes officiels Domaine législatif (Parlement) : LOI Domaine réglementaire : décret en Conseil d'état (pris en application d'une loi) décret arrêté Textes techniques d'explicitation destinés aux services de l Etat : circulaire note technique lettre ministérielle Champ d application du code du travail Prévention des risques Loi du 4 août 1955 : extension du Titre III du Code du travail (hygiène, sécurité et conditions de travail) aux établissements hospitaliers publics. Art. L. 231-1 : «( ) Sont également soumis à ces dispositions ( ) les établissements mentionnés à l article 2 de la loi n 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière et les établissements de soins privés ( )». Les mêmes obligations juridiques de prévention s appliquent à tous les types d établissements, à tous les salariés du secteur santé Titre III du Code du travail Obligations en matière d'hygiène, sécurité et conditions de travail - mise en place d'une démarche globale de prévention - mesures matérielles de prévention - mesures organisationnelles - mesures personnelles - mise en place des instances compétentes (médecine du travail, Comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail ) Prévention des risques Loi du 31 décembre 1991 : principes généraux de prévention et d'évaluation éviter les risques évaluer les risques qui ne peuvent pas être évités combattre les risques à la source adapter le travail à l'homme (conception des postes de travail, choix d'équipements de travail, méthodes de travail ) remplacer ce qui est dangereux par ce qui n'est pas dangereux ou l'est moins planifier la prévention en y intégrant technique, organisation du travail, conditions de travail, relations sociales et facteurs ambiants prendre en priorité des mesures de prévention collective, avant les mesures de protection individuelle donner les instructions appropriées aux travailleurs Evolution des obligations de l employeur dans le contexte de la réglementation européenne L évolution du corpus réglementaire européen a profondément modifié le rôle du chef d entreprise L employeur a l obligation d assurer la santé et la sécurité de ses salariés et pour cela il doit évaluer l ensemble des risques et les maîtriser Sur la base de l évaluation des risques l employeur doit définir les mesures à mettre en oeuvre pour garantir le meilleur niveau de protection, et cela sans se limiter au strict respect de la réglementation
Paragraphe III de l article L. 230-2 : obligation d évaluation des risques «Compte tenu de la nature des activités de l établissement, le chef d établissement doit évaluer les risques pour la sécurité et la santé des travailleurs y compris dans le choix des procédés de fabrication, des équipements de travail, des substances ou préparations, dans l aménagement ou le réaménagement des lieux de travail ou des installations et dans la définition des postes de travail» Décret n 2001-1016 du 5 novembre 2001 (J.O. du 7/11/01) Création d un document relatif à l évaluation des risques pour la santé et la sécurité des travailleurs, prévue par l article L. 230-2 du code du travail et modifiant le code du travail (deuxième partie : décrets en Conseil d État) Décret n 2001-1016 du 5 novembre 2001 (J.O. du 7/11/01) L article R. 230-1 prévoit que : L évaluation comporte un inventaire des risques identifiés dans chaque unité de travail ou de l établissement Les résultats sont transcrits dans un document unique Les résultats sont mis à disposition des membres du CHSCT ou des instances qui en tiennent lieu, des DP ou du personnel soumis à risque, du médecin du travail, des inspecteurs du travail et des agents des services de prévention de la sécurité sociale / Décret n 2001-1016 du 5 novembre 2001 (J.O. du 7/11/01) (suite) Le document est utilisé pour l établissement du bilan annuel et du programme annuel de prévention La mise à jour du document est, a minima, annuelle Le non respect de l établissement du document est passible d une peine d amende (contraventions de 5 e classe, article R. 230-1-1 du code du travail) Quelques repères pour le document unique Qui l élabore? Obligation qui incombe à l employeur Contenu du document Résultats de l évaluation des risques qui comporte un inventaire Deux étapes : Identifier les dangers Analyser les conditions d exposition des salariés à ces dangers Principes de l évaluation : précisés dans une circulaire Circulaire n 6 DRT du 18 avril 2002, prise pour l application du décret n 2001-1016 portant création d un document relatif à l évaluation des risques pour la santé et la sécurité des travailleurs, prévue par l article L. 230-2 du code du travail et modifiant le code du travail
Textes spécifiques sur les différents risques Manutention de charges Bruit Rayonnements ionisants Écrans de visualisation Risque chimique Risque CMR Amiante Silice, plomb, chlorure de vinyle, benzène Risque biologique Travail de nuit Directive 90/679/CEE du 26 novembre 1990 concernant la protection des travailleurs contre les risques liés à l'exposition à des agents biologiques au travail, codifiée (ainsi que les directives successives la modifiant) et abrogée par la directive 2000/54/CE du 18 septembre 2000 Transposition en droit français : décret n 94-352 du 4 mai 1994, créant une nouvelle section du code du travail consacrée à la prévention des risques biologiques (art. R. 231-60 à R. 231-65-3 du code du travail) Directives 90/679/CEE-2000/54/CE et décret du 4 mai 1994 «Agents biologiques» : «les micro-organismes, y compris les microorganismes génétiquement modifiés, les cultures cellulaires et les endoparasites humains susceptibles de provoquer une infection, une allergie ou une intoxication» (art. R. 231-61) Directives 90/679/CEE-2000/54/CE et décret du 4 mai 1994 Classement des agents biologiques de 1 à 4, par ordre croissant de pathogénicité Liste fixée par arrêté modifié du 18 juillet 1994 Classement des agents biologiques en fonction de leur risque infectieux (art. R. 231-61-1) Groupe Pathogénicité chez l'homme Danger pour les travailleurs Propagation dans la collectivité Existence d'une prophylaxie et/ou d'un traitement efficace 1 non - - - 2 oui oui peu probable oui 3 oui oui possible oui 4 oui oui risque élevé non Classement des agents biologiques Pathogènes transmissibles par exposition au sang VIH 3* Hépatite B 3* Hépatite C 3* Syphilis 2 Paludisme 3* Parvovirus B19 2 CMV 2 HTLV1 3* Fièvres hémorragiques virales 4 (Ebola, Marburg, Lassa, Congo-Crimée) Creutzfeldt-Jacob? 3* 3* : Agents normalement non transmissibles par voie aérienne
Directives 90/679/CEE-2000/54/CE et décret du 4 mai 1994 Champ d'application Deux types de situations de travail : activités impliquant l'utilisation «délibérée» d'agents biologiques, activités où l'exposition est «potentielle» Décret du 4 mai 1994 : mesures de confinement et d isolement Arrêté à paraître fixant les mesures d'isolement et de confinement en services de soins Arrêté du 16 juillet 2007 (J.O. du 4 août 2007) fixant les mesures techniques de prévention, notamment de confinement, à mettre en œuvre dans les laboratoires de recherche, d enseignement, d analyses, d anatomie et cytologie pathologiques, les salles d autopsie et les établissements industriels et agricoles où les travailleurs sont susceptibles d être exposés à des agents biologiques pathogènes (abrogeant l arrêté du 13 août 1996) Surveillance médicale Décret du 4 mai 1994 : Arrêté à paraître fixant les recommandations en matière de surveillance médicale spéciale (Art. R. 231-65) La mission du médecin du travail est définie ainsi dans le Code du travail : «( ) Eviter toute altération de la santé des travailleurs du fait de leur travail, notamment en surveillant les conditions d'hygiène du travail, les risques de contagion et l'état de santé des travailleurs» (Art. L. 241-2). Vaccinations Décret du 4 mai 1994 : (Art. R. 231-61-1) «Le chef d'établissement recommande (...) sur proposition du médecin du travail, aux travailleurs non immunisés (...), à sa charge, les vaccinations appropriées» Code de la Santé Publique Obligations vaccinales Décret du 4 mai 1994 : prescriptions spécifiques au secteur santé «Pour les activités impliquant le prélèvement, la manipulation et le traitement d'échantillons d'origine humaine ( ), mettre au point des procédures et mettre à disposition des travailleurs des matériels adaptés visant à minimiser les risques de contamination» (Art. R. 231-62-3, alinéa 2 e ) Décret du 4 mai 1994 : prescriptions spécifiques au secteur santé «Dans les lieux où des travailleurs sont susceptibles d'être en contact avec des agents biologiques pathogènes pouvant être présents dans l'organisme de patients ou de personnes décédées ( ), des mesures appropriées doivent être prises pour assurer la protection et la sécurité des travailleurs, notamment par une information sur les procédés de décontamination et de désinfection, et la mise en œuvre des procédés permettant de manipuler et d'éliminer sans risque des déchets contaminés ( )» (Art. R. 231-64, alinéa 1)
Décret du 4 mai 1994 : prescriptions spécifiques au secteur santé «Dans les laboratoires, notamment ceux réalisant des analyses de biologie médicale ( ), des mesures de confinement correspondant au niveau de risque mis en évidence au terme de l'évaluation ( ) doivent être prises ( )» «( ) Les laboratoires dont l'objectif n'est pas de travailler avec des agents biologiques pathogènes doivent, en cas d'incertitude quant à la présence de ces agents, adopter au moins le niveau de confinement requis pour les agents du groupe 2 et, si nécessaire, celui correspondant à ceux des groupes 3 ou 4» (Art. R. 231-64-1) Cas particulier des laboratoires d analyses médicales Obligations de prévention également prescrites par le code de la Santé publique : Arrêté du 26 novembre 1999 relatif à la bonne exécution des analyses de biologie médicale (arrêté remplaçant l arrêté du 2 novembre 1994). Arrêté du 26 novembre 1999 - Annexe générale Guide de bonne exécution des analyses de biologie médicale (GBEA) «( ) s assurer que les mesures concernant la santé et la sécurité des personnels et la protection de l environnement ( ) sont appliquées ( )» «( ) établir et mettre en œuvre les procédures applicables relatives à l hygiène et à la sécurité du personnel ( )» «( ) s assurer de l élimination des déchets ( )» Approche «qualité-sécurité» L intégration de la prévention des risques dans les critères de qualité nécessite une bonne évaluation préalable des risques, rejoignant les obligations du Code du travail. Le «Guide de bonne exécution des analyses de biologie médicale» est un exemple d intégration qualité-sécurité. Arrêté du 26 novembre 1999, remplaçant et abrogeant l arrêté du 2 novembre 1994 (ministère chargé de la Santé) Apport de la normalisation Normes françaises : AFNOR (normes NF) Normes européennes : CEN (normes NF EN) Exemples, normes relatives aux : - gants médicaux - désinfectants - postes de sécurité micro-biologique Conformité à la norme : - critère de choix des équipements Réparation des contaminations professionnelles Maladie professionnelle (système des tableaux et système complémentaire) Accident du travail Maladie contractée en service
Réparation des contaminations professionnelles Infections d origine professionnelle par les virus des hépatites A, B, C, D et E Tableau n 45 du Régime général Tableau n 33 du Régime agricole Réparation des contaminations professionnelles Les contaminations professionnelles par le VIH sont réparées au titre des accidents de travail (Décret n 93-74 du 18 janvier 1993) L accident (blessure, projection de sang ) doit être déclaré en AT Pour que la séroconversion puisse être rattachée à l accident, une sérologie négative doit être constatée avant le 8 e jour et un suivi sérologique doit être réalisé Les modalités de ce suivi sérologique sont précisées par l arrêté du 1er août 2007 (1 er et 3 e mois après l accident en l absence de traitement prophylactique, 2 e et 4 e mois en cas de traitement)