La méthanisation des boues urbaines Sylvaine Berger SOLAGRO - 75 Voie du TOEC - 31176 Toulouse Cedex 3 Tél. 05 67 69 69 69 - Email : sylvaine.berger@solagro.asso.fr «La méthanisation des effluents industriels», 2005 «La digestion anaérobie des boues urbaines», 2001 Agence de l Eau Adour Garonne, Solagro [gratuit, téléchargeable sur le web] «La méthanisation des déchets municipaux et assimilés», 2000 Solagro, ARENE Ile de France, Ademe, GDF «La valorisation du biogaz en Europe», 2000 ADEME, GDF, Solagro, Altener www.solagro.org Association loi 1901 200 adhérents, 16 salariés Initiatives pour l énergie, l agriculture, l environnement Biomasse : biogaz, bois énergie, biocarburants, paille Maîtrise de l énergie, énergies renouvelables Agroécologie, forêt 1
Plan de la présentation 1 / La méthanisation des boues urbaines : état des lieux et état de l art en France 2 / Les boues urbaine en co-digestion : la méthanisation territoriale Synthèse état des lieux et état de l art du parc de méthanisation des boues urbaines en France 2
Le parc français de méthanisation de boues urbaines capacité de 17 millions d équivalent habitants 60 installations (moyenne hors Achères : 125.000 EH) : de 30.000 à 6,5 millions d EH 350.000 tonnes de matières sèches digérées chaque année 140.000 tonnes sont transformées en biogaz => = 70.000 tonnes de pétrole taux d abattement des matières sèches 41 %, et 56% sur les matières volatiles Valorisation des boues digérées en agriculture Capacité : 18 MEH, stable depuis 30 ans Capacité en milliers EH 20 000 18 000 16 000 14 000 12 000 10 000 8 000 6 000 4 000 2 000 0 1970 1972 1974 1976 1978 1980 1982 1984 1986 1988 1990 1992 1994 1996 1998 2000 2002 3
64 installations en 2004 1970 : -71 STEP < 50 keh - 69 STEP > 50 keh Moyenne : 123 keh 2004 : -12 STEP < 50 keh - 54 STEP > 50 keh -Moyenne : 280 keh Etat des lieux Déclin dans les années 1990 : disparition de nombreuses stations de petite et moyenne capacité en surcharge, moindre intérêt avec boues d aération prolongée, nouveaux impératifs (azote, phosphore) système d appels d offre au moins disant, occultation de la problématique énergie Perte de savoir-faire Aujourd hui : une technologie mature améliorations techniques marginales parc actuel en bon état de fonctionnement, conduite maîtrisée Avis très positif des exploitants Regain d intérêt actuel, nouveaux projets 4
L C LH C L Q StB F L E C F T E N I H M StN C T D B SO M B R L A C B B M A N C M C M A NDC H P La place de la digestion dans la filière boues Eau brute Décanteur Bassin dʼaération Clarificateur Eau traitée Boues primaires Epaississeur Boues biologiques Déshydratation surnageant Stockage boues mixtes Digesteur Gazomètre boues digérées déshydratées 5
Le standard technique Sortie / soupapes gaz Gazomètre Chaudière, moteur Boues Canes d injection Injecteurs Compresseur Eau chaude Retour boues réchauffées Echangeur thermique (tubulaire) Caractéristiques du parc enquêté (20 STEP) Mésophile 37 C 55% d abattement des MVS sur boues mixtes 30% d abattement des MVS sur boues d aération prolongée Digesteur primaire + digesteur secondaire - Nouvelle conception => 1 digesteur TRH : 30 jours Charge du digesteur : 1,2 kg MVS/m3/j (variable de 0,6-2) Production de CH4 : 550 m3 CH4/t MVS dégradée 6
Types de substrats digérés TYPE DE BOUES Boues primaires seules Boues mixtes Boues biologiques seules Boues d'aération prolongée Boues de déphosphatation Graisses Matières de vidange EXEMPLES DE STATION Rochefort Clos de Hilde (Bordeaux) SIARCE (Corbeil), Cergy Limoges, Bourg-en-Bresse Seine-Aval (Achères) Saint-Brieuc Seine-Amont (Valenton) Destination des boues digérées DESTINATIONS FINALES Séchage thermique Co- incinération Incinération dédiée Compostage Epandage Stockage ISD EXEMPLES DE STATION Nancy, Saint-Brieuc Clos de Hilde (Bordeaux), Bonneuil Seine-Amont (Valenton) Mont-de-Marsan, Creil, Nîmes nombreux cas nombreux cas 7
Valorisation du biogaz TYPE D'APPLICATION Moteurs à gaz Moteurs dual-fuel Turbine à gaz Pile à combustible Conditionnement thermique des boues Séchage thermique des boues Combustible d'appoint pour incinérateur Gaz carburant pour véhicules Gaz naturel injecté sur réseau public Chauffage des locaux EXEMPLES DE STATION Rochefort, Marseille, Muret, Seine-Aval, Besançon Seine-Amont (Valenton) Louis-Fargue (Bordeaux), Seine-Aval Cologne (Allemagne) Seine-Aval (Achères) Saint-Brieuc, Nancy, Limoges Seine-Amont (Valenton) Lille Marquette, Eslov (Suède) Tilburg (Pays-Bas) Bonneuil, Cergy, Evry, Versailles Quelques exemples 8
Station d épuration urbaine Evry 250.000 EH Boues primaires + faible charge / dénitrification Centrifugation, chaulage, 30% siccité, épandage agricole MES 1991, digesteur 7000 m3 TRH 38 j Chauffage digesteur + locaux, 1500 MWh Station d épuration urbaine Rochefort 35.000 EH Boues primaires Filtre-bande, 27% siccité, compostage avec déchets verts municipaux, valorisation agricole MES 1965, digesteur 1200 m3 TRH 25 j Chauffage digesteur, 100 MWh 9
Station d épuration urbaine Seine Aval (Achères) 6.500.000 EH Boues primaires, biologiques et tertiaires Conditionnement thermique boues digérées (50% siccité) MES 1940 à 1965 28 digesteurs, total 250.000 m3 46.000 MWh : TAG 3,5 Mwe + 3 MAG 1 MW + 4 motocompresseurs 1,2 MW Station d épuration urbaine Ambarès (33) 90.000 EH Boues primaires + moyenne charge Filtre bande, 23% siccité, incinération et CET MES 1973 TRH 21j + 10j Chauffage digesteur 10
Station d épuration urbaine Asnières 42.000 EH Boues primaires + aération prolongée Filtre bande, 19% siccité, valorisation agricole MES 1989, digesteur 1950 m3, TRH 27 j Chauffage digesteur Station d épuration urbaine Bonneuil en France 300.000 EH Boues primaires + moyenne charge + tertiaires physicochimiques Centrifugation, siccité 23%, incinération (+ CET) MES 1995, Digesteurs 9700 m3, TRH 39 j Chauffage digesteur + locaux, 4000 MWh 11
Station d épuration urbaine Mont de Marsan 45.000 EH Boues primaires + moyenne charge Filtre bande, siccité 16%, compostage OM et déchets verts MES 1975, digesteurs 1800 m3, TRH 45j Chauffage digesteur + hors gel local deshydratation Station d épuration urbaine Versailles 250.000 EH Boues primaires + faible charge Centrifugation, chaulage, 30% siccité, valorisation agricole + CET MES 1992, digesteur 4000 m3, TRH 46 j Chauffage digesteurs + locaux 12
Les avantages Réduction de la masse et des odeurs Elimination des agents pathogènes (bactéries, virus) Impact sur les polluants organiques (cycle benzènique) Amélioration de la déshydratation Caractère structurant pour le compost Nécessité de moins de chaux Séchage : moins de dépenses d énergie Production d énergie : 3/4 du biogaz produit valorisé 2/3 en chaudière (280 GWh) : moitié pour le digesteur 1/3 en cogénération : 45 GWh d électricité + 60 GWh de chaleur Autres : moto-compresseurs + biogaz carburant à Lille Quand envisager la digestion? Facteurs favorables Coût d évacuation élevé Présence de boues primaires Station de moyenne ou grande capacité Contraintes de voisinage, recherche moindre emprise Destination : épandage, séchage thermique, enfouissement Besoins énergétiques identifiés Traitement physico-chimique du phosphore Codigestion de graisses 13
Quand envisager la digestion? Facteurs défavorables Coût d évacuation faible Boues d aération prolongée seules Station de faible capacité Peu de contrainte de voisinage et d emprise Destination : compostage, incinération (?) Fortes contraintes de rejet d azote (retour surnageant) Ne pas exclure d emblée cette solution Technique pas toujours connue des prescripteurs Approche intégrée traitement de l eau - traitement des boues La méthanisation territoriale 14
La production de biogaz en France - Enjeux Gaz de décharge 37 installations - 100 MWel 160 ktep Electricité Biogaz agricole Quelques installations < 500 kwe - Cogénération Nombreux projets individuels et collectifs STEP urbaines 60 stations 90 ktep Thermique 300 ktep primaire Valorisation électrique CET Potentiel important (biomasse agricole) => 2,4 Mtep en 2020 (dont 1,4 Mtep pour l agriculture et territoire) STEP industrielles 100 installations 50 ktep Thermique Traitement des déchets ménagers 4 sites + 2 en démarrage + nombreux projets 4 ktep Thermique Electricité Méthanisation territoriale Mélange boues urbaines et biodéchets des ménages, déchets industriels etc Biomasse produite sur un territoire : agriculteurs, collectivités, industriels Lieu d implantation choisi : valorisation de la chaleur : industrie, collectivité (réseau de chaleur) Basé sur le «modèle Danois» 20 installations «centralisées» depuis le milieu des années 1980 Portage : coopératives, sociétés, collectivités locales Taille : 20.000 à 200.000 t/an de lisiers (2/3) et déchets IAA (1/3) 15
Schéma de principe Collecte des boues urbaines Collecte des déchets Cogénérateur Réseau électrique Canalisation gaz Réseau de chaleur (vapeur, retour eau chaude) Séparation de phase Maturation digestat solide Collecte des déjections Unité de méthanisation Transport et épandage Stockages décentralisé 4 ) Le digestat est épandu sur les terres agricoles 1 ) les déjections et déchets biodégradables sont collectés et amenés à l usine 2 ) La méthanisation décompose les matières biodégradables en gaz 3 ) Le digestat qui contient les matières humiques et minérales est stocké (fosses à lisier) 5 ) Le biogaz alimente un moteur qui produit de l électricité et de la chaleur 16
Les critères de sélection des cosubstrats Quels critères : Valeur énergétique : potentiel méthanogène Equilibre de la ration Disponibilité Coût/recette Réglementation Valeur énergétique 17
Potentiel méthanogène de différents substrats Substrat Siccité (% MS) Productivité (m3 CH4/t entrée) Lisier bovin 8 12,8 Lisier porc Lisier volaille 5 5 12 12 Fumier bovin 20 32 500 à 1000 m3 CH4 Fumier porc 20 par tonne de 48 matière organique Fumier volaille 20 48 dégradée Matières stercoraires 12 38-44 Argile de blanchiment Huiles Boues d épuration Biodéchets 98 95 5 30 314 650-700 15 100 Equilibre de la ration Pour un fonctionnement optimal du digesteur : Pas de lignine Un mélange stable dans le temps Rapport C/N de 20 à 40 C/N>40 : digestion incomplète du carbone par manque d azote C/N<15 : inhibition de la digestion due à la formation NH4 Teneur NH4 ration : max 3 kg/t produit brute Teneur NH4 digestat : max 5 kg/t produit brute % de graisse : 30 % max de la MS de la ration Charge organique du digesteur : max 2 kg de MO/m3 18
Disponibilité Objectif : ration stable dans le temps et une charge organique constante Constats : système d élevage avec pâturage : baisse de la disponibilité disponibilité des co-substrats : Très variable sur l année (ex. : tontes et DV) Disponibilité sur 15 ans? Distances limites de transport des matières AR par camion 20 t, 30 l/100 km Energie : min. production électricité seule, rendement 30% ; max. taux global de valorisation 70% Distance limite : dépenses = 20% de l énergie produite Contraintes économiques et logistiques : limiter les distances à 10-20 km => échelle cantonale Distance maximale en km Distance limite de transport (km) 500 450 400 350 300 250 200 150 100 50 0 0% 20% 40% 60% 80% 100% Lisier, boues Fumier bovin Déchets IAA Fumier caprin Teneur en MS Lipides purs 19
Le choix des co-substrats substrats propres, homogènes, sans impuretés, facilement biodégradables, origine végétale, pas de difficulté réglementaire Redevance faible Redevance élevée substrats hétérogènes, présence d impretés, origine animale, contexte réglementaire, sanitaire Biomasse utilisée dans les centrales biogaz au Danemark Graisses/boues de flottation Déchets alimentaires Déchets de poisson Déchets de fruits Déchets de brasserie Déchets de laiterie Industrie du sucre Déchets d huileries Industrie pharmaceutique Cultures énergétiques Déchets d abattoir Autres déjections Lisier bovin Lisier porcin 20
Initiation du projet Réflexion au niveau d un territoire sur les 3 paramètres principaux : Le gisement de matière organique Substrats Co-substrats L énergie Injection de biométhane : distance au réseau, taille Cogénération : débouchés pour la chaleur, adéquation production / besoins, taux de valorisation La valorisation du digestat Besoins des agriculteurs : solide, liquide, azote minéral Débouchés : plan d épandage des fournisseurs, proximité de zones de grandes cultures Les consommateurs de chaleur Principalement eau chaude : cas le plus favorable Principalement vapeur => rendement sur gaz de 17% par cogénération moteur, 50% par cogénération turbine Norea [Mauléon] Gastronome [Neuil] Heuliez [Cerizay] Gastronome [Moncoutant] Loel&Piriot ; France Champignon ; SOVILEG [Thouars] Riblaire BRM Mobilier, [St Varent] Wagon Automotive, Calcia Ville [Airvault] [Bressuire] BTS Industrie [Chatillon sur Thouet] Ville [Parthenay] Couvoir Boyé [Allonne] Principalement gaz en direct => pas de cogénération 21
Évolution des formes d azote au cours de la digestion Produit brut N organique Produit digéré Produit solide : action similaire à amendement de fond NH4 Produit liquide : action similaire à engrais liquide L azote organique (protéines) est transformé en ammoniac (minéralisation) au cours de la méthanisation L ammoniac (soluble) se trouve principalement dans la fraction liquide en cas de séparation de phase Gain pour les acteurs Agriculteurs fournisseurs de déjections Economie engrais minéraux : Optimisation de la fertilisation, plan commun d épandage Phase liquide riche en NH4 Engrais de ferme désodorisés Industriels Economie sur le traitement des déchets Economie sur la consommation de chaleur 22
Limiter la volatilisation de NH3 Implication des agriculteurs «Fournisseur / utilisateur» Livraison des lisiers et fumiers à titre gratuit => engagement de reprise à valeur équivalente (base : m3? N? ) Modulé selon : ± paiement du transport, ± qualité produits livrés Prise charge rendu bord de champs ou rendu racine Livraison de lisiers et fumiers excédentaires sans reprise (excédents) : prestation => paiement à la tonne comme les résidus IAA? «Coopérateur» Prise de participation dans une coopérative, ou dans une société locale => rémunération des parts / prise de risque Structure porteuse : coopérative à créer ou existante, société locale de droit privé (partenariat avec société spécialisée), SCIC pour permettre la prise de participation des collectivités territoriales? 23
Injection du gaz / Biogaz Carburant des filières émergentes biogaz carburant (22 sites de traitement en Suède et une dizaine en Suisse) injection sur le réseau de gaz naturel (1 dizaine d installations en Suisse, Pays-Bas) Biogaz Carburant Suède 20 ans d expérience Production de biogaz à partir de STEP urbaine et méthanisation de déchets organiques (industriels + agricoles) Réseau de stations de distribution de biométhane carburant 2000 : 15 2007 : 70 2010 : objectif 400 Suisse 15 installations de méthanisation de biodéchets municipaux Transport par réseau de gaz naturel Lille Unique référence française Pilote en 1989 2008 : usine de méthanisation de biodéchets municipaux Réseau BIOGASMAX 24
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Injection sur le réseau Réglementation Prévue dans la Directive Européenne 2003/55/EC Décret d application 2004-555 Article 3 : expertise risque sanitaire Mission AFSSET depuis septembre 2006 - Dernière étape réglementaire Conclusions : possibilité d injecter le biogaz épuré mais l expertise collective ne s est pas prononcée sur le biogaz épuré issu de STEP urbaines et industrielles (pas de données suffisantes) Financement? Idem électricité? prise en charge du surcoût EnR /non EnR via CSPE Obligation d achat Tarif fixé par arrêté sur une durée déterminée => politique de l Allemagne 26