Les cancers colorectaux



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Transcription:

Les cancers colorectaux Pr Jean-Louis Merlin, Pr Thierry Conroy Centre Alexis Vautrin Nancy Université jl.merlin@nancy.fnclcc.fr www.alexisvautrin.fr

Incidence des cancers dans le monde en 2000 1 Poumon 2 Sein 3 Colorectal Estomac Foie Col utérin Œsophage ORL 1 200 000 1 000 000 940 000 870 000 560 000 470 000 410 000 390 000

Incidence des cancers en France en 2009 1. Prostate 71 000 2. Sein 52 000 3. Colorectal 39 500 4. Poumon 34 200

Le cancer colorectal en France 39 500 cas en 2009 : 11,4 % des cancers en France 2 ème cancer chez la femme et 3 ème cancer chez l homme 17 500 décès en 2009 Plus fréquent dans le nord et moins fréquent dans le sud Découvert au stade de métastases une fois/quatre

Le cancer colorectal en France : Le nombre de cas augmente, la mortalité baisse 39 500 cas en 2009 : 11,4 % des cancers en France 17 500 décès en 2009

Localisation du cancer colorectal 40 % de cancers du rectum 60 % de cancers du côlon côlon droit et transverse 25 % côlon G 5 % sigmoïde 30 %

Lésions tumorales pré-cancéreuses 60 à 80% des cancers du côlon se développent à partir d une lésion précancéreuse de la muqueuse intestinale : polype (macroscopie) ou adénome (microscopie) Mais plus de 90% des adénomes ne dégénéreront jamais Facteurs de risque de transformation : taille > 1cm contingent villeux dysplasie de haut grade Polype Polype > 1cm Composante villeuse Cancer

Du polype adénomateux au cancer Environ 10 ans BENIN MALIN muqueuse saine polypes de dysplasie croissante dysplasie sévère = in situ (Tis) cancer INVASIF (infiltrant) MUQUEUSE MUSCULARIS MUCOSAE SOUS MUQUEUSE MUSCULARIS PROPRIA SOUS SEREUSE SEREUSE Si polype enlevé, jamais de métastases 100% de guérison Risque variable selon stade Le plus souvent, dépist pisté à temps, un cancer colorectal n'est pas méchant

Du polype adénomateux en dysplasie sévère au cancer - Dysplasie sévère = cancer in situ: cellules cancéreuses localisées dans la membrane basale glandulaire (cancer intraépithélial) ou dans la muqueuse (cancer intramuqueux) MUQUEUSE MUSCULARIS MUCOSAE SOUS MUQUEUSE T in situ T invasif MUSCULARIS PROPRIA - Cancer invasif = franchissement de la musculaire muqueuse (envahissement de la sousmuqueuse) SOUS SEREUSE SEREUSE

La croissance tumorale D abord dans la lumière de l intestin : les tumeurs deviennent peu à peu circonférentielles En profondeur dans la paroi (l intérieur vers l extérieur) Puis ganglionnaire Puis métastatique La tumeur maligne induit localement la formation de nouveaux vaisseaux sanguins ou lymphatiques

Cancérogenèse colorectale Formes à prédisposition familiale Formes liées au hasard (sporadiques), pas d histoire familiale Situation intermédiaire : Antécédents de CCR retrouvés dans la famille chez 15 à 20% des patients

Haut risque de cancer colorectal Formes à prédisposition familiale Polypose adénomateuse familiale (PAF) Cancer vers 40 ans Risque avant 50 ans > 99% Le syndrome de Lynch = transmission par l un des 2 parents d un gène de prédisposition au cancer du côlon ou du rectum

La polypose adénomateuse familiale 1 % des cancers colorectaux Caractérisée par le développement de centaines ou de milliers de polypes adénomateux

La polypose adénomateuse familiale Cancer colorectal avant 40 ans Maladie le plus souvent à transmission autosomique dominante liée dans 90% des cas à une mutation du gène APC, un gène suppresseur de tumeur situé sur le bras long du chromosome 5 (5q21) Diagnostic moléculaire possible

La polypose adénomateuse familiale : Prise en charge Consultation d oncogénétique : dresser l arbre généalogique et recherche de la mutation familiale responsable Surveillance coloscopique annuelle à partir de l âge de 10-12 ans Enlever le gros intestin par précaution au plus tard vers 20 ans Surveillance endoscopique annuelle de la suture ou du rectum restant, Gastroscopie au moins tous les 3 ans

Le syndrome HNPCC* ou syndrome de Lynch * Hereditary non polyposis colorectal cancer: mais polypes quand même 2 à 4 % des cancers colorectaux Prédisposition par transmission autosomique dominante. Plusieurs gènes du système de réparation des mésappariements de l ADN sont en cause : hmsh2, hmlh1, hmsh6, hpms1, hpms2. La mutation d un allèle est responsable de ce syndrome Puis perte d hétérozygotie (ou mutation somatique) sur le second allèle Diagnostic moléculaire possible (mutation trouvée 1/2)

Caractérisques d un cancer colorectal de type Lynch Relatif jeune âge Côlon droit surtout (70 %) Meilleures chances de guérison Mutation constitutionnelle d un des gènes du système de réparation de l ADN = diagnostic génétique direct possible dans les familles

Le Syndrome de Lynch ou HNPCC Critères d Amsterdam II Trois sujets atteints par un cancer du spectre des cancers HNPCC (côlon, utérus, voies urinaires excrétrices, intestin grêle) dont un est parent au premier degré des deux autres Un cas avant 50 ans Deux générations successives atteintes L absence de ces critères n exclut pas un HNPCC

Instabilité des microsatellites (MSI) : diagnostic par biologie moléculaire MSI =MicroSatellite Instability = Microsatellites instables Test de «débrouillage» ADN ADN tumoral normal MSI

Syndrome de Lynch : surveillance endoscopique chez sujets indemnes Processus de développement d un cancer précoce et accéléré Fréquence élevée de lésions planes plus difficiles à détecter à la coloscopie Coloscopie tous les 1 à 2 ans dès l âge de 20 ou 25 ans, de préférence avec coloration à l indigo-carmin : plus grand nombre de polypes décelés

Syndrome de Lynch avec cancer colorectal Prise en charge après identification de la mutation Discuter avec le patient d enlever tout le gros intestin ou presque, avec surveillance endoscopique du rectum restant Examen gynécologique, biopsie d endomètre et échographie pelvienne annuels à partir de 30 ans Discuter avec la patiente d enlever ovaires, trompes et utérus, après accomplissement du projet parental

Que faire en pratique devant une suspicion d histoire familiale? I. Consultation d oncogénétique d emblée si : Deux sujets atteints parents au premier degré Malade de moins de 40 ans Malade ayant un antécédent personnel de cancer du spectre étroit (côlon, grêle, endomètre, voies urinaires) II. Test de débrouillage: recherche d instabilité des microsatellites (MSI) sur la tumeur Malades entre 40 et 60 ans atteints par un cancer colorectal Malades ayant un antécédent familial au 1 er degré de cancer connu comme associé au syndrome de Lynch Et si microsatellites instables (anormaux), indication d une recherche génétique approfondie

Deux voies de la cancérogenèse INstabilité Chromosomique (LOH) :80-85 % Perte d hétérozygotie mutations APC, Ki-ras, pertes alléliques, TP53 1 % polypose familiale FAP 80 % cancers sporadiques INstabilité Moléculaire (MSI) : 15-20 % Altération hmlh1 ou hmsh2, ou hmsh6, ou hmsh3 Dans les 2 voies, les mutations initiatrices sont celles des 2 syndromes familiaux, FAP et s de Lynch 2-4% Lynch 11-15 % cancers sporadiques avec hyperméthylation du promoteur de MLH1

Dépistage du CCR Le dépistage du cancer colorectal est justifié car : c est un cancer fréquent c est un cancer grave il peut être guéri s il est diagnostiqué au début Il existe une lésion précancéreuse identifiable il remplit les conditions nécessaires à la mise en place d un dépistage

Dépistage organisé du cancer colorectal Adénome (polype) bien avant cancer Adénomes et petits cancers : pas de symptômes Coloscopie : méthode efficace mais coûteuse, à risque et mal acceptée : à réserver aux formes à haut risque Objectif : réduction de la mortalité par cancer colorectal Le plus souvent, dépisté à temps, un cancer colorectal n'est pas méchant

Dépistage selon profils à risque de CCR Personnes à risque moyen sujets > 50 ans risque cumulé 0-74 ans : 3,5 % Dépistage organisé par test Hémoccult Personnes à risque élevé Atcd familiaux de CCR Atcd personnels et familiaux d adénomes maladies inflammatoires Personnes à risque très élevé Prédisposition familiale (PAF, HNPCC) Dépistage individuel par coloscopie

Le dépistage organisé du cancer colorectal concerne la population générale, à risque moyen de CCR : sujets de 50 à 75 ans asymptomatiques sans antécédents personnels ni familiaux de CCR sans MICI

Hémoccult II tous les 2 ans Hémoccult - + 2 ans Suivi simple - Coloscopie + Traitement Endo/chir Suivi spécifique

Dépistage du CCR en France Sur 100 tests Hemoccult II pratiqués : 1 à 3 % positifs Coloscopies de suivi : 10 % cancer 25 à 35 % polypes 97 à 99 % négatifs 55 à 65 % négatives

Le dépistage organisé est efficace si 50% de la population s y prête Coloscopie si Hémoccult + 1 à 2 % de positifs Mortalité 10% cancers (Stades I : 40%) - 15 à - 20% après 10 ans* * Dans la population totale (réduction de mortalité de 33% dans la population ayant effectivement participé)

Dépistage du cancer colorectal : résumé Population générale HAUT RISQUE RISQUE "MOYEN" RCH Crohn Polypose Lynch 1 parent au 1 er degré atteint avant 65 ans Sujet 50-75 ans sans facteur de risque Coloscopie tous les 2 ans après 15-20 ans d évolution Recherche de la mutation (consentement) Coloscopie tous les 5 à 10 ans Hemoccult tous les 2 ans. Coloscopie si test positif Sinon surveillance coloscopique tous les 1-2 ans

Symptômes du cancer du côlon Sang rouge ou noir dans les selles : la tumeur saigne anémie fatigue Sang rouge pendant/en dehors des selles Tout sang dans les selles au delà de 40 ans impose une coloscopie totale (même si hémorroïdes connues) Troubles du transit : la tumeur rétrécit l intestin alternance de diarrhée et de constipation aggravation d une constipation puis occlusion Traître : généralement pas de douleurs

Examens diagnostiques : Coloscopie : Informer et recueillir l accord du patient : risque de perforation (0,2 %) Anesthésie générale Coloscopie totale si possible quand la lésion est franchissable: voit, situe et biopsie la lésion Si coloscopie incomplète : coloscanner

Anatomo-pathologie Les biopsies permettent : d affirmer le diagnostic de cancer de préciser le type histologique Microscopie : 95 % d adénocarcinomes

Biologie moléculaire Recherche d instabilité de microsatellites systématique si : patient < 60 ans ou histoire familiale Recherche de mutations KRAS si maladie métastatique

Bilan d extension : standard SYSTÉMATIQUE Examen clinique complet avec toucher rectal Recherche d antécédents familiaux Bilan biologique NFS + Bilan hépatique Dosage de l ACE Coloscopie complète Echographie abdominale Radiographie pulmonaire F+P

Bilan d extension : options Scanner thoraco-abdomino-pelvien Morpho TEP pour métastases opérables RÉSULTATS 25 % de métastases au bilan d'extension lors du diagnostic surtout : Hépatiques +++ Péritonéales ++ Pulmonaires +

Classification TNM Tis T 1 T 2 T 3 T 4 Tis: Carcinome in situ T1 : Atteinte sous-muqueuse T2 : Atteinte musculeuse EXTENSION A UN ORGANE ADJACENT T3 : Atteinte sous-séreuse, séreuse ou graisse péricolique T4 : Atteinte de la cavité péritonéale à travers la séreuse, ou extension par contiguïté aux organes de voisinage

Envahissement ganglionnaire N0 N1 N2 Pas d'atteinte ganglionnaire Atteinte de 1 à 3 ganglions péricoliques ou périrectaux Atteinte de 4 ou plus ganglions péricoliques ou périrectaux ou le long d'un axe vasculaire

Facteurs pronostiques majeurs Degré d envahissement transpariétal Envahissement des organes de voisinage = T4 Envahissement ganglionnaire (N0, N1, N2) Nombre de ganglions envahis : N > 4* Existence de métastases Antigène carcino-embryonnaire (ACE) élevé * Au moins 12 ganglions doivent être prélevés et examinés

Répartition des stades au diagnostic Stade TNM I TNM T1, T2, N0, M0 répartition au diagnostic 19% II T3,T4, N0, M0 28% III T, N+, M0 26% IV T, N, M1 22%

Survie selon le stade Stade TNM I = T1 ou T2, N0 IIa = T3, N0 IIb = T4, N0 IIIa = T1 ou T2, N1 IIIb = T3 ou T4, N1 IIIc = Tx, N2 Survie à 5 ans 93% 85% 72% 83% 64% 44% Statistiques US O Connell JB et al., J Natl Cancer Inst 2004; 96:1420-1425.

Stratégie thérapeutique cancer du côlon

Chirurgie des cancers du côlon Examen de la cavité péritonéale, palpation du foie et du côlon Ligature des vaisseaux à l origine Résection en bloc Rétablissement de continuité de l intestin Envoi de la pièce complète en anatomo-pathologie

Indications (1) Cancers non métastatiques pt1-3 N0 M0 (stades I-II): chirurgie seule sauf cas particuliers pt4n0 (mauvais stade II) ou T N1 ou N2 M0 (stade III): chirurgie suivie de chimiothérapie adjuvante Cancers métastatiques (stade IV) L exérèse des métastases doit être envisagée en RCP dans chaque cas, car elle seule peut guérir En cas d inextirpabilité : chimiothérapie palliative

Indications (2) Cancers occlusifs Colostomie Colectomie subtotale Colectomie segmentaire sans rétablissement ou avec lavage sur table et rétablissement Endoprothèse (du haut rectum au côlon gauche) Cancers perforés : 2 types de perforation Tumeur perforée : Hartmann Perforation diastatique : colectomie subtotale sans rétablissement

Mortalité et morbidité postopératoires Mortalité : en chirurgie réglée < 1%, jusqu à 50% en urgence Morbidité Non spécifique : hémorragies, sepsis pariétaux, infections broncho-pulmonaires, urinaires, thrombo-embolies Spécifiques : fistules anastomotiques

Chimiothérapie adjuvante au stade III : ganglions touchés Données des années 1990 Evite 45 % des rechutes Survie avec chimiothérapie 75 % à 5 ans Survie avec chirurgie seule sans chimiothérapie 60 % à 5 ans Limiter au maximum les risques

Chimiothérapie adjuvante au stade III

Chimiothérapie adjuvante

Chimiothérapie adjuvante Après chirurgie à visée curative Pour les cancers du côlon pn+ (stade III), elle augmente la survie globale à 5 ans de 10 à 15 % 6 mois de FOLFOX ou 5-FU/acide folinique (FUFOL ou LV5FU2) ou capécitabine, à débuter dans les 6 semaines postopératoires Pas de preuve d augmentation de la survie au stade II (N -) : discuté au cas par cas en RCP surtout si pt4

Rôle du bévacizumab (Essai NSABP C-08) 0 20 40 60 80 100 % Ev 3yDFS mff6+b 291 77.4 mff6 312 75.5 Yrs HR 0.89 P 0.15 0.0 0.5 1.0 1.5 2.0 2.5 3.0 3.5 Pas de bénéfice sur la survie sans récidive Bénéfice la 1ère année ou retard au diagnostic de récidive?

Cancer du rectum : diagnostic Sang pendant/en dehors des selles Glaires (mucus blanchâtre) Syndrome rectal douleurs rectales douleurs violentes précédant l exonération tension douloureuse avec envie continue d exonérer fausses envies Diarrhée Alternance diarrhée/constipation Douleurs abdominales Le cancer accessible est au toucher rectal deux fois sur trois

Examen clinique cancer du rectum Toucher rectal +/- Toucher vaginal Echoendoscopie rectale petites tumeurs, ganglions IRM rectale grosses tumeurs

Stratégie thérapeutique Bilan d extension : scanner, échoendoscopie ou IRM RCP avant et après chirurgie pour tous les stades Remise d un Plan Personnalisé de Soins Expliquer les modalités des traitements, leur chronologie et les risques de séquelles

Stratégie thérapeutique Petites tumeurs : ct1-2 N0 M0 Chirurgie d emblée Examen de la pièce opératoire : si stade confirmé, surveillance si stade plus grave: RCP pour discuter traitement de précaution

ct2 N0 M0

Stratégie thérapeutique cancer du rectum ct3 ou ct4 ou N+

Bénéfices de la radiochimio préopératoire 1 - Diminution du stade T : downstaging 2 - Augmentation marge latérale 3 - Marge distale optimale

Radiochimiothérapie préopératoire Avis chirurgical préalable à tout traitement Radiochimiothérapie préopératoire avec 2 cycles de FUFOL ou capécitabine (Après radiochimiothérapie préopératoire, il n y aura pas de radiothérapie postopératoire)

Radiochimiothérapie préopératoire Standard pour ct3 ou T4 ou N+ car réduit de moitié les récidives locales et augmente la survie pour les stades ct4 Downstaging : 70% des cas dont 15-20% de stérilisation tumorale ypt0 N0

Plus grosses tumeurs : ct3-4 ou N+ M0 Traitement habituel Radiochimiothérapie 50 Gy + Xeloda Pause Chirurgie Chimio adjuvante si N+ 5 semaines 6-8 semaines Contre-indication à la chimiothérapie : 2 options RT préop 45 Gy/5 semaines Pause 6-8 semaines Chirurgie RT préop 25 Gy/5 jours 2-7 jours Chirurgie

Si chirurgie d'emblée une RCT postopératoire ne devrait plus se voir qu'en cas d'urgence chirurgicale...

Cancer du rectum : conclusions Importance de la qualité du bilan d extension Une radiochimiothérapie préopératoire réduit le risque de récidives locales pour les stades avancés Importance de la qualité de la chirurgie (centres experts, TME) Importance de la qualité de l anatomo-pathologie (marge latérale, qualité du mésorectum)

Surveillance après exérèse d un cancer du côlon localisé : objectif Améliorer la survie grâce à : Une détection précoce des récidives, à un stade curable Une détection précoce et une prévention des cancers colorectaux métachrones

Histoire naturelle Les récidives Fréquence 30 à 40% des malades opérés à visée curative Fonction du stade : I : 10% II : 20-30% III : 40-60% Chronologie 75% dans les 3 ans 90% dans les 3-5 ans (rechute d autant plus précoce que stade initial avancé)

Surveillance après traitement L intervalle optimal entre les examens de surveillance est mal connu Utile seulement si traitement possible Recommandations de la conférence de consensus Examen clinique tous les 3 mois pendant 2 ans, puis tous les 6 mois pendant 3 ans Echographie abdominale tous les 3-6 mois pendant 3 ans, puis tous les ans pendant 2 ans Radiographie pulmonaire annuelle pendant 5 ans Coloscopie à 3 ans, puis tous les 5 ans (sauf cas particulier) Dosage d ACE optionnel

Incidence accrue, mortalité réduite en 20 ans Hommes Femmes Taux standardisés Monde pour 100 000 50 40 30 20 10 50 40 30 20 10 0 0 1980 1985 1990 1995 2000 1980 1985 1990 1995 2000 Statistisques françaises, réseau FRANCIM

Amélioration de la survie en 35 ans

Chimiothérapie de nécessité pour métastases inopérables Allongement de la survie et maintien de la qualité de vie Survie avec chimiothérapie x 4 Survie sans chimiothérapie Ne pas réduire la qualité de vie par des toxicités excessives

Chimiothérapie palliative Récidives ou métastases inopérables après RCP Patient informé +++ Seulement si patient ambulatoire OMS 0-2 Objectif : amélioration de la survie et maintien / amélioration de la qualité de vie Nécessité d un accès veineux, car le plus souvent à base de 5-Fluorouracile (5-FU) en perfusion continue Efficacité évaluée tous les 2-3 mois : chirurgie secondaire si possible

Protocole de référence depuis 1997 : LV5FU2 5FU bolus 400 mg/m 2 Ac folinique 200 mg/m 2 5FU continu 600 mg/m 2 H0 H + 2 H + 24 2 jours consécutifs tous les 14 jours

Fluoropyrimidines orales dérivées du 5-FU UFT (Uracile/Ftorafur) administration 3 fois par jour 4 semaines sur 5 avec acide folinique per os même efficacité que FUFOL Xeloda (Capécitabine) administration 2 fois par jour 2 semaines sur 3 plus efficace que FUFOL

Irinotécan ou CAMPTO Inhibiteur de la topoisomérase I Injection de 90 minutes tous les 14 jours, généralement avec LV5FU2 = FOLFIRI Effets secondaires : cholinergiques (prévention/traitement par atropine) diarrhée (consignes écrites, traitement par lopéramide / antibiotique) alopécie 25 % FOLFIRI deux fois plus efficace que LV5FU2 en terme de taux de réponse

Oxaliplatine ou ELOXATINE DACH-platine Injection de 2 à 6 heures tous les 14-21 jours avec 5-FU et acide folinique = FOLFOX Toxicité : hautement émétisant diarrhée neuropathie sensitive, surtout au froid Deux fois plus efficace que LV5FU2 en terme de taux de réponse FOLFOX = XELOX = FOLFIRI

Traitements à la carte : identifier qui bénéficie d un traitement Génome tumoral Stratégie thérapeutique à la carte Patient : son histoire, son terrain Principe : déterminer pour chaque patient si un récepteur ou un gène anormal («cible») existe dans les cellules de son cancer et administrer un médicament contre cette cible

Folfiri-Cétuximab en 1ère ligne Etude CRYSTAL

Cetuximab ou ERBITUX

Panitumumab ou VECTIBIX TM 463 patients randomisés entre panitumumab 6mg/kg (AM humain) toutes les 2 semaines et traitement purement symptomatique (BSC) n SD PD à 6 m RR BSC 232 10 % 95 % 0 % Panitumumab 231 36 %* 82 % 8 % * dont 8 % de réponse de durée médiane 17 semaines Amado RG et al. J Clin Oncol 2008;26:1626-34

Signalisation EGFR PI3K/AKT et Ras/MAPK Shc Grb2 PI3-K Sos-1 Ras AKT MEKK-1 Raf MEK mtor MKK-7 ERK JNK Apoptose Résistance Prolifération Angiogénèse Métastases

Mutations somatiques du gène KRAS Mutations KRAS : retrouvées dans 40% des cas, associées à : résistance au cétuximab et au panitumumab à une survie réduite Si KRAS non muté : 32% de réponse aux anti EGFR utilisés en monothérapie utilité du génotypage de KRAS mais facteur prédictif insuffisant Lièvre A. et al. J Clin Oncol 2008;26:374-9

Au total : anti EGFr et CCR M1 Deux essais démontrent que le bénéfice d ajouter du Cetuximab à Folfox/Folfiri est restreint aux tumeurs KRAS «sauvage» Le Cetuximab n apporte rien, voire est délétère (Opus, CO.17) pour les ras mutés Décision de l EMEA de restreindre l utilisation du Cétuximab aux tumeurs KRAS sauvage

Bevacizumab ou AVASTIN Anticorps monoclonal humanisé anti VEGF 5 mg/kg/14 jours Phase III randomisée 815 pts OMS 0-1 (âge médian : 59,5 ans) 1 ère ligne à base de Campto IFL+ Placebo IFL+ BEV p N 412 403 RO 35% 45% 0,0029 Durée de réponse (m) 7,1 10,4 0,001 SSP (m) 6,24 10,6 <0,00001 SG (m) 15,6 20,3 0,00003 Hurwitz H et al. N Engl J Med 2004;350:2335 42

Bevacizumab : contre-indications Métastases cérébrales Athérosclérose ou ATCD vasculaire, HTA non contrôlée Ulcère ou plaie non cicatrisée Chirurgie «majeure» dans les 28 jours précédant le traitement Prise d anticoagulants, prise d aspirine fortes doses Tumeur en place ou obstruction digestive Protéinurie > 1 g/24h SOR 2006 : informer les patients des risques potentiels du traitement : accidents thromboemboliques artériels (8,5% après 65 ans), perforations intestinales (1%), hémorragies (4%)

Référentiels de bon usage INCa pour le bevacizumab Situation non acceptable : instauration d un traitement par bévacizumab sans chimiothérapie préalable ou associée Insuffisance de données : traitement adjuvant

Antagonisme bevacizumab-anti EGFR 2 essais randomisés : béva + antiegfr vs béva seul PACCE (n=1053) Folfox ou Folfiri + béva + panitumumab < Folfox ou Folfiri + beva en SSR (10 vs 11,4 mois) et en toxicité Hecht JR et al. J Clin Oncol 2008;27:672-80 CAIRO-2 (n=755) Xelox + béva + cétuximab < Xelox + beva en SSR (10,7 mois vs 9,4 mois; p < 0,01) et en qualité de vie Tol J et al. N Engl J Med 2009;360:563-72

Effets secondaires de la chimiothérapie Parfois fatigue (garder ou reprendre une activité physique ou sportive aide) Nausées parfois, vomissements devenus très rares Pas de perte de cheveux avec la plupart des protocoles Mais : Mener une vie normale Se nourrir normalement Peu ou pas d hospitalisation (hôpital de jour) Pas de douleurs

SYNTHÈSE : évolution de la survie globale du cancer colorectal métastatique 22,6 mois 17,4 mois P < 0,05 14 mois 11 mois 11,5 mois 6 mois 1976 1990 1992 1995 2000 2006 Observation Observation 5-FU FUFOL LV5FU2 Campto + LV5FU2 FOLFOXIRI FOLFIRI-béva FOLFIRI-cétux