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Depuis quelques années, l alimentation biologique a le vent en poupe. Les magasins «Bio» se multiplient. Les rayons Bio des grandes surfaces s allongent et offrent une variété de produits de plus en plus grande. Les filières courtes - achats à la ferme ou groupements d achats (GAC et GAS, groupements d achats communs ou solidaires) se développent également un peu partout. Entre-temps, l Union européenne a adopté une nouvelle législation relative au Bio. Des voix s élèvent pour critiquer ces nouvelles règles, jugées trop laxistes et, pour certains, trop favorables à la grande distribution. Deux visions du Bio s affrontent. On peut donc se demander s il y a désormais deux «Bio» : l un, celui des origines, des pionniers, un Bio 100 % ; l autre, le Bio de la grande distribution, le Bio «minimum légal» qui tolère quelques concessions règlementées. Bref, va-t-on vers un Bio à deux vitesses? 3

Le Bio gagne du terrain : le secteur se porte de mieux en mieux et affiche chaque année des statistiques en croissance. Ainsi, selon une étude de Bioforum 1, le chiffre d affaires du Bio a progressé en Belgique de 15 % entre 2008 et 2009. Sur les 5 dernières années, le nombre de producteurs en agriculture biologique a augmenté de 62 % en Région wallonne. Sur la même période, les surfaces agricoles Bio ont augmenté de 85 %. Évolution de l agriculture biologique en Wallonie 2 L étude de Bioforum avance quelques explications : l élargissement de l assortiment de produits Bio disponibles, une progression du nombre de ménages qui achètent du Bio, mais aussi de la fréquence d achats des ménages. Qu est ce qui pousse dès lors les ménages vers le Bio? 4 1 BioForum Wallonie «Le bio en chiffres : 2009» : http://www.bioforum.be/fr/pdf/37-le_bio_en_chiffres_2009.pdf 2 SPW - DGARNE Direction de la Qualité : http://agriculture.wallonie.be/apps/spip_wolwin/rubrique.php3?id_rubrique=54

Si, historiquement, le consommateur se tournait vers le Bio pour des raisons de sensibilités écologiques et environnementales, ses motivations sont aujourd hui plus larges. Elles sont entre autres liées à une question de santé. Les crises alimentaires et sanitaires que l on a connues depuis la fin des années 90 ont fortement marqué le public : crise de la dioxine, vache folle, fièvre aphteuse, tremblante du mouton Une enquête du CRIOC 3 montre que, parmi les personnes achetant du Bio, près de 8 sur 10 pensent que les aliments Bio sont meilleurs pour la santé. Cette vision du Bio est également renforcée par les discours, de plus en plus fréquents, de scientifiques, de nutritionnistes, de médecins, voire de politiques, qui insistent sur le caractère préventif d une alimentation saine et bio ou sur l urgence environnementale 4. Ainsi, l alimentation biologique, aux yeux des consommateurs partageant cette perception, contiendrait moins de pesticides et offrirait plus de vitamines et de minéraux. Si la première affirmation paraît évidente, il faut reconnaître que la seconde est plus compliquée à prouver scientifiquement. Cela ne veut pas dire qu elle soit fausse. Par ailleurs, ne peut-on pas estimer que l absence de résidus de pesticides justifie à elle seule cet argument relatif à la santé? Selon l enquête du CRIOC déjà citée, près de 7 consommateurs sur 10 ayant déjà acheté du Bio sont également sensibles au goût et aux qualités organoleptiques des produits Bio et estiment qu ils ont meilleur goût que ceux de l alimentation conventionnelle. Certains estiment même que l alimentation Bio est plus «nourrissante», et qu elle permet donc d atteindre plus vite la satiété. C est un argument «de poids» dans le contexte de l épidémie d obésité de nos sociétés occidentales. Cela peut aussi être un choix dicté par la peur 5 : peur par rapport à l industrie agroalimentaire et son cortège de pesticides, d engrais chimiques, de produits phytosanitaires de synthèse et d additifs en tous genres. 3 CRIOC, «Bio logiques de perception», juin 2008 : http://www.crioc.be/files/fr/3550fr.pdf 4 Question Santé, «Pourquoi devient-on Bio», 2010. 5 Ibid. 5

Il y a aussi, chez certains consommateurs Bio, le souhait de retrouver un véritable lien avec la terre, avec le producteur, à qui on peut demander conseil, ou simplement avec d autres consommateurs Bio avec qui on peut, par exemple, échanger menus et recettes. Les Groupes d Achats Communs ou Solidaires (GAC et GAS) en sont un bel exemple. Tout ceci participe à retrouver de la convivialité et à reconstruire du lien social autour de l alimentation. Cependant, les motivations des origines sont toujours bien présentes, comme le rappelle l enquête du CRIOC, puisque sur 10 consommateurs Bio, plus de 8 estiment que l alimentation Bio respecte davantage l environnement que l alimentation conventionnelle. Pourtant, malgré ce succès, des voix s élèvent pour fustiger cette croissance, estimant que le Bio perd son âme et que l on se dirige vers un Bio à deux vitesses. D où vient cette dichotomie? D une part de l explosion du Bio au niveau de la grande distribution ; d autre part, de la nouvelle législation européenne règlementant le secteur. Quand on se penche sur les statistiques de vente du Bio, on constate que son essor est dû, en grande partie, à la croissance du Bio dans les grandes surfaces. Près de la moitié des ventes Bio se font via la grande distribution, comme le montre le tableau suivant. 6

Répartition des ventes de produits bio en fonction des canaux de distribution 6 Type Répartition en 2008 Répartition en 2009 A. Supermarchés (grandes surfaces) 48,5% 49,2% B Supermarchés de proximité 12,2% 10,1% C. Magasins spécialisés 28,6% 30,0% D. Ventes à la ferme 4,8% 3,3% E. Marchés 4,4% 4,6% F. Hard discount 1,5% 2,7% Ainsi, par exemple, le groupe Delhaize annonçait en 2009 avoir connu sa plus forte augmentation de vente de produits Bio depuis des années : + 17 % d augmentation du chiffre d affaires entre 2007 et 2008. On sait que l enseigne est dans le peloton de tête de la grande distribution en ce qui concerne le Bio. Le distributeur affirme d ailleurs que plus d un tiers de tous les produits Bio vendus en Belgique passent par lui 7. Il est indéniable que la grande distribution a rendu le Bio accessible à un plus grand nombre. Delhaize explique encore dans son communiqué de presse : «Dans les années 80, le Bio était un marché en pleine expansion, mais on ne trouvait les produits Bio que dans des magasins spécialisés et dans les fermes. Delhaize a délibérément choisi de rendre l alimentation Bio accessible à tous en proposant des produits Bio à des prix compétitifs dans ses magasins». Ce succès du Bio en grande surface, à l instar de celui des produits du commerce équitable également vendu par ce biais, pose questions. Le Bio vend-il son âme? Est-ce un Bio «low cost», un Bio bradé? Mais que reproche-t-on à la grande distribution? Nature et Progrès l accuse d opérer une mainmise sur le Bio, exigeant des modes de fonctionnement similaires à celui du monde agroindustriel 8. Cependant, il s agit là d accusations 6 BioForum Wallonie «Le bio en chiffres : 2009» : http://www.bioforum.be/fr/pdf/37-le_bio_en_chiffres_2009.pdf 7 Communiqué de presse du Groupe Delhaize du 3 juin 2009 : http://www.delhaize.be/_webdata/ pressreleases/_fr/cp-semaine%20du%20bio-030609-fr.pdf 8 Nature et Progrès, «Bio mondialisée, bio de grandes surfaces», 2008 : http://www.natpro. be/~natpro/pdf/2008/08_22.pdf 7

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qui portent davantage sur les pratiques commerciales de la grande distribution (qu au demeurant, on peut appliquer à tous les autres secteurs, bio ou non, alimentaires ou non de la grande distribution). Cela ne remet pas en cause la qualité biologique des produits Bio. Ils répondent totalement aux critères de certification imposés par la législation. Toutefois, il est clair que la démarche n est pas la même entre l achat d un panier de légumes Bio dans un magasin Bio spécialisé, voire directement chez le producteur, et l achat des mêmes légumes Bio (d ailleurs peut-être issus du même producteur), dans une grande surface. La philosophie de la filière courte a disparu. Le caractère social de la démarche et le contact n y sont plus. Par ailleurs, au rang des critiques, on peut aussi regretter certaines aberrations. Trouver en rayon en plein hiver des fraises Bio, issues de cultures sous serres chauffées ou de pays lointains, ou encore des haricots Bio du Kenya, durant la saison des haricots en Belgique, est un non sens total. Il faut conserver une adéquation logique entre la production et le mode de distribution. On a fait beaucoup de commentaires sur la nouvelle législation européenne, dont certains erronés. Les partisans d un «Bio 100%» qui la trouvent trop laxiste ont ainsi parfois noirci le tableau pour rappeler leur souhait de pratiques plus exigeantes. D autre part, il y a ceux qui veulent discréditer le Bio en semant le doute sur son sérieux. Mettons les choses au clair. La nouvelle réglementation n autorise pas désormais l usage de produits chimiques (sauf les rares exceptions qui figuraient déjà dans l ancienne législation). Un produit transformé doit, comme par le passé, contenir minimum 95% d ingrédients Bio pour recevoir le label Bio. Et les 5 % restants doivent figurer sur une liste positive de produits que l on sait mal ou insuffisamment produire en Bio. 10

Satoriz, une association pionnière du Bio en France s est livrée à une analyse critique du texte 9. Voici les côtés positifs qu elle en retire. Le vin et les levures, comme les algues et les produits d aquacultures, peuvent désormais être certifiés. Mais la plus grande avancée est que les 27 pays de l Union partagent désormais une réglementation commune, des critères d exigence et de pratiques communs. Un logo européen a également été adopté. C est une avancée considérable par rapport aux multiples législations qui existaient dans chaque pays. Selon Satoriz, il s agit du label qualificatif et environnemental le plus exigeant au monde! L association salue aussi la définition qui est faite du Bio au début du texte. Le Bio n est plus présenté comme une réaction contre l agrochimie, mais bien comme un ensemble de démarches positives : «La production biologique est un système global de gestion agricole et de production alimentaire qui allie les meilleures pratiques environnementales, un haut degré de biodiversité, la préservation des ressources naturelles, l application de normes élevées en matière de bien-être animal et une méthode de production respectant la préférence de certains consommateurs à l égard de produits obtenus grâce à des substances et à des procédés naturels. Le mode de production biologique joue ainsi un double rôle sociétal : d une part, il approvisionne un marché spécifique répondant à la demande de produits biologiques émanant des consommateurs et, d autre part, il fournit des biens publics contribuant à la protection de l environnement et du bien-être animal ainsi qu au développement rural.» 10 On peut par contre déplorer certains points, tout d abord en ce qui concerne les OGM. Non, ils ne sont toujours pas autorisés, et certainement pas à concurrence de 0,9% comme on a pu l entendre. Par contre, on admet bien un taux de 0,9% de contamination ACCIDENTELLE, tolérée uniquement si le producteur est en mesure de prouver qu il avait pris suffisamment de précautions. Avant, il n y avait pas de règle par rapport aux OGM pour le Bio. La règlementation pour l agriculture conventionnelle était donc appliquée, et ce taux y était déjà fixé à 0,9%. 9 Satoriz, «Le bio, l Europe, la France, Satoriz et vous», mai 2009 : http://www.satoriz.fr/points-devue/le-bio-l-europe-la-france-satoriz-et-vous%e2%80%a6/article-sat-info-610-7.html 10 Règlement (CE) No 834/2007 du Conseil du 28 juin 2007 relatif à la production biologique et à l étiquetage des produits biologiques et abrogeant le règlement (CEE) n o 2092/91, lex.europa.eu/ LexUriServ/LexUriServ.do?uri=OJ:L:2007:189:0001:0023:FR:PDF 11

Il ne s agit pas d un recul laxiste donc. On peut néanmoins regretter que pour le Bio, on n ait pas pris une norme plus contraignante que pour le conventionnel. En effet, sur le fond, il est difficilement acceptable qu un produit Bio puisse contenir des OGM, fussent-ils accidentels. On notera au passage que plusieurs pays, dont la Belgique, s étaient prononcés contre ce point, en vain. Autre déception, toujours selon Satoriz, la nouvelle législation a omis d insérer les arômes dans la catégorie des ingrédients qu on peut certifier Bio. Enfin, une série de nouvelles normes relatives aux élevages ont été nivelées par le bas, entre autres le principe de la liaison au sol ou l ensilage. Par contre, on peut se réjouir que l alimentation donnée aux animaux devra désormais être à 100% Bio, alors qu avant le seuil était fixé à 90%. Pour conclure sur cette nouvelle règlementation, on peut dire que les accusations d un nivellement conséquent vers le bas ne sont pas fondées. Certes, il y a quelques points regrettables. Et en matière d alimentation, nous estimons qu on devrait toujours faire primer la norme la plus sévère. Oui, il existe un Bio à deux vitesses. Inévitablement, car deux visions s affrontent. Est-ce grave? Nous ne le pensons pas. Chacun défend une vision du Bio, et l une n est pas moins respectable que l autre. Les fondements de l agriculture biologiques sont-ils en danger? Probablement pas, pour autant que les règlementations en vigueur soient maintenues. Mais il faudra rester vigilant. Les quelques points noirs soulignés dans le nouveau texte (OGM, normes pour l élevage ) ne doivent pas devenir des boîtes de Pandore. Il y aura toujours des agriculteurs qui pratiqueront un Bio 100%, sans concession aucune. Leurs produits seront écoulés via les circuits courts, en harmonie avec leur vision du Bio. Ils trouveront toujours des consommateurs ayant cette exigence pour acheter leurs produits. 12

Et il y a et aura sans doute encore plus à l avenir un Bio organisé à une plus grande échelle, un Bio plus «industrialisé», mais non moins conforme aux cahiers des charges Bio règlementaires, dont les produits seront distribués en grandes surfaces et achetés par des consommateurs simplement soucieux de manger des produits issus de l agriculture biologique, facilement accessibles. Ces consommateurs n ont pas cette exigence de proximité et de convivialité. Les deux visions sont donc complémentaires. Les grandes surfaces ont donné une visibilité au Bio qu il n aurait sans doute pas eu sans elles. Elles ont contribué au développement du Bio. A l instar de l analyse que nous avions réalisée sur les produits du commerce équitable vendus en grande distribution 11, le Bio a agi comme un cheval de Troie. Il y a des consommateurs qui, au départ, ont acheté du Bio en supermarché et qui par la suite, ont découvert les filières courtes. Par ailleurs, le développement du Bio en grande surface a fait grimper la demande, et a donc permis à des agriculteurs de se lancer dans le Bio. Ceci dit, on ne doit pas perdre de vue les critiques faites à la grande distribution. Idéalement, le Bio devrait également être équitable, si on veut qu il soit pérenne. Par ailleurs, si elle veut rester crédible, la grande distribution doit garder une cohérence par rapport aux saisons et aux produits locaux, car manger Bio devrait intimement être lié au fait de manger «local» et «de saison». Pour conclure, nous pensons que les deux systèmes sont non seulement complémentaires, mais aussi que, actuellement, leur coexistence est souhaitable. Les circuits courts (magasins Bio, ventes à la ferme, marchés Bio) ne se développent pas encore assez vite pour répondre, seuls, à la demande sans cesse croissante. Car on peut espérer, en tout cas pour notre planète, qu un jour viendra où l agriculture sera redevenue totalement biologique. 11 Michel Dejong, «Commerce équitable ou commerce de l équitable?», CPCP, décembre 2009 13

Auteur : Michel Dejong Décembre 2010 Désireux d en savoir plus! Animation, conférence, table ronde n hésitez pas à nous contacter, Nous sommes à votre service pour organiser des activités sur cette thématique. Avec le soutien du Ministère de la Communauté française

E.R. : Eric Poncin - Rue des Deux Eglises 45-1000 Bruxelles 16 Centre Permanent pour la Citoyenneté et la Participation Rue des Deux Eglises 45-1000 Bruxelles Tél. : 02/238 01 00 info@cpcp.be CPCP asbl - décembre 2010